lundi, janvier 31, 2005

Clémenceau, Montaigne, les politiciens et moi

A me lire, vous pouvez me trouver extrêmement sévère, voire injuste, pour nos hommes politiques.

Au fil de mes messages, vous trouvez les qualificatifs suivants : lâches, pusillanimes, incompétents, paresseux, parasites, velléitaires.

Mais c'est qu'ils ne sont pas soumis à la norme commune, puisqu'ils veulent être plus haut dans la société, il est normal qu'ils soient jugés autrement que le commun.

Une fois de plus, je laisse parler Montaigne :

A ceux qui nous regissent et commandent, qui tiennent le monde en leur main, ce n'est pas assez d'avoir un entendement commun : de pouvoir ce que nous pouvons. Ils sont bien loing au dessoubs de nous, s'ils ne sont bien loing au dessus. Comme ils promettent plus, ils doivent aussi plus.

La seule limite à cette sévérité : nous savons que nous sommes tous des hommes, donc imparfaits et impurs. L'illusion de la perfection et de la pureté conduit au fascisme et à la dictature.

L'impureté est démocratique, tout est une question de seuil. Clémenceau le formulait ainsi :

La politique, c'est comme l'andouillette : ça doit sentir la merde, mais pas trop.

J'ai l'odorat sensible.

Cinéma : Aviator

FFF

Pas mal. Bien filmé. Di Caprio a des allures de Welles dans Citizen Kane. Quelques longueurs (sur 2 h 45, il ya bien un quart d'heure en trop).

Subtil jeu sur les couleurs : terne, presque noir et blanc au début, contrasté avec les progrès du technicolor.

Ce n'est pas un film de génie mais les bons moments se succèdent.

Une réplique d'anthologie quand Hugues lance à Katherine Hepburn avec un mépris absolu : "N'oublie pas que tu n'es qu'une star de cinéma."

Hugues à la famille Hepburn (gauchiste, filmée de manière cinglante) : "Si vous méprisez tant l'argent, c'est que vous en avez déjà." (ça irait assez bien à nos socialistes parisiens)

L'accident d'avion, le record de vitesse, Hollywood des années 30, les obsessions de Hugues.

Et une vision de politique américaine qui fait les passages les plus intéressants du film.

Un film foisonnant et une bonne détente.

27 heures ?

Résumé :

Le commissaire Maigret a dû tirer quelques furieuses bouffées à la lecture de l'enquête publiée par « Le Figaro » sur la durée effective du travail dans la police. Loin des 35 heures légales, celle-ci serait de 27 heures. « Damned » ! Comment est-ce possible ?

Un scénario exactement identique s'était produit en janvier 1999 lorsqu'un honorable conseiller à la Cour des comptes, M. Roché, avait publié un rapport très documenté sur la durée réelle du travail des divers corps de fonctionnaires et duquel il ressortait notamment que les policiers travaillaient 32 h 40 min par semaine. Les mêmes cris offensés avaient recouvert les chiffres d'alors et le funeste rapport avait rejoint la poussière sur une étagère.

Le plus consternant dans cette affaire n'est pas le psychodrame ridicule auquel elle a donné lieu ; c'est qu'elle a révélé que personne n'était capable de fournir le moindre chiffre fiable. Elle a en quelque sorte confirmé les déclarations fracassantes de Claude Allègre, alors ministre de l'Education nationale, avouant avec une fausse ingénuité qu'il ignorait, à plusieurs milliers d'unités près, le nombre de fonctionnaires de son ministère. Quelle grande entreprise privée confrontée à une concurrence acharnée pourrait être gérée de la sorte ? Aucune ! Entre 35 et 27 heures, il y a un écart de 29 %. Dans l'univers concurrentiel, de nombreux marchés se jouent sur des marges de 2 % à 3 %. L'Etat se permet des incertitudes dix fois supérieures. C'est cela aussi, et peut-être d'abord, la crise de l'Etat.

27 heures ?

La trouille des profs et des bidasses

Une des raisons pour lesquelles le gouvernement ne tient pas son objectif de taux de remplacement de départ à la retraite est qu'il n'ose pas toucher à l'Education Nationale et à l'armée, les deux plus gros employeurs publics.

Pour l'armée, la question est vite réglée : l'armée britannique, comparable à la nôtre, a moins d'effectifs et plus d'équipements. On devrait pouvoir s'en inspirer.

Pour l'Education Nationale, je comprends trop bien le problème : la trouille des grèves de profs et des manifs d'associations de parents d'élèves (dont les dirigeants sont à 95 % des profs : juge et partie, comme c'est confortable).

Diminuer les effectifs de profs ne devraient pas être trop difficile. En effet, les effectifs d'élèves diminuent dans l'enseignement primaire et bientôt dans le secondaire.

On va nous ressortir la fameuse réduction des effectifs par classe, mais il m'a semblé comprendre au fil de mes lectures plusieurs points sur cette question controversée :

_ il existe un effet de seuil, tant qu'on atteint pas ce seuil (10-15 élèves par classe), la diminution des effectifs baisse le stress des profs mais améliore peu ou pas les résultats scolaires

_ les effectifs par classe ne sont pas la variable la plus significative pour expliquer les résultats scolaires

De là à croire que l'argument de la réduction des effectifs n'est que le masque du corporatisme enseignant, il y a un pas que je franchis sans remords.

Dans les discours, les profs sont toujours très ouverts à la nouveauté, car ils se croient progressistes. Mais dès qu'on leur en propose une, de nouveauté, ce n'est jamais la bonne car ils ont conservateurs (1).

Mais je ne leur donne pas entièrement tort : pour arrêter d'être conservateur, pour accepter de quitter sa place présente, il faut avoir une idée, au moins vague, de ce que le futur réserve.

Or les gouvernements ont enchaîné les réformes sans afficher un principe fort (la justice serait bien -l'égalité des chances me paraît trop technocartique), sans présenter une feuille de route et sans faire sentir une volonté d'aboutir.

Claude Allègre, qui avait bien senti le problème de persévérance, n'a pas été soutenu jusqu'au bout par son premier ministre Jospin. Quant à ses idées de réforme, je ne m'en souviens plus bien.

(1) : Eventuellement, pour bloquer la discussion, ils peuvent aussi faire état de leur extrême sensiblité, les pauvres choux : un ministre leur dit un mot qui fait beaucoup de peine, genre "mammouth", et, hop, c'est la cabane sur le chien, la gorge qui se noue, la bonne volonté trahie, la colère qui monte, la honte au front, la fin des haricots, la grande scène de la cruelle déception amoureuse de l'Acte III, bref, la grève jusqu'à ce que le ministre fautif parcourt, à genoux un cierge à la main, la distance rue de Grenelle-Matignon, en clamant sa contrition, sous le regard moqueur des journalistes et dans l'indifférence des passants, seuls les chiens peut-être sont vaguement compatissants, et encore, les chiens de beaux quartiers sont des cons : essayez donc d'avoir une conversation décontractée avec un Yorkshire ou un lévrier afghan.

Gribouille gouverne

Un encadré intéressant dans Le Monde permet de comprendre comment ce gouvernement raisonne et fonctionne. C'est assez terrifiant.

L'objectif de ne remplacer qu'un fonctionnaire partant à la retraite sur deux est maintenu. Jusque là, j'approuve, bien que je considère que c'est le minimum d'effort possible et non le maximum (1). C'est ensuite que ça se gâte : il ne faut plus en parler.

Il faut parler des embauches de fonctionnaires. En effet, les départs à la retraites s'accélérant, si on conserve un taux de remplacement fixe, les embauches vont mécaniquement augmenter.

Seulement voilà, cette kolossalle finesse présente trois inconvénients majeurs :

_ connaissant le fantastique courage de ce gouvernement, on peut soupçonner qu'il va oublier l'objectif en même temps qu'il va arrêter de l'afficher (d'ailleurs même en l'affichant il ne le tient pas l'objectif)

_ c'est prendre les fonctionnaires pour des cons et les mépriser.

_ surtout, c'est amoindrir la légitimité du gouvernement : soit l'objectif du taux de remplacement est légitime et il faut l'expliquer et le défendre ; soit il est illégitime et, en douce ou en public, il faut l'abandonner.

(1) : comme je le dis et le répète, ce taux de remplacement devrait être re-situé dans un débat plus vaste sur "A quoi sert le service public ?" mais le gouvernement est trop bête et/ou trop lâche pour lancer ce débat, soit il croit les Français incapables d'y faire face (L'éternel "Nous sommes un excellent gouvernement, nous n'avons pas le peuple que nous méritons") ou encore un peu des deux.

Elections, processus robuste

A condition que l'organisation soit telle que l'honnêteté du scrutin soit globalement garantie, le processus électoral est robuste, aux violences, aux attentats, aux intempéries.

En effet, nous oublions souvent, blasés que nous sommes, que le simple fait qu'on demande leur avis aux gens est extrêmemement motivant.

Hélas, en Irak, ma crainte que le vote soit très "ethnique" a été confirmée. Il est difficile de faire la part, dans l'abstention sunnite, de la résignation à un gouvernement chiite et des pressions sociales.

Néanmoins, il sera légitime de répondre au futurs protestataires et terroristes sunnites : "Hé bien quoi ? Vous n'aviez qu'à aller voter.".

dimanche, janvier 30, 2005

Les religions, obsédées sexuelles

Le Vatican polémique avec l'Espagne sur les histoires de mariage homosexuel et de préservatif ; l'Islam, même pas intégriste, montre une trouille des femmes qui me paraît ahurissante.

Quand on lit l'actualité, on a l'impression que les religions, et notamment les religions révélées monothéistes, sont obsédées par le sexe et éprouvent une véritable terreur de toute liberté, baptisée permissivité, dans ce domaine.

Ayant quelques amis grenouilles de bénitier, je connais le contre-argument : c'est notre monde moderne qui est obsédé par le sexe, l'Eglise (ou l'Islam ou le judaïsme) parle de tas d'autres choses mais on ne retient que le sexe dans ses propos et on le grossit démesurément (vantard, va).

Je ne suis pas convaincu que le problème vienne de l'obsession sexuelle de notre monde et non des religions.

Si les propos du pape ou d'un mollah quelconque dérangent tant et font tant de bruit, c'est à mon avis parce que :

_ le décalage entre les prescriptions des autorités religieuses et les aspirations ou les pratiques des individus est grand

_ toute prescription dans un domaine aussi intime est perçue comme une restriction de la liberté, une atteinte à l'individu

En fait, je crois que le problème est là : contrôler la sexualité à travers des prescriptions, culpabilisantes pour qui y croit, c'est contrôler les individus.

On est passé de "Si tu te touches, tu deviendras sourd et tu y iras en enfer" à "Si tu mets une capote, tu iras en enfer", mais le principe est le même : tant que les ouailles ne font pas librement ce qu'elles veulent de leur cul, qu'elles en réfèrent au curé ou qu'elles aient mauvaise conscience, on les tient.

C'est connu par tous les adjudants et les entraîneurs de foot : maintenir un certain niveau de frustration peut être favorable à la performance et à la discipline. Cette comparaison est peu flatteuse, mais l'attitude des églises sur la question est-elle flatteuse ? Un martien s'intéressant à ces questions trouverait-il que "ça vole haut" ?

samedi, janvier 29, 2005

Démographie et économie

En France, débattre de démographie est tabou : la gauche a peur de tomber dans le natalisme, estampillé de droite, la droite craint d'être ringarde. Et pourtant ...

Et pourtant, le vieillissement et le non-renouvellemet des générations sont un évènement majeur. Que la situation soit pire ailleurs ne devrait pas nous consoler qu'elle soit mauvaise en France.

Le simple bon sens, même si il faut s'en méfier, nous dit que le déclin économique est inscrit dans cette transformation de la France en maison de retraite géante.

Plus largement, c'est à un suicide collectif par la grève des bébés auquel nous assisons.

Mais, après tout, cet auto-châtiment n'est peut-être qu'une juste punition infligée par notre mauvaise conscience : en un siècle, nous avons suscité deux guerres mondiales et un génocide industriel, notre société vaut-elle de se perpétuer ?

Comment la CIA voit l'Europe

Dans un essai prospectif, la CIA sonde le futur.

Pour elle, les puissances d'avenir sont la Chine, l'Inde, mais nullement l'Europe (démographie déclinante, croissance à la traîne, chômage endémique...). Le rapport mentionne aussi « l'élargissement sans fin de l'Europe » comme un dissolvant de la cohésion européenne, comme un obstacle à toute ambition de puissance.

C'est un pronostic sans doute fort juste. Et piquant si l'on sait que l'Amérique plaide vivement... pour l'élargissement de l'Europe à la Turquie.

D'ailleurs, moi aussi, je plaide pour l'élargissement à la Turquie, un peu pour les mêmes raisons que la CIA : je considère que l'Europe-puissance, acteur mondial, est déjà morte et que l'élargissemnt compte donc principalement sous l'angle économique.

En tout cas, la vision de la CIA est instructive sur les défis qui nous attendent.

Quand je regarde l'avenir, je me demande si je ne devrais pas émigrer au Canada. Mais ce n'est pour l'instant qu'une pensée fugitive.

Un juge s'en va

Résumé :

Jusqu'au 17 janvier, Laurent Lèguevaque était juge d'instruction à Tours. En démissionnant, fait très rare dans la magistrature, ce franc-tireur de 38 ans entend dénoncer les raideurs du monde judiciaire.

Tant pis pour les "ça ne se fait pas", même si les statistiques de la chancellerie leur donnent raison : au cours des dix dernières années, seules douze démissions de la magistrature ont été enregistrées - dont six en 1998, allez savoir pourquoi ; une seule en 2004, aucune durant les quatre années précédentes. C'est dire si Laurent Lèguevaque est un cas.

Il tire un bilan sombre jusqu'au défaitisme : "Ce métier est devenu nul. Ce n'est d'ailleurs plus un métier, juste une carrière." Ses collègues ne lui semblent préoccupés que d'avancement, de postes à pourvoir et d'appuis à solliciter, si bien que la magistrature n'est plus, à ses yeux, qu'"un corps de fonctionnaires voué au conformisme et à la soumission". Presque penaud, il admet avoir cru que les juges d'instruction étaient différents, que leur fonction d'enquêteur leur donnait une latitude plus grande, une indépendance plus authentique. "Cela a peut-être été vrai, mais cela ne l'est plus", estime-t-il, avant de résumer le tout en une formule : "On nous prend toujours pour des chevaliers blancs ; on n'est plus que des goélands mazoutés."


A l'écouter, l'ordinaire de ces magistrats qui font trembler les puissants est dénué de passion : on n'attend plus d'eux que la tenue de dossiers alimentés par d'autres - policiers, gendarmes, experts, procureurs, avocats. "La machine fait de nous des paperassiers, des petits hommes gris qu'on dissuade de mettre beaucoup d'eux-mêmes dans leur travail. A force de vouloir nous contrôler, elle nous uniformise, elle nous étouffe."

Il ne se montre ni amer ni déprimé, parsème son récit d'épisodes drolatiques qu'il relate avec moins de douleur que de dérision. "J'ai l'impression de revenir d'un long voyage dans une peuplade avec laquelle je n'aurais pas su communiquer."

Après leur entrevue, le président du tribunal lui a téléphoné pour l'avertir qu'il n'avait pas le droit d'abandonner son poste sans attendre l'arrêté du ministre, qui entérine sa démission. Lui y a vu un excès de formalisme, une manifestation de plus de cette "passion du normatif" qui noie les juges dans le détail et leur fait perdre de vue l'essentiel. Quand son supérieur a brandi la menace d'un "mandat d'arrêt", il assure avoir eu envie de lui répondre : "Chiche !"

Le conformisme vestimentaire de ses collègues l'agace. La déférence recommandée pour s'adresser à la hiérarchie l'insupporte. "La courtoisie avec les mis en examen, elle, peut vous être reprochée, remarque-t-il. Un jour, un collègue m'a dit avec horreur : "Comment fais-tu pour serrer la main d'un violeur d'enfant ?" Je lui ai répondu : "Je demande qu'on lui enlève ses menottes."" Ça ne l'a pas fait rire du tout."


Lien : Un juge s'en va

Parlement : quelques statistiques édifiantes

88 % des parlementaires sont des hommes (pas de transexuels déclarés, donc 12 % des femmes)

50 % viennent de la fonction publique (je croyais que c'était plus) (1)

75 % des députés ont plus de 50 ans et 50 % des sénateurs plus de 60 ans

82 % cumulent des mandats (dont entre 21 % des députés et 28 % des sénateurs trois mandats et plus) : situation proprement unique parmi les démocraties (2)

Aucun issu de l'immigration récente

91 % des étudiants se défient des partis politiques (il y a sûrement un rapport avec les statistiques précédentes)

Eloquent, non ?

Bien entendu, l'interdiction absolu du cumul des mandats est le préalable indispensable à tout changement. Mais, quand on vit de ses mandats, qu'on s'est installé dans le confort du parasitisme républicain, comment voter contre soi ?

(1) en Grande-Bretagne, un fonctionnaire doit démissionner une fois élu et un haut fonctionnaire en se présentant à l'élection (donc sans être sûr d'être élu) !!!

(2) : en général les cumulards sont moins de 15 %, d'ailleurs beaucoup de pays (ie Grande-Bretagne, Allemagne) n'ont même pas de législation anti-cumul, le problème étant réglé par la culture démocratique

Non au specticisme sur les élections en Irak

Je crois qu'il faut hélas tempérer les espoirs.

La démocratie, ce n'est pas seulement, ni même peut-être principalement, le droit de vote. En ce moment, je m'intéresse beaucoup à la Révolution française et les questions de l'époque se posent encore en Irak (et en France) :

_ comment obtenir d'une assemblée la meilleure décision ?

_ quelles sont les conditions pour être citoyen ?

_ comment le peuple souverain peut-il s'exprimer librement tout en restant uni et préservé de la démagogie ?

_ comment faire pour que la représentation nationale ne confisque pas le pouvoir ?

_ comment faire pour que les dirigeants éclairent et décident tout en n'outrepassant pas leur mandat représentatif (question très actuelle en France) ?

D'après Raymond Aron, avant même le droit de vote, une caractéristique essentielle de la démocratie est l'alternance au pouvoir : l'homme qui exerce le pouvoir aujourd'hui sait qu'il le perdra un jour qui n'est pas trop lointain et que son successeur ne sera peut-être pas bienveillant à son égard. Cela empêche la plupart des folies.

Or, quand les citoyens ne se sentent pas suffisamment libres et détachés par rapport à leur origine ethnique, comme c'est le cas en Irak, les votes reflètent la structure ethnique du pays et non des choix politiques. L'alternance est alors quasiment impossible puisque la composition ethnique d'un pays évolue très lentement. Cela bloque dès le départ le fonctionnement démocratique : une majorité sûre d'être au pouvoir pour l'éternité et une minorité sûre d'être exclue du pouvoir, cette situation est néfaste.

Les différentes factions irakiennes vont "se compter" (comme on dit au PS à propos des courants lors du vote des motions, sauf qu'au PS ça frise le ridicule, alors qu'en Irak, il y a des morts tous les jours). Mais en quoi cela sera-t-il bon pour l'avenir du pays ?

Il reste à espérer que les électeurs seront plus intelligents que les prévisionnistes (c'est arrivé plus d'une fois) et qu'ils nous réservent une bonne surprise.

Mais, et c'est là où je voulais en venir, malgré mes doutes, il y a un point fondamental qu'il faut garder en mémoire : la construction de la démocratie dans un pays est un long processus et il n'y a pas d'autre solution pour avoir un pays juste et prospère (1). Il n'est jamais trop tôt pour commencer.

Les élections en Afghanistan n'ont pas été la catastrophe annoncée, mais une étape sur une route encore très longue. espérons qu'il en sera de même en Irak.

Cette conviction, cet espoir, est supérieur à tous les doutes.

J'ai peur que les Français, Chirac en tête, refassent l'erreur mitterrandienne (2) de préférer la stabilité à la démocratie (3).

(1) : c'est pourquoi je trouve la multipolarité chiraquienne dangereuse : en dehors de la démocratie, point de justice. Je suis plus proche du point de vue américain même si je n'apprécie pas les manières de Bush.

(2) : Chirac ressemble tant à Mitterrand que ça n'a rien d'étonnant

(3) : des gens qui égorgent leurs adversaires ne sont pas des résistants avec lesquels la discussion est possible, ce sont des terroristes qu'il faut buter jusque dans les chiottes, comme dit Vladimir.

vendredi, janvier 28, 2005

Super-knock

Un médecin généraliste de Moselle est convoqué pour explications par le conseil de l'ordre : il établit 80 prescriptions par jour (en moyenne !).

A 20 euros la consultation, ça fait 1600 euros par jour ouvré.

Quand on dit (ce que les médecins ne veulent pas entendre) que la répartition sur le territoire français est inadaptée, on ne doit pas se tromper beaucoup.

Chirac à Davos : il a encore sorti une connerie

Décidément, celui-là, chaque fois qu'il l'ouvre, c'est pour dire une connerie.

En France, dès qu'il y a un problème, le premier réflexe est de voter une loi et de créer un impôt. Chirac propose donc un impôt mondial pour réduire la pauvreté. Ridicule.

Si les impôts réduisaient la pauvreté, nous serions bien placés en France pour le savoir, ça fait trente ans que les impôts augmentent et je n'ai pas remarqué que la pauvreté reculait.

C'est aussi con que l'idée de créer des emplois publics ou subventionnés pour diminuer le chômage. Si ça marchait, nous aurions en France le même taux de chômage qu'en Grande-Bretagne : 3,5 %, vu que ça fait trente ans que les effectifs de fonctionnaires grimpent.

C'est le contraire qui est vrai : trop de dépenses publiques (donc trop de prélèvements, impots + emprunts, sur l'économie marchande) tuent le dynamisme économique, augmentent le chômage et la pauvreté.

Réduire la pauvreté est un noble objectif. La solution repose sur un principe simple : aide toi et le ciel t'aidera.

C'est un simple constat : l'aide déversée sur des pays dont les structures, notamment politiques, ne sont pas prêtes donne bonne conscience aux blancs mais ne sert à rien. Les exemples, en Afrique particulièrement, abondent.

Or la lutte contre la corruption et pour plus de liberté ne peut venir que de l'intéreur. Avant que cela arrive, l'aide financière est gaspillée, après, elle est inutile.

Ce qu'on peut faire pour vraiment aider les pays pauvres, c'est supprimer les subventions à nos paysans (bien évidemment Chirac évite d'en parler) et y investir dès que la situation le permet (car l'investissement crée des emplois et des revenus stables).

Cycle mou, Pacte flou - Les Echos.fr

Un article Paul Fabra dans les Echos.

Résumé :

Sous prétexte qu'il peut exister de « bons » déficits, on a oublié, et pas seulement en France et en Allemagne, de s'en prendre à la dangereuse et insidieuse anomalie - parce qu'elle est une entrave à l'activité économique et, donc, à l'emploi (et à l'emploi stable) - qui caractérise notre temps : le déficit permanent. Il se présente soit sous forme ouverte (dans les deux pays cités, par exemple), soit de manière latente, comme c'est le cas dans les pays où l'équilibre est obtenu en laissant se dégrader le patrimoine public. Pis : une telle détérioration commence à se manifester aussi dans des pays hautement déficitaires comme le nôtre.


Paradoxalement, la bonne nouvelle d'un fort abaissement du déficit budgétaire français (ramené à 43,9 milliards d'euros contre une prévision initiale de 55,1 milliards dans la loi de Finances) a fait ressortir le côté purement formaliste des politiques budgétaires inspirées par le Pacte de stabilité et de croissance que le Conseil européen se propose de rénover les 22-23 mars prochain. L'amélioration est le résultat de plus-values fiscales (IS et TVA) fortuites et totalement inespérées. Ce miracle qui n'en est pas un pourrait bien changer la nature même du problème posé.


Le déficit reste à 3,6 % du PNB, soit au-dessus des 3 % considérés par les traités européens, comme le maximum à ne pas dépasser sauf circonstances exceptionnelles. François Copé n'en a pas moins dit que l'amélioration budgétaire « récompense la politique du gouvernement depuis deux ans et demi ».


Quelle récompense ? Quelle politique ? Dans le but de se rapprocher progressivement des 3 %, il a été procédé à une compression indifférenciée des dépenses sur plusieurs années consécutives, compression modérée, mais compression tout de même. Cette absence de discrimination vaut à elle seule comme forte présomption d'une absence de politique budgétaire proprement dite. Elle suppose optimale l'actuelle répartition des dépenses, puisque le gouvernement, se donnant pour mission de les plafonner (par rapport, toutefois à un PNB nominal en augmentation), décide de le faire globalement. Dans la mesure où ce n'est pas le cas, il s'agit d'un tour de passe-passe. La consolidation des comptes publics la facilite.


Ainsi, « pour la première fois depuis 1992, l'Etat aurait-il tenu en 2003 ses engagements » en matière d'effectifs. Ceux-ci ont diminué cette année-là de quelque 2.000 fonctionnaires. Un chiffre très inférieur à la marge d'erreur dans l'évaluation des effectifs ! Mais laissons de côté cette considération. Le rapport publié par l'Observatoire de l'emploi public note (« Les Echos » du 19 janvier) que les réductions d'effectifs, concentrées sur deux postes budgétaires seulement (1) - Education nationale et Culture - se sont traduites entièrement par « des transferts de personnels vers d'autres administrations ». Or, dans toute la mesure où le défaut principal, sinon unique, des déficits actuels, c'est leur permanence, une véritable politique corrective impliquerait une sévère sélection entre les dépenses, étant entendu qu'il conviendrait de « faire de la place » pour en augmenter quelques-unes dans les secteurs où les effectifs sont notoirement insuffisants.

Les politiques en question continuent à s'appuyer sur le concept de « stabilisateurs automatiques ». Encore aujourd'hui, la majorité des esprits continuent d'admettre, sans doute parce que beaucoup de raisonnements reposent sur lui, le schéma ultra-connu : en période d'expansion, les recettes fiscales augmentent, ponctionnant opportunément du pouvoir d'achat au moment où la surchauffe menace ; pour des raisons inverses, la contraction des rentrées d'impôts en période de récession serait bienvenue, tandis que le déficit qui en résulte présenterait l'avantage d'injecter du pouvoir d'achat au moment où la demande en a besoin. Qui a dit que l'économie était une science pessimiste ? Mais qui savait la semaine dernière qu'on était déjà si bien engagé dans la phase ascendante du cycle que l'Etat avait commencé d'en engranger les sous-produits fiscaux ?


Ne sommes-nous pas en train d'entrer dans une période d'évanescence du cycle économique ? Ce n'est pas que des politiques économiques adéquates - consistant précisément à laisser jouer les fameux stabilisateurs - auraient fini par en avoir raison. La réalité serait au contraire qu'une économie nourrissant en permanence un endettement public considérable se trouverait par là même anémiée du fait qu'une part grandissante de l'épargne nationale - ou internationale - est absorbée par le financement de la dette publique. D'où résulte, notamment, que la croissance, quand croissance il semble y avoir, « crée peu d'emplois ». Mais si elle crée peu d'emplois, on est en droit de douter de la solidité de cette croissance, voire de son existence. Cette croissance insaisissable, on se demandait avant-hier si elle finirait bien par décoller ! Le comble est qu'on la découvre à travers les statistiques fiscales. Une économie d'endettement est une économie agitée : elle engendre du chiffre d'affaires (TVA). Les restructurations détruisent des emplois, mais gonflent les profits (rentrées d'IS).


Dans son fonctionnement idéal, le Pacte de stabilité prévoit que les pays dégagent des surplus budgétaires en période de croissance. Ils y gagneront des marges de manoeuvre nécessaires quand, la récession étant venue, le moment le sera aussi pour le secteur public d'accroître ses dépenses déficitaires. La Commission Barroso ne cache pas son intention de (re)mettre en route, moyennant certaines concessions, cette belle machine. Mais ce savant balancement est-il encore de mise quand les vents soufflent simultanément dans toutes les directions, quand la conjoncture devient aussi volatile que les marchés financiers ?





(1) Ajoutons que c'est sans doute aussi le cas, mais plus discrètement, au ministèredes Finances.


Lien :Cycle mou, Pacte flou

La Russie poutinienne

Il y a naturellement des raisons à la régression politique que connaît ainsi la Russie. Shleifer et Treisman écrivent dans « Foreign Affairs » qu'elle n'est, comme le Mexique ou l'Argentine, qu'une « démocratie capitaliste à revenu moyen ». La médiocrité du revenu, poursuivent-ils, entraîne celles de la démocratie et du capitalisme. Vladimir Poutine s'en est tenu à une logique analogue devant les experts occidentaux qu'il a reçus à Novo-Ogarevo le 6 septembre dernier. La Russie, leur a-t-il confié, a la démocratie, les médias et le marché que lui permettent l'immaturité de ses citoyens, la dépendance de ses journalistes et son faible niveau de prospérité.

La thèse est sombre, mais se défend. Je doute simplement que le président russe ait décidé de tout niveler par le bas en vertu d'une quelconque philosophie du développement. On le sent plutôt guidé par la conception disciplinaire du patriotisme qu'il a acquise au service du « glaive et du bouclier ». Avec ce bagage, on orchestre les élections, on ne laisse pas les médias clabauder, on se méfie des patrons cosmopolites et on barricade le dernier carré de l'empire - le carré slave que Soljenitsyne avait déjà élu pour « réaménager notre Russie » - contre les débordements de l'Occident.

Le patriotisme de Poutine n'a pas que des inconvénients. Il est son côté vrai. C'est par là que le courant est passé avec la majorité de son peuple. En voilà un qui ne reproche manifestement pas à son président des tendances réactionnaires qu'il ressent lui-même, notamment en raison de promesses d'entrée dans le « monde civilisé » que la révolution libérale n'a pas bien tenues à ses yeux. Populaire hors du cercle de l'intelligentsia et de la presse écrite, le régime poutinien n'est donc pas une dictature. Il n'est pas non plus une Restauration. Poutine ne se bat pas pour la résurrection d'un système, il lutte pour le redressement d'un pays. Ce faisant, il oppose à ses interlocuteurs occidentaux des arguments d'intérêt national qu'ils peuvent comprendre. D'autant mieux, s'agissant des Américains, qu'ils ne sont pas pour rien dans l'absence de patriotisme reproché à Ioukos, comme dans les derniers craquements de l'espace communautaire russe. Les arguments du Kremlin passeraient mieux, cependant, s'ils n'invoquaient pas constamment l'inviolabilité du « chez soi » pour justifier l'arbitraire, la brutalité et les contre-vérités. La révolution civilisatrice lancée par Gorbatchev, et dont on fêtera les vingt ans le 11 mars prochain, montrait au contraire qu'il faut ouvrir grand sa porte aux principes qui gouvernent les grandes nations modernes.

Mes politiques préférés

Dans l'ordre :

Nelson Mandela
Ignacio Lula da Silva
Bill Clinton
Tony Blair

Vous comprenez que chaque élection française me pose probléme !

Réponse à la devinette

Si les Russes n'ont eu qu'un otage au Liban, c'est qu'ils ont prisaussitôt un mec du Hezbollah. Qu'ils l'ont ensuite renvoyé chez lui. Dans une valise. Découpé en morceaux.

Très russe, comme méthode de négociation !

jeudi, janvier 27, 2005

Livre : Laughter and tears (George Rarey)

FFFF

Rarey était publicitaire à Greenwich. Après le 7 décembre 1941, il s'est retrouvé aviateur, lui qui n'avait même pas le permis de conduire.

Il est mort en Normandie à l'été 1944.

Laughter and tears a été par son fils (qui n'a pas connu son père) à partir des dessins laissés par son père, des témoignages de camarades et des lettres envoyées à sa mère.




La grande valeur de ce livre très émouvant, c'est son humour qui le rend si proche. La continuité est particulièrement dérangeante : on sent que le publicitaire bobo avant la lettre et le pilote de chasseur bombardier ne font qu'un.

C'est un sentiment très proche de ce qu'on a ressenti au 11 septembre 2001 : plus rien ne sera jamais comme avant et pourtant, c'est la même vie qui continue.

Humour (involontaire) de l'idéologie

J'ai un collègue communiste, Bruno, que j'aime beaucoup, et que je conserve précieusement parce que, à mon avis, un communiste au XXIème siècle est aussi anachronique qu'un dinosaure.

Malheureusement, ses convictions le font quelquefois déraper. C'est ainsi qu'il s'est laissé aller à deux déclarations historiques dont j'espère qu'elle vous feront autant rire que moi :

_ "De Gaulle était un fasciste"
_ "Louis XVI a été guillotiné par le capitalisme"

Saisissant, non ?

Pour Jean Prévost (Jérome Garcin)

FFFF

Normalien, sportif, intellectuel et résistant, Jean Prévost a eu deux torts :_ mourir au maquis du Vercors_ avoir systématiquement raison avant tout le monde

Comme c'est particuliérement irritant, pour les lâches et les imbéciles, qui forment ensemble une majorité, ceux-ci se sont empressés de lui rendre hommage et de l'oublier.

Jérome Garcin s'efforce de réparer cet oubli par une petite biographie vigoureuse et passionnée.

A noter : Jean Prévost a écrit une biographie de Montaigne en trois jours (pour se prouver qu'il pouvait le faire), a présenté sa thèse sur Stendhal en même temps qu'il organisait le maquis du Vercors et est mort la veille de la disparition de son grand ami Saint-Exupéry.

Je ne peux donc m'empêcher de croire que les amitiés littéraires réunissent, au-delà de la mort et du temps.

En ces temps d'anti-américanisme primaire, je vous signale que Jean Prévost à écrit en 1939 un livre, Usonie, qui est quasi-introuvable, sur les Etats-Unis, où il parlait déjà d'écologie (c'est pour vous illustrer cette tendance irritante de Prévost d'avoir raison avant les autres).

Livre : Mémoires d'un agent secret de la France libre

FFFF

Gilbert Renault (dit colonel Rémy) était :
a.. producteur de cinéma
b.. catholique
c.. breton
d.. sympathisant d'Action Française
e.. père de 8 enfants

Vous voyez le genre.

Gilbert Renault :

a.. est allé à Londres dès le 17 juin 1940 (comme beaucoup de résistants de la première heure, ce n'est pas le discours de De Gaulle, que pratiquement personne n'a entendu, qui l'a décidé, mais la voix chevrotante du vieillard Pétain appelant le 17 à la résignation et à la capitulation.)

b.. a créé le réseau Confrérie Notre Dame (placé sous le patronage de Notre Dame des victoires, on est catho ou on ne l'est pas)

c.. a développé le plus important réseau de renseignement de France

d.. a échappé trois fois de justesse à l'arrestation

Plus connu sous le nom de colonel Rémy, ces Mémoires d'un agent secret de la France libre sont à lire : on se dit qu'il aurait du jouer au Loto, vu sa chance, tellement il a survécu à des aventures rocambolesques (pour lui, ce n'était pas la chance, c'était la Providence. Après tout, pourquoi pas ?).

Après guerre, il s'est brouillé avec De Gaulle et les gaullistes quand il a eu le malheur d'affirmer que De Gaulle lui avait confié que Pétain avait servi de bouclier, ce que Charlot a toujours nié avoir dit.

Dans le silence du coeur

Par les livres, j'ai eu une bonne éducation anti-totalitaire : Camus, Malraux, puis à 14 ans, L'archipel du goulag (20 ans après, je ne pourrais plus lire un tel pavé !), Si c'est un homme, L'espèce humaine, La condition de l'homme moderne, George Orwell, Voltaire, Montaigne, Stendhal.

C'est pourquoi je suis sensible à la commémoration de la libération d'Auswitch.
Cependant, j'ai peur qu'on en fasse trop, et pas assez bien, qu'il y ait plus de quantité que de qualité.

L'intériorisation est nécessaire.

C'est pourquoi je vous propose une minute de silence, après la lecture de ce message, une vraie minute, regardez vos montres, pour penser à "tous les rayés et à tous les tondus qui ne sont pas revenus des bagnes", Par exemple, à cette Française qui gifle à toute volée la gardienne SS qui l'insulte en sachant que cela signifie la mort, à ces combattants du ghetto de Varsovie qui préférèrent mourir debout et à Anne Frank.

Les retraites américaines

Les noirs vivant moins longtemps et les femmes plus longtemps, certains républicains suggèrent de moduler les cotisations retraite en fonction de la race et du sexe (les noirs cotisant moins, les femmes plus).

C'est une proposition intéressante. L'analyse me conduit à la rejeter, mais faites l'effort d'y réfléchir quelques instants. Et faites l'effort de réfléchir à la vision de la société qui sous-tend une telle proposition.

mercredi, janvier 26, 2005

Louis Chirac

Je ne suis pas anarchiste. Je pense qu'un Etat est nécessaire au bon fonctionnement d'une société. Mais j'ai l'impression que la IIIème République n'a été qu'une parenthèse dans l'histoire de France. Le bon vieux temps de l'administration royale égalisant les conditions sous sa poigne (plus ou moins) de fer est revenu.

Cela annoncerait par voie de conséquence le retour de la France explosive. C'est la thèse tocquevilienne, comme quoi les ferments de révolution sont plus nombreux en France car la société civile, nivelée par l'administration, dispose de peu de moyens et de culture démocratique pour exprimer ses conflits autrement que par la violence. De plus, les révolutions sont plus faciles, puisqu'il suffit de changer la tête de l'Etat tout puissant (Louis XVI par Robespierre, Robespierre par Bonaparte, Bonaparte par Louis XVIII, etc ...).

Les analyses de Tocqueville sont vieilles d'un siècle et demi, mais elles pourraient peut-être encore s'appliquer. N'exagérons pas, je ne prends pas les vessies pour des lanternes, les "grandes" grèves de 1995, caprices de privilégiés (1), pour les prémices de la révolution.
Il n'empêche que l'alternance systématique depuis 20 ans et l'impuissance des gouvernants à commencer à réfléchir à concevoir des moyens éventuels d'élaborer dans un futur presque proche une ébauche de balbutiement de brouillon de projet politique ne manquent pas de me préoccuper.

J'ai probablement tort, puisque notre bien-aimé Président, l'inénarrable Jacques C., ne trouve rien de plus urgent que de s'inquiéter de la biodiversité (toujours sur ce mode compassionel, compatissant -on sent qu'il souffre avec la fauvette bleue à bec argenté du Bas-Poitou- qui donne si fort envie de lui flanquer des beignes).

Je ne sais pas pourquoi, ça me fait penser à Louis XVI, bien ennuyé par ses turbulences politiques qui lui gachait ses chasses lors de l'été 1789. C'est vrai, tous ces gens qui attendent de leurs dirigeants qu'ils arrêtent de s'agiter et qu'ils agissent, c'est d'un triste, c'est petit, mesquin, bourgeois quoi, vous ne trouvez pas ?

Cette association d'idées est sans doute un effet de mon mauvais esprit.

(1) privilégiés au sens propre : qui bénéficient de conditions dérogatoires à la loi commune (retraites, emploi)

Fitna, la guerre au coeur de l'islam (G. Kepel)

FFF

Kepel considère que l'islamisme terroriste est une forme de guerre civile à l'intérieur du monde musulman, suite à l'échec de l'islamisme politique.

En lisant son livre, on peut renvoyer Américains et Européens dos à dos :

_ les Américains, aveuglés par l'idéologie neo-conservatrice, ont subi une défaite intellectuelle majeure en étant incapables d'analyser la situation orientale dans toute sa complexité. Ils ont attaqué l'ennemi (l'Irak) qui convenait à leur puissance (une armée classique) à la place de leur véritable ennemi (Ben Laden & Co) en réformant leurs forces pour s'y adapter. Pour Kepel, c'est une transposition stupide de la pensée de la guerre froide : islamisme = communisme, Moyen-Orient = pays de l'est, Irak = URSS.

_ les Européens, pour leur part, font preuve d'aveuglement en sens inverse : ils ne se rendent pas compte, malgré les attentats de Madrid, que la guerre contre l'islamisme terroriste les concerne tout autant que les Américains -quelques idiots inconscients se réjouissant même plus ou moins d'un possible échec américain en Irak- et que le résultat de cette guerre se joue chez eux, dans la capacité de leurs populations musulmanes à élaborer une doctrine compatible avec la vie moderne.

Kepel me paraît assez effrayé par les capacités d'endoctrinement des intégristes dans les banlieues françaises et invitent clairement à ne pas céder au chantage médiatique aux droits de l'homme, au droit à la différence et tout ce qu'on nous ressort dans les affaires de voile.

Ils qualifient les écolos, les catholiques et les gauchistes qui croient lutter pour la liberté de choix en défendant le voile d' "idiots utiles" (utiles aux islamistes), comme au bon vieux temps du communisme triomphant. En effet, la pression sociale et familiale est tellement forte que la liberté de ne pas choisir le voile est quasi-inexistante pour celles qui sont face au problème.

Le tableau est assez sombre : Al Quaida est dans une impasse politique qui le force à l'escalade de la violence et les gouvernements occidentaux se sont laissés aller à une dérive sécuritaire, dommageable pour le rayonnement des idéaux démocratiques , sans que l'efficacité de celle-ci soit prouvée.

Il reste un espoir au moyen-orient, tout entier basé sur une évolution positive de la majorité irakienne chiite, mais cet espoir d'amélioration est bien mince.

Kepel ne s'attarde pas sur le conflit israelo-palestinien : il semble penser que c'est une question fondamentale mais qu'elle est suffisamment connue en long en large et en travers pour ne pas y revenir.

Je pense qu'une politique forte à mettre en oeuvre chez nous est un programme forcené de substitution du pétrole, afin de ne plus être vulnérable de ce coté-là aux soubresauts orientaux et de couper les pétro-dollars aux islamistes de tout poil. Hélas, pour des raisons que je comprends mais qui ne me semblent pas à hauteur des enjeux,les gouvernements occidentaux répugnent à s'engager dans cette voie.

mardi, janvier 25, 2005

Un mot à propos de l'expo Miyazaki-Moebius

Autant j'aime bien les auteurs autant l'expo m'a paru un peu courte.

Ce WE je vais essayer le musée Snecma à Melun-Villaroche. Je vous raconterai.

Je me prépare à être Président des Etats Unis d'Amérique

En effet, je viens de voir la liste officielle des derniers livres lus par mon ami George W. Je vais les lire, je vous raconterai.

Le déficit est une drogue (mortelle)

Hop ! Le déficit budgétaire est moins important que prévu de 10 milliards d'euros et Le Monde demande déjà que le gouvernement distribue du pouvoir d'achat.

Passons sur le fait, pourtant économiquement fondamental, que l'idée même que le gouvernement puisse distribuer du pouvoir d'achat n'a aucun sens (le gouvernement ne fait que re-distribuer -la syllabe supplémentaire est très importante- du pouvoir d'achat, il n'en crée pas.).

Mais, mon bon monsieur, si le déficit est moins important que prévu, ce qu'il faut faire est très simple : absolument rien ; ni baisser les impots ni augmenter les fonctionnaires. Le déficit est moins important que prévu : saluons la nouvelle, c'est toujours ça qui n'ira pas grossir la dette.

Quant à baisser les impôts, je suis contre : la diminution des dépenses, si elle arrive un jour (in'ch Allah), doit servir à annuler le déficit.

Quant à augmenter les fonctionnaires, je suis contre une augmentation générale. Et le total des augmentations indivduelles doit être calculé de manière à ce qu'il reste un bénéfice sur le taux de non-remplacement des départs à la retraite.

Comme un fonctionnaire retraité coûte 60 % d'un actif, on ne peut commencer à distribuer des sous qu'avec un taux de remplacement inférieur à 5/10 (on tient compte du fait que certains fonctionnaires finissent quand même par mourir et que leur retraite ne coûte plus rien). Comme 10 % des fonctionnaires partent à la retraite chaque année, si on ne remplaçait aucun départ à la retraite, on pourrait distribuer 5 % d'augmentation moyenne. Mais comme, d'autre part, il est essentiel pour l'économie que le déficit se réduise, il ne reste plus grand'chose à distribuer (1), et tout cela en supposant que les départs à la retraite ne sont pas remplacés, ce qui est très loin d'être le cas en réalité.

(1) je suis sincèrement navré de faire ce constat : les intérêts du pays et les intérêts des fonctionnaires sont divergents, au moins en matière de flouze.

Montaigne en voyage

En 1580, Montaigne, prétextant de sa "maladie pierreuse" (calculs rénaux), part en voyage à travers l'Europe (France, Allemagne, Suisse, Italie) pour un an et demi, officiellement à la recherche de la meilleure cure thermale.

Il aime les voyages, s'il avait eu à choisir son destin, il aurait passé sa vie "le cul sur la selle". Voyageur curieux, il fait son miel de tout.

Ce qu'il dit de son écolier s'applique à lui-même : "Il sondera la portée d'un chacun : un bouvier, un masson, un passant, il faut tout mettre en besogne, et emprunter chacun selon sa marchandise : car tout sert en mesnage : la sottise mesmes, et foiblesse d'autruy luy sera instruction. A contreroller les graces et façons d'un chacun, il s'engendrera envie des bonnes, et mespris des mauvaises.

Qu'on luy mette en fantasie une honneste curiosité de s'enquerir de toutes choses : tout ce qu'il y aura de singulier autour de luy, il le verra : un bastiment, une fontaine, un homme, le lieu d'une battaille ancienne, le passage de Cæsar ou de Charlemaigne."

Sur ses motivations,il dit "Je sais bien ce je fuis et non pas ce que je cherche".

Et il précise sa pensée : "Nous n'avons pas faict marché, en nous mariant, de nous tenir continuellement accouez, l'un à l'autre, comme je ne sçay quels petits animaux que nous voyons d'une maniere chiennine. Et ne doibt une femme avoir les yeux si gourmandement fichez sur le devant de son mary, qu'elle n'en puisse veoir le derriere, où besoing est. "

Voilà qui est clair ! Mais un an et demi, tout de même ...

A380 contre ipod

Dans l'un de ses éditoriaux, « Business Week » revient sur la cérémonie de lancement de l'A380. L'hebdomadaire de souligner une nouvelle fois à quel point « cet énorme avion à deux ponts est un oiseau impressionnant », mais surtout « un remarquable étalage de prouesses technologiques et industrielles », qu'il s'agisse des matériaux composites utilisés pour alléger son poids ou bien de la flotte de barges et de camions gigantesques qui ont servi pour transporter à Toulouse ses énormes composants.

Autant « Business Week » ne semble pas douter du succès commercial de cet avion, même s'il souligne qu'avec 149 commandes fermes rien n'est encore acquis pour ce projet dont le point mort sera atteint lorsqu'il comptera enfin 250 achats. Autant l'hebdomadaire s'interroge sur les leçons que les chefs d'Etat présents le 18 janvier à Toulouse ont voulu tirer de cet événement en affichant « leur enthousiasme pour la création de champions européens dans les domaines du transport, des télécoms et de l'énergie ».

« Le problème, souligne «Business Week», c'est que les gouvernements sont bien connus pour leur maladresse à choisir les bons champions industriels. La France, par exemple, a consacré des milliards à tenter de bâtir une industrie informatique nationale. » Aussi l'hebdomadaire américain recommande plutôt aux gouvernements de doper les efforts en matière de recherche et de développement, dont les dépenses représentent 2 % du produit intérieur brut alors qu'elles atteignent 2,8 % aux Etats-Unis. Et l'éditorialiste de conclure en affirmant que l'Europe serait bien avisée d'améliorer les crédits d'impôts pour la recherche, de faciliter les formalités ou d'alléger le fardeau fiscal qui pèse sur les start-up. « Le super jumbo Airbus est impressionnant, rappelle-t-il. Mais l'iPod d'Apple Computer l'est tout autant. »

Je ne vous étonnerais pas (si vous avez lu mes messages précédents) en vous disant que l'intervention étatique en économie (1) me paraît illégitime et inefficace. Les échecs (aurais je la cruauté de rappeler Bull et le Crédit Lyonnais ?) sont plus nombreux que les réussites.

C'est pourquoi l'idée d'agence de l'innovation me fout une trouille bleue : encore un machin couteux et néfaste.

L'Etat veut faire quelque chose pour l'industrie, sans effets secondaires dévastateurs parce que partant d'un principe économique sain ? Facile : qu'il annule le déficit et qu'il réduise la dette. Sans même baisser les impots, l'effet serait positif.

Mais j'ai bien peur que, pour la génération actuelle de politiciens, l'idée que ce que l'Etat puisse faire de mieux dans certains cas, c'est de ne pas s'en mêler, de ne pas avoir d'avis, est irrémédiablement perdue.

(1) pour moi, "intervention étatique" s'oppose à "politique économique", qui consiste non pas à orienter le cours de la vie économique mais à fournir un cadre réglementaire stable, clair et stimulant. Donc, suivant cette définition, tout ce qu'on nomme aujourd'hui "politique industrielle", c'est de l'interventionnisme (fébrile) et non de la politique.

Par exemple, un débat public sur la bio-éthique, sur la génétique, sur les cellules-souche (débat qui a eu lieu chez ces ignares d'Américains pendant les présidentielles) permettrait de fournir au entreprises de recherche en biologie un cadre réglementaire stable car issu d'un processus démocratique.

lundi, janvier 24, 2005

Petit plaisir de pilote

je trainais une frustration de pilote qui n'a pas volé depuis le 22 novembre pour cause de météo contrariante.

Voyant qu'un beau temps relatif s'établissait aujourd'hui sur la région parisienne, je me suis organisé pour voler.

Avec mon instructeur préféré, nous avons décollé avec 15 noeuds de vent, rafales à 20, plein travers (rare à Toussus le vent plein travers). L'avion, un DR 315, est officiellement limité à 22 noeuds plein travers, c'est-à-dire qu'au dessus, nous ne sommes plus assurés si l'atterrissage se passe mal.

C'était des atterrissages de dahu, avion très incliné dans le vent à l'arrondi pour compenser, mais je me suis bien amusé. Quelques rafales à 25 noeuds.

C'est amusant comme tout de fignoler dans ses conditions parce qu'il n'y a pas de marges : trop vite, l'avion ne pose pas ; trop lent, le vent prend le dessus.

La dernière finale bien calée, sur le plan, la vitesse bien scotchée, avec le nez qui compense la dérive, un vrai plaisir.

Les pilotes comprendront, les autres n'ont qu'à apprendre à piloter.

Des espions sous contrôle du Pentagone opéreraient dans le monde

Résumé de l'article :

Le Pentagone aurait créé une agence de renseignement secrète qui mène des opérations clandestines à l'étranger, sous le contrôle direct du ministre de la défense américain, Donald Rumsfeld, écrivait le Washington Post dans son édition du dimanche 23 janvier.

Cette unité, appelée Unité de soutien stratégique (Strategic Support Branch), opérerait déjà depuis deux ans notamment en Irak et en Afghanistan, selon le Post, qui cite des documents et des entretiens avec des membres de cette unité, sous le couvert de l'anonymat.

Cette organisation secrète doit également fournir des informations sur le côté "humain" du renseignement, comme les interrogatoires de prisonniers et le recrutement d'espions étrangers.
Parmi ces agents peuvent figurer des personnalités tristement célèbres dont l'association officielle avec le gouvernement américain serait embarrassante, toujours selon les documents cités par le Post.

S'appuyant sur des documents du Pentagone et des entretiens avec des officiels, le journal affirme que M. Rumsfeld a créé cette structure pour en finir avec sa "dépendance quasi totale" à l'égard de la CIA en matière de "renseignement humain" (par opposition au renseignement technologique basé sur les observations satellite ou les écoutes).

Le général William Boykin [connu pour son intégrisme et ses propos anti-musulmans], sous-secrétaire adjoint chargé du renseignement, a admis que M. Rumsfeld souhaitait assumer le commandement de certaines missions jusque-là conduites par la CIA, poursuit le Washington Post, dont les informations recoupent partiellement l'article publié la semaine passée dans le New Yorker et qui affirme lui aussi que "la CIA continuera d'être rétrogradée" et que "Rumsfeld deviendra encore plus important durant le second mandat" de George W. Bush.

"La guerre contre le terrorisme serait étendue et placée en réalité sous le contrôle du Pentagone", ajoutait Seymour Hersh dans le New Yorker.

Cette division secrète serait financée par un redéploiement interne du budget du Pentagone, échappant de fait à un contrôle parlementaire, et sa création n'a pas été explicitement approuvée par le Congrès, poursuit le Post.

Cette création donne à M. Rumsfeld un pouvoir que n'avait pas ses prédécesseurs sur les activités de renseignement, alors même que le Congrès cherche à regrouper toutes les agences travaillant dans ce domaine sous l'autorité d'un chef unique.

M. Rumsfeld est très opposé à cette idée, et a largement contribué à retarder la réforme des services de renseignement entreprise par le Congrès.

Cité dans le Post, Thomas O'Connell, secrétaire assistant à la défense chargé des opérations spéciales, déclare que Donald Rumsfeld s'est débarrassé du "mode de pensée obtus" et des "mentalités timorées" d'anciens responsables du Pentagone.

Analyse :

On ne peut exagérer l'importance de cette nouvelle.

Elle montre à quel point Washington est aujourd'hui dirigé par des idéléogues (idéologie : quand la réalité et le discours se contredisent, tout mettre en oeuvre pour nier la réalité). Cette attitude est grosse de décisions désastreuses.

De plus, c'est un contournement (un de plus) par le Pentagone de l'idéal américain de contrôle démocratique des institutions.

Norman Mailer a écrit peu après le 11 septembre 2001 pour dire qu'il trouvait que le gouverment Bush avait des initiatives fascisantes. On voit bien dans la phrase sur les "timorés" le culte de la force et de l'action pour l'action.

C'est outrancier d'aller plus loin que de parler de tendances ; mais il est vrai que l'idéal démocratique, pourtant mis en avant vers l'extérieur, ne semble pas au coeur des pensées de l'équipe Bush.

Lien :Des espions sous controle du Pentagone

Abandon de poste

On savait déjà Jacques Chirac une cellule de soutien psychologique à lui tout seul. Voilà que Hervé Gaymard déclare que la France souffre de dépression nerveuse.

Comparaison n'est pas raison. On sent bien l'utilité pour nos dirigeants de telles analogies : la dépression est une maladie floue, avec des causes "naturelles" difficiles à cerner, à ranger dans la catégorie des aleas de la météo et les tsunamis.

Mais, à mon avis (voir mes messages précédents), rien n'est plus faux : la cause du malaise des
Français est parfaitement identifiable à qui veut se donner la peine de regarder. C'est l'obstination des politiques à appliquer depuis vingt ans les mêmes recettes inefficaces, dont la seule vertu est, au fond, de renforcer le pouvoir de l'Etat et donc le leur propre pouvoir.

Or, mécanisme psychologique bien connu, pour que les Français retrouvent confiance en eux et en l'avenir, il faut leur faire confiance et leur donner la parole.

Cela ne veut pas dire céder au premier braillard bovésiste venu, c'est une autre forme de fuite des responsabilités. Cela veut dire organiser une décentralisation où ils sentent autre chose que des jeux d'appareils et une vraie volonté de l'Etat de lâcher du lest en leur faveur.

Pour marquer le coup, il faudrait commencer par une mesure symbolique qui montrerait que la réforme, ce n'est pas toujours pour le français moyen mais aussi pour les hommes politiques : supprimer les départements.

dimanche, janvier 23, 2005

Bouquins : Fortune de France (Robert Merle)

FFFF

C'est vite lu : il n'y a qu'une bonne douzaine de tômes. Les aventures de Pierre de Siorac, par Robert Merle, tout au long des guerres de religion.

L'auteur étant mort récemment, la série est finie. Sur la fin, ça commençait à faiblir, mais les premiers tomes sont vraiment instructifs, captivants et agréables.

Robert Merle a truffé ses récits d'expressions savoureuses du XVIème siècle sans en rendre la lecture difficile.

Allez, je m'en vas à la repue de midi avec une faim chiennine.

samedi, janvier 22, 2005

Marcel Rufo : Adolescents et famille

Un lien vers une conférence très marrante et très instructive de Marcel Rufo sur les adolescents.

Lien : Marcel Rufo : Adolescents et famille

Une inspiration vénitienne

A Venise, les charges politiques n'étaient exercées que par les riches et quelqu'un désigné ne pouvait refuser sa charge. Pourquoi ?

Parce que les charges coûtaient cher et procuraient plus de soucis que d'honneur.

La république de Venise a vécu 700 ans.

Je ne sais pas comment nous pourrions nous en inspirer, mais, d'une manière ou d'une autre, il faudrait tuer toute possibilité de carrière politique. Les malheureuses expériences Chirac et
Mitterrand de carriéristes au long cours devraient nous vacciner.

La limitation drastique du renouvellement et du cumul des mandats (2 mandats en même temps max, 2 mandats consécutifs max) serait un bon début.

Le noeud gordien

J'ai appris au cours de mes études d'ingénieur que, quand on n'arrive pas à résoudre un problème, il faut le reformuler. Au cours d'un stage "Gestion des conflits", j'ai appris le même genre de technique.

C'est la technique qu'a appliquée Alexandre en tranchant le noeud gordien : il a posé différemment le problème de délier le noeud.

J'ai une haute opinion de la fonction politique et pas mal de mépris pour ceux qui l'exercent. Pourquoi ?

Parce que ce sont des prisonniers.

Ils sont prisonniers d'être des politiques professionnels et de faire carrière pendant des décennies (Luc Ferry et Francis Mer pensent que c'est parce qu'ils ne savent pas faire grand'chose d'autre !). Cela impose de ne pas déplaire. Ils sont lâches.

On tombe donc dans la fiction du consensus et on se donne l'illusion de l'action avec la couteuse agitation étatique.

Cela vient du vieux fond de monarchisme français : un seul peuple uni sous la poigne du roi et de son administration.

Mais la démocratie est bien différente : des groupes opposent légitimement leurs intérêts. Chasseurs et écolos, salariés et fonctionnaires, jeunes et vieux, etc ...

Puisque les vieilles techniques, consensus et interventions étatiques, se sont révélées depuis vingt ans impuissantes, tranchons le noeud :

_ divisons les Français, faisons surgir les débats sur les sujets qui fâchent, arrêtons de ne parler que de sujets compasionnels (tsunami, lutte contre le cancer, etc ...)

_ au lieu de nous demander ce que l'Etat peut faire, demandons nous ce qu'il peut arrêter de faire

La machine infernale tourne à fond

Voici une dépêche Reuters :

L'Agence France Trésor (AFT) a procédé jeudi à une adjudication sur la ligne d'obligations assimilables du Trésor indexées sur l'inflation française hors-tabac (OATI) à échéance 25 juillet 2029 pour un montant de 406 millions d'euros.

L'AFT a également procédé à une adjudication sur la ligne d'obligations assimilables du Trésor indexées sur l'inflation européenne hors-tabac (OATeI) à échéance 25 juillet 2015 d'un montant de 1,089 milliard d'euros, selon un communiqué.

Sur ces deux lignes, la date de règlement a été fixée au 25 janvier 2005.

Sur la ligne OATeI à 1,60%, échéance 25 juillet 2015, le taux moyen pondéré (TMP) a été de 1,40% contre 1,57% lors de la dernière adjudication, le 18 novembre 2004.
Sur la ligne OATI à 3,40%, échéance 25 juillet 2029, le TMP a été de 1,74% contre 2,36% lors de la dernière adjudication, le 15 juillet 2004.

Qu'est ce que ça veut dire en bon Français ? Ca veut dire que non seulement l'Etat français continue à s'endetter à fond et que, redoutable innovation, cela se fait maintenant à des taux indexés sur l'inflation.

Donc une reprise de l'inflation nous soulagerait beaucoup moins qu'auparavant. Bref, nous sommes de plus en plus piégés par la dette.

A quelque chose malheur est bon, ça nous évitera peut-être la fausse solution de l'inflation.

Encore qu'il ne faut pas trop espérer : nos gouvernants sont tout à fait capables de cumuler les erreurs.

Les mots

Un petit éditorial du Point :

Comment, en notre beau pays, habiller l'inertie politique ? Par quelles postures faire oublier l'impuissance lorsque les vaches sacrées de l'« avantage acquis » et la tyrannie du statu quo paralysent le pouvoir ? Comment faire illusion, comment s'illusionner ?

Pierre Mazeaud, président du Conseil constitutionnel, pointe publiquement l'incontinence législative : on demande à des lois pléthoriques de répondre à tout incident public monté en graine. Lois de circonstance, vides de dispositions « normatives », gonflées de déclarations d'intention, de proclamations édifiantes, de « politiquement correct » et autres vessies déguisées en lanternes.

Pierre Mazeaud parle d'or. Mais le verbiage législatif n'est qu'une variété de l'empire du Verbe substitué à l'action. A entendre nos caciques, on doit parfois se pincer : ne sont-ils pas eux-mêmes - et souvent depuis belle lurette ! - acteurs d'un pouvoir dont ils déplorent si justement les défaillances ? Jusque dans l'exercice annuel des voeux, à l'Elysée, à Matignon, le « voeu pieux » relève de l'art déclaratif, lequel nomme, énonce, promet, se grise de projets contradictoires, bref remplace par l'invocation le plat calendrier des mesures à prendre. A croire que la représentation élue ne retient que sa fonction « représentative », sa capacité à épouser les aspirations publiques. Et oublie l'action qu'elle a pour mission de conduire. Que devient un « pouvoir » qui peut de moins en moins ?

Ce n'est pas, bien sûr, de gaieté de coeur que le pouvoir réforme avec tant de lenteur, de craintes et de renoncements. Il espère toujours que le temps et la méthode Coué permettront à la France de combler le retard qui se creuse. Il redoute qu'en pressant le pas la résistance, ici ou là, de quelque Bastille syndicale n'allume une mauvaise mèche et que se dresse l'épouvantail d'une flambée incontrôlée de grèves du service public.

Il se trouve, hélas, qu'à ce jeu-là et au fil des ans une médiocrité résignée envahit la nation. La croissance patine à 1,95 % de moyenne entre 1992 et 2002. Quant au chômage - que presque toutes les grandes démocraties réduisent avec succès -, il est désormais si bien établi chez nous qu'on en vient à se féliciter... qu'il n'augmente pas. Nicolas Baverez n'est plus seul à peindre « la France qui tombe ». Le bilan de l'excellent Camdessus, les évaluations de l'OCDE ou de la Banque européenne d'investissements, les confidences de quelques hiérarques de Bercy, voire le rapport Beffa sur les retards de nos industries de pointe, tout suggère que l'atermoiement coûte de plus en plus cher et rend le rattrapage de plus en plus illusoire. Il nous faudrait une cure à l'anglaise, ou désormais à l'allemande. Nous en sommes loin !

Pour ne rien arranger, avec la mondialisation et les bas salaires d'Asie, la compétition s'accroît pour toutes nos entreprises, tandis que les exigences d'un actionnariat boulimique excluent les moins rentables. Ainsi se débattent-elles de plus en plus entre une « concurrence destructrice d'emplois et une exigence croissante de rentabilité immédiate ».

Le libéral bon teint qui me peint cet étouffoir ne recommande pas pour autant le bouche-à-bouche étatique. Ce n'est pas d'assistances nouvelles, et encore moins de dirigisme, que nos entreprises ont besoin. Elles veulent tout simplement moins de charges et moins d'interdits pour courir mieux. Ce n'est pas chez nous que fonctionne la « destruction créatrice » où les emplois détruits sont aussitôt remplacés par des emplois au moins aussi nombreux nés de l'innovation. N'y rêvons pas ! L'« exception française » refuse cette voie libérale qui réussit ailleurs. Elle se cramponne au vieil emplâtre social partout ailleurs rejeté.

Alors, prenons garde que sous la feinte sérénité de la France d'en haut ne se répande dans la France d'en bas une dangereuse nappe de grisou !

Comme on l'imagine, dans ce climat, la consultation référendaire du prochain printemps devient épineuse. L'acrimonie nationale y trouvera une occasion - déplacée mais commode - de se débonder. Elle s'ajoutera à l'hypothèque de la question turque, peu aisée à écarter du débat tant l'adhésion ottomane implique une certaine idée de l'Europe qui déplaît à des Européens aussi convaincus que je puis l'être. Les stratèges de cet élargissement mirobolant, quand ils effacent si légèrement de leurs calculs les disparités culturelles, rappellent fâcheusement l'aveuglement de notre politique d'immigration. Elle était évidemment nécessaire, mais la naïveté et l'incurie avec lesquelles elle fut gérée en ont fait un boulet. Et ont contrarié l'intégration qui en eût fait un atout.

Alors quoi ? Le vote « oui » - mais oui ! - reste tout de même le seul raisonnable. On ne va pas « jeter » l'Europe existante sous le prétexte que des songe-creux songent à la dénaturer ! L'Europe est pour la France le seul viatique. Mais gare au grand steeple-chase de printemps !

© le point 13/01/05 - N°1687 - Page 3 - 769 mots

Petite devinette

Pourquoi les Russes n'ont ils eu, au temps de la guerre du Liban, qu'un otage, qui a par ailleurs été libéré assez rapidement ?

Réponse dans quelques messages.

L'avantage comparatif et l'indemnisation du chômage

Le principe de l'avantage comparatif (voir message précédent) garantit que chacun trouve un travail où il est plus productif. Il en découle deux conséquences directes :

_ les emplois subventionnés , par définition non-productifs (puisqu'ils n'auraient pas été créé sans subventions) faussent le fonctionnement du principe de l'avantage comparatif. Au final ils aggravent le chômage. C'est la blague du clown qui creuse un trou pour boucher le trou précédent, il y a toujours un trou sauf qu'à la fin le clown est épuisé.

_ le chômage n'est que passager. L'indemnisation du chômage n'est donc pas nécessaire, la solidarité naturelle, c'est-à-dire la famille, suffisant à pourvoir à l'urgence (cas asiatique), ou l'indemnisation du chômage ne peut être que passagère (cas suisse et britannique). Les pays scandinaves sont dans une situation intermédiaire.

On peut en conclure que l'indemnisation du chômage au long cours n'est que le revers de la médailles des emplois aidés et subventionnés.

Pour retrouver le plein emploi, supprimons le déficit public en supprimant les allocations chômage au long cours.

Ca ne serait même pas rétrograde socialement : ceux qui imaginent que la pauvreté sera augmentée font l'habituelle erreur de raisonner à richesse et travail constants. Or, la richesse et le travail augmenteraient si tout le monde travaillait.

C'est bien ce qui s'est passé dans l'Allemagne des annnées 50 : pas de "champions nationaux" soutenus par le gouvernement, indemnisations chômage dégressives, un forte éthique capitaliste et gouvernement mettant en place un cadre légal stable et clair.

En conséquence de cette réussite, le parti socialiste allemend a abandonné dès 1957 au congrès de Bad Godesberg toute référence au marxisme et à la rupture avec le capitalisme. Cela vient probablement du fait que les socialistes allemands sont des traîtres (comme les Anglais d'ailleurs).

Vérité difficile à entendre.

Mais la dignité de chaque homme est dans son travail productif car il contribue ainsi à la société, la preuve en est qu'un client est prêt à payer pour obtenir le résultat de ce travail.

Combien méprisant à coté de cela apparaissent les emplois subventionnés et le chômage au long cours. Traiter les chomeurs comme des cancéreux économiques incurables, n'est ce pas du mépris ? Payer les chomeurs de longue durée à rester à la maison, n'est ce pas leur signifier qu'ils ne sont bons à rien d'autre ?

Le diable et le chomage (P. Fabra)

FFFF

Pas vraiment un livre récent puisqu'il regroupe les chroniques de Paul Fabra dans Le Monde et Les Echos entre 1985 et 1998. Pour la première fois, j'aborde un raisonnement économique qui me paraît honnête et rigoureux.

En effet, je trouve en général les livres et les traités d'économie à la limite de la littérature de l'absurde, très dans le style "si les pauvres avaient plus d'argent, ils seraient moins pauvres", mais dit avec des termes techniques abscons qui enlèvent toute saveur et tout humour.

Les chroniques actuelles de Paul Fabra dans Les Echos donnent toujours des points de vue économiques intéressants. Je ne suis donc pas surpris que ce livre soit captivant. C'est même le meilleur livre que j'ai lu sur des sujets de société depuis fort longtemps. C'est pourquoi je vous prie d'excuser ce long résumé, peu adapté à un blog.

"Le chomâge, fatalité ou nécessité ?", dont j'ai fait le compte-rendu récemment, synthétisait les études récentes sur le chômage comme phénomène social. Ce livre ci adopte un point de vue plus macroéconomique mais il en appuie les conclusions.

L'idée centrale de Fabra est bien connue puisqu'elle était déjà dans la note de Denis Olivennes pour la fondation Saint-Simon il y a quinze ans "La préférence française pour le chômage" : le chômage est élevé en France parce que c'est le prix à payer de mauvaise conceptions économiques et de la préservation de rentes de situation, qui se fait toujours au détriment de ceux qui n'ont pas de situation.

L'essentiel est vite résumé : le traitement social du chomâge traite les effets (la précarité, l'exclusion, la pauvreté), non la cause. La cause est le manque de capital productif accumulé, c'est-à-dire d'argent disponible pour créer des emplois.

Les comptes nationaux raisonnant en flux -croissance du PIB, déficit du commerce extérieur etc, le capital productif accumulé n'apparaît jamais.

Or, il semble pourtant que ça soit, par exemple, le facteur le plus efficace pour expliquer les ravages de l'explosion d'une bulle spéculative. Spéculer sur l'immobilier revient à investir, en faisant des dettes et non en accumulant du capital, dans des locaux qui resteront vides après l'explosion de la bulle et donc à détourner l'argent d'un investissement en capital plus productif.

Ce défaut de capital productif accumulé est du à une mauvaise répartition de l'argent : trop aux actionnaires, trop aux salariés, trop aux créanciers, trop à l'Etat, pas assez pour investir et pour créer des emplois.

On note tout de suite qu'il y a une pierre dans chaque jardin.

On remarque que, au nom de cette idée, Fabra s'oppose aussi au néo-libéralisme, qui est, comme l'étatisme, une doctrine du capitalisme sans capital.

La théorie néo-libérale moderne fait de la dette, qui a un coût, un moyen de financement équivalent au capital. Or, c'est fondamentalement faux : l'actionnaire s'engage dans la société (perversion actuelle : il spécule) tandis que le créancier attend un revenu fixe.

Le capital n'est pas un coût mais un apport de fonds propres. La dette est un coût.

La préférence actuelle -préférence financière, Fabra distingue bien "financier" et "économique"- pour la dette, qui permet de générer des effets de levier, a un coût qui soustrait l'argent à l'investissement et donc à l'emploi. Le comble de l'absurde est l'habitude de certaines sociétés de racheter leurs propres actions plutôt que d'investir l'argent disponible.

Bien entendu, c'est le contraire qu'il faudrait faire : maintenir la dette et les dividendes à un niveau raisonnable et investir les profits.

L'exemple positif type est Air Liquide : appel aux banques restreint, confiance aux actionnaires (qui sont en contrepartie très fidèles).

Ou encore Rhode & Schwarz, société moyenne familiale allemande de haute technologie, fondée en 1935, dont la particularité est de ne jamais avoir fait appel à un banque pour emprunter. Ce qui n'a pas empêché son développement. Je reconnais que c'est un exemple extrême.

Fabra pense que ce n'est pas aux salariés d'abord d'être flexibles mais aux structures, à commencer par la première d'entre elles, l'Etat, mais aussi les entreprises et leurs dirigeants (Fabra manifeste bien peu d'estime pour ce qui s'appelait encore le CNPF). De plus, des salaires élevés ne sont pas forcément l'ennemi de l'emploi (voir aussi cette démonstration dans "Le chomâge, fatalité ou nécessité ?").

Pour Fabra, les intérêts de la dette et les salaires des employés sont directement concurrents vis-à-vis des ressources de l'entreprise, c'est pourquoi cette culture de la dette entretient le chômage.

Accuser la mondialisation ou les progrès techniques est anti-économique. Raisonnons par l'absurde, supposons que, effectivement, les progrès techniques et la mondialisation soient à la cause du chômage. Croyez vous qu'en fermant les frontières et en arrêtant toute recherche scientifique, le chômage sera résorbé ?

Cette préférence pour la dette qui mine l'économie est d'origine étatique : les énormes émissions d'obligations d'Etat épuisent les réserves de liquidités, qui devraient "normalement" s'investir dans le privé pour créer de la richesse, maintiennent des taux bas -paradoxe apparent- en créant une accoutumance à la sécurité et fournissent aux sociétés privés des instruments pour s'endetter (produits dérivés). Cet immense (le marché de titres publics est supérieur de 40 % au marché des titres privés) marché de taux alimente la financiarisation de la société.

C'est pourquoi la gauche française est malhonnête, idiote ou aveugle quand elle se plaint de la financiarisation de la société et ne se bat pas (c'est le moins qu'on puisse dire) pour annuler les déficits publics, qui alimentent pourtant cette financiarisation.

Toutes les mesures de taxations proposées sur les mouvements spéculatifs ressemblent à un limiteur de vitesse sur une Ferrari : quand on veut vraiment restreindre la vitesse, on achète une voiture moins puissante ou on supprime le carburant. De même, il faudrait couper le moteur de la spéculation en lui otant son carburant : les titres d'Etat.

Les pays scandinaves font tous les jours la preuve qu'on peut concilier libéralisme tempéré et protection sociale.On sait bien que ce qui empêche de résoudre le problème du chômage est l'anti-libéralisme. Et puisqu'ils sont cohérents, les scandinaves, la Suède, en bon pays social-démocrate, a annulé le déficit public et le Danemark suit la même voie, la Norvège aussi.

De plus, le service de la dette (les intérêts) sera en 2005 le premier budget de l'Etat, paralysant toute initiative politique.

La dette d'Etat entretient le chômage et la stagnation économique. Les intérêts tuent la politique.

De plus, cette dette étatique alimente une toute-puissance de l'Etat qui est anti-démocratique (Ah, la fameuse "autorisation préalable pour les constructions ne nécéssitant pas de permis de construire" ou "la déclaration préfectorale des aires d'atterrissages de ballons") puisque la base de la démocratie est la confiance dans le citoyen libre et responsable.

Il faut faire confiance aux hommes. Au fond, il faut choisir, ou avoir une industrie, ou avoir un ministère de l'industrie, on ne peut pas avoir les deux.

Comment en sortir ? Fabra propose de supprimer l'ISF, qui est un impôt qui ne rapporte pas grand-chose mais qui "punit" les riches, et de lever un impôt sur le patrimoine à l'assiette beaucoup plus étendu mais au taux plus bas (de 4% à 12 %). Cet impôt serait ponctuel, payable sur trois ans et devrait annuler la totalité de la dette de l'Etat.

L'assiette serait calculée de manière à ce qu'il pèse sur les 20 % de ménage qui possède 80 % du patrimoine.

Cet impôt devrait donc rapporter en moyenne la dette répartie sur l'ensemble des ménages, c'est-à-dire 30 000 euros par ménage en moyenne, en réalité, il pèserait beaucoup plus sur les ménages imposés, de l'ordre de 150 000 euros en moyenne.

Cela peut paraître énorme mais c'est le prix de la prospérité. De plus, le taux de prélèvements étant assez bas, cela devrait être assez relativement peu douloureux. Ca ne toucherait que les ménages qui peuvent se le permettre.

Posez vous deux questions : Etes vous satisfait de l'économie française des vingt dernières années ? Voulez vous continuer ainsi ?

Bien sûr, pour éviter que le cycle infernal ne recommence, il faudrait en même temps qu'on annule la dette, annuler le déficit. Voire fixer constitutionellement que l'Etat ne peut pas être déficitaire ; en toute rigueur, il faudrait préciser "sauf en cas de guerre", mais cette précision pousserait certains à la guerre permanente, par exemple des opérations de "maintien de l'ordre" dans un ex-colonie.

Annuler le déficit revient à réduire de 20 % les dépenses publiques, chose qui est assez aisée tant les gaspillages sont nombreux (voir "L'Etat, le grand gaspillage" de Jacques Marseille).

Je pense (c'est mon opinion, ce n'est plus celle de Fabra) qu'une vraie décentralisation est une nécessité à la fois politique et économique. Il faudrait donc réduire les dépenses de l'Etat de 50 % (estimation à la grosse pour fixer les idées) afin de transférer des pouvoirs et des moyens aux collectivités locales. [Addendum de 2012 : je ne crois plus autant en la décentralisation].

C'est plus difficile, mais en remettant à plat les pratiques d'assistanat, c'est tout à fait possible. Autant une forte protection sociale est indispensable, autant l'assistanat est néfaste. Aujourd'hui, nous sommes dans une logique folle, résignée et méprisante qui consiste à aider les chômeurs à vivre au chômage plutôt que les aider à trouver du travail.

Décentralisation et réduction des pouvoirs de l'Etat seraient une vraie révolution (presque) tranquille. Mais les individus en seraient à la fois plus prospères et plus libres, la société plus juste.

En fait, c'est la cohérence du dispositif, répartissant les efforts, qui le rendrait politiquement viable :
_ les assujettis au super-impôt constaterait que l'Etat fait des réformes radicales
_ les fonctionnaires bousculés, voire licenciés, verraient que les riches sont mis à contribution

Tous victimes ? Bien au contraire, car l'ensemble de la société française ne s'en porterait que mieux.

Evidemment, si l'inspiration est économique, la conséquence est libérale. Notre société est libérale par essence, puisqu'elle est politiquement libérale. Le fait que "libéral" soit devenu une insulte en dit long sur notre malaise et notre crise identitaire mais ne nous aide pas à en sortir.

La conception française, qui découle directement de l'anti-libéralisme, que la quantité de travail est fixée, qu'il faut la partager et que l'Etat peut (et doit) créer des emplois est ravageuse : on ne partage en fait que le chomage et on entrave les emplois viables.

Pour montrer à quel point la logique de la réduction du temps de travail dans un but économique est absurde, il suffit de se rappeler que la réduction maximale du temps de travail qu'on puisse imaginer, c'est le chômage.

Je me pose la question de la poule et de l'oeuf : l'antilibéralisme a-t-il créé la protection des rentes de situation ou la protection des rentes de situation a-t-il créé l'antilibéralisme ?

La réforme proposée est loin d'être impossible : il "suffirait" de faire de la politique, et non de l'électoralisme à courte vue. L'idée directrice est vite définie "Depuis trente ans, les pénuries et les inégalités s'aggravent ; travaillons pour plus de prospérité et plus de justice."

Enfin je ne suis pas naïf, je sais à quel point les idéologies (1), à droite ou à gauche, parasitent la réflexion et le débat. Mais pourquoi ne pas compter sur l'intelligence des Français ?

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Quant aux entreprises, Fabra trouve que l'osmose des élites publiques vers les élites privées fait oublier les sains principes du capitalisme. Les règles de la gestion publique, gestion sans capital -c'est ce qui la distingue du privé, déteignent fâcheusement sur la gestion privée.

Quand on voit les "réussites" d'ex-hauts fonctionnaires dans le privé, les Messier, Tchuruk, Haberer, Bilger, qui tous mis leur boite au bord de la faillite et ne l'ont sauvé qu'au prix de licenciements et de destructions de valeur massifs, on peut que l'approuver.

Les histoires d'effets de levier, de répartition des gains de productivité entre travail et capital, c'est de la foutaise. La seule chose qui compte dans une économie capitaliste, c'est la rentabilité du capital. Cette règle simple a plusieurs conséquences intéressantes :

1) la rentabilité du capital tend à s'égaliser. En effet, si un secteur est momentanément plus rentable, plus de capitaux vont s'y investir, la rentablité du capital va chuter jusqu'à un point d'équilibre qui est le même pour tous les secteurs puisque les capitaux sont mobiles.

Le capital ne doit pas être rémunéré plus que le marché (ça ne servirait qu'à attirer de nouveaux actionnaires), si il y a profit après distribution du dividende, il doit être investi pour faire fructifier le capital.

2) les gains de productivité ne vont ni au travail ni au capital mais au consommateur. En effet, si quelqu'un trouve le moyen de produire moins cher, il baissera son prix pour conquérir des clients (sauf si la concurrence est faussée, par exemple par des mesures étatiques ou monopolistiques). L'exemple de la chute continue du prix de l'électronique est suffisamment éloquent.

Le gain de pouvoir d'achat du client peut être utilisé ailleurs.

C'est ainsi que les gains de productivité agricole ont fait diminuer la part de la nourriture dans le budget des ménages, les loisirs ont augmenté leur part d'autant.

3) la productivité, qui justifie bien des licenciements, est un outil statistique trompeur, d'ailleurs les staticiens parlent de "productivité apparente", le qualificatif est d'importance. En effet, la logique de la productivité est de dire : si je produis 100 bidules avec 100 employés, en faisant un effort, je dois pouvoir produire 100 bidules avec 95 employés, c'est toujours 5 salaires économisés.

Or la logique du capitalisme est inverse, elle est d'essayer de produire 105 bidules sans investissements supplémentaires, y compris, si nécessaire, en embauchant.

4) le capital d'une entreprise y est de manière durable, il a vocation à se transmettre de génération en génération. Tout ce qui le fragilise, et notamment l'endettement, doit être regardé avec circonspection. Si une entreprise s'endette pour financer une expansion, quelles ressources a-t-elle en période de crise ? Aucune, elle est nue, elle licencie, elle vend par morceaux, bref elle bouffe son capital. Fabra écrivait cela en 1997, vous noterez que les évènements des années 2000 ont largement conforté son analyse.

J'ajoute que la logique voudrait plutôt que, les périodes d'expansion étant financées par le capital, les crises soient abordées vierges de dettes, la dette pouvant alors être un outil (à utiliser prudemment) pour surmonter une mauvaise passe ou pour profiter plus aisément de la détresse de concurrents moins prudents.

Un certain Jean du Puits ou de la Cascade ou quelque chose comme ça a déjà fait une fable sur une histoire de cigale et de fourmi, je ne vais pas vous la refaire.

Le fait que les entreprises familiales ont un actionnariat qui n'oublie pas que le capital a vocation à la pérennité explique peut-être qu'elle connaissent un regain d'intérêt en période de crise.

Hélas, Fabra n'explique pas comment cette bonne vieille culture capitaliste va faire son retour chez des managers piqués aux stock-options comme les boeufs sont piqués aux hormones.

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Je vous cite la table des matières, qui fournit un bon résumé :

Livre I : une économie de paix gérée comme une économie de guerre [ce parallèle que l'auteur fait entre gestion actuelle des entreprises et des Etats et économie de guerre est particulièrement riche.]

1) L'accumulation de la dette
2) La déflation par la dette publique
3) L'effondrement de la culture bancaire et financière (2)
4) Contorsions pour contourner le problème du remboursement
5) Pour en sortir
6) Communisme = économie de guerre

Livre II : la fausse fatalité du sous-emploi permanent

1) L'alibi de la mondialisation
2) L'alibi des nouvelles technologies
3) L'alibi du salaire minimum et des salaires trop élevés
4) Une économie sous-oxygénée : la prétendue insuffisance d'épargne
5) Le franc Mitterrand-Chirac et le chômage
6) L'ascension d'une idée destructrice : les 35 heures
7) Sacrifiés sur l'autel de la productivité : jusqu'où ?
8) Les emplois subventionnés : où l'Etat mine en vain le marché
9) Cacophonie de la politique anti-chômage
10) Bousculer l'état d'esprit
11) Capitalisme avec capital = emplois
12) La compétition et le désavantage comparatif

(1) idéologie : discours sur la réalité primant cette réalité. Principe : si la réalité et le discours sont en contradiction, c'est la réalité qui a tort, il convient de la nier ou de la réinterpréter. L'objet de l'idéologie est de masquer la réalité et ses évolutions (tout au long des années 50-60, le PCF mettait en avant la "paupérisation du prolétariat" alors que tous les ouvriers ne se sont jamais autant enrichis ; aujourd'hui, la droite critique le manque de flexibilité alors que le recours aux interimaires et au temps partiel permettent une flexibilité jusqu'alors inconnue). Le moteur de l'idéologie est la fuite de la tension psychologique et intellectuelle que requiert une remise en cause permanente.

Combattre les idéologies est d'abord un combat intérieur reposant sur deux règles : s'en tenir fermement et sans concession à des principes, sans projection sur la réalité, rester ouvert dès qu'il s'agit de la projection sur la réalité. Par exemple, la résistance à l'oppression doit être un principe sans compromis ; par contre, décréter que le capitalisme est toujours et dans toutes les situations oppresseur, c'est de l'idéologie.

Le vice de base de l'idéologie est de considérer que la réalité, infiniment variée et changeante, peut être enfermée dans un discours cohérent.

(2) "la culture bancaire et financière" qui s'effondre à laquelle pense Fabra est celle qui consiste à investir pour créer des richesses, par opposition à celle qui consiste à boursicoter sur les marchés de taux

Contre une politique de "champions nationaux"

Le capitalisme repose sur deux principes :

_ la compétition, principe qui est à peu près compris par nos gouvernants, et encore, ils ne voient souvent qu'une lutte à mort

_ l'avantage comparatif, qui est totaement ignoré de nos gouvernants, sauf, de temps en temps, au niveau international, où il est confondu malencontreusement avec la compétition

Ricardo, au XIXème siècle, comme quoi ce n'est pas une découverte récente, expliquait très simplement en quoi consiste l'avantage comparatif :

Imaginons qu'il n'y ait que deux produits, les chapeaux et les chaussures, et que deux producteurs, Pierre et Paul.

Pierre est deux fois plus productif que Paul dans les souliers et trois plus productif que Paul dans les chapeaux. Il a intérêt à laisser Paul faire les souliers et à se consacrer aux chapeaux.
Ou encore, comme disait un économiste, dont j'ai oublié le nom : "Même si je tape deux fois plus vite à la machine que ma secrétaire, j'ai tout de même intérêt à embaucher une secrétaire car je suis dix fois meilleur économiste qu'elle et donc je dois y consacrer tout mon temps."

Ce principe d'une économie d'échanges garantit que chacun y trouve sa place, dans le travail où il est le moins mauvais.

Or, la constitution de "champions nationaux" contredit ce principe. En effet, cela consiste à fausser artificiellement la compétition et le mécanisme de l'avantage comparatif ne peut plus jouer : l'argent utilisé au profit des "champions nationaux" l'est au détriment des activités moins "prestigieuses" (cette notion de prestige n'a aucun sens économique) sur lesquels le principe de l'avantage comparatif joue à plein.

On s'étonne de la faiblesse des PME françaises, la raison n'est pas à en chercher ailleurs que dans la faveur dont bénéficient les grands groupes.

A contrario, le Japon tente de préserver un tissu de PME en gardant la concurrence la plus saine possible ; en effet, plus une activité est fragile, plus les pratiques de concurrence déloyale sont mortelles.

Bref, envisager l'économie de marché comme la loi de la jungle où le plus fort,le "champion national", met à mort les autres prouve une méconnaissance totale de ses mécanismes. Il en résulte des décisions désastreuses.

Que cette erreur soit fort répandue dans tous les pays n'enlève rien à sa nocivité.

L'économie de marché repose sur le contrat (entre client et fournisseur, entre employeur et employé), toute action en faveur de l'éconmie devrait contribuer à rendre ces relations contractuelles plus claires et non en des interventions, forcément brouillonnes, dans l'espoir vain d'orienter l'économie dans tel ou tel sens.

C'est en ce sens que je disais précédemment que le capitalisme souffre plus de l'oubli de ses principes que de ses contradictions.

Pourquoi le progrès technique n'est pas cause du chômage (complément)

Dire que la hausse de la productivité cause le chômage est contradictoire. Si le travail est plus productif, il rapporte plus, ça vaut d'autant plus le coup d'embaucher !

En réalité, ce qu'il y a de sous-jacent, c'est la vieille lune marxiste comme quoi le capitalisme de vrait s'écrouler sous ses propres contradictions.

Ce qui me menace réellement le capitalisme aujourd'hui est beaucoup plus l'infidélité à ses principes fondateurs : compétition et avantage comparatif (voir message suivant, le temps que je rédige).

vendredi, janvier 21, 2005

Le vernis culturel

Le peuple de Mozart et de Goethe a mis méthodiquement des juifs au four.

La culture n'empêche pas les atrocités. C'est la conscience, qui est par nature individuelle et aléatoire, qui les empêche.

Aujourd'hui, des soldats isaréliens, américains et anglais torturent avec l'assentiment, au moins passif, d'une large part de la population.

jeudi, janvier 20, 2005

Lycéens et Auschwitz : le malaise

Des lycéens ont été sanctionnés pour avoir tenu des propos antisémites et eu des attitudes déplacées à Auschwitz lors d'un voyage scolaire.

Il ne faut absolument négliger l'immense potentiel de connerie des adolescents, du fait de leur immaturité.

Mais on peut aussi se demander si il n'y a pas là une dérive de la part des adultes : toutes les situations fortes sont particulièrement difficiles à supporter pour des adolescents. Nous connaissons tous ces ricanements et ces ironies faciles lors de la représentation de grandes tragédies.

C'est peut-être l'idée même de visite de groupe qui pose problème. En groupe, on est en représentation, à plus forte raison des adolescents. La situation est bien peu propice à l'intériorisation.

C'est pourquoi la lecture préalable d'un livre, "Si c'est un homme" par exemple, qui est nécessairement solitaire est sans doute obligatoire.

Bouquin :"Si c'est un homme" (Primo Levi)

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En ces temps de commémration de l'ouverture des camps de concentration hitlériens, "Si c'est un homme" de Primo Levi est incontournable.

Bouleversant, quand il essaie d'habituer cette Allemande à ne pas détourner le regard et à le voir comme un être humain.

Il s'oppose à "L'espèce humaine " d'Antelme. Antelme croit que les camps de concentration ne sont que le paroxysme de la société humaine, notamment capitaliste. Levi croit encore en la culture.

Pourquoi la mondialisation et le progrès technique ne sont pas les causes du chômage

Le progrès technique :

Une remarque historique préliminaire : si le progrès technique causait le chômage, ce dernier aurait du être à son pic en 1960. Or, on sait bien qu'il n'en ait rien.

L'homme a toujours eu besoin d'outils pour travailler, même le balayeur a besoin d'un balai. L'amélioration des outils, le progrès techniques, libère l'homme de certaines tâches pour qu'il puisse se consacrer à d'autres. Si il en résulte un gain de productivité, le client en bénéficie et c'est du pouvoir d'achat libéré pour autre chose.

Un exemple parlant, c'est l'augmentation de la productivité agricole par la mécanisation : la part de la nourriture dans le budget des ménages a baissé, la part des loisirs et des produits manufacturés a augmenté d'autant, il y a eu un exode rural, les paysans sont devenus des ouvriers. Il n'y a pas eu pour autant de chômage structurel durable. Le niveau de vie a augmenté.

Alors ? On retombe sur notre histoire de manque de capital productif accumulé. Pour créer des nouvelles industries, pour augmenter la richesse globale et le pouvoir d'achats, il faut des investissements, il faut des sous pour construire des usines, des laboratoires, des boutiques etc ... C'est parce que de nouvelles industries ne prennent pas complètement le relais des anciennes qu'il y a du chômage. Et c'est parce que l'épargne est absorbé par la dette publique qu'il y a sous-investissement.

La mondialisation :

Ca va avec l'explication sur le progrès.

Si les Chinois sont peu payés, c'est parce que leur travail ne vaut pas plus. Dans les pays industrialisés, les travailleurs ne sont pas en compétition avec les petits Chinois, ils ont leurs créneaux à eux. Quand on abandonne l'industrie textile, cela signifie que ce n'est plus une tâche assez précieuse pour notre niveau de richesse, exactement comme les paysans abandonnaient la terre pour se livrer au travail ouvrier mieux valorisé.

Seulement, les industries nouvelles peinent à prendre le relais, mais cela, ce n'est pas de la faute des Chinois, c'est notre problème. On en revient à la question de la sous-capitalisation.

Par exemple, je suis tout à fait surpris par la lenteur des progrès des énergies alternatives au pétrole. Comme par hasard (mais en est-ce vraiment un ?), la société qui développe les véhicules hybrides est Toyota : une société pas endettée (elle est assise sur une montagne de cash), chiche avec ses actionnaires et pas exceptionnellement généreuse avec ses salariés.

Autre exemple, on se plaint du peu de recherche finançée par le privé en France, n'y a-t-il pas un rapport avec des dépenses publiques à 55 % du PIB ?

Notre économie de guerre

Comparaison n'est pas raison, cependant le parallèle entre notre économie et une économie de guerre est éclairant :

Economie de guerre : les jeunes sont sacrifiés

Notre économie : le chômage des jeunes est le plus important chez les moins de 25 ans

Economie de guerre : les dépenses sont financées par le déficit

Notre économie : les dépenses sont financées par le déficit

Economie de guerre : les taux d'intérêt sont bas car les bons du trésor sont les seuls placements

Notre économie : les taux d'intérêts sont bas car le volume des bons du trésor est supérieur de 40 à 50 % aux titres privés

Economie de guerre : l'Etat administre l'économie

Notre économie : l'Etat intervient sur les prix, sur les salaires, sur les relations entre clients et fournisseurs, sur les relations entre employeurs et employés, sur la concurrence, favorise ou défavorise certaines orientations du marché.

Pour une politique de rupture ?

Aujourd'hui, nous sommes dans un cycle infernal :

dépenses publiques -> sous-investissement -> déflation larvée -> chômage -> intervention étatique -> dépenses publiques

Ce cercle vicieux entraîne la France sur la pente d'un appauvrissement progressif mais certain. L'appauvrissement, comme l'éclatement des bulles spéculatives, se fait par saccades, les longues glissades sont suivies de courtes périodes de rémission, des secteurs surnagent pendant que d'autres, plus nombreux, s'écroulent. Ils se trouvent donc toujours des docteurs Tant-mieux pour nous expliquer que tout cela n'est pas si grave.

Je m'adresse donc à ceux qui ont pris conscience du problème (tant pis pour les docteurs Tant-mieux).

Je me demande comment en sortir.

Paul Fabra (je vous poste le résumé de La diable et le chômage après demain) propose un super-impôt ponctuel sur le patrimoine destiné à éteindre une fois pour toutes la dette de l'Etat et de repartir sur de bonnes bases, c'est à dire zéro déficit et zéro dette.

Economiquement, c'est la bonne solution. Mais politiquement ?

Après tout, chacun voit midi à sa porte et certains croient encore qu'il faut augmenter les dépenses publiques. Comment appliquer cette politique ?

Nos politiciens se comportent comme des amateurs papillonants. Aucune concentration ni ligne directrice. Ce qui ne manque pas de provoquer un désarroi profond chez les citoyens.

Pourquoi ? Parce que le mauvais réflexe en période de crise est de renforcer les pouvoirs de l'Etat (c'est normal, nos énarques sont formés à cela), de faire de l'activisme étatique. Cette réaction, appliquée systématiquement depuis vingt ans, a sans conteste prouvé son inadaptation. Nos hommes politiques s'en rendent bien compte, mais comme c'est la seule réaction qu'ils ont dans leur éventail (l'éventail à un pli, c'est petit !), ils ne savent pas, et n'envisagent même pas vraiment, de faire quelque chose d'autre.

Là est la véritable pensée unique. Et ils persévèrent dans l'erreur, mais avec mauvaise conscience, d'où la multiplication des observatoires Théophile et des comités Théodule : l'Etat s'étend encore, mais il n'ose plus agir ouvertement, alors, pour s'occuper, il observe, il consulte.

Acculés, les gouvernants peuvent aussi choisir de se débarrasser du problème plutôt que de le résoudre en le transférant "à Bruxelles".
On sait les anciennes idées impuissantes mais on n'en a pas de nouvelles, alors on navigue à vue.

D'où cette impression d'impuissance et de fébrilité.

Lionel Jospin s'était excusé d'avoir dit, à propos des licenciements chez Michelin, que l'Etat ne peut pas tout. Grave capitulation de l'intelligence devant le préjugé. Au contraire, il aurait du enfoncer ce clou démocratique. Non, l'Etat ne peut pas tout et c'est très bien ainsi.

Donc, point de départ de tout, des principes corrects :

- ce que l'Etat fait doit être mesuré, évalué, corrigé. L'Etat est responsable devant les citoyens

- la vie économique a sa logique propre qui repose sur le contrat qui lie les individus. L'intervention de l'Etat dans cette logique la perturbe et risque d'introduire des injustices. L'Etat ne doit pas vouloir se mêler de tout, sous peine de se condamner lui-même à l'inefficacité.

- le rôle économique de l'Etat est de fournir un cadre stable et pérenne pour les relations entre acteurs économiques, non d'influer au gré des circonstances sur les relations entre les acteurs dans un sens ou dans un autre.

- le capital productif accumulé crée la richesse et l'emploi

Muni de ces principes, il reste à élaborer un projet :

Il doit être :

- cohérent. Les principes sont là pour ça.

- transparent : pas de sous-entendus ou de non-dits- exhaustif. Sachant que tous les problèmes ne peuvent être anticipés, on se reportera aux principes pour décider en face d'un problème inattendu

- souple. L'exhaustivité est un but, inaccessible. L'adaptation doit être en accord avec les principes.

Pour s'accorder au rythme de la vie politique actuel, ce projet doit être minutieusement préparé dans l'opposition, de manière à ce que la majorité des lois et décrets s'y rattachant soit publiée dans les trois premiers mois après l'arrivée au pouvoir. Après six mois, les quelques lois qui pourraient encore passer seraient liées à des réglages et des ajustements, mais le coeur du dispositif serait en place.

On touche là un grave poblème : la faiblesse des "think tank" et des partis politiques français. Nous n'avons pas de "shadow cabinet" à l'anglaise.