Ce matin, Ségolène Royal, ancienne candidate à l’élection présidentielle, candidate à la fonction de premier secrétaire du parti socialiste, était l’invitée de RTL, à 7h50.

La première question a concerné l’accueil des enfants dans les écoles les jours de grève à l’éducation nationale. Peu de gens, semble-t-il, écoutent vraiment les réponses à ce genre de questions. Mais plusieurs dirigeants socialistes, par exemple Julien Dray, dimanche, au Grand Jury, ou bien Ségolène Royal, ce matin, au micro de RTL, se disent d’accord sur le principe. Oui, il faut trouver une solution pour les élèves. Oui, il faut éviter de pénaliser les parents.

Alors, comment faire ? Il ne faut pas « passer en force », comme souhaite le faire le président de la République, a expliqué Julien Dray, parce que proposer de faire une loi sur le sujet serait « passer en force ». Venant d’un parlementaire, l’expression est quand même étonnante. Il faut éviter qu’il y ait des grèves, a répondu en substance Ségolène Royal. Etrange approche de la vie sociale que ce souhait de la disparition de la grève, expression irréaliste d’un monde tellement parfait que le conflit disparaitrait. Les Soviets qui avait trop lu Marx y croyaient. On pouvait penser que depuis la pensée était désuète. Pas tout à fait, semble-t-il.

La seule faiblesse, pour faire court, de l’organisation d’un droit de garde des élèves tient à l’identité de celui qui s’en chargera. La commune, a indiqué le président de la République. La commune, a dit Ségolène Royal, qui déteste être d’accord avec Nicolas Sarkozy. Oui, mais quand la grève de la fonction publique est générale, qu’elle concerne la fonction publique nationale, donc les enseignants, et territoriale, c'est-à-dire le personnel communal, comment faire ? C’est ce qui s’est passé jeudi à saint Quentin, ville où Xavier Bertrand, ministre de la Santé, est premier adjoint. Pas de garde volontaire parce qu’il n’y avait pas de personnel.

La seule solution pour sortir de la difficulté, c’est la réquisition des personnels. Mais au gouvernement, on pousse des hauts cris. La réquisition ? Vous n’y pensez pas. Soit. Alors, oublions ce droit de garde des élèves, poudre aux yeux et communication. Que de temps perdus en faux débats.


François Hollande et quelques autres avaient rêvé d’un parti socialiste parfait. Les idées d’abord, ces fameuses idées que les socialistes traquent depuis tant d’années sans jamais parvenir à en saisir une seule par la queue. Durant sa campagne, Ségolène Royal avait eu deux idées : augmenter le SMIC et refaire des emplois jeunes. Deux vieilles idées. Là, il parait qu’il faut des idées neuves.

Au passage, on peut se marrer. La politique en France, c’est le concours Lépine de l’idée. La politique, en France, ce devrait être autre chose : une expertise sérieuse et réaliste des problèmes, des réponses réalistes et sérieuses, une anticipation des difficultés à venir, un fabuleux talent pédagogique pour faire partager tout cela. Trop simple, trop humble, pas assez français. Ce que nous cherchons nous, ce sont les idées, ou plutôt « l’Idée » qui mettrait à distance la mondialisation et éclairerait le chemin nouveau que personne ne voit et qui existe, c’est sûr, puisque nous en décidons ainsi.

Bref, le parti socialiste rêvé aurait dû se concentrer sur « les idées » et repousser à plus tard la question vulgaire de personnes, pouahhhh. En fait, ceux qui développent ces thèses organisent en sous main la répartition des postes. Hypocrisie de la politique, tellement prégnante chez nous que l’on s’étonne de voir autant d’intellectuels réfléchir aux causes du discrédit de l’action publique alors que tout est là, dans la seule hypocrisie des attitudes et des discours.

Vendredi, Ségolène Royal a rompu ce maléfice. Je suis candidate, a-t-elle dit. Elle l’a fait pour de mauvaises raisons : l’offensive encore un peu contournée, mais bien menée de Bertrand Delanoë, maire de Paris, prêt à franchir le pas, lui aussi, mais qui ne le dit pas encore. Au moins, le voile se déchire. Le monde pur des idées se mélangera donc un peu avec la souillure des ambitions. Que d’enfantillages dans ces postures !

Ce matin, au micro de RTL, Ségolène Royal qui ne dit du mal de personne, manquerait plus que ça, a méchamment taclé Bertrand Delanoë. A-t-elle lu le texte, un peu d’eau [froide] réchauffée, qu’a produit récemment le maire de Paris ? Oui, elle l’a lu, mais ce texte, précise-t-elle, Bertrand Delanoë l’a écrit avec Lionel Jospin, il faut le préciser, précise-t-elle. Nouvelle version d’une phrase célèbre, retournée pour le coup à l’envoyeur : « vieilli, usé et fatigué ». C’est méchant, ce sera peut-être efficace. Cela donne le ton de ce que sera le débat du parti socialiste dans les mois à venir.

Souhaitons qu’au milieu des vacheries, il y ait aussi ceci : des solutions pour équilibrer la sécurité sociale, d’autres pour préserver les régimes de retraites par répartition, formidable institution de solidarité [erreur d'analyse de JMA], une réflexion sur la compétitivité des entreprises françaises, des projets fédérateurs d’une Europe dont les Allemands pourraient bientôt avoir envie de se détacher, et aussi, pourquoi ne pas rêver, une analyse approfondie des travers et errements des acteurs de la politiques, si souvent cyniques et si rarement sincères.