Il y a un article dans Causeur sur la peine de mort au Japon.
J'étais opposant à la peine de mort (Victor Hugo m'a mis beaucoup de conneries dans la tête). Puis, j'ai lu Romain Gary, qui n'est pas un barbare assoiffé de sang : l'homme étant ce qu'il est, on peut douter une société qui n'a pas le courage de tuer (oui, au risque de se tromper) pour faire respecter ses lois survive très longtemps.
La peine de mort est un message, non pas tant vers les meurtriers potentiels, que vers l'ensemble de la société : cette société sera défendue quoi qu'il arrive. La peine de mort est l'incarnation suprême de la phrase de Goethe : «Mieux vaut une injustice qu'un désordre».
Notre société maternée erre dans le rousseauisme : elle a non seulement perdu l'habitude de la dureté, mais la conviction de sa nécessité. Le mal qui est en l'homme (le péché originel comme diraient les chrétiens) demande pourtant à être réprimé sous peine d'anarchie (dont les plus faibles sont toujours les victimes).
D'ailleurs, depuis que les thèses criminophiles tiennent le haut pavé, on observe une augmentation de la criminalité. Si les meurtres sont constants, c'est que les services de secours sont plus efficaces, il y a plus de victimes sauvées in extremis, mais les tentatives de meurtres augmentent.
J'en viens à considérer que le rétablissement de la peine de mort serait un signe de la sortie du maternalisme. Malheureusement, rétablir la peine de mort serait si difficile qu'on ne s'y résoudra que lorsqu'on sera tombé dans l'anarchie (je veux dire : encore plus qu'aujourd'hui).
Je ne suis pas plus un sanguinaire que les opposants à la peine de mort. Mais l'anarchie qui vient m'apprend la valeur de l'ordre et le besoin de le faire respecter, à un prix élevé, même si ce prix doit être la mort éventuelle d'un innocent (après tout, il y a bien d'autres innocents qui meurent, pour des raisons moins pressantes).
Bonjour,
RépondreSupprimerConcernant Hugo, il me semble utile de rappeler que ce dernier était contre la peine de mort...sauf contre ses ennemis politiques!
Source: l'historien Jean des Cars dans "Les Historiens et la légende noire du Second Empire" sur le site de l'Institut de France.
http://www.canalacademie.com/ida148-Les-Historiens-et-la-legende-noire.html?var_recherche=l%E9gende%20noire
Je propose que Franck Boizard soit le premier innocent à qui on appliquera la peine de mort, dont il réclame le rétablissement.
RépondreSupprimerAprès tout, puisqu'il se fait très bien à l'idée que des innocents soient injustement condamnés, il sera bien forcé de convenir qu'il n'a rien à redire à être le premier d'entre eux.
Je suis d'accord avec le diagnostic général concernant le délitement de notre société. Cependant, je ne vois pas en quoi l'application de la peine de mort serait un message plus efficace à l'encontre des meurtriers que l'application stricte des lois existantes. La perspective de passer le restant de ses jours derrière des barreaux ne me paraît ni très réjouissante ni motivante pour commettre des meurtres.
RépondreSupprimerEn revanche, la peine de mort, par le risque qu'elle nous fait courir de punir des innocents, nous fait porter à tous, en tant que membres de la société, la responsabilité de ces morts, qui, en définitive, deviennent des meurtres légalisés.
Et la morale ? Et l'éthique ?
Cher Anonyme,
RépondreSupprimerComme la plupart des commentateurs anonymes, vous êtes un imbécile.
Je ne m'y fais pas «très bien». Je m'y fais, c'est tout.
Mais je doute que, pétri de vos certitudes et de votre complexe de supériorité morale, vous soyez à même de comprendre cette nuance.
DoMP,
RépondreSupprimerLa peine de mort est anti-indidualiste. Le message de la peine de mort est : «L'ordre dans la société est plus important que la vie d'un homme.»
C'est à chacun de juger de la pertinence de ce message et de la nécessité de le faire passer.
Moi je ne m'y fais pas... Pour le coup, je suis plutôt "mieux vaut un coupable en liberté qu'un innocent exécuté". On peut libérer un prisonnier en cas d'erreur judiciaire, même si c'est dix ans après (et ça arrive régulièrement...) mais pas recoller une tête...
RépondreSupprimerEn outre, dans l'état actuel des choses, il me semble que le problème n'est pas tant que les peines ne sont pas assez sévères, mais plutôt qu'elles ne sont pas appliquées. Qu'est ce que ça change, par exemple, que le viol soit puni de 7 ans de prisons ou de mort, si de toute manière on préfère taper sur les doigts des coupables et les sermonner avant de les relâcher ?
Enfin pour ce qui est du message qu'envoie la société ("elle sera défendue à tout prix"), le fait de ne pas avoir la peine de mort est aussi un message : tuer est mal, que ce soit un citoyen qui tue un citoyen ou la société qui tue un citoyen. De la même manière, je ne serais pas pour violer les violeurs ou pour torturer les tortionnaires. Si c'est interdit, c'est interdit pour tous. Enfermer les éléments dangereux dans une petite boîte me semble bien suffisant. (SI on les y enferme en effet...)
Vous me direz que vu comme ça, si tuer est mal même pour la société, je devrais être contre la guerre... Mais non, pas si c'est de la légitime défense. De la même manière que je suis contre la peine de mort tout en considérant qu'une personne attaquée a parfaitement le droit de tuer son agresseur, au diable la réponse proportionnelle...
Enfin il me semble que l'argument de l'effet dissuasif de la peine de mort est infondé, et qu'elle ne diminue pas la criminalité. Mais je vous accorde que ça fait partie des choses que j'ai entendues toute ma vie sans me renseigner davantage...
Mais elle l'est rétablie, la peine de mort.
RépondreSupprimerDans le projet de constitution européenne elle y figurait, et comme celle-ci fut reprise par la forfaiture du traité dit de Lisbonne
" l’article 2 («droit à la vie») de la nouvelle Charte des droits fondamentaux dispose que «nul ne peut être condamné à la peine de mort ni exécuté.»
mais dans un passage en petits caractères on trouve les exceptions:
«La mort n’est pas considérée comme infligée en violation de cet article dans les cas où elle résulterait d’un recours à la force rendu absolument nécessaire:
a) pour assurer la défense de toute personne contre la violence illégale;
b) pour effectuer une arrestation régulière ou pour empêcher l’évasion d’une personne régulièrement détenue;
c) pour réprimer, conformément à la loi, une émeute ou une insurrection.»
Tient donc, toute personne que l'on considérerait comme insurgé contre cette UE pourrait donc "légalement" être mis à mort !
Franck, le message "L'ordre dans la société est plus important que la vie d'un homme." ne passe pas seul. Il passe aussi, entre autres avec ceux-ci :
RépondreSupprimer"L'état a le droit de vous tuer, même innocent, s'il respecte les procédures qu'il édicte lui-même"
et
"L"individu n'est rien sinon en tant que membre d'un groupe"
Vous savez comme moi que ce que ces messages portent d'horreur potentielle.
«Vous savez comme moi que ce que ces messages portent d'horreur potentielle. »
RépondreSupprimerCela me semble, sur le long terme, un des legs les plus néfastes des totalitarismes du XXème siècle : l'Etat ne peut plus assurer ses fonctions régaliennes d'une manière claire, directe, brutale, adulte sans aussitôt être soupçonné des pires errements.
Alors l'Etat est plus présent que jamais, mais en douceur, en infantilisant, en manipulant.
Je crois qu'on y perd beaucoup : je préfère un Etat léger et sévère à un Etat envahissant et «gentil».
Je suis convaincu qu'il y a des hommes qui méritent d'être retiré de la société, qui, par ce qu'ils ont fait, ont perdu le droit de vivre.
Qu'est-ce qu'on est fait ? On les tue ou les abrutit pendant trente ans de médicaments puis on les relâche en espérant qu'ils se seront ramollis ?
«En outre, dans l'état actuel des choses, il me semble que le problème n'est pas tant que les peines ne sont pas assez sévères, mais plutôt qu'elles ne sont pas appliquées. »
Vous avez raison, mais on peut demander deux choses à la fois : des peines appliquées et sévères.
Tiens ?
RépondreSupprimerOn reparte de la peine de mort et, tel les escargots après la pluie, tous les bisounours à grrrosse qu..conscience sont de sortie.
D'autres humains aussi doués d'intelligence ont une vision nettement différente de ces choses-là. Et, en parcourant les Etats Unis au fil des ans, je ne peux que remarquer qu'une nette restauration de la peine capitale est votée dans la grande majorité de ces Etats.
Il doit surement y avoir une bonne raison !!!
Obsédé,
RépondreSupprimerVous êtes complètement louf ! Prendre les USA, ce pays satanique, en exemple pour quoi que ce soit : vous allez vous faire lyncher.
On en revient à ce que je disais : l'oubli de la nécessaire dureté pour maintenir une civilisation.
A noter que dans le fil de Causeur, certains nauséabonds remarquent que les abolitionnistes sont aussi partisans de l'avortement facile et de l'euthanasie aisée et qu'il y a peut-être là une contradiction.
J'ai l'impression qu'ils ont touché une corde sensible.
A propos de l'avortement, je me souviens d'une remarque d'un de mes profs, pourtant de gauche : «Il se peut que, dans quelques générations, nous soyons vus comme des génocidaires, pour avoir non seulement légalisé, mais subventionné et encouragé l'avortement».
Franck,
RépondreSupprimerL'état n'a nul besoin ni d'être totalitaire, ni d'être du XXème siècle pour faire preuve d'un flagrant déni de l'individualité de chacun du se son droit à la vie.
Au contraire, même. Car il n'y a guère que dans l'occident moderne (au sens large, géopolitique) que les droits élémentaires des hommes ont été respectés.
Je vous accorde que depuis, dans de nombreux pays, nous nous sommes engagés sur la pente glissante de la route de la servitude, mais ce n'est pas, à mon sens, une raison de valoriser l'excès d'autorité.
C'est d'ailleurs le drame des démocraties modernes, de ne pas être capables de se cantonner au rôle régalien de l'état, d'envahir toute la sphère privée, d'infantiliser et de déresponsabiliser à tout va, tout en cessant d'être ferme dans les domaines qui sont pourtant les leurs.
Cependant, bien que je partage votre analyse concernant ces états à la fois envahissants et mous, je refuse leurs contrepartie de légerté et de force. Etre ferme devrait suffire. Enfermer à vie un assassin ne me pose guère de problème. Le message est très fort également. Le bagne peut même s'entendre. Mais pas l'assassinat légal. Ce chemin-là mène à des enfers qui n'ont pas tant attendu le XXème siècle pour exister que pour être reconnus comme tels.
Obsédé textuel :
On peut être opposé à la peine de mort et n'être pas un Bisounours. Envisagez seulement que la position morale que je tiens, sans être nécessairement donneuse de leçon, peut cependant être rigoureuse et profonde.
"Il doit surement y avoir une bonne raison"
Ah? Forcément. Oui. La raison ne peut être que bonne.
...
Parce que ?
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
RépondreSupprimerDepuis quand "eux ils font comme ça" est une raison suffisante ? A ce compte là, je peux vous dire "de nombreux pays en Europe sont en train de légaliser le mariage homosexuel, y'a sûrement une raison"...
RépondreSupprimerPassons sur le "bisounours". Je ne trouve pas la peine de mort "méchante", je trouve qu'elle ouvre la porte à des injustices terribles. Respecter une justice dure, je suis d'accord ("je préfère un État léger et sévère à un État envahissant et «gentil»." tout à fait d'accord aussi). Mais respecter une justice injuste, eh bien, ça coince. D'ailleurs je ne respecte plus la justice de ce pays à cause de ça.
Pour la comparaison avec l'euthanasie elle ne me semble guère appropriée, il s'agit plutôt de suicide, dans la majorité des cas. Personnellement je tends à penser que l'euthanasie a toujours existé, c'est un petit secret entre le docteur et son patient désespéré, ça existe sans être légal et c'est suffisant.
Enfin pour l'avortement, la contradiction peut tout à fait être résolue.
D'abord, on peut considérer que le fœtus n'est pas un individu, donc que ce n'est pas du tout un meurtre, tant qu'il n'a pas un système nerveux fonctionnel et des pensées.
Mais je partirai de l'hypothèse que c'est un meurtre. D'ailleurs en tant que femme, si j'avortais, j'aurais beau me dire "il n'était pas conscient", j'aurais l'impression de commettre un meurtre.
Il s'agit seulement de considérer que ce meurtre là, le meurtre commis par une femme sur un être qui fait encore partie de sa propre chair, est acceptable. Que c'est un moindre mal.
Le problème posé par la peine de mort, de risquer de tuer des innocents, ne se pose pas avec l'avortement.
Bien sûr, certains sortiront toujours les mouchoirs pour dire que tout bébé est un innocent. Mais aux yeux de la société, tuer quelqu'un qui n'existe pas encore vraiment, ça n'a pas l'impact que peut avoir le fait de tuer un individu adulte malgré ses protestations d'innocence et de se rendre compte cinq ans plus tard que oups, oui, il disait vrai...
Ou pour le dire autrement, l'avortement me semble insupportable, mais c'est une décision privée qui ne concerne que la mère (et éventuellement le père). La peine de mort me semble insupportable et concerne la société.
Mon explication est probablement encore bancale, mais je n'avais jamais avant aujourd'hui analysé la ressemblance entre avortement et peine de mort. Ces sujets peuvent paraître proches, mais je les ai toujours perçus comme tout à fait différents.
Franck, excusez moi, j'aurais peut être du aller écrire ces tartines sur mon propre blog, mais j'y ai déjà parlé d'avortement récemment, on va croire que ça m'obsède.
La justice, d'une manière générale, n'est pas intrinsèquement injuste, elle est humaine donc faillible, y compris en cas de peine de mort.
RépondreSupprimerIl se trouve que, depuis quelques années, la justice des pays européens dérive dans une direction que le bon sens considère injuste. Il n'est pas rare d'entendre des juges expliquer, d'une manière plus ou moins subtile, que leur mission est de protéger les criminels. C'est gravissime : ce n'est plus une justice reposant sur des principes justes à l'application imparfaite, c'est une justice aux principes carrément injustes, alors l'application ...
Mais cette évolution est nécessairement passagère, puisque si elle va jusqu'à son terme, il n'y aura plus de justice (à part quelques tribunaux islamiques). Le processus est d'ailleurs bien avancé.
Revenons à la peine de mort. Pour résumer mon argument : je suis de plus en plus convaincu que l'abolition de la peine de mort fait partie d'un contexte d'amolissement de la société qui la met en péril. En effet, je suis d'accord avec Julien Freund : l'essence du politique est le conflit. Une société ramollie n'appelle la paix universelle mais l'attaque, externe ou interne.
C'est pourquoi tous les arguments pour ou contre la peine de mort n'enlève pas à mes yeux sa vertu fondamentale : un condamné exécuté, c'est un criminel de moins en vie (aux erreurs judiciaires près).
Certes, ce n'est pas «sympa» pour le condamné, mais il fallait y penser avant d'assassiner.
Je remarque chez la plupart des abolitionnistes une incohérence qui mériterait d'être sondée scrupuleusement : ils sont contre la peine de mort pour des crimes civils, mais pas contre la peine de mort pour des crimes politiques. Cela est évident par omission : il n'y a pas à ma connaissance d'abolitionnistes qui aient protesté contre l'exécution d'Eichmann.
Clarissa,
Il y a chez les abolitionnistes une contradiction : une sensibilité exacerbée à la vie des criminels et une insensibilité tout aussi exacerbée à la vie des foetus.
On pourrait s'attendre à ce que la sensibilité ou l'insesibilité soient égales dans les deux cas.
Vous me permettrez de trouver qu'il y a là sujet à s'interroger. N'est-ce pas une ruse du Malin que d'inverser à ce point les valeurs ?
Comme j'essayais de l'exprimer, je me sens plus sensible à l'égard de la vie d'un fœtus qu'à l'égard de la vie d'un criminel. (Même si je n'irais pas jusqu'à parler d'insensibilité quant à la vie de tout homme, même criminel.)
RépondreSupprimerCe n'est pas une question de sentiments mais bien de raison : l'interdiction de l'avortement me semble avoir des conséquences plus négatives que son autorisation ; l'inverse pour la peine de mort.
Quant aux ruses du malin, j'ai tendance à ne pas trop les prendre en comptes, désolée.
Ceci dit je comprends ce que vous voulez dire. C'est vrai qu'il peut être agaçant de voir des gens affirmer de manière péremptoire qu'un fœtus n'est pas en vie et clore le débat avec ça... Comme si on savait exactement à quel instant, à partir de quel mouvement on passe de l'inanimé au vivant...
RépondreSupprimerLes anti-européistes ont fait beaucoup de foin autour de cette disposition du traité de Lisbonne qui autorise la peine de mort, en insinuant que cela servirait à condamner à mort les opposants à l'intégration européenne.
RépondreSupprimerEn réalité, elle ne fait qu'entériner les législations existantes. Tous les pays, je suppose, et c'est le cas de la France, avaient et ont encore des dispositions législatives pour des situations exceptionnelles (état d'urgence, atteinte à la sûreté de l'Etat, espionnage en temps de guerre, etc).
On sera bien contents d'avoir cette possibilité le jour où l'armée devra tirer sur des milices islamiques.
D'autre part, le même texte prévoit la légalité de la légitime défense, même si elle conduit à la mort de l'agresseur.
Ca, les anti-européistes ne l'ont pas remarqué.
Très bonne réflexion. Je suis moi-même épris d'un rejet fort, dogmatique, de la peine de mort. Mais force m'est de constater que tes arguments sont justes, et que deuxièmement le message fort qu'il existe des choses inacceptables, inhumaines, et qui conduisent une société d'individus à en supprimer un n'est pas un message anodin, en tout cas pas dénué de sens...
RépondreSupprimerJe suis personnellement favorable à la peine de mort, pour les raisons citées par Franck et par souci d'économie. Contrairement à une idée bien répandue, il est effectivement moins couteux d'éxécuter un homme même après 10 appels et contre-enquêtes que de le maintenir à vie dans une prison de très haute sécurité.
RépondreSupprimerCeci étant dit, j'ai remarqué (et ce débat en est la parfaite illustration) que c'est le second sujet après l'avortement qui divise le camp réac'/nationaliste, c'est pourquoi je ne l'évoque jamais en public, même avec des personnes du même courant de pensée.
Si demain l'on appliquait strictement les lois existantes et que l'on instaurait une réelle perpétuité, je pourrais vivre avec cette idée et je ne ferais pas de la peine de mort un casus belli.
Sur les erreurs judiciaires: elles restent très rares et la plupart des états américains ont modifié leur législation sur le sujet afin d'offrir toutes les garanties au condamné. D'abord, si le jury n'est pas unanime (hang jury ou deadlocked jury), c'est prison à vie ou bien mistrial donc un nouveau procès.
Dans certains états, si la peine de mort est effectivement ordonnée, c'est l'Etat qui fait appel automatiquement du jugement.
Ca plus les divers recours, à part Timothy McVeigh, je n'ai pas souvenir d'un condamné à mort qui ait été mis à mort avant au moins 15 ans après son jugement (largement de quoi l'innocenter avec les moyens modernes d'investigation).
«Si demain l'on appliquait strictement les lois existantes et que l'on instaurait une réelle perpétuité, je pourrais vivre avec cette idée et je ne ferais pas de la peine de mort un casus belli.»
RépondreSupprimerJe suis d'accord : la peine de mort ne me semble ni une priorité ni un préalable.
Je la vois plutôt comme un symbole : le jour où l'on rétablira la peine de mort en France signifiera qu'on a enfin mis à bas le maternalisme.
Se faire son opinion sur un sujet comme la peine de mort n'est pas aisé car nous sommes dans l'abstraction.
RépondreSupprimerOn a une opinion sur son rôle éventuel dans la société, mais la question principale qu'il faut se poser individuellement : Si le cas se présente, aurais-je le courage d'appuyer sur le bouton ?
A partir du moment on l'on se sent capable de le faire, on peut y être favorable,car derrière la société, c'est moi en tant qu'individu.
Combien de personnes se délectant d'un bon steack aurait le courage aujourd'hui d'assister à l'abattage d'un boeuf?
Assurément peu, car notre société a mis le voile sur la mort en la rendant abstraite.
L'abstraction est une donnée importante dans cette problématique,car elle dilue la responsabilité individuelle.( cf tous les grands dictateurs).
Franck :
RépondreSupprimer"je suis de plus en plus convaincu que l'abolition de la peine de mort fait partie d'un contexte d'amollissement de la société qui la met en péril"
C'est possible. Dans ce cas, j'en déduirais seulement qu'à toute chose, malheur est bon. Tout n'est quand même pas à jeter dans notre société moderne. Si ?
"il n'y a pas à ma connaissance d'abolitionnistes qui aient protesté contre l'exécution d'Eichmann."
Je n'étais pas né. Et c'était en Israël. Je ne me sens pas lié par ce passé. Cela se déroulerait-il aujourd'hui en France, je m'y opposerais, car il faut être cohérent.
J'ai toujours détesté l'argument disant qu'il faudrait réserver la peine de mort aux crimes les plus horribles et aux cas où le doute est absent. C'est idiot, à mon sens. Si l'absence de doute était garant de vérité, l'erreur ne serait pas humaine et nous autres humains serions plus souvent d'accord entre nous.
La seule position morale défendable en faveur de l'abolition de la peine de mort, c'est qu'elle soit complète, sans exception. Si je peux comprendre pourquoi Göring fut condamné à mort à Nuremberg, je n'accepterais pas qu'il le fût aujourd'hui, alors que l'enfer des passions nous laisse plus de répit qu'à l'époque.
Je voudrais par ailleurs préciser que ma position n'indique aucunement une quelconque "sensibilité" à l'égard des criminels. Ils sont la lie de la société et doivent être sévèrement punis. Si, par un moyen magique, on pouvait s'assurer que jamais un innocent ne serait condamné à mort, mon argument majeur contre cette peine s'envolerait. Mais nous sommes humains. Faillibles. Et la société, en faisant passer le message que vous ou moi pouvons nous retrouver dans le couloir de la mort parce que notre voisin a fauté fait passer le message que nous ne valons rien par nous mêmes. Je ne veux pas que des innocents soient des pertes tolérables de ce système.
Robert :
Il y a une nette différence entre pratiquer la peine de mort, qui résulte d'un processus froid et réfléchi, et le droit à la police et l'armée de tirer pour tuer dans le cadre de leurs fonctions.
La position morale n'est pas la même, je suis sûr que vous en percevez les nuances.
Ribellu :
L'argument économique est un faux argument. On ne devrait pouvoir s'opposer à la peine de mort que pour des considérations morales. Et, quant à moi, ma morale n'est pas à vendre.
Il se trouve cependant qu'aux Etats-Unis, une condamnation à mort coûte plus cher à l'état qu'une perpétuité, à cause de tous les recours possibles, de la durée de ceux-ci, et des conditions particulières dans lesquelles les condamnés sont gardés en prison durant ce temps. Mais les Etats-Unis ne sont pas tous les pays, et la question du coût est de très mauvais goût, à mon avis.
Qu'il puisse être trop cher de ne pas tuer des innocents que révulse. Pas vous ?
Franck :
"Je la vois plutôt comme un symbole : le jour où l'on rétablira la peine de mort en France signifiera qu'on a enfin mis à bas le maternalisme."
C'est vrai. Mais c'est un peu cher le symbole. La morale n'est pas symbolique, elle.
teddy bear :
Nul besoin d'être capable d'être gardien de prison pour en accepter le principe. Je ne vois pas pourquoi l'argument serait valable pour le bourreau dans le cas de la peine de mort. Mais vous avez dit quelque chose d'essentiel : La peine de mort nous engage tous personnellement, au travers de notre appartenance à la société.
Franck :
RépondreSupprimer"je suis de plus en plus convaincu que l'abolition de la peine de mort fait partie d'un contexte d'amollissement de la société qui la met en péril"
C'est possible. Dans ce cas, j'en déduirais seulement qu'à toute chose, malheur est bon. Tout n'est quand même pas à jeter dans notre société moderne. Si ?
"il n'y a pas à ma connaissance d'abolitionnistes qui aient protesté contre l'exécution d'Eichmann."
Je n'étais pas né. Et c'était en Israël. Je ne me sens pas lié par ce passé. Cela se déroulerait-il aujourd'hui en France, je m'y opposerais, car il faut être cohérent.
J'ai toujours détesté l'argument disant qu'il faudrait réserver la peine de mort aux crimes les plus horribles et aux cas où le doute est absent. C'est idiot, à mon sens. Si l'absence de doute était garant de vérité, l'erreur ne serait pas humaine et nous autres humains serions plus souvent d'accord entre nous.
La seule position morale défendable en faveur de l'abolition de la peine de mort, c'est qu'elle soit complète, sans exception. Si je peux comprendre pourquoi Göring fut condamné à mort à Nuremberg, je n'accepterais pas qu'il le fût aujourd'hui, alors que l'enfer des passions nous laisse plus de répit qu'à l'époque.
Je voudrais par ailleurs préciser que ma position n'indique aucunement une quelconque "sensibilité" à l'égard des criminels. Ils sont la lie de la société et doivent être sévèrement punis. Si, par un moyen magique, on pouvait s'assurer que jamais un innocent ne serait condamné à mort, mon argument majeur contre cette peine s'envolerait. Mais nous sommes humains. Faillibles. Et la société, en faisant passer le message que vous ou moi pouvons nous retrouver dans le couloir de la mort parce que notre voisin a fauté fait passer le message que nous ne valons rien par nous mêmes. Je ne veux pas que des innocents soient des pertes tolérables de ce système.
Robert :
Il y a une nette différence entre pratiquer la peine de mort, qui résulte d'un processus froid et réfléchi, et le droit à la police et l'armée de tirer pour tuer dans le cadre de leurs fonctions.
La position morale n'est pas la même, je suis sûr que vous en percevez les nuances.
Désolé pour le double post. J'avais un message d'erreur disant "request too large"
RépondreSupprimerLa peine de mort, pourquoi pas ? Mais à une condition fondamentale : que le juge et les jurés qui ont décidé de la mort d'un criminel subissent le même sort dans le cas d'une erreur judiciaire. Il y a une sacrée disproportion entre les criminels auxquels on demande d'assumer leurs crimes et les tribunaux qui sont absous de leurs responsabilités. Il est anormal qu'un juge d'instruction qui a envoyé un innocent en prison, lequel s'est donné la mort, s'en tire avec juste un semblant de réprimande. Dans un système judiciaire libre et responsable, ce juge aurait pris la porte et passerait le restant de ses jours à payer pour son erreur.
RépondreSupprimerNon, Théo.
RépondreSupprimerVotre réponse est un faux-fuyant : une erreur judiciaire provient de tout le système. Il peut y avoir lieu de sanctionner un mauvais juge, nullement de le tuer.
Il faut admettre avec la peine de mort la possibilité d'une erreur fatale, c'est même le principal argument des abolitionnistes.
A propos du risque d’erreur judiciaire, je rapelle ce qu’écrivait, il y a trente ans, Marie-Laure Rassat, professeur de droit pénal à l’Université de Paris XII :
RépondreSupprimer« …s’il est vrai (des faits récents le prouvent, hélas) qu’on ne peut jamais être à l’abri d’une exécution injustifiée, il n’en reste pas moins qu’on ne peut abolir une institution au nom de la seule éventualité du mauvais usage qui pourrait en être fait, car bien peu de mécanismes humains résisteraient au tri comme insusceptibles d’abus. » (« Contre ou pour la peine de mort », Librairie philosophique J. Vrin, Paris 1979, pp 29-30
Je suis personnellement partisan du rétablissement de la peine de mort, à la condition expresse que le jury n’ait à se prononcer que sur un faisceau de nombreuses preuves matérielles incontestables, le doute le plus infime devant bénéficier à l’accusé.Aussi bien,n' aurait pas échappé à la peine capitale un michel Fourniret, un Guy George,un marc Dutroux pour lesquels l'argument du risque d' erreur judiciaire est sans fondement.
«le doute le plus infime devant bénéficier à l’accusé»
RépondreSupprimerC'est déjà le cas.
En vérité, vous proposez le rétablissement de la peine de mort telle qu'elle était avant son abolition, ce qui ne paraît pas idiot.
"En vérité, vous proposez le rétablissement de la peine de mort telle qu'elle était avant son abolition"
RépondreSupprimerVoilà... Et comme ça, aussi certain de lui que le jury était, il condamnait parfois à mort des innocents. En notre nom à tous.
Et tout ça pour quoi ?
Emprisonner quelqu'un sa vie entière derrière des barreaux n'est pas suffisant ? Pourquoi ?
"Emprisonner quelqu'un sa vie entière derrière des barreaux n'est pas suffisant ? Pourquoi ?"
RépondreSupprimerA l'heure actuelle, ça n'existe pas.
Certes. Mais vous ne militez pas pour le rétablissement de la peine de prison à perpétuité réellement perpétuelle, ce me semble...
RépondreSupprimer"Certes. Mais vous ne militez pas pour le rétablissement de la peine de prison à perpétuité réellement perpétuelle, ce me semble..."
RépondreSupprimerSi, lisez plus haut.
J'ai dit que le sujet de la peine de mort me paraissait tellement polémique que je pourrais tout à fait vivre avec l'idée d'un enfermement à vie (donc jusqu'au décès du condamné derrière les barreaux) si la perpétuité réelle était instaurée.
Après, moralement, contrairement à vous je ne suis pas choqué par l'idée que l'on puisse mettre à mort les criminels les plus horribles.
Reste le problème de l'erreur judiciaire qui me parait être un peu exagéré par les "anti" mais qui plaide en faveur de la perpetuité réelle que j'appelle de mes voeux.
@ Franck:
RépondreSupprimerCela va mieux en le disant:bravo pour la très grande qualité de votre blog et de vos billets.
Ce que j’ appelle un doute infime ?
Lorsqu' on n' est pas sûr à 100%.Je me réfère aux cas oû certains éléments à charge ou à décharge du dossier donnent lieu à débat .Exemple : les procès d’ Omar Radhad ou de Patrick Dils.
Je maintiens que dans certaines affaires criminelles récentes il n’ existait aucun élément de doute quant à la culpabilité des meurtriers en série : Marc Dutroux, Guy Georges, michel Fourniret , Thierry Paulin, Patrice Allègre, Emile Louis, Francis Heaulme …C’ est pour ce type d'affaires que la peine de mort me paraît devoir être requise et être tout à fait proportionnée à l' horreur des crimes commis.
Enfin, je rappelle que, depuis 1981,deux faits importants sont survenus : la découverte et l’utilisation de l’ADN, qui réduit fortement la possibilité d’une erreur judiciaire, et le droit de faire appel d’un jugement de cour d’assises, garantie supplémentaire qui n’existait pas à l’époque.
Ribellu : Je ne suis pas choqué qu'on puisse mettre à mort des meurtriers. Je suis choqué qu'on puisse mettre à mort un innocent qu'on croirait être meurtrier.
RépondreSupprimerMischka :
Ca fait belle lurette que lorsque quelqu'un est condamné à mort, il n'y a pas le moindre doute sur sa culpabilité.
Ce qui n'a bien évidemment pas empêché l'exécution d'innocents.
Errare Humanum Est