Livre intéressant et qui nuance pas mal d’idées reçues.
Des difficultés de l’armée française en 1914, l’auteur dresse la liste des causes habituelles mais les lient à un problème fondamental rarement évoqué : pour s’opposer à l’Allemagne, la France a fait le choix d’une armée nombreuse, donc très couteuse, d’où les déficiences de l’entrainement et de l’expérimentation. Mais, finalement, ce choix s’est révélé pas si mauvais.
Il pointe aussi, plus connu, la défiance des officiers, aristocrates et bourgeois, vis-à-vis des capacités de la troupe. Il faudra les trois premières années de guerre pour surmonter ce préjugé erroné.
Au cours des quatre années de guerre, l’armée française a subi autant de transformations majeures.
L’aboutissement est l’armée française de 1918, qui est bien la meilleure du monde. Elle a inventé le combat inter-armes moderne. Goya écrit qu’il y a plus de similitudes entre un chef de section d’aujourd’hui et un chef de section de 1918 qu’avec leur homologue de 1914.
Un exemple d’aout 1918 : un avion d’observation biplace repère une compagnie allemande à découvert. Il la mitraille. Elle se réfugie dans un bois. L’avion tire des balles traçantes vers le bois pour le désigner à l’infanterie française en progression par demi-sections. Par TSF (en 1918, l’armée française a presque dix fois plus de postes que l’armée allemande), il alerte l’artillerie, qui a suivi puisqu’elle est motorisée pour plus de la moitié. L’artillerie effectue son tir sur le bois pendant que l’infanterie continue son approche. Les Allemands évacuent le bois. L’affaire a duré trente minutes, c’est-à-dire moins qu’il n’en faut bien souvent aujourd’hui à un avion occidental pour obtenir une autorisation de tir en Syrie ou en Libye (mais il est vrai que nous ne sommes pas véritablement en guerre).
Puis, à partir de septembre, utilisation massive des chars légers, les géniaux (ils ont tous les attributs d'un char moderne) FT17.
De leur coté, les Allemands ont nettement séparé les troupes de choc, que les Français appelaient péjorativement « les gladiateurs », de l’infanterie tout-venant. Pétain a refusé de faire de même, préférant élever le niveau moyen. Décision juste, puisque, une fois les troupes de choc laminées par les offensives du printemps, l’armée allemande s’écroule.
Alors, pourquoi l'effondrement de 1940, alors que les Français avaient toutes les bonnes idées en 1918 ?
On peut commencer par dire : « C'est compliqué». Mais il y a une raison très forte, rarement mentionnée : les pépètes, le flouze, l'avoine. Le combat inter-armes, aujourd'hui comme hier, coûte une fortune ; aussi bien en matériel qu'en formation et entraînement. En 1939, l'économie allemande était mise à genoux par le réarmement et c'est la raison du déclenchement de la guerre à cette date (1).
Puis, il y eut cette catastrophe industrielle, due (déjà) à l'idéologie : la loi de confiscation des profits de guerre, qui priva l'industrie française des moyens d'entretenir son avance.
La ligne Maginot a couté très cher mais probablement moins qu'une armée vraiment moderne.
La solution était peut-être dans l'armée de métier prônée par De Gaulle. Mais des raisons idéologiques (là encore) empêchèrent d'examiner la question sereinement. La peur du coup d'Etat fit beaucoup, mais dois-je rappeler qu'il n'y a jamais de coup d'Etat dans un pays bien géré ? Au lieu de chercher à éviter un coup d'Etat, preuve de leur incompétence, les dirigeants feraient de se concentrer sur le bon gouvernement.
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(1) : l'idée que Hitler aurait été surpris par la déclaration de guerre britannique est absurde et prouve seulment le génie hitlérien de la manipulation. Au contraire, le timing de l'Adolf était remarquable : en 1939, économie de guerre allemande à son maximum, réarmement ennemi (c'est-à-dire nous) en cours avec des effets prévus en 1941.
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