Radio France libre…
Par Camille Pascal
La propagande s’est tue en même temps que la radio d’État. Que son président soit chaudement remercié de cette grève salutaire.
Tout a commencé par quelques mètres carrés de moquette, choisie avec grand soin il est vrai, qui devaient venir égayer un bureau triste à mourir et donner de l’éclat à un jeune président qui aime, mais peut-on l’en blâmer, à être pris en photo sous son meilleur jour. Là-dessus sont venus s’ajouter une énième réforme de la radio publique et un plan d’économies indispensable mais qui ne sera en réalité jamais appliqué car il faudrait, pour cela, heurter les intérêts de tous les prébendiers de l’État culturel qui coûtent bien plus cher, à la vérité, que des boiseries en palissandre.
Résultat de tout cela, une grève dure qui semble vouloir s’installer. Faut-il s’en plaindre ? Ce n’est pas si sûr car France Musique émet de la musique en lieu et place des commentaires abscons de musicologues qui s’écoutent davantage que les compositeurs dont ils parlent, France Culture, réduite au silence, offre à son public la possibilité de lire les livres dont il n’est jamais question sur son antenne et donne ainsi la possibilité à une intelligentsia qui le fait rarement de réfléchir un peu avant que de parler. Il est des grèves dont on réclamerait presque la reconduction…
Mais surtout, et c’est là un petit miracle républicain qui malheureusement ne durera pas, la propagande s’est tue. C’est une impression très étrange car, après des années de domination absolue de la nouvelle pensée dévote, ce silence paraît presque irréel.
La radio publique se trouve ainsi empêchée par elle-même, et à quelques jours d’échéances électorales majeures, de faire campagne pour la gauche ou plus exactement contre la droite. En effet, ceux qui dénonçaient il y a quelques années les risques d’une mainmise de l’État sur l’audiovisuel public trouvent à l’inverse parfaitement normal d’utiliser du matin au soir et du soir au matin les ondes de ce même service public pour ériger en dogme leur vérité politique. Les mêmes qui traquent à longueur d’émission la discrimination trouvent pourtant normal d’imposer leur vision du monde à ceux qui ne la partagent pas. Ils fustigent tous les pouvoirs sauf le leur.
Mais ne boudons pas notre plaisir et profitons pleinement de cette grève. Pascale Clark n’est plus là pour venir, jour après jour, proclamer sa détestation obsessionnelle de Nicolas Sarkozy, Patrick Cohen nous épargne son dédain de tout ce qui n’a pas milité à l’Unef dans sa jeunesse, et Augustin Trapenard ses leçons de morale “boboïde”.
Radio France est exceptionnellement libre de toute idéologie et tous les Français peuvent aujourd’hui écouter leur radio publique sans avoir l’impression d’être ignorés ou méprisés par ceux qui leur parlent sans jamais en réalité s’adresser à eux. Il est possible que Mathieu Gallet doive quitter bientôt son joli bureau mais, pour avoir réussi cette performance, il mérite au moins la Légion d’honneur.
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