Même si nous y verrons plus clair dans quelques années, il me semble approprié de faire un point sur ce que l'on sait ou, du moins, sur ce que je comprends.
Les causes
> une bulle immobilière gonflée par les Etats, notamment l'Etat américain.
> une régulation bancaire inadaptée et déresponsabilisante.
> le crédit trop facile, des taux trop bas.
On peut penser, comme Loïc Abadie, qu'il s'agit d'un excès collectif de confiance (et j'ajoute, corrélativement, d'irresponsabilité).
Les conséquences
> une mauvaise évaluation du risque et une diffusion opaque de celui-ci, engendrant une perte de confiance globale des financiers.
> des créances douteuses à la tonne.
Pour résumer, beaucoup d'argent a été beaucoup trop mal utilisé.
Que penser des mesures actuelles ?
Quand on prend du recul, le comportement des gouvernements est fort étrange.
Il n'y a pas unanimité sur les causes de la crise, mais, en tout cas, tout le monde est d'accord qu'il s'agit d'une crise de solvabilité : les boites en difficulté, banques et autres, le sont parce qu'elles se sont endettées afin d'investir dans des choses qui se révèlent pas assez rentables pour leur permettre de rembourser cette dette.
Dans une telle situation, la solution est bien connue : l'apurement des dettes. Cela passe par des ventes d'actifs, des négociations avec les créanciers, des ré-échelonnements de dettes, des dépôts de bilan, des mises en faillite, des liquidations.
Bien sûr, une crise de ce type provoque de la déflation, c'est-à-dire une baisse générale des prix (ça a déjà commencé, avec la bourse et l'immobilier), puisque tous ceux qui sont sur-endettés veulent vendre quasiment à n'importe quel prix, pour sauver leur peau.
La déflation est extrêmement dangereuse car elle paralyse l'économie : pourquoi acheter, pourquoi investir maintenant, alors que ça sera moins cher demain ?
Le problème des gouvernements est donc simple à poser : comment faire que l'apurement des dettes se déroule le moins mal possible, c'est-à-dire avec le moins de déflation ?
Plusieurs solutions ont été proposées : augmentations de capital bradées souscrites par l'Etat, conversion forcée par la loi des dettes en capital, laisser les banques faire faillite en garantissant un minimum les déposants, etc ... Toutes avaient plus ou moins pour point commun de faire payer les responsables (à part les responsables étatiques), les créanciers et les actionnaires imprudents.
Or, d'une manière générale, ce n'est pas la voie que les gouvernements ont choisie. Ils ont décidé, par différents artifices, par des voies plus ou moins droites, de reprendre à leur compte les créances douteuses, de transformer, à l'aide d'assistances financées par la dette publique, des dettes privées en dettes publiques. C'est ce que signifient les différents plans de relance.
Ce faisant, ils ont choisi de faire évoluer une crise de l'endettement privé vers une crise de l'endettement public. Ca n'a pas de sens. C'est pourquoi je qualifie le comportement des gouvernements d'étrange.
Comme c'est à la fois immoral (pourquoi celui qui est vertueux, le contribuable qui a su préserver son capital et son travail, paierait-il pour celui qui a failli ?) et inadéquat, cela ne peut que déclencher des effets qu'on qualifiera à tort de pervers, alors qu'ils ne sont que la conséquence directe et prévisible de mauvaises mesures.
L'un de ces effets les plus comiques (à condition d'avoir un fort humour noir) est la course à la palme du plus mauvais bilan : pour escroquer le maximum d'argent au couillon étatique, un dirigeant consciencieux doit expliquer que sa boite est dans une situation catastrophique et que sa faillite entrainerait elle-même une catastrophe cataclysmique. C'est la prime au très mauvais élève.
Regardez les fabricants américains d'automobiles, ils sont sont en train de nous faire une numéro du plus mauvais éléve de la terre absolument époustouflant. J'espère que les autorités américaines, Présidence et Congrès, ne cèderont pas à ce chantage, mais je suis très loin d'en être sûr.
La voie était étroite, et les gouvernements ne me semble pas avoir fait le bon choix.
Quid de l'avenir ?
Maintenant que les dettes privées sont en train de se transformer en dettes publiques, les Etats ne vont pas pouvoir supporter très longtemps leur endettement sans réagir car, pendant la crise, le vieillissement des populations continue et les systèmes de retraite seront bientôt en péril, je ne vois que deux solutions :
> la grosse catastrophe : une banqueroute des Etats les plus fragiles. A la lueur des précédents historiques, la solution la plus sûre pour les citoyens de ces Etats serait l'émigration (va falloir apprendre à parler Chuisse).
> la petite catastrophe : une forte inflation jusqu'à résorption des dettes les plus criantes.
Mais, avant d'en arriver là, il y aura sans doute une période de rémission, vers 2009-2010, qui fera croire aux plus optimistes (ou incompétents ?) que la crise est derrière nous.
Une fois les dettes purgées, nous serons repartis pour 50 ans de croissance (et vive le capitalisme). Jusqu'à la prochaine crise.
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