Un débat s'est ouvert dans les commentaires du message Petites leçons de la crise au Liban sur le point de définir guerre juste et guerre utile.
Le dilemme actuel d'Israel est bien rendu par l'article La nouvelle guerre du Liban et les limites de la politique de compromis dont la dernière phrase est :
L'usage de la force suscite sans doute la haine, mais l'inaction encourage les ambitions impérialistes de forces islamistes qui ont déclaré la guerre aux valeurs occidentales et à ceux qui les incarnent dans leur pays et dans le monde entier.
Je voudrais me placer sur un autre plan : Gaston Bouthoul, un des fondateurs de la polémologie, qui est l'étude non pas circonstancielle mais sociologique des guerres, attribuait, pour résumer, les guerres à un trop plein de jeunesse, de vitalité, ressenties. La pression déborde sous forme de guerres.
Il y a dans l'homme une pulsion guerrière indéniable. Malgré toutes nos belles idées pacifistes, il est symptomatique que s'attachent à la guerre des valeurs positives : courage, sens du sacrifice, endurance, intelligence, autorité.
Un écrivain qui a fait une guerre (Genevoix, Mailer ? Je ne me souviens plus) expliquait que la fraternité d'armes était un sentiment qu'aucune expérience civile ne pouvait rendre.
Shakespeare l'a comme à son habitude excellement exprimé : "Celui qui verse son sang à mes cotés est mon frère, et des gentilhommes qui ce soir sont au fond de leur lit se mordront les lèvres de ne pas avoir été ici". (traduction très libre d'aoprès ouvenirs)
Le malheur des guerres modernes est qu'elles sacrifient plus de civils que de combattants.
Néanmoins, je pense que la pulsion guerrière vient d'abord, les raisons qu'on en donne ne sont qu'un habillage, car il est souvent assez facile d'imaginer des solutions non guerrières.
Un autre malheur est qu'il faut être deux pour faire la paix mais un seul suffit à déclencher la guerre.
Dans le cas du Proche-Orient, où il y a plus d'un pays (y compris le Liban, dont les actions ne sont pas allées en direction d'une paix avec Israel) à ressentir cette pulsion, la guerre est quasi-inévitable.
La paix avec le Jordanie et l'Egypte est venue d'une cause psychologique : le sentiment de fierté d'avoir gagné la guerre de 1973 (c'est le point de vue officiel égyptien) allié à une lassitude de la guerre.
C'est pourquoi on peut faire tous les plans de paix qu'on veut sur un coin de la table, tant que les belligérants ne seront pas las de la guerre, il n'y aura pas de paix.
Or, les frustrations existant dans les peuples arabes, les humiliations ou ce qui est vécu comme tel et la peur de disparaitre chez les Israeliens sont un puissant moteur qui empêche la lassitude de tomber sur les épaules des protagonistes.
Bref, la pulsion guerrière risque encore de trouver beaucoup d'énergie pour l'alimenter.
Je ne comprends pas ce qui vous arrive.
RépondreSupprimerL'article "La nouvelle guerre du Liban et les limites de la politique de compromis", du politologue israélien Mickaël Bensadoun, est le type même de la propagande unilatérale qu'à tort ou à raison vous reprochiez aux médias français au début de cette discussion. L'adversaire est tout uniment mauvais, et le camp de celui qui écrit a 20 sur 20.
Un simple exemple : l'Iran dont il est question est constamment celui d'Ahmadinejad alors que d'une part il est loin (heureusement) d'y faire la loi, d'autre part, son élection aussi large qu'inattendue ne s'explique pas sans l'indignation soulevée par l'agression caractérisée des Etats-Unis et de l'Angleterre contre l'Irak. Alors que cette guerre est bien évoquée s'agissant de ce personnage, mais seulement pour dire qu'il profite des difficultés américaines dans ce pays !
Ce qui se passe aujourd'hui de véritablement horrible et inédit, c'est justement l'adhésion pleine et entière d'Israël, qui jusque là pratiquait plutôt l'égoïsme sacré, au camp occidental et à la théorie du choc des civilisations.
Or j'ai entendu ce midi Hervé de Charrette, qui n'est guère lévogyre et même plutôt sarkozyen, appeler à la pondération en mettant précisément en garde contre cette théorie.
Je suis réellement intrigué de vous voir, ainsi que tous les autres intervenants, aussi suiviste, naïf et prêt à marcher au pas.
"son élection aussi large qu'inattendue ne s'explique pas sans l'indignation soulevée par l'agression caractérisée des Etats-Unis et de l'Angleterre contre l'Irak" Vous cédez à votre complexe américain, vous voyez le Grand Satan partout, même dans les élections iraniennes : si l'effet que vous dites a peut-être existé, la cause première de l'élection de l'éradicateur de Téhéran est l'abstention massive de ceux susceptibles de voter pour les réformateurs, a priopri, pour le peu qu'on en sait, par découragement face à un processus électoral largement biaisé.
RépondreSupprimerQuant à être prêt à marcher au pas : vous exagérez. J'ai des doutes depuis le début sur les choix par Israel. Cependant, je ne vois pas ce que j'aurais fait à la place des dirigeants israeliens (pas d'interlocuteurs pour discuter).
On peut espérer, si on est optimiste, qu'un des effets des événements actuels sera d'amener la Syrie à discuter avec Israel (et vice-versa).
Au fait, une part de l'opinion d'Israel a toujours adhéré à un "choc des civilisations".
RépondreSupprimerMais, aujourd'hui, il s'agit d'un objectif très terre à terre : se débarasser du Hezbollah, pour ne pas avoir à ses frontières le bras armé d'une future puissance nucléaire à velleités éradicatrices.
Alors c'est bien beau de sous-entendre que les Israeliens sont des abrutis qui suivent l'infame théorie bushiste (encore faudrait il que cette théorie soit idiote, ce dont je ne suis pas certain), mais que feriez vous à leur place ?
Pour ma part, je ne sais pas ce que j'aurais fait à la place des Israeliens.
Par contre, j'ai une idée assez nette de ce que nous, Français, devrions faire : nous contenter d'envoyer des convoi humanitaires.
Car, si nous poussons pour une trêve, nous aidons de facto le Hezbollah, ce qui ne me paraît pas dans notre intérêt (d'ailleurs, certains Libanais ont le même point de vue - http://www.libanoscopie.com).
C'est cynique, cruel, lâche, tout ce que vous voulez, mais les Etats ne sont-ils pas les plus froids des monstres froids ?
Pour que je pense qu'il est de bonne politique pour la France de pousser à une trêve, il faudrait que vous me montriez que les avantages du'une trêve pour la France (quels sont-ils ?) sont supérieurs à ses inconvénients (aider le Hezb).
Je persiste à penser que serait un marché de dupes un réglement qui n'aurait pas reçu explicitement et sincèrement l'approbation de la Syrie (avec un marchandage du genre "on promet de ne pas essayer de renverser votre dictature, on vous donne des sous mais en contrepartie, vous cessez de subventionner et d'armer le Hezbollah et de vous mêler la politique libanaise.") Un tel accord s'est déjà vu : c'est celui qui a été passé avec Khadafi (arrêt du terrorisme en échange de garantie de survie du régime).
Vous me direz aussi, tout à votre anti-américanisme, qu'il faut que les USA acceptent cette entorse flagrante à la "croisade démocratique". C'est difficile, mais nécessité fait loi et puis, l'accord avec la Lybie a été validé par un certain G. W. Bush. Tout espoir n'est donc pas perdu : si les USA savent choisir leur priorité, à savoir isoler l'Iran, ils seront gentils avec les satrapes syriens.
Je suis un incurable optimiste : de ce merdier, pourrait bien sortir quelque chose d'excellent pour Israel, le Moyen-Orient et les Libanais : un Liban authentiquement indépendant.
Vous avez toujours l'étiquetage facile.
RépondreSupprimerJe trouve inadmissible d'être traité d'anti-américain, peut-être plus encore que d'étatiste ou de collectiviste ! Il existe une bonne Amérique, honteuse de ses dirigeants actuels, et je m'en sens profondément solidaire.
Vous avez un souvenir complètement biaisé des élections iraniennes : Rafsandjani avait la cote auprès des sondages et de l'establishment islamiste, la victoire d'Ahmadinejad vient d'une lame de fond populaire et point du tout de l'abstention, et elle s'explique fort majoritairement et non marginalement par le fait que les gens simples (contrairement à Rafsandjani et sa clique qui faisaient la part du discours et de la démagogie bushiens) n'acceptaient pas d'être placés sur l'axe du mal avec menace d'invasion à la clé, ayant sous les yeux le spectacle du saccage de l'Irak.
Je vous dis qu'il ya un fait nouveau, que le gouvernement israélien lui-même place sa politique sous l'étiquette du choc Orient-Occident et vous me répondez que c'était déjà le cas d'une partie de l'opinion : parlons-nous la même langue ?
Vous êtes un va-t-en-guerre, même si vous vous en défendez. Il y a le feu, il menace de se propager à toue la terre, tous les hommes de bonne volonté doivent crier halte. Et dans l'article israélien que vous citez, la référence à Munich est à vomir.
>>Je trouve inadmissible d'être traité d'anti-américain, peut-être plus encore que d'étatiste ou de collectiviste ! Il existe une bonne Amérique, honteuse de ses dirigeants actuels, et je m'en sens profondément solidaire.
RépondreSupprimerVoilà, l'argument massue de tous les anti américains, décennie après décennie. Mais quand comprendrez-vous qu'aux Etats Unis, lorsqu'on élit un président, c'est qu'on veut le voir à la tête du pays?
Et en France, quand on crache sur le président américain, on crache de fait aussi sur ceux qui l'ont élu. Vous n'êtes solidaire que des M. Moore et autres menteurs et affabulateurs, pas du peuple américain.
Petite note au passage, car vous semblez vous aussi bien naïf : Sarkozy n'a pas grand chose de libéral.
Petite note pour DoMP : ce mécanisme est connu.
RépondreSupprimerJe suis pour la réforme en général, mais je suis opposé à chaque réforme en particulier.
Je ne suis pas anti-américain, mais aucune décision d'un gouvernement américain ne trouve grâce à mes yeux.
etc .
Oui, il faut avoir un point de vue singulier pour prendre Sarko pour un libéral (ce que n'a pas dit F. Delpla).
En fait, il s'agit d'un raccourci. En novlangue bien pensante, "libéral" est un terme péjoratif au sens très vague, qu'on peut traduire en français traditionnel par "que je n'aime pas et que je méprise à la limite de l'insulte" ; ce qui, concernant Nicolas Sarkozy, peut se comprendre.
"libéral" est dans la politique française l'équivalent de "con" dans la vie courante : ça veut tout dire et rien dire mais on sent bien que ce n'est pas un compliment. Il ne faut pas chercher plus loin.
DoMP, vous essayez de réconcilier le souvenir d'un ministre des finances interventionniste nommé Sarkozy avec l'idée que vous vous faites du libéralisme : vous êtes trop rationnel et trop précis.
"libéral" a simplement remplacé "bourgeois" dans le vocabulaire des socialistes et a tout aussi peu de sens, c'est un mot-malle de poste où on met tout ce qui dérange, gêne, résiste, disconvient, désapprouve, contredit ; c'est l'ennemi, la somme de toutes les peurs, le repoussoir, comme les dragons au Moyen-Age, si vous voulez.
Comme les dragons, c'est une chimère, dévorant tout crus les travailleurs, jetant les enfants à la rue, refusant de soigner les pauvres, laissant les vieux dans la détresse, prenant plaisir à licencier les braves fonctionnaires, etc .
D'ailleurs, pas plus que les dragons au Moyen-Age, personne n'a jamais vu un libéral dans un gouvernement de la Vème République, mais la simple évocation de cette hypothèse terrifiante suffit à faire tenir tranquille les enfants des jeunesses socialistes.
Tiens, j'ai oublié de poser une question : qu'est-ce qu'il a de si mensonger, l'article que j'ai mis en lien ?
RépondreSupprimerNe peut-on faire certains parallèles entre l'Iran atomique et l'Allemagne des années 30 (même si OK, comparaison n'est pas raison) ?
> volonté belliqueuse affichée
> éradication des juifs comme objectif
> les moyens de cette politique (la bombinette)
> un fort nationalisme
> un désespoir montant (les jeunes ont bcp de pbs) que le gouvernement essaie d'attribuer à l'ennemi extérieur
L'élément de comparaison le plus faible me semble être ce dernier : le désarroi iranien n'approche pas celui de l'Allemagne des années 30.
Je suis inapte à faire un // hitler -Ahmadinejad.