Cette question très généreuse est posée dans un article à paraître dans le journal Le Monde de cet après-midi.
A mes yeux, elle est symptomatique de ce qui ne va pas dans la gauche française : on remplace par les bons sentiments et par une utopie qui n'a aucune chance d'advenir une analyse et des décisions qui permettraient de débloquer une situation néfaste.
Les problèmes de l'immobilier en France sont essentiellement dus à une pénurie de foncier et de bâti organisée par l'Etat et à un système HLM qui aide les logements au lieu d'aider les personnes.
Quand on me dit «Et si chaque citoyen aidait un SDF ?», je réponds par le proverbe chinois «Si vous voulez vous faire un ennemi, donnez lui du poisson. Si vous voulez vous faire un ami, apprenez lui à pécher.»
Le problème n'est pas un manque de charité (même si nos gauchos, à l'instar des vieux cathos, adorent faire la charité, ils peuvent ainsi conforter leur risible complexe de supériorité morale), le problème est de vivre selon des lois qui laissent l'immobilier libre de se développer.
On en revient à Hayek : une société de plusieurs millions d'individus ne saurait être basée sur la charité et sur la solidarité, qui sont des valeurs tribales ou villageoises (ce qui n'empêche évidemment pas de les pratiquer individuellement, mais rend dangereux d'en faire le principe d'une société moderne), une société moderne doit être basée sur des lois simples et claires, identiques pour tous, qui laissent les individus libres de prendre leurs responsabilités et de construire leur vie.
Je crois hélas que cette base du libéralisme est inaccessible à nos gauchistes : ils sont trop bêtes ou trop pétris de certitudes. Depuis soixante ans qu'on applique aux HLMs un système proche du socialisme, croyez vous que les socialistes prendront sur eux l'échec du logement des pauvres et feront leur mea culpa ? Pas du tout, toujours contents d'eux, ils estiment que la faute est de ne pas s'être enfoncé encore assez profondément dans l'erreur, qu'il faut toujours plus de socialisme pour régler les difficultés créées par le socialisme. Comprenne qui pourra.
Ils continueront donc à nous souler de mots ronflants «solidarité», «comportement citoyen» et autres billevesées, tout en favorisant dans les faits des politiques conservatrices qui bloquent l'ascension sociale.
Addendum : maintenant que l'article a été publié, c'est encore pire que ce je pensais en lisant le mail de ce matin décrivant le contenu du journal de l'après-midi. On a même droit au cliché anti-nazi.Les bons sentiments n'ont jamais fait une bonne politique, il arrive aussi qu'ils servent de cache-misère à une mauvaise politique. C'est le cas s'agissant du logement.
A ce sujet, achetez et faites acheter ce livre fondamental, qui expose les causes de la pénurie de logements en France depuis... 1914, et préconise des remèdes concrets (et aussi réalistes politiquement qu'il est possible).
RépondreSupprimerhttp://www.crisepublique.fr/
En gros, c'est pas compliqué: il faut faire exactement le contraire de ce qu'on fait sans interruption depuis 1914; le contraire de ce que tout le monde dit qu'il faut faire, de la droite à la gauche en passant par l'abbé Pierre.
C'est précisément parce que l'Etat dépense des milliards pour le logement social que les gens ne trouvent pas à se loger.
C'est précisément parce que l'Etat multiplie les lois de protection des locataires que ceux-ci n'arrivent pas à se loger.
C'est parce qu'on fait passer la prétendue préservation de l'environnement (qui est surtout l'environnement des propriétaires) avant le logement des SDF que ces derniers se retrouvent à la rue.
Ce sont les lois rendant les terrains non constructibles qui entretiennent la pénurie de logements et font exploser les prix. Etc, etc.
Ce sont les prétendus remèdes qui créent la maladie.
Concernant la question spécifique des SDF, on remarquera que de nombreux témoignages de connaisseurs du sujet (y compris de SDF eux-mêmes) disent à demi-mot que le problème d'un grand nombre d'entre eux n'est pas vraiment celui du logement (en tous cas pas principalement), mais avant tout un problème de pathologie mentale qui les conduit à cette forme de semi-suicide (dépression,drogue, alcool...).
Curieusement, personne ne s'appesantit sur cette question, comme si le dolorisme était obligatoire, comme s'il fallait absolument préserver la capacité d'indignation publique contre les gouvernements qui n'en font jamais assez, comme s'il fallait entretenir ce scandale permanent pour faire saigner les petits coeurs de gauche et les faire s'esbaudir de leur bonne conscience.
Vous vous doutez bien que je suis d'accord avec vous.
RépondreSupprimerMais l'immobilier (plans d'urbanisme, permis de construire, distribution de logements HLM) est un pouvoir extrêmement prisé des maires. Or, dans notre merveilleux système, les députés et les ministres sont maires, ou le redeviendront.
Il n'y a donc aucune chance que les problèmes de l'immobilier soient résolus.
Les lamentos et les bons sentiments continueront donc à éviter de remettre en cause le système actuel.
C'est un schéma bien connu en France : une charité de pacotille couvre le conservatisme.
D'une manière générale, nous sommes habitués, hélas, à des gouvernements menteurs. Ils mentent sur les vrais problèmes.
Le gouvernement Sarkozy tente un effort de vérité sur la dette publique, mais c'est parce qu'il est coincé et, de toute façon, il ne va pas au bout de l'analyse.
La phrase de Reagan «L'Etat n'est pas la solution, c'est le problème.» a trente ans mais reste incompréhensible aux trois quarts des Français et des politiciens (plutôt 99 % pour les politiciens).