Nous souffrons tous d’un déficit d’admiration
Vous vous doutez que je partage l'opinion de Charles Gave même si je ne partage son admiration de Mandela, qui fut une catastrophe pour l'Afrique du Sud (de toutes les manières d'organiser l'après-apartheid, Mandela a probablement choisi la plus mauvaise, pour des raisons idéologiques).
Un homme qui conseille de se passer de télévision ne peut être entièrement mauvais.
La télévision est un drogue dure, comme le téléphone portable et pour des raisons assez proches. Je connais des gens qui deviennent nerveux quand ils sont loin d'une télévision ou de leur portable. Ils sont pathétiques.
Comprenez bien mon insistance, que vous pouvez juger obsessionnelle : l'abrutissement télévisuel est le premier outil de contrôle des populations. «Pendant qu'ils sont devant la télévision, ils ne pensent pas à faire la révolution». On m'explique souvent, comme si j'étais un demeuré (je le suis peut-être, mais pas à cause de l'absence de télé !), «Tu sais, il passe des choses bien à la télé, il n'y a pas que des crétineries». Et alors ? Ce n'est pas la question (même si les gens regardent à 99 % des conneries, les «choses bien» n'étant qu'un alibi).
Le problème de la télé : c'est le divertissement pascalien à la puissance dix.
« Rien n’est si insupportable à l’homme que d’être dans un plein repos, sans passions, sans affaire, sans divertissement, sans application. Il sent alors son néant, son abandon, son insuffisance, sa dépendance, son impuissance, son vide. Incontinent il sortira du fond de son âme l’ennui, la noirceur, la tristesse, le chagrin, le dépit, le désespoir».
La télévision nous empêche de nous ennuyer en nous abrutissant. C'est bien ? Non, c'est mal ! Car l'ennui, c'est la condition de la méditation. Et la méditation, c'est la condition de la sagesse.
Là encore, Pascal (Blaise, pour les intimes), le dit mieux que moi :
« La seule chose qui nous console de nos misères est le divertissement, et cependant c’est la plus grande de nos misères. Car c’est cela qui nous empêche principalement de songer à nous, et qui nous fait perdre insensiblement. Sans cela, nous serions dans l’ennui, et cet ennui nous pousserait à chercher le moyen le plus sûr d’en sortir. Mais le divertissement nous amuse, et nous fait arriver insensiblement à la mort. »
Bien sûr, il y a d'autres affreux divertissements que la télévision. Mais celle-ci est quand même l'éléphant dans le magasin de porcelaine de la pensée.
Après la télévision, on peut attaquer la téléphone portable.
Mme de Sévigné, quand elle écrivait ces délicieuses lettres à sa fille faisait une oeuvre. Tandis qu'Unetelle, quand elle abrutit le téléphone de son babil incessant et répétitif, fait une chose que la décence m'interdit de préciser d'avantage (il est vrai que, pour certains «artistes contemporains», c'est aussi une oeuvre).
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