Débat Houellebecq-Finkielkraut (exceptionnellement, je n'ai pas repris le titre de l'article pour le lien parce que ce titre est très con, à contre-courant de l'article).
Je suis beaucoup plus en accord avec Houellebecq qu'avec Finkielkraut.
Comme d'habitude, Finkielkraut est incapable de penser les religions. C'est quand même l'homme qui a réussi à écrire un livre sur Péguy en faisant l'impasse sur son retour au catholicisme. Cet angle aveugle devient inquiétant. Cela rend sa pensée naïve, voire crétine ... et sans guère d'intérêt.
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Michel Houellebecq - Je suis tout à fait d'accord, le malaise occidental est avant
tout endogène. De ce point de vue, je suis resté tout à fait positiviste. A la fin du
Moyen Age, on entre dans une nouvelle ère, critique, celle que Comte appelait l'âge
métaphysique, qui est incapable de créer quoi que ce soit, dont la seule fonction
est de détruire l'ère organique antérieure, basée sur la féodalité et la chrétienté.
Nous vivons en ce moment l'effondrement de l'âge métaphysique, qui va laisser la
place à une nouvelle ère organique, nécessairement basée sur une religion. Mais
quelle religion ? En bon disciple de Comte, j'ai exploré dans mes romans
précédents l'hypothèse d'une religion nouvelle, basée sur la science. J'avais omis
de considérer cette hypothèse simple: il se peut très bien qu'on assiste, tout
simplement, au retour d'une religion ancienne.
Alain Finkielkraut - Dieu est parti, et il ne dépend pas de nous de le faire revenir.
Je crois que ce qui est mort pour de bon en France comme dans le reste du monde
occidental, c'est la croyance en la vie éternelle. «Là où il y avait Dieu, il y a
maintenant la mélancolie», disait Gershom Scholem. Et le croyant lui-même ne sait plus retirer à la mort son dard venimeux. On ne peut pas décider de croire à
nouveau dans la vie éternelle - et c'est le destin de l'Occident… Mais il faut en
rabattre : l'histoire de l'Occident, ce n'est pas l'histoire universelle. Je pense qu'en
islam, par exemple, la question de la vie éternelle ne fait même pas débat.
Michel Houellebecq - Alain, je suis en net désaccord là-dessus. Ce sont ceux qui
croient à la vie éternelle qui survivent. La religion gagne toujours à la fin - ne
serait-ce que pour des raisons simplement, brutalement démographiques.
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Alain Finkielkraut -[…]Par-delà la mort, [les tués de Charlie Hebdo] nous posent cette question : qui sommes-nous et à quoi tenons-nous ? La France,
qui s'enchante de ses valeurs, prend conscience que les valeurs ne sont pas tout.
Elle redécouvre qu'elle a des moeurs parce que ces moeurs sont aujourd'hui
rejetées par une partie de la population. Et cela doit se distinguer, je crois, de la
question religieuse.
Michel Houellebecq - Je ne crois pas qu'on puisse dissocier la question des moeurs
de la question religieuse. J'ai lu l'ayatollah Khomeyni, c'est intéressant. On
aimerait avoir en France des gens d'une aussi grande rigueur, qui souligneraient
que l'islam parle peu des questions métaphysiques, beaucoup plus des moeurs et
de l'organisation sociale. C'est cette modestie métaphysique qui lui a permis de
traverser sans problème les révolutions scientifiques successives, alors que le
catholicisme se fracassait sur Galilée, puis sur Darwin.
[…]
Michel Houellebecq - On peut écrire des essais, étudier l'histoire, mais je crois que
les bifurcations essentielles demeurent mystérieuses, on les ressent sans les
comprendre. Nous venons de traverser une de ces bifurcations. Depuis les
attentats de Charlie Hebdo, plus personne ne croit que les choses puissent
s'arranger ; et, pire, plus personne ne le souhaite.
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