samedi, avril 28, 2007
Le Curtiss H75 au combat
Un numéro hors série du Fana de l'aviation est consacré au journal de marche entre aout 1939 et juillet 1940 de l'escadrille dite des Petits Poucets, équipée d'avions américains Curtiss Hawk H75.
La guerre fut perdue sans que les pilotes aient l'impression d'avoir démérité ni même d'avoir été vaincus.
La désorganisation de l'armée française et l'inadaptation à la guerre moderne furent telles que prédites par De Gaulle dans Vers l'armée de métier et dans La France et son armée et telles que décrites par Marc Bloch dans L'étrange défaite.
J'avais déjà consacré un texte à ces problématiques : Pourquoi l’échec de l’aéronautique française des années 30 ?
On remarquera qu'on est là à l'étape suivante de la réflexion : les gouvernants ont pris acte que l'aéronautique française n'était pas à la hauteur des exigences de la guerre imminente et ont décidé d'acheter américain.
La vaillance des pilotes n'a pas suffi, l'intendance si importante dans les guerres modernes n'a pas suivi. La France, sans être la Russie, n'a jamais été économe du sang de ses soldats, on préfère fatiguer les troufions et gaspiller leurs vies qu'embarrasser la cervelle des généraux de considérations triviales de logistique. Vauban, un ingénieur, le déplorait déjà (1).
Par exemple, des avions précieux ont été accidentés à cause de pistes mal drainées.
Les manuels d'entretien des avions ne sont arrivés en escadrille qu'en juin 1940, ce n'est pas mortel, on se débrouille, mais tout de même, c'est pénible, surtout pour des avions de fabrication étrangère.
Les H75, à parité avec les Me 109 en 1939, étaient surclassés en 1940, faute d'évolution.
Après les erreurs de logistiques, les erreurs d'organisation. La doctrine était figée : la chasse était vue comme une auxiliaire de l'armée de terre. Il en est résulté des chaînes hiérarchiques, embrouillées, redondantes et des zones d'opération trop étroites (un avion parcourt en dix minutes la distance qu'un bidasse fait en une journée).
Les Anglais et les Américains ont aussi commis des fautes (Too few, too late), mais ils avaient la Manche et la Pacifique pour leur donner le temps de se redresser.
Nous qui n'avions pas ces protections, nous nous devions d'être plus intelligents, plus ouverts, un peu comme les Finlandais le furent pour lutter contre les Russes. Nous ne l'avons pas été.
NB : je regrette amèrement que les deux seuls avions en état de vol représentant la guerre 1939-1940 coté français soient détenus l'un, le H75, par un Anglais, certes francophile, et l'autre par un Suisse, qui ont cependant tous deux eu le bon goût de peindre leurs engins aux couleurs françaises. Dormez bien, bonnes gens, l'Etat veille sur le patrimoine national.
(1) : j'en profite pour redresser une caricature : dans les armée allemandes depuis Bismarck, les différences de rang sont nettement moins marquées que dans l'armée française et les officiers ont plus proches de leurs hommes et, comme par hasard, plus préoccupés de logistique.
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