Je suis affolé quand j'entends des ventes aux enchères de Ferrari ou de Picasso à plusieurs dizaines de millions d'Euros.
On nous explique, pour justifier ces prix délirants, que c'est de l'art.
Déjà, concernant les Ferrari, j'ai un sérieux doute : ce sont de jolies voitures, mais de l'art ? Est-ce qu'on ne se monte pas un tantinet le bourrichon avec de grands mots creux ? Si c'est de l'art, c'est de l'art pour parvenus, pour nouveaux riches, pour indécrottables incultes. Au fond, une Ferrari, ce n'est tout de même qu'une bagnole. Je regarde les videos des maisons de ventes, comme celle-ci :
Elles me paraissent toujours grotesques de présenter une Ferrari comme si c'était le Saint Sacrement (le Saint Sacrement, tiens, nous y reviendrons ...).
Enzo Ferrari s'était fait une spécialité d'exploiter sans retenue la crédulité de ses riches clients, allant jusqu'à vendre des épaves à peine restaurées, et il estimait cette activité tout à fait légitime. Je suis enclin à partager son avis : après tout, s'il y a des gens suffisamment cons pour payer quatre roues et un moteur des millions, autant les soulager de leur argent (1).
Les Picasso, me direz vous ? C'est plus de l'art que les Ferrari (notons que Picasso avait la même philosophie que Ferrari vis-à-vis de ses acheteurs). Mais ce n'est aussi que de l'art. Qu'est-ce qui justifie de payer une peinture, n'importe quelle peinture, même la Joconde, plus cher qu'un pavillon de banlieue ?
Je parlais de Saint Sacrement et ça tombe bien. Les théoriciens de l'art ont une explication, au-delà de la spéculation, pour ces prix fous.
L'art, ou ce qui est supposé tel, est censé nous procurer un bout d'éternité à nous qui sommes terrifiés par la mort. L'art nous aiderait à maitriser la peur de la mort, nous qui ne croyons plus en l'au-delà. Malraux en a fait des tonnes sur le sujet. Autrement dit, la cote de l'art serait liée à la baisse de la religiosité et à la persistence de la peur de la mort.
Cette explication me laisse perplexe, toujours est-il que je ne partage pas le délire autour de voitures ou de tableaux que je trouve pourtant jolis (oui, j'aime beaucoup les Ferrari et certains Picasso, mais je les garde à leur place, qui n'est pas essentielle).
Bref, très peu pour moi. Si vous voulez vous amuser avec une voiture de collection, il y a des 205 GTI qui sont beaucoup moins chères que les Ferrari. Et si vous ne voulez pas vous amuser avec une voiture de collection mais la regarder tous les soirs dans votre garage, ça ne m'intéresse pas.
A ce stade, la spéculation devient pour moi une justification rationnelle : «J'achète une Ferrari ou un Picasso des millions parce que ça me fait plaisir et parce que je sais que je trouverai un encore plus pigeon que moi pour faire un profit à la revente».
Je serais une maison de ventes, je cesserais ces videos emphatiques ridicules, je ferais des videos pour montrer que le réservoir de plus cons que moi dans le monde est inépuisable. Mais peut-être est-ce une évidence qui n'a pas besoin de videos.
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(1) : Enzo Ferrari a toujours eu du dédain pour ses clients, qui étaient à ses yeux des cochons payants pour financer la compétition. Après le partenariat avec Fiat, dans les années 70, ce dédain s'est mué en franc mépris, puisqu'il n'avait plus besoin d'eux pour financer la F1. Il n'hésitait pas en privé à dire que ses clients étaient des abrutis esclaves du statut social. Avait-il vraiment tort ?
D'ailleurs, la dernière voiture de route à laquelle il s'est intéressé est la Daytona. Tous les modèles postérieurs, 512BB, 400i, 308, 328, Testarossa, etc. sont des créations FIAT, avec des techniques FIAT par des ingénieurs FIAT, dans les locaux de Ferrari, mais, chut, c'est un secret. D'ailleurs, la qualité de la production a fait à ce moment là le même bond que trente ans plus tard avec l'arrivée de Montezemelo.
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