Je lis la biographie de Mongénéral par Jean Lacouture et j'y trouve beaucoup d'échos contemporains.
Prenons l'exemple du plan Pinay-Rueff.
Quelques mois après son retour au pouvoir en 1958, l'étatiste, du moins c'est ainsi qu'on le décrit, De Gaulle est convaincu par Jacques Rueff non seulement d'adopter un plan d'inspiration libérale (on dirait aujourd'hui, avec le sens de la mesure qui caractérise notre époque, «ultra-libérale»), mais également de mettre tout son poids derrière, contre l'avis même de ses ministres.
Il ne porte le nom d'Antoine Pinay, ministre des finances, que par raccroc, celui-ci ayant initialement menacé de démissionner si ce plan « excessif» était appliqué.
Ce plan «excessif et téméraire» qui était censé bousculer de pauvres Français fragiles et colériques, les mettant ainsi au bord de la révolution (ça ne vous rappelle rien ?), fut un grand succès.
Il fut aussi l'occasion de deux réparties gaulliennes. A un ministre qui lui disait : «J'ai peur de ne pas être d'accord.», Jupiter tonnant répondit : «Et moi, j'ai peur que vous ne soyiez plus ministre.»
A un autre qui arguait «Les Français vont crier.», la réponse auguste tomba «Et alors ?»
Le parallèle entre ce plan et ce qui semble désirable pour la France de 2007 est frappant :
> Dévaluation du franc de 17 % et De Gaulle en profite, en bon communicant, afin de frapper les esprits, pour passer au «nouveau franc». N'est-ce pas l'équivalent d'une sortie de l'Euro ?
> Restriction des déficits publics, malgré l'augmentation des dépenses militaires pour cause de bombinette, diminution des dépenses, augmentation des impots. Le Grand Charles aurait-il été effrayé par la diminution d'un tiers de l'effectif de la fonction publique qui me semble aujourd'hui nécessaire ?
> Libéralisation du contrôle des prix et suppression des barrières douanières. La révision du code du travail, la dé-bureaucratisation de la France et l'introduction de la retraite par fonds de pension sont-elles aujourd'hui plus difficiles ?
Le plus admirable, c'est que Charles De Gaulle n'était pas particulièrement compétent en économie. Pourtant il a choisi d'adopter et de promouvoir un plan que beaucoup d'experts considéraient comme extrémiste. Pourquoi ?
Le goût du défi n'est pas à négliger, mais, après tout, il avait d'autres défis à relever.
Le bon sens est l'élément essentiel : le plan Rueff était cohérent, clair, intellectuellement solide, en phase avec l'époque.
Mais le devoir d'Etat est l'élément décisif, le plus qui fait basculer la décision : De Gaulle a très bien senti que ceux qui attaquaient le plan Rueff n'étaient pas tous bas et médiocres, n'avaient pas tous un intérêt particulier à défendre, mais qu'ils défendaient tous une cause accessoire, la paix sociale, la tranquillité immédiate, par rapport à la grande cause, celle du pays et de son avenir.
On comprend bien ainsi en quoi les prétendus descendants de De Gaulle, qu'ils se nomment Chirac, Seguin ou Guaino, sont des usurpateurs : ils imitent le discours mais trahissent l'esprit.
Présentons les choses simplement : Charles De Gaulle aurait-il toléré le laxisme, l'affaissement, la veulerie, que représentent trente ans de déficits publics accumulés ? Une indication qui donnera la réponse : le budget de l'Etat français était en déficit depuis 1931 quand De Gaulle est arrivé au pouvoir.
Quel est le dernier homme politique qui a demandé aux Français un effort ? Et pas un effort pour subir, mais un effort pour aller de l'avant ? Non, on parle toujours de protéger, pour ne pas dire de materner. Nos politiciens, se muant en gardes-malades, nous méprisent sont en-dessous de leur tâche.
Ne pourrait on dire que « c'est avec chagrin que nous voyons ces hommes éminents se faire, en vertu d'une sorte de loyalisme à l'envers, non point des guides exigeants, mais des porte-paroles rassurants.»
Quand entendrons-nous de nouveau : «J’ai décidé de remettre nos affaires en ordre réellement et profondément. [...] Notre pays va se trouver à l’épreuve [mais] le rétablissement visé est tel qu’il peut nous payer de tout [...] Sans cet effort et ces sacrifices, nous resterions un pays à la traîne, oscillant perpétuellement entre le drame et la médiocrité.»
Vivement qu'un kador de la génétique prélève un peu d'ADN du Général, afin de le faire revenir à la vie ;-)
RépondreSupprimerUn expert comptable a mis en place en temps que ministre de l'économie un semblant de "normalité" dans les comptes de l'état. Ses efforts ont été repris par son successeur et le suivant s'est ...empressé de mettre tout ça à la poubelle.
RépondreSupprimerQui est l'expert comptable ?
Qui est son successeur ?
Qui est l'auteur du massacre et du point de départ de l'abyssale dette ?
Anonyme, je sens que vous brulez de nous donner la réponse.
RépondreSupprimerl'un d'eux est au FMI ...
RépondreSupprimerJe ne peux qu'être d'accord avec vous.
RépondreSupprimerMon seul souci est que je n'arrive pas à remettre la main sur la version intégrale du rapport Rueff-Armand de 1958. J'aimerai tant lire ce qu'ils écrivirent à propos des professions règlementées.
Si quelqu'un a une idée. Je suis preneur.
Arthuis / DSK /Fabius dans l'ordre
RépondreSupprimerLe General a fait en 58 ce qu'il a refusé de faire en 44/45.
RépondreSupprimerAttendons 2021 avant de juger...
Charles