Pourquoi l'arrivée du FN au pouvoir ne changerait rien
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Le FN forme en réalité un système avec les partis qu'on dit à tort «républicains»
alors qu'ils sont de purs simulacres, de simples écuries présidentielles ayant réussi
à vider le débat politique de tout contenu, en détournant l'attention des Français
vers un péril imaginaire, à chaque fois que de véritables choix politiques étaient
nécessaires. Ces partis sont en réalité des factions, c'est-à-dire non des partis au
sens de la partie au service du tout, poursuivant un véritable projet politique, mais
des partis inféodés à l'ambition d'un homme ou de quelques-uns. Les divisions qui
structurent le système des partis ne sont plus des divisions politiques, mais des
divisions quant à la possession des places et l'obtention du pouvoir personnel. Le
système des partis est ainsi devenu un système des factions -selon la fameuse
distinction de Burke- incapable d'exprimer une véritable politique, et ne servant
plus que des ambitions personnelles. Les Français sont conscients de cette
évolution, d'où leur «populisme», c'est-à-dire leur refus de cautionner ce système
des partis devenu système des factions. En cela ils ne font pas preuve
d'extrémisme, mais d'un véritable désespoir républicain.
[…]
On ne peut en effet prendre la mesure de l'extraordinaire hallucination provoquée
par le FN dans la vie de ce pays si l'on ne réalise pas qu'elle est le symptôme d'un
désir profond que tout change pour que rien ne change. Si le FN est effrayant, ce
n'est pas par son extrémisme, mais par la névrose de répétition de la société
française dont il est le symptôme. Il incarne l'aboutissement de la dépolitisation
totale de la France depuis l'après-guerre, par-delà le sursaut gaullien. L'évolution
du FN vers une sorte de socialisme national est, à cet égard, tout à fait révélatrice.
Ce que le FN veut conserver, ce n'est pas la tradition républicaine redécouverte
par De Gaulle, c'est L'État-Providence réservé au nationaux. L'Immigration et
l'Europe, là dedans, ne sont qu'une variable d'ajustement au système des partis:
Mitterrand, c'était l'État-Providence grâce à l'Immigration et à l'Europe, Marine Le
Pen c'est l'État-Providence grâce à l'absence d'Immigration et d'Europe. Dans les
deux cas, il faut tout changer pour que rien ne change, c'est-à-dire pour que se
poursuive l'illusion d'une réalisation totale de l'individu à l'ombre d'un État tout
puissant. Les Français, là dedans, continuent à être pris pour des enfants, et non
pour un peuple capable de liberté.
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Vous imaginez bien que j'ai apprécié la référence à Burke !
J'ai fait la même analyse :
Le FN, glaciateur de la politique française
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