La classe jacassante, sur des sujets comme le mariage homosexuel et l'Europe, nous tient le discours suivant : «Le parlement (ou le président) est démocratiquement élu, le parlement vote (ou le président décide). Donc c'est démocratique. Donc si vous n'êtes pas d'accord, vous êtes un affreux fachisse. Circulez, y a rien à voir».
Ce raisonnement repose sur une double imposture :
1) L'imposture du fétichisme juridique.
Toute loi votée dans les règles serait légitime. Suivant ce raisonnement, si le parlement vote que 2+2=5 ou que le mariage, c'est aussi entre deux hommes, il n'y a rien à redire.
Cette manière de penser est par essence totalitaire, au sens strict du terme, et opppressive. Les crimes nazis étaient couverts par des lois et les lecteurs de Soljenitsyne savent que l'envoi au Goulag était précédée d'un processus judiciaire dans les règles.
En vérité, il y a des réalités qui échappent à la loi, parmi celles-ci la nature humaine. La loi n'a ni le pouvoir ni la légitimité de redéfinir la nature humaine.Toute tentative en ce sens ne peut mener qu'à des catastrophes.
2) L'imposture de la représentation.
Le peuple souverain vote pour élire les parlementaires et le président. Donc tout ce qu'ils font est légitime. Tout ce que fait l'Etat est légitimé par le peuple souverain.
Une telle manière de penser oublie que le scrutin majoritaire agrège en un résultat unique (Untel est élu) des millions d'opinions divergentes, de nuances, de motivations. Il piétine donc des millions de sensibilités. Votre vote est trahi avant que le bulletin n'ait touché le fond de l'urne.
On ne peut pas déduire du scrutin majoritaire élisant une personne un programme politique. C'est si vrai que les candidats font des listes de propositions puis, une fois élus, choisissent d'en renier certaines et d'en appliquer d'autres à toute force.
Les vices du système sont patents quand on considère que les parlementaires, à propos du traité de Lisbonne, ont voté à l'inverse du peuple consulté en 2005. L'argument du programme du candidat Sarkozy, contenant cette proposition, est un sophisme : les électeurs ne pouvaient trier dans le programme mais consultés sur un point précis de ce programme, pour une fois, ils ont dit «non» et le parlement a passé outre.
Il y a donc un détournement de souveraineté par les hommes de l'Etat.
Comme disent les Anglo-Saxons, les Français (mais, plus largement, les Européens eurolandais) ont inventé la démocratie non-représentative. Il est vrai que l'intelligence collective diminue (dysgénie, fabrique du crétin, prolifération des demi-intellectuels et compagnie), ce qui favorise ce genre d'évolution.
Comment sortir de ce piège ?
1) Réduire au maximum la place de l'Etat, de manière à laisser jouer librement les choix et les opinions individuels. C'est de cette façon qu'on piétine le moins les libertés.
2) Limiter la pression majoritaire sur les individus grâce au droit naturel.
3) Limiter le recours à la représentation, outil de tant de tromperies. Préférer des référendums fréquents sur des questions claires et précises, laissant peu de place à aucune interprétation sur la volonté du peuple.
Nous serions alors assez proches du système suisse qui, malgré ses difficultés (chez eux aussi, la classe jacassante tente de kidnapper le pouvoir), est tout de même meilleur que le nôtre.
Mais, évidemment, en France, pays vivant dans la religion de l'Etat et, il faut bien le dire, dans la haine des libertés, ce n'est qu'un doux rêve.
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