Poussé par DoMP et quelques autres, j'ai entrepris de lire Etat d'urgence, le roman de Michael Crichton sur le réchauffement climatique (ou le non-réchauffement).
Je vous en ferai une critique complète ultérieurement.
Comme seule la partie argumentative et documentée m'intéresse, j'ai commencé par la fin. Je ne suis pas surpris de retrouver (mais avec des chiffres cette fois, pour les amateurs !) les idées dont je vous ai fait part.
1) Y a-t-il un réchauffement climatique ? Oui, depuis 1890, mais plus les données sont fiables, moins le réchauffement mesuré est important.
2) Est-il du à l'homme ? Peut-être, mais on ne sait pas vraiment, car on ne connaît pas le mécanisme. Par exemple, le taux de CO2 augmente régulièrement sur la période considérée (depuis 1890), cela soulève deux problèmes si on regarde l'enchaînement diffusé dans le public
homme => CO2 => effet de serre => réchauffement :
> l'activité industrielle de la fin du XIXème siécle, plus faible qu'aujourd'hui, peine à expliquer l'augmentation du Co2
> la température a baissé ou est restée stable entre 1940 et 1970 alors que le taux de CO2 continuait à augmenter
3) Que faire ? Continuer à chercher car, ignorants du mécanisme, nous le sommes encore plus des conséquences.
Crichton propose une sorte de moratoire de dix ans sur les mesures couteuses, dix années pendant lesquelles on mettrait à l'épreuve les prédictions des climatologues avant d'engager des crédits.
Je vais même plus loin : l'ONU pourrait proposer qu'au 31 décembre 2008 soient déposées les projections de prévisions climatiques pour 2009-2014 avec un prix élevé (1 Md $ ?) pour le labo qui aura fait la meilleure prédiction. Résultat en 2014. Ce délai n'est rien à l'échelle des phénomènes en cause et permttrait de décider de manière plus éclairée.
Si les climatologues sont sérieux, ils ne peuvent refuser ce défi.
Enfin, Crichton fait deux remarques qui méritent réflexion :
1) un parallèle avec l'eugénisme. L'eugénisme en son temps était largement admis, ou au moins toléré, par la communauté scientifique, c'était l'opinion majoritaire, les opposants étaient mal considérés par le monde universitaire et disposaient de peu de crédits, des organismes importants s'y intéressaient, le grand public en connaissait les idées et les politiques appelaient à prendre des mesures en conséquence ou les ont prises. Nous avons préféré oublier. Science et politique ne font pas bon ménage. Comparaison n'est pas raison, mais ça devrait inciter à une certaine modération.
2) Les opposants scientifiques à la théorie du réchauffement climatique fait de main d'homme sont surtout des retraités, ce qui peut s'interpréter de deux façons :
a) Seuls les vieux gateux n'y croient pas
b) Le sujet est tellement tabou que seuls les retraités, à l'abri de se voir couper les crédits pour cause d'hérésie, peuvent s'exprimer librement. L'histoire des sciences montre assez que les savants ne sont pas plus que les autres hommes à l'abri des phénomènes de conformisme et d'adhésion à l'esprit de groupe.
Suite avec la critique complète.
mardi, février 28, 2006
lundi, février 27, 2006
Pétitionnons de principe
Pétition de principe : tenir pour vraies des choses infondées ou qui demandent à être vérifiées, Hayek en recensaient quelques-unes :
> l'Etat dépense plus intelligemment son argent que les particuliers
> l'Etat doit veiller à ce que chacun reçoive ce qui lui est du.
> La dépense est profitabe et l'épargne mauvaise
Bastiat signale que le summum de la pétition de principe consiste à le faire tenir dans le vocabulaire, dans un seul mot, pour qu'on n'en voit pas l'absurdité, il cite deux exemples :
> tributaire. Un pays importateur est tributaire de ses importations. La pétition de principe est que l'importation n'est pas souhaitable, qu'elle traduit une situation d'infériorité, de dépendance.
Mais c'est oublier que l'importation est un échange. Qui est le plus dépendant : l'occident du pétrole saoudien ou l'Arabie saoudite de l'argent occidental ?
> nous sommes envahis de produits étrangers. Quel rapport entre des vaisseaux déversant le fer et le feu et des vaisseaux déversant des biens bon marché qui feront le bonheur des consommateurs qui courront les acheter ?
D'ailleurs, Bastiat récuse avec drôlerie toute les métaphores guerrières.
Je rappelle pour mémoire que Bastiat a démontré dans deux pages des Sophismes Economiques que tous les pays vous entourant élèveraient-ils des barrières douanières à votre commerce, vous auriez quand même intérêt à abaisser vos barrières douanières de façon unilatérale.
Ca se termine par cette phrase à faire tomber en syncope un militant d'ATTAC : Je dis, et le pense très sincèrement [et le prouve], que, si deux pays se trouvent dans des conditions de production inégales, c'est le moins favorisé de la nature qui a le plus à gagner à la liberté des échanges.
Il existe des pétitions de principe modernes :
> Le départ à la retraite des vieux libére des places pour les jeunes. Pourquoi les retraités seraient-ilsautomatiquement remplacés ? Le fait qu'il y aura de plus en plus d'oisifs à subventionner penche au contraire vers l'augmentation de la productivité et donc moins d'emplois.
> L'ultra-libéralisme. Pourquoi le libéralisme serait-il forcément outrancier ?
> La protection sociale. Où est-il prouvé que distribuer à certains de l'argent pris à d'autres protège et en quoi est-ce social ?
> mais le sommet actuel, le chef-d'oeuvre de la pétition de principe, qu'on n'est pas surpris de voir dans la bouche des illusionistes chiraquiens, c'est le merveilleux, l'admirable patriotisme économique. En deux mots, nous avons, tenez vous bien, les pétitions de principe suivantes :
>> le patriotisme peut être délimité.
A quand le patriotisme sociologique ? Le patriotisme médical ? Le patriotisme mathématique ?
>> la nationalité est un critère pertinent dans le champ économique.
Juste pour rigoler : c'est quoi la nationalité d'Arcelor ?
>> L'Etat a vocation à intervenir dans l'économie en fonction d'intérêts nationaux et cette intervention est bénéfique.
Sans commentaires, pour ceux qui ont de la mémoire
>> Avoir des entreprises étrangères en France est mauvais ; avoir des entreprises françaises à l'étranger est bon. (comme disent les Taïwanais de Thomson, comme disent les Français d'Ikea).
> l'Etat dépense plus intelligemment son argent que les particuliers
> l'Etat doit veiller à ce que chacun reçoive ce qui lui est du.
> La dépense est profitabe et l'épargne mauvaise
Bastiat signale que le summum de la pétition de principe consiste à le faire tenir dans le vocabulaire, dans un seul mot, pour qu'on n'en voit pas l'absurdité, il cite deux exemples :
> tributaire. Un pays importateur est tributaire de ses importations. La pétition de principe est que l'importation n'est pas souhaitable, qu'elle traduit une situation d'infériorité, de dépendance.
Mais c'est oublier que l'importation est un échange. Qui est le plus dépendant : l'occident du pétrole saoudien ou l'Arabie saoudite de l'argent occidental ?
> nous sommes envahis de produits étrangers. Quel rapport entre des vaisseaux déversant le fer et le feu et des vaisseaux déversant des biens bon marché qui feront le bonheur des consommateurs qui courront les acheter ?
D'ailleurs, Bastiat récuse avec drôlerie toute les métaphores guerrières.
Je rappelle pour mémoire que Bastiat a démontré dans deux pages des Sophismes Economiques que tous les pays vous entourant élèveraient-ils des barrières douanières à votre commerce, vous auriez quand même intérêt à abaisser vos barrières douanières de façon unilatérale.
Ca se termine par cette phrase à faire tomber en syncope un militant d'ATTAC : Je dis, et le pense très sincèrement [et le prouve], que, si deux pays se trouvent dans des conditions de production inégales, c'est le moins favorisé de la nature qui a le plus à gagner à la liberté des échanges.
Il existe des pétitions de principe modernes :
> Le départ à la retraite des vieux libére des places pour les jeunes. Pourquoi les retraités seraient-ilsautomatiquement remplacés ? Le fait qu'il y aura de plus en plus d'oisifs à subventionner penche au contraire vers l'augmentation de la productivité et donc moins d'emplois.
> L'ultra-libéralisme. Pourquoi le libéralisme serait-il forcément outrancier ?
> La protection sociale. Où est-il prouvé que distribuer à certains de l'argent pris à d'autres protège et en quoi est-ce social ?
> mais le sommet actuel, le chef-d'oeuvre de la pétition de principe, qu'on n'est pas surpris de voir dans la bouche des illusionistes chiraquiens, c'est le merveilleux, l'admirable patriotisme économique. En deux mots, nous avons, tenez vous bien, les pétitions de principe suivantes :
>> le patriotisme peut être délimité.
A quand le patriotisme sociologique ? Le patriotisme médical ? Le patriotisme mathématique ?
>> la nationalité est un critère pertinent dans le champ économique.
Juste pour rigoler : c'est quoi la nationalité d'Arcelor ?
>> L'Etat a vocation à intervenir dans l'économie en fonction d'intérêts nationaux et cette intervention est bénéfique.
Sans commentaires, pour ceux qui ont de la mémoire
>> Avoir des entreprises étrangères en France est mauvais ; avoir des entreprises françaises à l'étranger est bon. (comme disent les Taïwanais de Thomson, comme disent les Français d'Ikea).
Ca sent le gaz : que d'hypocrisie !
Suez absorbe GDF qui se trouve du coup privatisé.
A mes yeux, c'est une très bonne chose, cependant :
> j'aurais préféré une vraie opération de marché à un Mecanno gouvernemental (T. Breton vient d'affirmer que c'est GDF qui prend Suez, marrant ! Si c'était vrai, ça voudrait dire que les actionnaires de Suez (CA 40 Md €) seraient spoliés par les actionnaires de GDF (20 Md €), vous allez me dire "Aucun gouvernement français n'a jamais eu peur de spolier les épargnants"...)
> le "patriotisme économique" est une stupidité économique (relire d'urgence Bastiat) : les Britanniques y opposent plus finement l'effet Wimbledon "Nous avons un excellent tournoi mais les joueurs viennent d'ailleurs."
> reste le problème "social" comme on dit en novlangue (je traduis pour ceux qui parlent encore français : que faire des privilèges extorqués au contribuable-cotisant retraites-consommateur par les agents de GDF du temps qu'ils étaient en situation de monopole ?)
A mes yeux, c'est une très bonne chose, cependant :
> j'aurais préféré une vraie opération de marché à un Mecanno gouvernemental (T. Breton vient d'affirmer que c'est GDF qui prend Suez, marrant ! Si c'était vrai, ça voudrait dire que les actionnaires de Suez (CA 40 Md €) seraient spoliés par les actionnaires de GDF (20 Md €), vous allez me dire "Aucun gouvernement français n'a jamais eu peur de spolier les épargnants"...)
> le "patriotisme économique" est une stupidité économique (relire d'urgence Bastiat) : les Britanniques y opposent plus finement l'effet Wimbledon "Nous avons un excellent tournoi mais les joueurs viennent d'ailleurs."
> reste le problème "social" comme on dit en novlangue (je traduis pour ceux qui parlent encore français : que faire des privilèges extorqués au contribuable-cotisant retraites-consommateur par les agents de GDF du temps qu'ils étaient en situation de monopole ?)
dimanche, février 26, 2006
Analyse des barbares
Ce mot "barbares", dont François Delpla désapprouvait l'utilisation compulsive à propos d'ATTAC, est revenu sous une autre forme plus grave dans la tête de jeunes sauvages :
Fichier : Halimi.pdf
Fichier : Halimi.pdf
Les dinosaures à Kyoto (2)
Suite du message Les dinosaures à Kyoto :
Ma réflexion s'articule autour de deux points :
> le climat est très complexe à modéliser et on peut faire dire, le pire étant quand c'est inconscient, ce qu'on veut à un modèle qu'on a du mal à recaler (je le sais, j'en ai fait), même pour des choses plus simples que le climat.
Par exemple, on me dit : la montée des eaux va amplifier l'évaporation, peut-être, mais est ce que ça ne va pas augmenter la capacité d'absorption du Co2 de l'océan et l'albedo global ? Je n'en sais fichtre rien.
Je suis conscient que les modèles nous prédisent des catastrophes mais voilà : je ne les crois pas fiables.
Si un astronome me disait qu'une comète va percuter la terre dans vingt ans, je serais tenté de le croire, car on maîtrise relativement bien les trajectoires des corps célestes, on a découvert des planètes avant de les voir en analysant les aberrations de trajectoires d'autres planètes. Où et quand la climatologie a-t-elle prouvé un tel degré de connaissance ?
On n'est pas capable de donner une météo fiable à15 jours et on serait capable de prévoir le climat dans 100 ans ? Alors que des deux problèmes, le deuxième est peut-être le plus complexe et qu'il ne mobilise pas autant de moyens que le premier ?
> or, les décisions prises suite à ces modèles et ces projections sont extrêmement couteuses, cet argent ne serait il pas mieux utilisé ailleurs (lutte contre le SIDA, éducation, etc.)
Je disais que, dans un cas aussi incertain, il vaut mieux réagir qu'anticiper, ou, si vous préférez, anticiper plus tardivement plutôt que de prendre des décisions hatives.
J'avais oublié un point, c'est : "Messieurs les savants, continuez à travailler et à raffiner notre savoir, perfectionnez vos modèles."
Je me suis souvenu (mieux vaut tard que jamais) que sur ce sujet j'avais déjà publié un article :
La relative absence d'importance d'empêcher le réchauffement global (B. Lomborg)
Enfin, dans la pile de Herald Tribune en retard, j'ai trouvé cet article sur le fait que les dirigeants chrétiens évangéliques tournent écolos. Il ne pouvait mieux tomber puisqu'il recoupe exactement mon propos (oui, oui, je sais encore un argument d'autorité) :
(Vous trouverez au lien suivant l'article de RH Nelson sur environnementalisme et théologie cité par J. Tierney : ENVIRONMENTAL RELIGION: A THEOLOGICAL CRITIQUE)
And on the Eighth Day, God Went Green By JOHN TIERNEY (NYT)
816 wordsPublished: February 11, 2006
And on the eighth day, God said, Let there be a thermostat for the heavens and the earth, and God saw that it was good. And God said, Let no man adjust it more than 2 degrees Fahrenheit, or 1 degree Celsius, until the end of time.
Now that evangelical Christians have joined the battle against global warming, we may as well acknowledge that America has one truly national religion: environmentalism.
Its tenets, already taken for granted in the blue states, were embraced this week by the Christian leaders who formed the Evangelical Climate Initiative. They haven't yet rewritten Genesis, but their advertising campaign warns of ''millions of deaths'' from biblical scourges -- floods, droughts, pestilence -- unless humans make a ''sacred commitment'' to stop global warming.
It may look odd for evangelicals to be taking up Hollywood's most fashionable cause, but the alliance makes perfect sense. Environmentalism has always fundamentally been a religion -- ''Calvinism minus God,'' in the words of Robert Nelson, a professor of environmental policy at the University of Maryland. He calls the global warming debate the latest example of environmentalist creationism.
The Puritans and other Calvinists believed that God was revealed not just in Scripture but also in the ''Book of Nature.'' To them, the wilderness was an unchanged record of God's handiwork at ''the Creation,'' offering a glimpse of the world before man's pride and sinfulness alienated him from nature and caused him to be expelled from Eden.
Environmentalists have had similar notions, starting with John Muir, who considered nature ''a mirror reflecting the Creator.'' Al Gore urged the ''moral courage'' to secure ''our place within creation.'' When Bruce Babbitt was secretary of the interior, he called plants and animals ''a direct reflector of divinity,'' and he warned Americans not to ''recklessly destroy the patterns of creation.''
There is one large problem with this version of creationism. The world we see was not created in a week, and it has looked a lot different in the past.
The forests that seemed divine to the Puritans and to Muir and Babbitt were not present at the Creation. They were merely the latest adaptation to changing climatic conditions and competition with other species, including humans -- Indians had been managing the forests by cutting trees and setting fires. There is no such thing as a ''natural'' forest in America, Nelson writes, unless you reject creationism and define nature as ''the Darwinian vision of unremitting struggle for survival.''
Darwin's Book of Nature isn't as morally satisfying as Calvin's, at least not for those who enjoy berating Americans for their sinful desires to cut down trees and burn fossil fuels. But it does make for a clearer way to think about global warming. Instead of assuming that humans will be punished for tinkering with God's handiwork, you can consider the best strategy for our species' survival.
That means rejecting the assumption that we must immediately start atoning for our excesses. Solutions like the Kyoto treaty amount to expensive hair shirts that appeal to penitents but not necessarily to economists. Even economists who support the Kyoto treaty acknowledge that it will make only a small difference far in the future while imposing serious costs today.
And those costs seem too high to other economists, like the four Nobel laureates and their colleagues who met in Copenhagen in 2004 to study proposals to help the world's poor. The Copenhagen Consensus, as they called it, was that programs to slow global warming are one of the worst investments -- far less worthwhile than programs to immediately combat disease and improve drinking water and sanitation.
Saving lives now makes more sense than spending large sums to avert biblical punishments that may never come. Scientists agree that the planet seems to be warming, but their models are so crude that they're unsure about how much it will heat up or how much damage will be done. There's a chance the warming could be mild enough to produce net benefits.
For now, the best strategy is to refine the forecasts and look for the cheapest and least painful ways to counteract global warming, including heretical ideas like geo-engineering schemes to cool the planet by blocking sunlight. It's hard today to imagine how that would be done -- or how environmentalists would ever allow something so ''unnatural.'' But maybe they could be convinced that we're just resetting God's thermostat back to the eighth day of Creation.
Ma réflexion s'articule autour de deux points :
> le climat est très complexe à modéliser et on peut faire dire, le pire étant quand c'est inconscient, ce qu'on veut à un modèle qu'on a du mal à recaler (je le sais, j'en ai fait), même pour des choses plus simples que le climat.
Par exemple, on me dit : la montée des eaux va amplifier l'évaporation, peut-être, mais est ce que ça ne va pas augmenter la capacité d'absorption du Co2 de l'océan et l'albedo global ? Je n'en sais fichtre rien.
Je suis conscient que les modèles nous prédisent des catastrophes mais voilà : je ne les crois pas fiables.
Si un astronome me disait qu'une comète va percuter la terre dans vingt ans, je serais tenté de le croire, car on maîtrise relativement bien les trajectoires des corps célestes, on a découvert des planètes avant de les voir en analysant les aberrations de trajectoires d'autres planètes. Où et quand la climatologie a-t-elle prouvé un tel degré de connaissance ?
On n'est pas capable de donner une météo fiable à15 jours et on serait capable de prévoir le climat dans 100 ans ? Alors que des deux problèmes, le deuxième est peut-être le plus complexe et qu'il ne mobilise pas autant de moyens que le premier ?
> or, les décisions prises suite à ces modèles et ces projections sont extrêmement couteuses, cet argent ne serait il pas mieux utilisé ailleurs (lutte contre le SIDA, éducation, etc.)
Je disais que, dans un cas aussi incertain, il vaut mieux réagir qu'anticiper, ou, si vous préférez, anticiper plus tardivement plutôt que de prendre des décisions hatives.
J'avais oublié un point, c'est : "Messieurs les savants, continuez à travailler et à raffiner notre savoir, perfectionnez vos modèles."
Je me suis souvenu (mieux vaut tard que jamais) que sur ce sujet j'avais déjà publié un article :
La relative absence d'importance d'empêcher le réchauffement global (B. Lomborg)
Enfin, dans la pile de Herald Tribune en retard, j'ai trouvé cet article sur le fait que les dirigeants chrétiens évangéliques tournent écolos. Il ne pouvait mieux tomber puisqu'il recoupe exactement mon propos (oui, oui, je sais encore un argument d'autorité) :
(Vous trouverez au lien suivant l'article de RH Nelson sur environnementalisme et théologie cité par J. Tierney : ENVIRONMENTAL RELIGION: A THEOLOGICAL CRITIQUE)
And on the Eighth Day, God Went Green By JOHN TIERNEY (NYT)
816 wordsPublished: February 11, 2006
And on the eighth day, God said, Let there be a thermostat for the heavens and the earth, and God saw that it was good. And God said, Let no man adjust it more than 2 degrees Fahrenheit, or 1 degree Celsius, until the end of time.
Now that evangelical Christians have joined the battle against global warming, we may as well acknowledge that America has one truly national religion: environmentalism.
Its tenets, already taken for granted in the blue states, were embraced this week by the Christian leaders who formed the Evangelical Climate Initiative. They haven't yet rewritten Genesis, but their advertising campaign warns of ''millions of deaths'' from biblical scourges -- floods, droughts, pestilence -- unless humans make a ''sacred commitment'' to stop global warming.
It may look odd for evangelicals to be taking up Hollywood's most fashionable cause, but the alliance makes perfect sense. Environmentalism has always fundamentally been a religion -- ''Calvinism minus God,'' in the words of Robert Nelson, a professor of environmental policy at the University of Maryland. He calls the global warming debate the latest example of environmentalist creationism.
The Puritans and other Calvinists believed that God was revealed not just in Scripture but also in the ''Book of Nature.'' To them, the wilderness was an unchanged record of God's handiwork at ''the Creation,'' offering a glimpse of the world before man's pride and sinfulness alienated him from nature and caused him to be expelled from Eden.
Environmentalists have had similar notions, starting with John Muir, who considered nature ''a mirror reflecting the Creator.'' Al Gore urged the ''moral courage'' to secure ''our place within creation.'' When Bruce Babbitt was secretary of the interior, he called plants and animals ''a direct reflector of divinity,'' and he warned Americans not to ''recklessly destroy the patterns of creation.''
There is one large problem with this version of creationism. The world we see was not created in a week, and it has looked a lot different in the past.
The forests that seemed divine to the Puritans and to Muir and Babbitt were not present at the Creation. They were merely the latest adaptation to changing climatic conditions and competition with other species, including humans -- Indians had been managing the forests by cutting trees and setting fires. There is no such thing as a ''natural'' forest in America, Nelson writes, unless you reject creationism and define nature as ''the Darwinian vision of unremitting struggle for survival.''
Darwin's Book of Nature isn't as morally satisfying as Calvin's, at least not for those who enjoy berating Americans for their sinful desires to cut down trees and burn fossil fuels. But it does make for a clearer way to think about global warming. Instead of assuming that humans will be punished for tinkering with God's handiwork, you can consider the best strategy for our species' survival.
That means rejecting the assumption that we must immediately start atoning for our excesses. Solutions like the Kyoto treaty amount to expensive hair shirts that appeal to penitents but not necessarily to economists. Even economists who support the Kyoto treaty acknowledge that it will make only a small difference far in the future while imposing serious costs today.
And those costs seem too high to other economists, like the four Nobel laureates and their colleagues who met in Copenhagen in 2004 to study proposals to help the world's poor. The Copenhagen Consensus, as they called it, was that programs to slow global warming are one of the worst investments -- far less worthwhile than programs to immediately combat disease and improve drinking water and sanitation.
Saving lives now makes more sense than spending large sums to avert biblical punishments that may never come. Scientists agree that the planet seems to be warming, but their models are so crude that they're unsure about how much it will heat up or how much damage will be done. There's a chance the warming could be mild enough to produce net benefits.
For now, the best strategy is to refine the forecasts and look for the cheapest and least painful ways to counteract global warming, including heretical ideas like geo-engineering schemes to cool the planet by blocking sunlight. It's hard today to imagine how that would be done -- or how environmentalists would ever allow something so ''unnatural.'' But maybe they could be convinced that we're just resetting God's thermostat back to the eighth day of Creation.
samedi, février 25, 2006
Une leçon de Japonais ?
La martingale japonaise
LE MONDE 25.02.06 12h55 • Mis à jour le 25.02.06 12h55
Encore un pays qui obtient le but que la France s'avère incapable d'atteindre, voire juge inatteignable : une forte croissance, le plein-emploi, une insertion réussie dans la mondialisation, sans pour autant tout adopter du modèle libéral à l'américaine. Le Japon a trouvé la martingale. Sa croissance a été de 2,8 % l'an passé, le double de la France, son taux de chômage est de 4,6 %, les grandes entreprises bâtissent de nouvelles usines au Japon malgré les coûts, la confiance de la population est au plus haut.
La transformation est surprenante. Il y a encore trois ans, le Japon semblait épuisé, trop vieux dans un monde asiatique en plein boom, son système bancaire plombé par des dettes, l'économie plongée dans une destructrice déflation, la classe politique, archaïque, poursuivie par une série sans fin de scandales. Les financiers de Wall Street le condamnaient avec la méchanceté de la proie survivante par une blague : "Quelle est la différence entre le Japon et l'Argentine ? Deux ans."
Que s'est-il passé ? Une révolution incrémentale, dit-on à Tokyo. Tout du modèle a été modifié, mais sans que les principes le soient. Le pays s'est donné du temps, dix ans, quinze ans, mais il sort solidement rénové de sa crise.
Début des années 1990, l'économie nippone, si flamboyante dans les décennies précédentes au point de menacer la suprématie américaine, s'écroule. Trop forte de ses succès, elle a plongé dans la spéculation immobilière et boursière, dans l'excès des capacités industrielles, des dettes, des effectifs.
La sortie ne vient "aucunement de l'Etat" et d'une relance keynésienne, disent, unanimes, les économistes tokyoïtes [ça mérite d'être précisé puisque certains en France pensent encore que la relance keynésienne existe. Certes, elle existe, comme les OVNIs, seulement dans la tête de ceux qui y croient]. Non que les gouvernements n'aient pas essayé : les financements par le déficit ne manquent pas au début des années 1990, pour qui des routes, qui des quartiers neufs, qui des hôtels de ville somptueux. Ces dépenses n'ont pour effet que de porter la dette à 160 % du PIB, record absolu des pays développés. Le gouvernement Koizumi a arrêté cette politique inefficace en 2001.
La source du renouveau vient entièrement du secteur privé. Les grandes firmes, à l'image de Toyota ou de Nissan, sauvée par Renault, s'engagent dans une stratégie double : pousser la recherche-développement pour faire passer le Japon du statut de copieur à celui d'inventeur, et abaisser franchement leurs coûts. Le modèle industriel intégré est abandonné au profit de la sous-traitance et de la concurrence. Quant aux effectifs, les entreprises ne touchent pas à l'emploi à vie des salariés à temps plein, syndiqués, mais les CDD et autres précaires passent à 43 % des effectifs globaux (pour les sociétés cotées en Bourse). Les salariés "flexibles" touchent en moyenne la moitié de ce que gagnent les salariés "normaux". Résultat : "Les coûts baissent de 30 % à 35 %", selon Jasper Koll, économiste de Merrill Lynch. On peut contester cette forme duale de l'emploi, mais elle est efficace : les profits des entreprises remontent, elles remboursent leurs dettes, regagnent une forte compétitivité. Aujourd'hui que la reprise est confirmée, l'emploi en CDI remplace progressivement les CDD.
Parallèlement, le capitalisme nippon fait sauter l'intégration banque-industrie (43 % des entreprises cotées avaient un actionnariat croisé, avec une part des étrangers limitée à 6 %), introduit de nouvelles règles comptables, révise sa "corporate gouvernance", durcit les lois antitrust, crée des fonds de gestion et accepte les OPA, même agressives. Des restructurations s'engagent : les firmes pétrolières passe de 14 à 4, les papetières de 14 à 3, les banques de 15 à 3.
Le scandale du portail Internet japonais Livedoor donne l'impression d'une chute dans un libéralisme financier et magouilleur "à la Enron". C'est en réalité une exception dans un Japon qui a introduit les méthodes américaines pour ce qu'elles avaient d'utile dans l'exigence de transparence et de mise au jour des problèmes, alors les Japonais ont tendance à les cacher. Mais, comme le décrit l'économiste français Robert Boyer, le Japon n'a fait, selon sa tradition historique, qu'hybrider à nouveau son système. De l'art subtil du "à prendre et à laisser"...
Mais la vraie source du succès nippon vient de son insertion dans l'Asie en mouvement. Menacé directement par la Chine et les autres pays à bas coût de main-d'oeuvre, le Japon a commencé à délocaliser massivement dans les années 1980. Puis il s'est ravisé, et on observe aujourd'hui un rapatriement. La Chine pillant sans vergogne, les firmes nippones ont compris qu'il était de leur intérêt de conserver au Japon toutes les fabrications stratégiques. De même pour ce qu'elles nomment les "productions coeurs", les lecteurs laser pour Sharp ou les moteurs pointus pour Toyota, même si le coût en est un peu rehaussé. De sorte que les grands groupes nippons organisent leurs usines sur le schéma d'un "réseau asiatique" : la recherche, le design et les composants essentiels au Japon, les pièces en Thaïlande ou en Indonésie et le montage final en Chine, le Japon conservant l'architecture d'ensemble bien serrée dans ses mains.
La dette, le vieillissement, les inégalités ? Les réformes ne sont pas finies, rien n'est jamais fini, n'oubliez pas le kaizen, le mouvement perpétuel. Le Japon est optimiste. Le Japon a réussi.
Éric Le Boucher
Article paru dans l'édition du 26.02.06
LE MONDE 25.02.06 12h55 • Mis à jour le 25.02.06 12h55
Encore un pays qui obtient le but que la France s'avère incapable d'atteindre, voire juge inatteignable : une forte croissance, le plein-emploi, une insertion réussie dans la mondialisation, sans pour autant tout adopter du modèle libéral à l'américaine. Le Japon a trouvé la martingale. Sa croissance a été de 2,8 % l'an passé, le double de la France, son taux de chômage est de 4,6 %, les grandes entreprises bâtissent de nouvelles usines au Japon malgré les coûts, la confiance de la population est au plus haut.
La transformation est surprenante. Il y a encore trois ans, le Japon semblait épuisé, trop vieux dans un monde asiatique en plein boom, son système bancaire plombé par des dettes, l'économie plongée dans une destructrice déflation, la classe politique, archaïque, poursuivie par une série sans fin de scandales. Les financiers de Wall Street le condamnaient avec la méchanceté de la proie survivante par une blague : "Quelle est la différence entre le Japon et l'Argentine ? Deux ans."
Que s'est-il passé ? Une révolution incrémentale, dit-on à Tokyo. Tout du modèle a été modifié, mais sans que les principes le soient. Le pays s'est donné du temps, dix ans, quinze ans, mais il sort solidement rénové de sa crise.
Début des années 1990, l'économie nippone, si flamboyante dans les décennies précédentes au point de menacer la suprématie américaine, s'écroule. Trop forte de ses succès, elle a plongé dans la spéculation immobilière et boursière, dans l'excès des capacités industrielles, des dettes, des effectifs.
La sortie ne vient "aucunement de l'Etat" et d'une relance keynésienne, disent, unanimes, les économistes tokyoïtes [ça mérite d'être précisé puisque certains en France pensent encore que la relance keynésienne existe. Certes, elle existe, comme les OVNIs, seulement dans la tête de ceux qui y croient]. Non que les gouvernements n'aient pas essayé : les financements par le déficit ne manquent pas au début des années 1990, pour qui des routes, qui des quartiers neufs, qui des hôtels de ville somptueux. Ces dépenses n'ont pour effet que de porter la dette à 160 % du PIB, record absolu des pays développés. Le gouvernement Koizumi a arrêté cette politique inefficace en 2001.
La source du renouveau vient entièrement du secteur privé. Les grandes firmes, à l'image de Toyota ou de Nissan, sauvée par Renault, s'engagent dans une stratégie double : pousser la recherche-développement pour faire passer le Japon du statut de copieur à celui d'inventeur, et abaisser franchement leurs coûts. Le modèle industriel intégré est abandonné au profit de la sous-traitance et de la concurrence. Quant aux effectifs, les entreprises ne touchent pas à l'emploi à vie des salariés à temps plein, syndiqués, mais les CDD et autres précaires passent à 43 % des effectifs globaux (pour les sociétés cotées en Bourse). Les salariés "flexibles" touchent en moyenne la moitié de ce que gagnent les salariés "normaux". Résultat : "Les coûts baissent de 30 % à 35 %", selon Jasper Koll, économiste de Merrill Lynch. On peut contester cette forme duale de l'emploi, mais elle est efficace : les profits des entreprises remontent, elles remboursent leurs dettes, regagnent une forte compétitivité. Aujourd'hui que la reprise est confirmée, l'emploi en CDI remplace progressivement les CDD.
Parallèlement, le capitalisme nippon fait sauter l'intégration banque-industrie (43 % des entreprises cotées avaient un actionnariat croisé, avec une part des étrangers limitée à 6 %), introduit de nouvelles règles comptables, révise sa "corporate gouvernance", durcit les lois antitrust, crée des fonds de gestion et accepte les OPA, même agressives. Des restructurations s'engagent : les firmes pétrolières passe de 14 à 4, les papetières de 14 à 3, les banques de 15 à 3.
Le scandale du portail Internet japonais Livedoor donne l'impression d'une chute dans un libéralisme financier et magouilleur "à la Enron". C'est en réalité une exception dans un Japon qui a introduit les méthodes américaines pour ce qu'elles avaient d'utile dans l'exigence de transparence et de mise au jour des problèmes, alors les Japonais ont tendance à les cacher. Mais, comme le décrit l'économiste français Robert Boyer, le Japon n'a fait, selon sa tradition historique, qu'hybrider à nouveau son système. De l'art subtil du "à prendre et à laisser"...
Mais la vraie source du succès nippon vient de son insertion dans l'Asie en mouvement. Menacé directement par la Chine et les autres pays à bas coût de main-d'oeuvre, le Japon a commencé à délocaliser massivement dans les années 1980. Puis il s'est ravisé, et on observe aujourd'hui un rapatriement. La Chine pillant sans vergogne, les firmes nippones ont compris qu'il était de leur intérêt de conserver au Japon toutes les fabrications stratégiques. De même pour ce qu'elles nomment les "productions coeurs", les lecteurs laser pour Sharp ou les moteurs pointus pour Toyota, même si le coût en est un peu rehaussé. De sorte que les grands groupes nippons organisent leurs usines sur le schéma d'un "réseau asiatique" : la recherche, le design et les composants essentiels au Japon, les pièces en Thaïlande ou en Indonésie et le montage final en Chine, le Japon conservant l'architecture d'ensemble bien serrée dans ses mains.
La dette, le vieillissement, les inégalités ? Les réformes ne sont pas finies, rien n'est jamais fini, n'oubliez pas le kaizen, le mouvement perpétuel. Le Japon est optimiste. Le Japon a réussi.
Éric Le Boucher
Article paru dans l'édition du 26.02.06
Les dinosaures à Kyoto
Un lecteur (béni soit il) me signale que j'ai raconté des fadaises dans le message Protocole de Kyoto : les Américains en pointe
J'avoue à la relecture que j'ai un peu embrouillé les chiffres, parce que, effectivement, je prends la différence par rapportaux objectifs.
Prenons les rapports de l'ONU sur la période 1990-2002 (GHG = Green House Gas : gaz à effet de serre) :
GHG/hab GHG/PNB
France -7 % -20.8 %
Allemagne -21.7 % -34 .2 %
USA -1.6 % -20.2 %
De plus, la France et l'Allemagne partent d'un niveau nettement plus bas.
Bref, vous connaissez le proverbe "Il y a les mensonges, les gros mensonges et les statistiques".
Je vous présente mes excuses pour cette erreur qui voulait illustrer un point pour lequel je n'ai au fond besoin d'aucun chiffre, à savoir que le réchauffement climatique est un faux problème et qu'il n'y a pas besoin de mesures gouvernementales.
Je suis tombé dans le panneau que je reproche à d'autres, le fétichisme des chiffres : croire que les chiffres sont plus vrais, qu'ils prouvent plus, que les raisonnements, alors qu'un chiffre ne prouve rien sans la logique qui va derrière.
Examinons sans chiffres ces histoires de réchauffement climatique, qui, à mes yeux, reposent sur un enchainement de pétitions de principe (1), c'est-à-dire sur rien :
a) Le climat se réchauffe
b) La cause de ce réchauffement est l'activité humaine
c) le réchauffement climatique est dangereux (pour qui ? Pour la nature telle qu'on la connaît ? Pour l'homme ?). Il faut agir.
Admettons le a), encore qu'il faudrait prouver que l'augmentation de température constatée depuis quelques années est une tendance longue et non un effet passager de la variabilité naturelle.
S'agissant du b), on entre en pleine rigolade.
En effet, si il y a bien une chose dont nous sommes sûrs à propos du climat, c'est d'ailleurs notre seule certitude, c'est que le climat est très complexe à modéliser et fortement non linéaire ; autrement dit, l'oubli ou la mauvaise évaluation d'un des paramètres (par exemple la capacité d'absorbtion de CO2 des océans) peuvent changer résultats, interprétations et projections du tout au tout.
Enfin, en admettant a) et b), il reste la question fondamentale : pourquoi le réchauffement climatique serait-il mauvais ? Cette question a-t-elle même un sens ?
Depuis la naissance de la terre, puis de l'apparition de l'homme, la nature et l'homme n'ont cessé d'évoluer, pourquoi faudrait-il figer la situation de 2006 ? Sommes nous si savants que nous pouvons prévoir totalement les conséquences d'un réchauffement ? Evidemment non, nous ne pouvons prévoir que ce à quoi nous songeons, c'est-à-dire une prolongation des tendances actuelles, mais il nous est impossible de prévoir une rupture.
Tout ce qu'on peut dire, c'est que quand le climat change, la vie des hommes change, pour certains en bien, pour d'autres en mal. Belle découverte !
Et si les dinosaures avaient décidé qu'ils avaient intérêt à figer l'évolution de la terre ?
Que faire sur cette question climatique ? Réagir. Non pas anticiper, car on risque de faire des choses extrêmement couteuses (et l'argent utilisé là manque ailleurs) fondées sur de fausses anticipations, mais attendre les éventuelles conséquences et s'adapter.
Avez vous la tentation de me traiter d'irresponsable ? Tournez bien sept fois votre doigt sur le clavier avant, et considérez l'alternative suivante :
Est il plus responsable :
> de dépenser des milliards de dollars pour empêcher un phénomène dont les mécanismes, les conséquences et la nature bénéfique ou maléfique de ces conséquences sont inconnus ?
> d'attendre que les hypothétiques conséquences en question se manifestent pour décider comment agir ?
(1) : pétition de principe : tenir pour vraies des choses infondées ou qui demandent à être vérifiées, Hayek en recensaient quelques-uns :
> l'Etat dépense mieux son argent qu'un particulier
> l'Etat doit redistribuer les revenus
Bastiat signale que le summum de la pétition de principe consiste à le faire tenir dans le vocabulaire, dans un seul mot, pour qu'on n'en voit pas l'absurdité, il cite deux exemples :
> tributaire. Un pays importateur est tributaire de ses importations.
La pétition de principe est que l'importation n'est pas souhaitable, qu'elle traduit une situation d'infériorité, de dépendance. Mais c'est oublier que l'importation est un échange. Qui est le plus dépendant : l'occident du pétrole saoudien ou l'Arabie saoudite de l'argent occidental ?
> nous sommes envahis de produits étrangers. Quel rapport entre des vaisseaux déversant le fer et le feu et des vaisseaux déversant des biens bon marché qui feront le bonheur des consommateurs qui voudront bien les acheter ?
Il existe des pétitions de principe modernes :
> L'ultra-libéralisme. Pourquoi le libéralisme serait-il forcément outrancier ?
> La protection sociale. Où est-il prouvé que distribuer à certains de l'argent pris à d'autres protège et en quoi est-ce social ?
J'avoue à la relecture que j'ai un peu embrouillé les chiffres, parce que, effectivement, je prends la différence par rapportaux objectifs.
Prenons les rapports de l'ONU sur la période 1990-2002 (GHG = Green House Gas : gaz à effet de serre) :
GHG/hab GHG/PNB
France -7 % -20.8 %
Allemagne -21.7 % -34 .2 %
USA -1.6 % -20.2 %
De plus, la France et l'Allemagne partent d'un niveau nettement plus bas.
Bref, vous connaissez le proverbe "Il y a les mensonges, les gros mensonges et les statistiques".
Je vous présente mes excuses pour cette erreur qui voulait illustrer un point pour lequel je n'ai au fond besoin d'aucun chiffre, à savoir que le réchauffement climatique est un faux problème et qu'il n'y a pas besoin de mesures gouvernementales.
Je suis tombé dans le panneau que je reproche à d'autres, le fétichisme des chiffres : croire que les chiffres sont plus vrais, qu'ils prouvent plus, que les raisonnements, alors qu'un chiffre ne prouve rien sans la logique qui va derrière.
Examinons sans chiffres ces histoires de réchauffement climatique, qui, à mes yeux, reposent sur un enchainement de pétitions de principe (1), c'est-à-dire sur rien :
a) Le climat se réchauffe
b) La cause de ce réchauffement est l'activité humaine
c) le réchauffement climatique est dangereux (pour qui ? Pour la nature telle qu'on la connaît ? Pour l'homme ?). Il faut agir.
Admettons le a), encore qu'il faudrait prouver que l'augmentation de température constatée depuis quelques années est une tendance longue et non un effet passager de la variabilité naturelle.
S'agissant du b), on entre en pleine rigolade.
En effet, si il y a bien une chose dont nous sommes sûrs à propos du climat, c'est d'ailleurs notre seule certitude, c'est que le climat est très complexe à modéliser et fortement non linéaire ; autrement dit, l'oubli ou la mauvaise évaluation d'un des paramètres (par exemple la capacité d'absorbtion de CO2 des océans) peuvent changer résultats, interprétations et projections du tout au tout.
Enfin, en admettant a) et b), il reste la question fondamentale : pourquoi le réchauffement climatique serait-il mauvais ? Cette question a-t-elle même un sens ?
Depuis la naissance de la terre, puis de l'apparition de l'homme, la nature et l'homme n'ont cessé d'évoluer, pourquoi faudrait-il figer la situation de 2006 ? Sommes nous si savants que nous pouvons prévoir totalement les conséquences d'un réchauffement ? Evidemment non, nous ne pouvons prévoir que ce à quoi nous songeons, c'est-à-dire une prolongation des tendances actuelles, mais il nous est impossible de prévoir une rupture.
Tout ce qu'on peut dire, c'est que quand le climat change, la vie des hommes change, pour certains en bien, pour d'autres en mal. Belle découverte !
Et si les dinosaures avaient décidé qu'ils avaient intérêt à figer l'évolution de la terre ?
Que faire sur cette question climatique ? Réagir. Non pas anticiper, car on risque de faire des choses extrêmement couteuses (et l'argent utilisé là manque ailleurs) fondées sur de fausses anticipations, mais attendre les éventuelles conséquences et s'adapter.
Avez vous la tentation de me traiter d'irresponsable ? Tournez bien sept fois votre doigt sur le clavier avant, et considérez l'alternative suivante :
Est il plus responsable :
> de dépenser des milliards de dollars pour empêcher un phénomène dont les mécanismes, les conséquences et la nature bénéfique ou maléfique de ces conséquences sont inconnus ?
> d'attendre que les hypothétiques conséquences en question se manifestent pour décider comment agir ?
(1) : pétition de principe : tenir pour vraies des choses infondées ou qui demandent à être vérifiées, Hayek en recensaient quelques-uns :
> l'Etat dépense mieux son argent qu'un particulier
> l'Etat doit redistribuer les revenus
Bastiat signale que le summum de la pétition de principe consiste à le faire tenir dans le vocabulaire, dans un seul mot, pour qu'on n'en voit pas l'absurdité, il cite deux exemples :
> tributaire. Un pays importateur est tributaire de ses importations.
La pétition de principe est que l'importation n'est pas souhaitable, qu'elle traduit une situation d'infériorité, de dépendance. Mais c'est oublier que l'importation est un échange. Qui est le plus dépendant : l'occident du pétrole saoudien ou l'Arabie saoudite de l'argent occidental ?
> nous sommes envahis de produits étrangers. Quel rapport entre des vaisseaux déversant le fer et le feu et des vaisseaux déversant des biens bon marché qui feront le bonheur des consommateurs qui voudront bien les acheter ?
Il existe des pétitions de principe modernes :
> L'ultra-libéralisme. Pourquoi le libéralisme serait-il forcément outrancier ?
> La protection sociale. Où est-il prouvé que distribuer à certains de l'argent pris à d'autres protège et en quoi est-ce social ?
vendredi, février 24, 2006
Libéralisme (P. Salin) (2)
Dans le message précédent déjà long, j'ai oublié trois exemples importants de solutions libérales :
L'immigration
> ouverture totale des frontières à l'immigration (liberté des individus)
> protection sociale (santé, retraite, chomage) par assurance individuelle. Donc une mauvaise incitation à l'immigration (profiter de la protection sociale financée par les autres) disparaît.
> liberté totale des employeurs et des bailleurs de choisir leurs employés et leurs locataires (suppression des lois anti-discrimination : on peut porter à titre personnel un jugement négatif contre le racisme et l'immigration, mais l'Etat et la loi n'ont pas à s'immiscer dans ses questions qui relèvent du délit d'opinion, seule est condamnable la violence)
Pour Salin, les problèmes d'immigration vienne d'une mauvaise répartition des responsabilités : la protection sociale est collectiviste alors qu'elle devrait être individuelle, d'où des effets "pervers", notamment en matière d'immigration, qui ne sont, dans l'optique libérale, que des effets normaux de l'adaptation des hommes aux circonstances.
Je suis d'autant plus en accord avec Salin sur ce point que deux constations viennent le renforcer :
> c'est exactement le système qui a été pratiqué aux USA au 19ème siècle et personne ne peut nier que l'intégration des immigrés se soit faite, et dans des proportions bien plus considérables qu'en France. Bien sûr, ce système a des inconvénients, mais, à moins de refuser de penser et de réfléchir (ce dont je soupçonne certains anti-libéraux, qui réagissent comme si l'intention prétendument altruiste -mais tout le monde peut se dire altruiste- suffisait à garantir le résultat), il faut bien constater que tous les systèmes, même et surtout ceux qui se disent les plus généreux, ont des inconvénients, il s'agit donc de peser le pour et le contre et de choisir.
> la combinaison d'un système social collectiviste et d'une immigration dite "de peuplement" (c'est-à-dire pour appeler un chat un chat : de gens qui ne sont pas venus pour travailler mais pour profiter des diverses prestations dites sociales) conduit à des résultats dévastateurs en France qu'on peut constater tous les jours. Pour ne prendre qu'un exemple : je connais (vaguement) un jeune Français d'origine marocaine, qui n'est dans sa tête ni français (le genre "Je hais la France") ni marocain (il est dépaysé au Maroc) ; il est au RMI, il ne cherche pas de travail, n'a pas l'intention d'en chercher, il vit chez ses parents, il fait quelques petits boulots au noir une fois tous les six mois et traficouille à droite à gauche le reste du temps. Je ne vois pas bien quel avenir il peut avoir. Et je pense qu'il en est là en grande partie parce que les autres, sous le concept vague de "la collectivité", ont toujours payé pour lui (les allocs, l'école gratuite, le RMI). A quelle étape de son éducation notre société lui a-t-elle signifié concrètement "Tu gagneras ta vie à la sueur de ton front" ? Jamais. Il est un assisté, et ce n'est pas généreux, c'est dégradant.
La relance par l'épargne
Pascal Salin considère, et si vous connaissez mon blog, la rengaine vous est connue, que la relance de la consommation est de la foutaise démagogique. Par contre, la relance par l'épargne (cesser de taxer outrageusement l'épargne) est efficace, à condition que cette épargne s'investisse dans la création de richesses et non dans de stériles bons du trésor, car c'est l'investissement, et non la consommation, qui prépare l'avenir. Mais pour cela, il faudrait que l'Etat se serre la ceinture, autre rengaine connue.
Mais Salin raisonne très peu en macro-économie puisqu'il estime que ça n'a pas de sens, son argumentation pour la relance par l'épargne s'appuie sur deux points :
> la responsabilité est individuelle, l'argent dépensé par un organe où il n'y a pas de propriétaire humain, individuel, en l'occurrence l'Etat, est de l'argent dépensé de manière irresponsable.
> au contraire, l'épargnant est fortement motivé pour gérer son argent de manière responsable.
Donc, il faut préférer l'épargne à l'impot, même redistribué.
La spéculation et les fonds de pension
Salin ne condamne pas la spéculation, puisqu'il considère que spéculer est dans la nature humaine (presque chaque transaction est le résultat d'une spéculation : vous vendez qq chose en espérant en tirer plus que ce qu'il vous a couté), donc il ne condamne pas la spéculation financière.
Cependant, il a une analyse du rôle des fonds de pension intéressante : il considère que, dans beaucoup de cas, les responsabilités y sont mal définies, les épargnants sont connus, mais ils ne sont pas réellement propriétaires au sens où peuvent l'être des propriétaires d'une compagnie d'assurance par exemple. Les managers de ces fonds ont donc les mains libres pour se laisser aller au court-termisme, puiqu'ils ne sont pas vraiment des propriétaires voulant faire fructifier leur bien sur le long terme et qu'ils ne sont pas controlés par de vrais propriétaires. C'est un exemple non étatique où une définition floue du duo propriété-responsabilité conduit à de mauvais effets.
Implicitement, il préfère une définition claire : une compagnie d'assurances avec des propriétaires bien définis et des assurés-retraites traités comme tous les assurés, plutôt que la structure batarde, qui ressemble à celle d'une association, de certains fonds de pension.
Nota : ce qui fait la différence entre une association et une société, c'est que l'association n'a pas de propriétaires. Comme il n'y a pas de titres de propriété pour définir les apports de chacun, chacun doit apporter la même chose que les autres, c'est pourquoi le législateur, pour une fois sage (mais c'était en 1901, à l'époque, on ne faisait pas des lois uniquement pour plaire au public du 20 h suivant la dernière émotion ou la dernière mode), oblige à ce que la cotisation soit la même pour tous les membres.
Une réflexion influencée par Montaigne et La Boétie
Je suis imperméable à l'esprit de système. C'est ce qui m'intéresse dans l'approche libérale : on pose quelques principes, puis ensuite les hommes s'en débrouillent, il n'y a pas besoin d'avoir réponse à tout, un avis sur tout. Ceci étant, il y a hic : le libéral considère que la liberté est souhaitable pour des questions de principes (c'est la liberté qui permet aux hommes d'interagir de manière à ce que le tout soit supérieur à l'ensemble des parties), indépendamment des désirs des hommes.
Mais il se trouve que si la liberté n'est pas désirée, ce qui est de plus en plus le cas en France (1), le mécanisme de l'éthique de responsabilité qui va avec peut se détraquer en une sorte de dédoublement, où l'on admet sa responsabilité tout en la niant, les exemples sont légion : le juge Burgaud, les protagonistes du sang contaminé, les nonistes du 29 mai, etc.
Il n'empêche : le libéralisme est un humanisme, peut-être le seul.
(1) je suis en train de lire Gérard Mermet, l'auteur des Francoscopies, qui passe en revue l'état de l'opinion française et il a des mots absolument terribles : pour lui, une partie des Français fuit le monde tel qu'il est, donc la liberté et la responsabilité, au profit du fantasme politique ("un autre monde"), du repli sur la famille et de l'importance croissante donnée aux loisirs. Et surtout, en corollaire à tout cela, pour répondre à ceux qui ne verraient dans cette orientation que des choix légitimes, il constate que le niveau d'exigence morale des Français est un des plus bas d'Europe (Par exemple, à la question "A-t-on toujours tort de frauder l'assurance-chomage ?", les Français répondent oui à 69 % alors que les Danois sont autour de 90 % -je n'ai pas le chiffre sous la main). Mermet fait clairement le lien entre attente de l'Etat (refus de la liberté individuelle, priorité aux solutions collectives) et sens moral bas (faible sens des responsabilités).
J'avoue que j'ai été surpris, bêtement, que Mermet parle d'exigence morale et de sens des responsabilités : je le prenais plutôt pour un type de gauche, ce qu'il est d'ailleurs peut-être, et ces dernières années, la gauche nous a tellement habitué à parler de responsablité collective (expression vide de sens à mes yeux) que ça en devient surprenant de lire un présumé gauchiste évoquant la responsabilité (nécessairement individuelle à mon avis).
L'immigration
> ouverture totale des frontières à l'immigration (liberté des individus)
> protection sociale (santé, retraite, chomage) par assurance individuelle. Donc une mauvaise incitation à l'immigration (profiter de la protection sociale financée par les autres) disparaît.
> liberté totale des employeurs et des bailleurs de choisir leurs employés et leurs locataires (suppression des lois anti-discrimination : on peut porter à titre personnel un jugement négatif contre le racisme et l'immigration, mais l'Etat et la loi n'ont pas à s'immiscer dans ses questions qui relèvent du délit d'opinion, seule est condamnable la violence)
Pour Salin, les problèmes d'immigration vienne d'une mauvaise répartition des responsabilités : la protection sociale est collectiviste alors qu'elle devrait être individuelle, d'où des effets "pervers", notamment en matière d'immigration, qui ne sont, dans l'optique libérale, que des effets normaux de l'adaptation des hommes aux circonstances.
Je suis d'autant plus en accord avec Salin sur ce point que deux constations viennent le renforcer :
> c'est exactement le système qui a été pratiqué aux USA au 19ème siècle et personne ne peut nier que l'intégration des immigrés se soit faite, et dans des proportions bien plus considérables qu'en France. Bien sûr, ce système a des inconvénients, mais, à moins de refuser de penser et de réfléchir (ce dont je soupçonne certains anti-libéraux, qui réagissent comme si l'intention prétendument altruiste -mais tout le monde peut se dire altruiste- suffisait à garantir le résultat), il faut bien constater que tous les systèmes, même et surtout ceux qui se disent les plus généreux, ont des inconvénients, il s'agit donc de peser le pour et le contre et de choisir.
> la combinaison d'un système social collectiviste et d'une immigration dite "de peuplement" (c'est-à-dire pour appeler un chat un chat : de gens qui ne sont pas venus pour travailler mais pour profiter des diverses prestations dites sociales) conduit à des résultats dévastateurs en France qu'on peut constater tous les jours. Pour ne prendre qu'un exemple : je connais (vaguement) un jeune Français d'origine marocaine, qui n'est dans sa tête ni français (le genre "Je hais la France") ni marocain (il est dépaysé au Maroc) ; il est au RMI, il ne cherche pas de travail, n'a pas l'intention d'en chercher, il vit chez ses parents, il fait quelques petits boulots au noir une fois tous les six mois et traficouille à droite à gauche le reste du temps. Je ne vois pas bien quel avenir il peut avoir. Et je pense qu'il en est là en grande partie parce que les autres, sous le concept vague de "la collectivité", ont toujours payé pour lui (les allocs, l'école gratuite, le RMI). A quelle étape de son éducation notre société lui a-t-elle signifié concrètement "Tu gagneras ta vie à la sueur de ton front" ? Jamais. Il est un assisté, et ce n'est pas généreux, c'est dégradant.
La relance par l'épargne
Pascal Salin considère, et si vous connaissez mon blog, la rengaine vous est connue, que la relance de la consommation est de la foutaise démagogique. Par contre, la relance par l'épargne (cesser de taxer outrageusement l'épargne) est efficace, à condition que cette épargne s'investisse dans la création de richesses et non dans de stériles bons du trésor, car c'est l'investissement, et non la consommation, qui prépare l'avenir. Mais pour cela, il faudrait que l'Etat se serre la ceinture, autre rengaine connue.
Mais Salin raisonne très peu en macro-économie puisqu'il estime que ça n'a pas de sens, son argumentation pour la relance par l'épargne s'appuie sur deux points :
> la responsabilité est individuelle, l'argent dépensé par un organe où il n'y a pas de propriétaire humain, individuel, en l'occurrence l'Etat, est de l'argent dépensé de manière irresponsable.
> au contraire, l'épargnant est fortement motivé pour gérer son argent de manière responsable.
Donc, il faut préférer l'épargne à l'impot, même redistribué.
La spéculation et les fonds de pension
Salin ne condamne pas la spéculation, puisqu'il considère que spéculer est dans la nature humaine (presque chaque transaction est le résultat d'une spéculation : vous vendez qq chose en espérant en tirer plus que ce qu'il vous a couté), donc il ne condamne pas la spéculation financière.
Cependant, il a une analyse du rôle des fonds de pension intéressante : il considère que, dans beaucoup de cas, les responsabilités y sont mal définies, les épargnants sont connus, mais ils ne sont pas réellement propriétaires au sens où peuvent l'être des propriétaires d'une compagnie d'assurance par exemple. Les managers de ces fonds ont donc les mains libres pour se laisser aller au court-termisme, puiqu'ils ne sont pas vraiment des propriétaires voulant faire fructifier leur bien sur le long terme et qu'ils ne sont pas controlés par de vrais propriétaires. C'est un exemple non étatique où une définition floue du duo propriété-responsabilité conduit à de mauvais effets.
Implicitement, il préfère une définition claire : une compagnie d'assurances avec des propriétaires bien définis et des assurés-retraites traités comme tous les assurés, plutôt que la structure batarde, qui ressemble à celle d'une association, de certains fonds de pension.
Nota : ce qui fait la différence entre une association et une société, c'est que l'association n'a pas de propriétaires. Comme il n'y a pas de titres de propriété pour définir les apports de chacun, chacun doit apporter la même chose que les autres, c'est pourquoi le législateur, pour une fois sage (mais c'était en 1901, à l'époque, on ne faisait pas des lois uniquement pour plaire au public du 20 h suivant la dernière émotion ou la dernière mode), oblige à ce que la cotisation soit la même pour tous les membres.
Une réflexion influencée par Montaigne et La Boétie
Je suis imperméable à l'esprit de système. C'est ce qui m'intéresse dans l'approche libérale : on pose quelques principes, puis ensuite les hommes s'en débrouillent, il n'y a pas besoin d'avoir réponse à tout, un avis sur tout. Ceci étant, il y a hic : le libéral considère que la liberté est souhaitable pour des questions de principes (c'est la liberté qui permet aux hommes d'interagir de manière à ce que le tout soit supérieur à l'ensemble des parties), indépendamment des désirs des hommes.
Mais il se trouve que si la liberté n'est pas désirée, ce qui est de plus en plus le cas en France (1), le mécanisme de l'éthique de responsabilité qui va avec peut se détraquer en une sorte de dédoublement, où l'on admet sa responsabilité tout en la niant, les exemples sont légion : le juge Burgaud, les protagonistes du sang contaminé, les nonistes du 29 mai, etc.
Il n'empêche : le libéralisme est un humanisme, peut-être le seul.
(1) je suis en train de lire Gérard Mermet, l'auteur des Francoscopies, qui passe en revue l'état de l'opinion française et il a des mots absolument terribles : pour lui, une partie des Français fuit le monde tel qu'il est, donc la liberté et la responsabilité, au profit du fantasme politique ("un autre monde"), du repli sur la famille et de l'importance croissante donnée aux loisirs. Et surtout, en corollaire à tout cela, pour répondre à ceux qui ne verraient dans cette orientation que des choix légitimes, il constate que le niveau d'exigence morale des Français est un des plus bas d'Europe (Par exemple, à la question "A-t-on toujours tort de frauder l'assurance-chomage ?", les Français répondent oui à 69 % alors que les Danois sont autour de 90 % -je n'ai pas le chiffre sous la main). Mermet fait clairement le lien entre attente de l'Etat (refus de la liberté individuelle, priorité aux solutions collectives) et sens moral bas (faible sens des responsabilités).
J'avoue que j'ai été surpris, bêtement, que Mermet parle d'exigence morale et de sens des responsabilités : je le prenais plutôt pour un type de gauche, ce qu'il est d'ailleurs peut-être, et ces dernières années, la gauche nous a tellement habitué à parler de responsablité collective (expression vide de sens à mes yeux) que ça en devient surprenant de lire un présumé gauchiste évoquant la responsabilité (nécessairement individuelle à mon avis).
mercredi, février 22, 2006
Libéralisme (P. Salin)
FFFF
Je saisis l'occasion de la critique de ce livre excellent pour faire une synthèse de ce qu'est le libéralisme à mes yeux (et à ceux de Pascal Salin, nos conceptions voisinant, ce dernier étant bien plus compétent que moi). J'en ai plus que soupé d'un certain anti-libéralisme idiot, qui ne se donne même pas la peine de se renseigner et de réfléchir.
Il est donc temps de remettre les choses en perspective. C'est un peu long, mais ça en vaut la peine.
Le libéralisme est avant une morale, une façon de voir l'homme et la vie en société. Pour bien le comprendre, il faut d'abord saisir la différence entre les constructivistes et les libéraux.
Constructivistes et libéraux
Les constructivistes, qui peuvent être de droite ou de gauche, pensent qu'on peut comprendre la société, en prédire l'évolution et la façonner. Les libéraux pensent que les interactions d'hommes libres donneront des résultats toujours plus riches que tout ce qui pourrait sortir du cerveau planificateur d'un technocrate.
Le libéral considère que vouloir diriger la société dans un sens ou dans l'autre est à la fois illégitime et vain. Pour lui, ce qu'on appelle des "effets pervers" (par exemple, la contribution Delalande qui, en augmentant le coût du licenciement des plus de 50 ans, fait qu'on en n'embauche plus) sont en réalité des "effets normaux" : les hommes s'adaptent aux législations qu'on essaie de leur imposer d'en haut et aboutissent à un résultat différent du but fixé techniquement, de façon scientiste.
Autre exemple d'effet "pervers" qui est en fait tout ce qu'il y a de plus normal : la protection des locataires qui fait que pour louer un appartement on doit fournir un vrai bottin de paperasserie.
Suivant la distinction de Hayek, un libéral gouverne selon les principes, un constructiviste suivant les directions. Un constructiviste dira : "Il faut faire telle et telle chose pour arriver à tel résultat." Le discours d'un libéral sera à peu près "Il faut prendre telle et telle mesure pour être en accord avec nos principes, mais je ne peux pas vous en prédire le résultat ; la seule chose que je peux vous dire, c'est que nos principes sont conformes à la nature humaine." Attention, il y a de faux libéraux, les utilitaristes, qui prennent le libéralisme comme un livre de recettes, mais qui restent des constructivistes.
Les constructivistes raisonnent par grandes masses, par agrégats humains (le pays, l'Etat, le commerce extérieur, le PIB, etc.) seuls moyens de tenter d'appréhender la société. Pour les libéraux, cette tentative de modélisation de la société est vaine, présomptueuse et méprisante pour les grandes resssources d'initiative et d'invention des hommes, et les agrégats sont, au mieux, des erreurs, au pire, des leurres dissimulant des intérêts individuels ; ce qui a fait dire à Bastiat que "l'Etat est une fiction à travers laquelle chacun essaie de profiter de tous". Pascal Salin parle rarement de "l'Etat" mais plus souvent "des hommes de l'Etat".
Pour un libéral, des choses aussi abstraites que l'intéret général, les biens publics, les externalités, la concurrence pure et parfaite n'existent pas et dissimulent des intérêts bien humains.
Par exemple, il est assez aisé aujourd'hui de voir que la prétendue défense du service public est le masque de la sauvegarde par les fonctionnaires, au détriment des contribuables, d'avantages acquis grâce à la capacité de contrainte étatique, qui peut forcer les hommes à payer pour des choses dont ils n'ont ni besoin ni envie.
L'Etat, c'est tout simplement la concrétisation de la violence et de la contrainte dans la société, comme l'avait très bien vu La Boétie dès 1550 dans Le discours de la servitude volontaire.
Pour un libéral conséquent l'Etat est l'ennemi, à une nuance près, où je me détache de P. Salin : le droit, il faut bien quelqu'un pour le faire respecter et finalement, ça ne peut être qu'un détenteur de violence légitime, c'est-à-dire l'Etat. C'est pourquoi je réduis l'Etat à police, justice, défense mais je le conserve.
Quant au quatrième rôle de l'Etat d'après Adam Smith (les investissements collectifs non rentables), je laisse la question en suspens.
L'Etat est clairement un mal, j'hésite juste à savoir si c'est un mal nécessaire ou non en théorie (la réponse de Salin est négative). En pratique, c'est clair : il ne faut pas trop compter sur une disparition de l'Etat ! Un amoindrissement drastique serait déjà bienvenu.
Une fable sur l'opposition constructivisme-libéralisme
Les automobiles apparaissent dans un village, c'est la foire aux accidents.
La solution constructiviste
Chaque automobiliste dépose son parcours le matin avant 9 h et l'administration, une fois en possession de tous les parcours, détermine les collisions éventuelles et autorise ou non les trajets.
La solution libérale
Les principes suivants sont édictés : les automobilistes roulent à droite, cèdent la priorité à droite et sont responsables des accidents qu'ils provoquent en enfreignant ces règles.
Les principes du libéralisme
La liberté
La liberté consiste à ne pas être contraint. La seule contrainte admissible est celle qui consiste à être empêché de contraindre autrui. Cette défintion négative de la liberté est importante. Une définition positive de la liberté ("la liberté est le droit de ...") conduit à l'affrontement, à cette fameuse "loi du plus fort" dénoncée par les anti-libéraux.
Les impots étant perçus par la contrainte (je ne suis pas libre de ne pas payer), ils sont un vol,
certes légal, mais un vol tout de même.
La propriété
Chaque bien est créé. Même une terre est "créée" par le premier à la mettre en valeur. C'est pourquoi les collectivistes, qui raisonnent comme si il y avait un stock de biens à distribuer ont moralement tort : ces biens, il faut toujours les prendre à quelqu'un, c'est pourquoi la "fonction redistributive de l'Etat" dissimule un vol, il s'agit toujours de prendre à un homme pour donner à un autre homme. Robin des bois était un gentil voleur, mais c'était un voleur quand même.
Ceci correspond à des situations très concrètes : on m'a parlé ce week-end d'un homme qui a volontairement arrêté de travailler à quarante ans, qui vit du RMI depuis dix ans, ayant fait savoir à son entourage qu'il n'avait pas l'intention de retravailler jamais. Il vit chez sa mère. C'est un abus, me direz-vous ? En êtes vous sûr ? C'est la raison d'être du système "redistributif" de prendre à certains pour donner à d'autres plus que ce que leur apporte leur travail. La situation que je vous décris est un cas extrême, non un abus, car il est conforme aux principes de la "redistribution".
La propriété est la garantie de la liberté : c'est la chose dont on est maître, qu'on peut garder et échanger sans contrainte.
La responsabilité
Autant la liberté avait une définition négative, autant la responsabilité est la coté positif de la propriété. Je suis responsable de mes biens. Pour un libéral, il n'y a pas de notion de faute, d'intention (on ne pénètre pas dans l'esprit des hommes) : si autrui subit du mal du fait d'un de mes biens, je suis responsable, que le mal soit voulu ou non.
Ceci est cohérent avec le fait qu'on considère que chaque homme est pris dans un réseau ramifié de relations avec d'autres hommes : il est impossible de prévoir toutes les conséquences de chacun de nos actes (on retrouve là l'opposition au constructivisme), le fait de ne pas avoir prévu la conséquence de nos actes ne peut donc être une excuse et ne dégage pas de la responsabilité. Pour inverser la phrase célèbre d'un ministre, le libéral pense que "pas coupable (pas de jugement moral), mais responsable".
Si je prête ma voiture à un homme sans permis et qu'il a un accident, je suis responsable.
C'est pourquoi les libéraux détestent tant le "principe de précaution" : il restreint la liberté, tout en étant intellectuellement incohérent (le principe de précaution supposerait d'appliquer le principe de précaution à lui-même et de s'en passer) alors que le principe de responsabilité suffit largement, encore faut-il le comprendre.
Le contrat
A partir de ces trois piliers du libéralisme (liberté, propriété, responsabilité), on en obtient un quatrième : le contrat. Le contrat est l'acte par lequel deux hommes libres entrent en relation, donnent ou échangent leurs propriétés de manière responsable. Le contrat est nécessairement bénéfique pour les deux parties, puisque que contracté librement : si l'une des parties était lésée, elle n'aurait pas contractée. Ceux qui jugent de l'extérieur un contrat déséquilibré font simplement un complexe de supériorité par rapport au contractant qu'ils estiment défavorisé.
Au nom de ce principe de la liberté et de la responsabilité des contractants appliqué à la propriété de sa force de travail par l'ouvrier, c'est le très libéral Bastiat qui s'est battu pour la première loi sur le droit de grève.
Les sociétés commerciales, noeuds de contrats (contrat des actionnaires, contrats de travail, contrats-clients, contrats-fournisseurs) est un des produits les plus élaborés du libéralisme, pour partager profits et risques. Aux salariés, salaires fixes et (presque) sûrs, aux actionnaires profits et risques. De plus, il existe deux instruments particulièrement efficaces pour s'assurer que les entreprises produisent de la valeur : la faillite et l'OPA.
D'ailleurs, d'un point de vue libéral, "les entreprises" est aussi abstrait que "l'Etat".
C'est pourquoi la participation des salariés au capital des entreprises est un mélange des genres malvenu, idée qui ne peut venir que de gens qui n'ont rien compris, des énarques par exemple ; cela déséquilibre le partage des responsabilités et, surtout, des risques.
La relation contractuelle est moralement supérieure à la relation démocratique, puisque cette dernière contient une dose de contrainte (majorité contre minorité).
La coopération est aussi, sinon plus, naturelle aux hommes que l'opposition, c'est pourquoi il ne faut pas croire les étatistes et les collectivistes qui vous décrivent l'apocalypse si l'Etat n'était pas là pour mettre du liant. La preuve qu'ils ont tort ? Tout bêtement l'histoire : l'Etat est une création relativement récente.
Le droit
Le juge constate le droit pré-existant et éventuellement non écrit. cela peut paraitre bizarre dans notre pensée napoléonienne qui confond la loi écrite d'en haut et le droit, mais il suffit de penser aux pays de common law : la Grande-Bretagne vit très bien sans constitution. Les droits maritimes et aéronautiques ont existé, avant que les Etats s'y impliquent, parfois lourdement hélas.
Voilà : liberté, propriété, responsabilité, contrat, le droit, vous avez les bases du libéralisme. Trouver la solution libérale à un problème, c'est définir au mieux les droits de propriétés et les responsabilités qui s'y attachent. Les externalités et les biens publics dérivent d'une mauvaise définition des propriétés.
Un marché libre et un système de prix peuvent être utiles mais ce ne sont que des moyens.
Un dernier commentaire avant de passer aux exemples : on accuse souvent le libéralisme de matérialisme. Au contraire, on laisse les individus libres de contracter ou non, d'incorporer ce qu'ils veulent dans la valeur des choses. Une autoroute doit passer, les collectivistes exproprient les propriétaires à la valeur du marché, les libéraux contournent la propriété de celui qui a refusé trois fois le prix du marché parce qu'il ne veut pas vendre sa maison de famille. Qui est matérialiste ?
Quelques exemples de libéralisme appliqué
Les embouteillages, l'effet de serre et la pollution
La priorité aux transports en commun est une absurdité collectiviste. A Paris, on atteint des sommets de contre-sens : on fait des couloirs réservés aux bus alors qu'on manque déjà de place. Pourquoi voyager inconfortablement, lentement et à plusieurs, alors que les voitures modernes sont confortables et font du "porte à porte" ?
Pourquoi les routes sont elles publiques ? Vendons les routes et les rues, chaque propriétaire ou assemblée de copropriétaires fixant règles de circulation et de péages. Il s'établirait un marché des rues : elles seraient payées suivant le service qu'elles rendent et seuls iraient ceux qui en ont vraiment besoin.
La gamme des transports possibles s'étendrait (je pense aux colectivos sud-américains).
Quant à la pollution et à l'effet de serre, il est plus difficile de définir un propriétaire de l'air pur, mais si vos propriétés (ou vous même) sont atteintes, faites un procès. Vos propriétés ne sont pas atteintes ? Alors, où est le problème ? Vous croyez savoir qu'à l'avenir, ça pourrait poser un problème ? Voilà bien une réaction scientiste, croire connaître l'avenir d'une société complexe. N'oubliez pas qu'en 1875, certains croyaient qu'il y aurait un mètre de crottin dans les rues de Paris en 1950. On en reparle dans vingt ans, quand l'hydrogène aura peut-être remplacé les hydrocarbures ?
La vitesse ne tue pas
L'Etat dit "La vitesse tue". En réalité, ce sont les comportements inadaptés à la situation qui tuent. Mais comme l'Etat ne peut pas lutter contre la véritable cause des accidents, il définit comme cause ce contre quoi il peut lutter. Absurde ! Mais l'Etat n'est il pas en soi une absurdité ?
Les espèces menacées
Une chose à ne surtout pas faire : déclarer les espèces menacées patrimoine de l'humanité. Elles sont à tout le monde et à personne, tout le monde a intérêt à en profiter, personne n'a intérêt à y investir et à les entretenir. Si les boeufs et les moutons avaient été déclarés patrimoine de l'humanité, ils auraient disparu depuis longtemps. Protéger les espèces menacées ? Simple : trouvez leur un vrai propriétaire en chair et en os.
Abstrait ? Théorique ? Bien au contraire : depuis qu'on a fait certaines tribus du Zimbabwé propriétaires des éléphants sur leurs territoires, elles ont chassé les braconniers, soigné les éléphants et vivent du produit du tourisme et des éléphants qu'on est obligé d'abattre pour éviter la surpopulation.
La concurrence
La concurrence pure et parfaite qui inspire par exemple l'UE est une illusion constructiviste qui définit a priori des parts de marché idéales. La seule condition qui garantit des contrats satisfaisants pour les deux parties est l'absence de contrainte, autrement dit la seule et unique condition pour que la concurrence vive, c'est que la liberté d'entrée sur le marché soit préservée.
Les retraites, le chomage et la santé
Vous avez deviné : que chacun s'assure, prenne ses responsabilités et fasse ses choix.Puisque tous payent aujourd'hui des charges sociales dans un système collectiviste, lers sommes nécessaires pour une assurance individuelle existent. L'intérêt par rapport au système collectiviste : la responsabilisation et la motivation. Tant que nous auront un système où chacun individuellment a intérêt à tirer sur la corde, les régimes sociaux seront en déficit, les gens ne sont pas idiots, ce sont les collectivistes qui, en niant la nature humaine, sont idiots.
Conclusion
Méfiez vous des demi-libéraux, des "libéraux, mais ..." Le libéralisme est un tout cohérent. J'espère vous avoir convaincu que le libéralisme est un système de valeurs qui tient la route et qu'il n'est pas si facile à contrer.
Le libéralisme est une utopie, mais une utopie réaliste, en ce sens qu'elle prend l'homme tel qu'il est, alors que le collectivisme est une utopie irréaliste, elle a besoin d'un "homme nouveau", et ça finit dans les goulags.
Pour reprendre le mot de Pascal Salin, le libéralisme est intolérant avec les idées (idiotes, incohérentes ou infondées) et tolérant avec les hommes, le collectivisme, c'est l'inverse.
Tout cela est à mes yeux un peu théorique (quitte à passer pour un traître utilitariste), mais c'est plaisant de se détacher pour un temps du consensus constructiviste et étatiste, qui est fort simplet, quand il ne dissmule pas les intérêts catégoriels les plus sordides.
Et puis, le programme de Salin pourrait peut-être inspirer des réformes : je ne crois pas à l'impôt entièrement basé sur le volontariat, mais on pourrait espérer un impôt proportionnel remplaçant l'impot progressif.
Nota : pour les durs de la comprenette, je précise : je n'ai pas parlé de favoriser l'entreprise ou les patrons, tout simplement parce que j'applique les mêmes principes à tous : un patron qui se gave de subventions pour ceci ou pour cela est autant un receleur du vol étatique qu'un fonctionnaire payé à ne pas en ramer une.
mercredi, février 15, 2006
CPE, CNE, vers des résultats décevants
par Vincent Bénard
'' Incentives matters''- James Gwartney
Venant d'un libéral, un titre aussi critique envers les nouveaux contrats de travail proposés par D. de Villepin pourra surprendre.
Entendons nous bien: Sur le fond, l'idée de remettre un peu de flexibilité dans le marché du travail n'est pas mauvaise. Naturellement, tout libéral eut préféré que ces évolutions se fassent dans le cadre d'une réforme générale du CDI et non en empilant deux nouveaux contrats type sur la masse de contrats existants. Mais mieux vaut une demi mesure qui va dans le bon sens que pas de mesure du tout. Toutefois, et à mon grand regret, le contexte et la manière dont ces deux mesures sont présentées à l'opinion et seront mises en oeuvre les voue à un échec quasi-certain, échec qui malheureusement ne pourra profiter qu'aux tenants des thèses les plus anti-libérales de la gauche la plus archaïque du monde.
Je m'explique. Le CPE et le CNE prétendent faciliter l'embauche de nouveaux salariés en réduisant chez l'employeur la crainte de rester bloquer avec un employé peu efficace, ou de ne pouvoir licencier si son carnet de commande diminue. Le CPE et le CNE tentent de lever une des barrières connues à l'embauche de nouveaux salariés. Soit.Mais pour un entrepreneur, l'acte d'embaucher un nouveau salarié ne dépend pas que de l'absence de barrières psychologiques ou législatives qui lui seraient opposées. Il dépend avant tout des incitations qu'il a à le faire: espérance de chiffre d'affaires dépendant de la conjoncture et de ses marchés, et espérance de gain net découlant de la fiscalité appliquée à ces gains. Lever les freins à l'embauche est important, créer de l'espoir de gain l'est encore plus. Or, la fiscalité française, tant sur les gains du travail que sur ceux nés du risque pris par l'employeur, reste une des plus décourageantes qui soit. Croire que deux mesures très partielles ne touchant qu'une partie du monde du travail pourront à elles seules déclencher un processus d'embauches massives est un leurre.
Pour diminuer durablement le chômage, il faut travailler de façon duale sur les barrières à l'embauche, comme le CNE et le CPE tentent timidement de le faire, et sur les incitations à la création d'emploi, qui passent par une réduction drastique des prélèvements obligatoires. Or le gouvernement, s'il a instauré un bouclier fiscal bienvenu, quoique insuffisant, a également annoncé le gel de toute baisse d'impôt dans les années à venir, car il n'ose pas se lancer dans l'indispensable réduction des dépenses publiques qui doit l'accompagner. Et des augmentations de charges se profilent à l'horizon. Le plan gouvernemental pour l'emploi ne marche que sur une jambe: attention à la chute.
J'ai la désagréable impression que lorsque nos chers politiciens vont chercher à l'étranger des solutions pour lutter contre le chômage, ils se contentent d'en extrapoler des recettes de cuisine mais sont incapables de saisir la perspective d'ensemble qui a conduit au résultat final: Ainsi, s'ils retiennent du « modèle » Danois l'assouplissement du marché du travail, ils oublient que conjointement, ce pays à diminué ses prélèvements obligatoires de 13 points de PIB, excusez du peu. Il est évident pour tout analyste sensé que le Danemark n'aurait pas accompli de tels progrès dans sa lutte contre le chômage s'il n'avait privilégié que le volet « flexibilité » de la réforme au dépens du volet fiscal.
Toute action gouvernementale doit s'inscrire dans une vision d'ensemble qui doit être clairement expliquée aux citoyens, or notre gouvernement semble se satisfaire de la juxtaposition de mesures sans cohérence aucune. Aussi peut on prévoir, au vu de nos performances en terme de croissance, que le bilan prochain du gouvernement en terme d'emploi sera tout à fait médiocre, malgré les astuces comptables qu'il ne manquera pas d'utiliser pour l'enjoliver. Aussi la gauche la plus dure n'aura-t-elle aucun mal à partir en guerre contre la « précarisation » et le « saccage des acquis sociaux » perpétrés par « la droite ultra libérale » sans que « les promesses en terme d'emploi ne soient tenues », ce qui ne rendra que plus difficile l'acceptation par l'opinion de réformes ultérieures plus cohérentes.Ceux qui prônent le remplacement de « la sécurité de l'emploi » par « la sécurité du marché de l'emploi » sont dans le vrai, mais à vouloir rendre flexible le marché du travail sans créer les conditions propres à inciter les employeurs à embaucher, le gouvernement place dangereusement la charrue avant les boeufs.
'' Incentives matters''- James Gwartney
Venant d'un libéral, un titre aussi critique envers les nouveaux contrats de travail proposés par D. de Villepin pourra surprendre.
Entendons nous bien: Sur le fond, l'idée de remettre un peu de flexibilité dans le marché du travail n'est pas mauvaise. Naturellement, tout libéral eut préféré que ces évolutions se fassent dans le cadre d'une réforme générale du CDI et non en empilant deux nouveaux contrats type sur la masse de contrats existants. Mais mieux vaut une demi mesure qui va dans le bon sens que pas de mesure du tout. Toutefois, et à mon grand regret, le contexte et la manière dont ces deux mesures sont présentées à l'opinion et seront mises en oeuvre les voue à un échec quasi-certain, échec qui malheureusement ne pourra profiter qu'aux tenants des thèses les plus anti-libérales de la gauche la plus archaïque du monde.
Je m'explique. Le CPE et le CNE prétendent faciliter l'embauche de nouveaux salariés en réduisant chez l'employeur la crainte de rester bloquer avec un employé peu efficace, ou de ne pouvoir licencier si son carnet de commande diminue. Le CPE et le CNE tentent de lever une des barrières connues à l'embauche de nouveaux salariés. Soit.Mais pour un entrepreneur, l'acte d'embaucher un nouveau salarié ne dépend pas que de l'absence de barrières psychologiques ou législatives qui lui seraient opposées. Il dépend avant tout des incitations qu'il a à le faire: espérance de chiffre d'affaires dépendant de la conjoncture et de ses marchés, et espérance de gain net découlant de la fiscalité appliquée à ces gains. Lever les freins à l'embauche est important, créer de l'espoir de gain l'est encore plus. Or, la fiscalité française, tant sur les gains du travail que sur ceux nés du risque pris par l'employeur, reste une des plus décourageantes qui soit. Croire que deux mesures très partielles ne touchant qu'une partie du monde du travail pourront à elles seules déclencher un processus d'embauches massives est un leurre.
Pour diminuer durablement le chômage, il faut travailler de façon duale sur les barrières à l'embauche, comme le CNE et le CPE tentent timidement de le faire, et sur les incitations à la création d'emploi, qui passent par une réduction drastique des prélèvements obligatoires. Or le gouvernement, s'il a instauré un bouclier fiscal bienvenu, quoique insuffisant, a également annoncé le gel de toute baisse d'impôt dans les années à venir, car il n'ose pas se lancer dans l'indispensable réduction des dépenses publiques qui doit l'accompagner. Et des augmentations de charges se profilent à l'horizon. Le plan gouvernemental pour l'emploi ne marche que sur une jambe: attention à la chute.
J'ai la désagréable impression que lorsque nos chers politiciens vont chercher à l'étranger des solutions pour lutter contre le chômage, ils se contentent d'en extrapoler des recettes de cuisine mais sont incapables de saisir la perspective d'ensemble qui a conduit au résultat final: Ainsi, s'ils retiennent du « modèle » Danois l'assouplissement du marché du travail, ils oublient que conjointement, ce pays à diminué ses prélèvements obligatoires de 13 points de PIB, excusez du peu. Il est évident pour tout analyste sensé que le Danemark n'aurait pas accompli de tels progrès dans sa lutte contre le chômage s'il n'avait privilégié que le volet « flexibilité » de la réforme au dépens du volet fiscal.
Toute action gouvernementale doit s'inscrire dans une vision d'ensemble qui doit être clairement expliquée aux citoyens, or notre gouvernement semble se satisfaire de la juxtaposition de mesures sans cohérence aucune. Aussi peut on prévoir, au vu de nos performances en terme de croissance, que le bilan prochain du gouvernement en terme d'emploi sera tout à fait médiocre, malgré les astuces comptables qu'il ne manquera pas d'utiliser pour l'enjoliver. Aussi la gauche la plus dure n'aura-t-elle aucun mal à partir en guerre contre la « précarisation » et le « saccage des acquis sociaux » perpétrés par « la droite ultra libérale » sans que « les promesses en terme d'emploi ne soient tenues », ce qui ne rendra que plus difficile l'acceptation par l'opinion de réformes ultérieures plus cohérentes.Ceux qui prônent le remplacement de « la sécurité de l'emploi » par « la sécurité du marché de l'emploi » sont dans le vrai, mais à vouloir rendre flexible le marché du travail sans créer les conditions propres à inciter les employeurs à embaucher, le gouvernement place dangereusement la charrue avant les boeufs.
La Vieille Europe est-elle condamnée ?
Grâce à l'Institut Hayek, je vous mets en ligne un petit cadeau avant de partir en vacances : un texte de Theodore Darlrymple en Français :
Une tendance se dessine
Théodore Dalrymple
Feu le Professeur Joad, grand vulgarisateur philosophique plutôt que philosophe dans le vrai sens du terme, avait pour habitude de commencer sa réponse à n'importe quelle question en disant "Ca dépend de ce que vous entendez par..." - dans ce cas-ci, "condamnée".
"Condamnée" implique une destinée inéluctable, contre laquelle il est probablement vain que les hommes luttent. Et cela implique en retour une vision particulière, et contestable, de l'Histoire.
Le déterminisme historique a deux sources:
- La première est l'apparente capacité des historiens, bénéficiant naturellement d'une sagesse après coup, d'expliquer n'importe quel évènement historique d'une façon plausible, et ce même si leurs explications sur ces mêmes événements diffèrent largement. Ils donnent ainsi l'impression que puisque le passé semble déterminé, le futur doit l'être aussi.
- La seconde est la propension qu'ont les gens de croire qu'une tendance statistique ou sociale continuera sur sa lancée, ou en d'autres termes que les tendances sont la même choses que les prédictions. Il suffit pourtant à quelqu'un de constater que la croissance exponentielle de bactéries dans une Boîte de Petri, qui finirait par envahir la biosphère mondiale de ce seul organisme si elle pouvait se poursuivre assez longtemps, ne saurait être infinie; ce qui implique que les extrapolations ne donnent pas nécessairement lieu à des prédictions exactes.
Néanmoins, il est indéniable qu'un voile funeste flotte en ce moment sur l'Europe. Rétrospectivement, le vingtième siècle peut être considéré comme la mélancolie de l'Europe, un long rugissement marquant la retraite (pour reprendre la description de Matthew Arnold sur le déclin religieux.) Et tout comme le Continent Européen, selon Disraeli, n'admettrait plus que la Grande-Bretagne soit le Laboratoire du Monde, le monde n'admettrait pas, et n'admet plus, que le continent européen le domine, économiquement, culturellement et intellectuellement.
La perte de pouvoir, d'influence et de prestige de l'Europe continue à ce jour; et bien que l'environnement matériel de chacun puisse s'être amélioré (il suffit de comparer la vie quotidienne en France ou en Angleterre des années 50 avec celle d'aujourd'hui) il est toujours désagréable de vivre dans un pays en déclin perpétuel, même si ce déclin est tout relatif. Cela crée un profond malaise existentiel.
A ceci s'associe le fait que la plupart des populations européennes ont un profond sentiment d'impuissance face à leurs propres élites politiques inamovibles. (Mon épouse, née à Paris il y a 56 ans, ne peut se souvenir d'aucune période de sa vie depuis son adolescence où M. Chirac n'était pas une figure d'importance dans la vie publique française, et s'il n'était pas décédé après cinquante ans au pouvoir ou dans son voisinage, la même chose aurait pu être dite de M. Mitterrand.) Ce sentiment d'impuissance ne vient pas d'un manque d'intelligence ou de finesse de la part des populations concernées: si vous vouliez savoir pourquoi il y a tant de jeunes sans emploi en France, vous feriez mieux de ne pas le demander pas au Premier Ministre, M. Dominique de Villepin, mais plutôt de poser la question au plombier ou au peintre du coin, infiniment plus honnêtes et clairvoyants. Ils vous donneraient des raisons précises et convaincantes expliquant pourquoi aujourd'hui aucun employeur sensé ne se lancerait de bonne grâce dans l'embauche d'un jeune sans expérience. A vrai dire, il faut une certaine dose d'éducation, disponible seulement auprès de ceux qui ont reçu beaucoup d'enseignement supérieur, pour ne pas le comprendre.
Les peurs
Le moteur principal du déclin actuel de l'Europe est, de mon point de vue, son obsession de la sécurité sur tous les plans sociaux, qui a amené l'existence d'un système économique et social figé et particulièrement résistant à sa remise en question. Cette obsession de la sécurité s'est à son tour combinée avec une peur du futur, le futur n'ayant rétrospectivement apporté à l'Europe que des catastrophes et un déclin relatif depuis plus d'un siècle.
Que craignent exactement les Européens, si on admet que leur déclin a été accompagné d'une amélioration inégalée de leur bien-être matériel? Une économie ouverte leur évoque davantage de menaces que de promesses: ils croient que le monde extérieur ne leur apportera pas la prospérité par le commerce, mais le chômage et la perte de leur confort. Ils sont en conséquence enclins à se replier à l'intérieur de leur coquille et à succomber aux tentations protectionnistes, tant à l'intérieur sur le marché de l'emploi qu'à l'extérieur en regard d'autres nations. Et plus ces autres nations comblent leur retard relatif, plus la protection leur apparaît nécessaire. Le cercle vicieux est en place.
Bien entendu, dans ce processus l'Etat a été investi de pouvoirs toujours plus grands ou se les est arrogés (ou les deux.) Un monstre bureaucratique a pris forme et s'est développé, non seulement nuisible à l'économie mais luttant carrément contre elle, et il ne peut être réformé qu'au prix d'une agitation sociale que les politiciens cherchent plutôt à éviter. L'inertie ponctuée d'explosions sociales reste l'issue la plus vraisemblable.
Désespérant de trouver au pays un travail alors qu'un quart des gens de moins de trente ans sont sans emploi, des centaines de milliers de jeunes Français ont traversé la Manche pour tirer profit de la relative flexibilité du marché du travail britannique. Ce dernier est malheureusement en train d'être détruit par son gouvernement au travers d'une réglementation toujours plus contraignante, dans le plus pur style du centralisme à la française.
Depuis qu'il est arrivé au pouvoir, le gouvernement britannique actuel a énormément augmenté les dépenses publiques, si bien que le poids des taxes anglaises dépasse désormais celles de l'Allemagne, qui est elle-même une économie lourdement imposée. L'objectif ostensiblement avancé pour ces dépenses est l'amélioration des services publics tout en servant la justice sociale, une rhétorique à laquelle le grand public a cru jusqu'ici; le motif caché, ou au moins la conséquence annexe, a été l'empilement de postes administratifs à une échelle inégalée, dont la fonction principale consiste à gêner les autres alors qu'ils essayent de créer de la richesse et de se générer une clientèle politique dépendante des "largesses" gouvernementales. La moitié de la population anglaise est désormais récipiendaire de subventions d'Etat pour tout ou partie de ses revenus. Non seulement cela conduira à un désastre économique, mais cela provoque aussi un effet psychologique particulier, comme celui succinctement décrit par Hilaire Belloc dans la morale de sa fable où le jeune Albert se fait dévorer par un lion en échappant à la bonne qui l'a emmené au zoo:
Et toujours reste près de ta bonne d'enfant,
De peur de rencontrer, un jour, plus effrayant.
Cette population dépendante n'aime pas l'Etat et ses agents; en fait les gens les détestent. Mais ils en arrivent à craindre encore plus la disparition de leurs bons offices. Ils sont comme des accros à la drogue qui savent que ce qu'ils s'injectent n'est pas bon pour eux, et qui haïssent les dealers auprès de qui ils s'approvisionnent, mais qui ne peuvent pas faire face aux douleurs supposées du sevrage. Et ce qui est vrai pour la Grande-Bretagne reste vrai, à quelques exceptions près, pour le reste de l'Europe.
Au nom de la Justice Sociale, les intérêts personnels et sectoriels sont devenus tous-puissants, paralysant tout effort d'améliorer le sort du plus grand nombre. Cela n'est nul part plus clair qu'en France où Libération, journal de gauche, montra dans un sondage que trois fois plus de gens avaient une bonne opinion du socialisme que du capitalisme (l'ambition de trois quarts des jeunes Français étant de devenir fonctionnaires.) En conséquence, la défense des avantages corporatistes et individuels est telle en France qu'ils rendent toute réforme quasi-impossible, en tous cas sans violence dans les rues. Les employés du transport public, disposant de privilèges qui auraient fait s'étrangler Louis XIV, se lancent dans des grèves aussitôt que la moindre réduction de leur nombre n'est ne serait-ce que murmurée; le tout au nom d'une justice sociale qui se traduit par ces privilèges éhontés, et cela bien que ces grèves amènent détresse et appauvrissement à des millions de leurs concitoyens tandis que les avantages acquis rapprochent toujours plus l'Etat de la banqueroute. Le but de chacun est de parasiter quelqu'un d'autre ou de se battre pour obtenir la plus grande part possible du gâteau économique. Personne ne se préoccupe de l'évolution de la taille dudit gâteau. Après moi, le déluge est devenu le mot d'ordre non d'un roi, mais de la population entière.
De ce point de vue la France est peut-être pire que la plupart des autres pays d'Europe, sans pour autant constituer une catégorie à part. Il n'est guère difficile de souligner qu'un monde globalisé et de plus en plus compétitif ne se sentira pas concerné par la France comme le sont les autres gouvernements européens; et bien qu'il est possible que les pays européens parviennent à survivre et à trouver leur salut économique dans un marché de niche, cela représenterait la marginalisation d'un continent habitué à se voir comme le centre du monde. De ce point de vue, "l'Europe marginalisée" n'est bien sûr pas la même chose que "l'Europe condamnée", sauf pour ceux qui pensent qu'avoir une place importante dans le cortège des nations est absolument crucial.
Les populations allogènes
Il y a d'autres menaces sur l'Europe. La perception misérabiliste du passé du continent, dans lequel les accomplissements stupéfiants sont défaussés pour ne retenir que massacres, oppression et injustice, prive la population de toute fierté ou de sens des traditions envers lesquels elle pourrait contribuer ou qu'elle pourrait au moins considérer comme valant la peine d'être défendus. Cette perte de confiance culturelle est particulièrement importante à l'heure où s'installe une immigration de masse venant de cultures très étrangères, un afflux qui ne peut être géré correctement (comme il l'a été par le passé, ou comme aux Etats-Unis jusqu'à l'ère du relativisme culturel) que si les nations hôtes s'estiment dépositaires d'une culture dans laquelle les nouveaux venus souhaiteraient, ou devraient souhaiter, s'intégrer, s'assimiler, et faire leur.
En l'absence de telles convictions, le risque est que les seuls points communs réunissant les habitants d'un pays se réduisent au simple critère géographique; et la guerre civile est la méthode avec laquelle ils règleront leurs points de vue antagonistes sur la façon dont la vie doit être vécue. Ceci est particulièrement vrai lorsque les immigrés croient être en possession d'une vérité unique et universelle, comme l'Islam le prétend fréquemment sous ses différentes formes. Si la nation hôte a un tel manque de confiance dans sa propre culture qu'elle ne fait même pas de la maîtrise de sa langue nationale une condition de base pour l'obtention de la citoyenneté (comme cela a été le cas jusqu'à une époque récente en Grande-Bretagne), il ne faut pas s'étonner que l'intégration n'aille pas très loin.
Le problème s'aggrave quand un marché du travail rigide est capable de créer des castes entières de citoyens sans emploi, et qui pourraient bien le rester pendant toute leur vie adulte. A la rancoeur liée à l'inutilité économique s'ajoute, ou plutôt se multiplie, la rancoeur de la différence culturelle. Cette combinaison est particulièrement dangereuse dans le cas de l'Islam parce que le mélange du sentiment d'infériorité d'un côté et de supériorité de l'autre est très explosif, comme l'histoire l'a prouvé. Les habitants d'Amérique Latine l'ont ressenti envers les Etats-Unis, les Russes envers l'Europe, les Chinois et les Japonais envers les Européens et les Américains, entre autres nombreux exemples.
Est-ce inéluctable?
La poursuite de ce déclin ou l'émergence d'une catastrophe n'est pas inévitable, cependant, bien qu'inverser la tendance demandera de vifs efforts. Malheureusement, les présages ne sont pas bons, non seulement parce que les systèmes de sécurité sociale érigés dans la plupart des pays d'Europe ont consacré l'immobilisme politique, mais aussi parce que l'entité supra-nationale européenne se construit contre la volonté des peuples d'Europe (pour autant qu'ils soient consultés.)
L'Union Européenne a différents objectifs, aucun n'étant en rapport avec les véritables défis qui attendent le continent. Elle fait oublier aux Allemands qu'ils sont allemands, leur donnant une identité de substitution plus plaisante à leur goût; elle permet aux Français d'ignorer qu'ils sont maintenant une nation moyenne, noyée dans la masse, les flattant avec l'illusion de puissance et de prestige; elle instaure une sorte de placard doré géant pour des politiciens qui n'ont plus la volonté ou les idées pour combattre dans l'arène électorale, leur permettant de s'accrocher au pouvoir et d'user de leur influence bien après qu'ils ont été rejetés par les urnes; et enfin, elle s'impose comme une forteresse potentielle contre les vents de la concurrence qui soufflent du monde entier, et qui sont désormais très dérangeants aux yeux de ceux qui désirent la sécurité par-dessus tout.
Les pensées apocalyptiques sont curieusement attirantes. Parler d'un destin funeste est un peu trop fort à mes yeux; je pense qu'il serait plus approprié de dire que l'Europe s'endort dans un déclin toujours plus prononcé.
Mais nous devrions aussi humblement nous rappeler qu'en fin de compte, le futur reste imprévisible.
Theodore Dalrymple est le nom de plume d'Anthony Daniels, psychiatre et écrivain réputé, auteur de dizaines de livres sur des sujets aussi divers que la culture, la médecine ou l'éducation. Cet article est une traduction mise en forme, que j'espère fidèle, à l'original.
Une tendance se dessine
Théodore Dalrymple
Feu le Professeur Joad, grand vulgarisateur philosophique plutôt que philosophe dans le vrai sens du terme, avait pour habitude de commencer sa réponse à n'importe quelle question en disant "Ca dépend de ce que vous entendez par..." - dans ce cas-ci, "condamnée".
"Condamnée" implique une destinée inéluctable, contre laquelle il est probablement vain que les hommes luttent. Et cela implique en retour une vision particulière, et contestable, de l'Histoire.
Le déterminisme historique a deux sources:
- La première est l'apparente capacité des historiens, bénéficiant naturellement d'une sagesse après coup, d'expliquer n'importe quel évènement historique d'une façon plausible, et ce même si leurs explications sur ces mêmes événements diffèrent largement. Ils donnent ainsi l'impression que puisque le passé semble déterminé, le futur doit l'être aussi.
- La seconde est la propension qu'ont les gens de croire qu'une tendance statistique ou sociale continuera sur sa lancée, ou en d'autres termes que les tendances sont la même choses que les prédictions. Il suffit pourtant à quelqu'un de constater que la croissance exponentielle de bactéries dans une Boîte de Petri, qui finirait par envahir la biosphère mondiale de ce seul organisme si elle pouvait se poursuivre assez longtemps, ne saurait être infinie; ce qui implique que les extrapolations ne donnent pas nécessairement lieu à des prédictions exactes.
Néanmoins, il est indéniable qu'un voile funeste flotte en ce moment sur l'Europe. Rétrospectivement, le vingtième siècle peut être considéré comme la mélancolie de l'Europe, un long rugissement marquant la retraite (pour reprendre la description de Matthew Arnold sur le déclin religieux.) Et tout comme le Continent Européen, selon Disraeli, n'admettrait plus que la Grande-Bretagne soit le Laboratoire du Monde, le monde n'admettrait pas, et n'admet plus, que le continent européen le domine, économiquement, culturellement et intellectuellement.
La perte de pouvoir, d'influence et de prestige de l'Europe continue à ce jour; et bien que l'environnement matériel de chacun puisse s'être amélioré (il suffit de comparer la vie quotidienne en France ou en Angleterre des années 50 avec celle d'aujourd'hui) il est toujours désagréable de vivre dans un pays en déclin perpétuel, même si ce déclin est tout relatif. Cela crée un profond malaise existentiel.
A ceci s'associe le fait que la plupart des populations européennes ont un profond sentiment d'impuissance face à leurs propres élites politiques inamovibles. (Mon épouse, née à Paris il y a 56 ans, ne peut se souvenir d'aucune période de sa vie depuis son adolescence où M. Chirac n'était pas une figure d'importance dans la vie publique française, et s'il n'était pas décédé après cinquante ans au pouvoir ou dans son voisinage, la même chose aurait pu être dite de M. Mitterrand.) Ce sentiment d'impuissance ne vient pas d'un manque d'intelligence ou de finesse de la part des populations concernées: si vous vouliez savoir pourquoi il y a tant de jeunes sans emploi en France, vous feriez mieux de ne pas le demander pas au Premier Ministre, M. Dominique de Villepin, mais plutôt de poser la question au plombier ou au peintre du coin, infiniment plus honnêtes et clairvoyants. Ils vous donneraient des raisons précises et convaincantes expliquant pourquoi aujourd'hui aucun employeur sensé ne se lancerait de bonne grâce dans l'embauche d'un jeune sans expérience. A vrai dire, il faut une certaine dose d'éducation, disponible seulement auprès de ceux qui ont reçu beaucoup d'enseignement supérieur, pour ne pas le comprendre.
Les peurs
Le moteur principal du déclin actuel de l'Europe est, de mon point de vue, son obsession de la sécurité sur tous les plans sociaux, qui a amené l'existence d'un système économique et social figé et particulièrement résistant à sa remise en question. Cette obsession de la sécurité s'est à son tour combinée avec une peur du futur, le futur n'ayant rétrospectivement apporté à l'Europe que des catastrophes et un déclin relatif depuis plus d'un siècle.
Que craignent exactement les Européens, si on admet que leur déclin a été accompagné d'une amélioration inégalée de leur bien-être matériel? Une économie ouverte leur évoque davantage de menaces que de promesses: ils croient que le monde extérieur ne leur apportera pas la prospérité par le commerce, mais le chômage et la perte de leur confort. Ils sont en conséquence enclins à se replier à l'intérieur de leur coquille et à succomber aux tentations protectionnistes, tant à l'intérieur sur le marché de l'emploi qu'à l'extérieur en regard d'autres nations. Et plus ces autres nations comblent leur retard relatif, plus la protection leur apparaît nécessaire. Le cercle vicieux est en place.
Bien entendu, dans ce processus l'Etat a été investi de pouvoirs toujours plus grands ou se les est arrogés (ou les deux.) Un monstre bureaucratique a pris forme et s'est développé, non seulement nuisible à l'économie mais luttant carrément contre elle, et il ne peut être réformé qu'au prix d'une agitation sociale que les politiciens cherchent plutôt à éviter. L'inertie ponctuée d'explosions sociales reste l'issue la plus vraisemblable.
Désespérant de trouver au pays un travail alors qu'un quart des gens de moins de trente ans sont sans emploi, des centaines de milliers de jeunes Français ont traversé la Manche pour tirer profit de la relative flexibilité du marché du travail britannique. Ce dernier est malheureusement en train d'être détruit par son gouvernement au travers d'une réglementation toujours plus contraignante, dans le plus pur style du centralisme à la française.
Depuis qu'il est arrivé au pouvoir, le gouvernement britannique actuel a énormément augmenté les dépenses publiques, si bien que le poids des taxes anglaises dépasse désormais celles de l'Allemagne, qui est elle-même une économie lourdement imposée. L'objectif ostensiblement avancé pour ces dépenses est l'amélioration des services publics tout en servant la justice sociale, une rhétorique à laquelle le grand public a cru jusqu'ici; le motif caché, ou au moins la conséquence annexe, a été l'empilement de postes administratifs à une échelle inégalée, dont la fonction principale consiste à gêner les autres alors qu'ils essayent de créer de la richesse et de se générer une clientèle politique dépendante des "largesses" gouvernementales. La moitié de la population anglaise est désormais récipiendaire de subventions d'Etat pour tout ou partie de ses revenus. Non seulement cela conduira à un désastre économique, mais cela provoque aussi un effet psychologique particulier, comme celui succinctement décrit par Hilaire Belloc dans la morale de sa fable où le jeune Albert se fait dévorer par un lion en échappant à la bonne qui l'a emmené au zoo:
Et toujours reste près de ta bonne d'enfant,
De peur de rencontrer, un jour, plus effrayant.
Cette population dépendante n'aime pas l'Etat et ses agents; en fait les gens les détestent. Mais ils en arrivent à craindre encore plus la disparition de leurs bons offices. Ils sont comme des accros à la drogue qui savent que ce qu'ils s'injectent n'est pas bon pour eux, et qui haïssent les dealers auprès de qui ils s'approvisionnent, mais qui ne peuvent pas faire face aux douleurs supposées du sevrage. Et ce qui est vrai pour la Grande-Bretagne reste vrai, à quelques exceptions près, pour le reste de l'Europe.
Au nom de la Justice Sociale, les intérêts personnels et sectoriels sont devenus tous-puissants, paralysant tout effort d'améliorer le sort du plus grand nombre. Cela n'est nul part plus clair qu'en France où Libération, journal de gauche, montra dans un sondage que trois fois plus de gens avaient une bonne opinion du socialisme que du capitalisme (l'ambition de trois quarts des jeunes Français étant de devenir fonctionnaires.) En conséquence, la défense des avantages corporatistes et individuels est telle en France qu'ils rendent toute réforme quasi-impossible, en tous cas sans violence dans les rues. Les employés du transport public, disposant de privilèges qui auraient fait s'étrangler Louis XIV, se lancent dans des grèves aussitôt que la moindre réduction de leur nombre n'est ne serait-ce que murmurée; le tout au nom d'une justice sociale qui se traduit par ces privilèges éhontés, et cela bien que ces grèves amènent détresse et appauvrissement à des millions de leurs concitoyens tandis que les avantages acquis rapprochent toujours plus l'Etat de la banqueroute. Le but de chacun est de parasiter quelqu'un d'autre ou de se battre pour obtenir la plus grande part possible du gâteau économique. Personne ne se préoccupe de l'évolution de la taille dudit gâteau. Après moi, le déluge est devenu le mot d'ordre non d'un roi, mais de la population entière.
De ce point de vue la France est peut-être pire que la plupart des autres pays d'Europe, sans pour autant constituer une catégorie à part. Il n'est guère difficile de souligner qu'un monde globalisé et de plus en plus compétitif ne se sentira pas concerné par la France comme le sont les autres gouvernements européens; et bien qu'il est possible que les pays européens parviennent à survivre et à trouver leur salut économique dans un marché de niche, cela représenterait la marginalisation d'un continent habitué à se voir comme le centre du monde. De ce point de vue, "l'Europe marginalisée" n'est bien sûr pas la même chose que "l'Europe condamnée", sauf pour ceux qui pensent qu'avoir une place importante dans le cortège des nations est absolument crucial.
Les populations allogènes
Il y a d'autres menaces sur l'Europe. La perception misérabiliste du passé du continent, dans lequel les accomplissements stupéfiants sont défaussés pour ne retenir que massacres, oppression et injustice, prive la population de toute fierté ou de sens des traditions envers lesquels elle pourrait contribuer ou qu'elle pourrait au moins considérer comme valant la peine d'être défendus. Cette perte de confiance culturelle est particulièrement importante à l'heure où s'installe une immigration de masse venant de cultures très étrangères, un afflux qui ne peut être géré correctement (comme il l'a été par le passé, ou comme aux Etats-Unis jusqu'à l'ère du relativisme culturel) que si les nations hôtes s'estiment dépositaires d'une culture dans laquelle les nouveaux venus souhaiteraient, ou devraient souhaiter, s'intégrer, s'assimiler, et faire leur.
En l'absence de telles convictions, le risque est que les seuls points communs réunissant les habitants d'un pays se réduisent au simple critère géographique; et la guerre civile est la méthode avec laquelle ils règleront leurs points de vue antagonistes sur la façon dont la vie doit être vécue. Ceci est particulièrement vrai lorsque les immigrés croient être en possession d'une vérité unique et universelle, comme l'Islam le prétend fréquemment sous ses différentes formes. Si la nation hôte a un tel manque de confiance dans sa propre culture qu'elle ne fait même pas de la maîtrise de sa langue nationale une condition de base pour l'obtention de la citoyenneté (comme cela a été le cas jusqu'à une époque récente en Grande-Bretagne), il ne faut pas s'étonner que l'intégration n'aille pas très loin.
Le problème s'aggrave quand un marché du travail rigide est capable de créer des castes entières de citoyens sans emploi, et qui pourraient bien le rester pendant toute leur vie adulte. A la rancoeur liée à l'inutilité économique s'ajoute, ou plutôt se multiplie, la rancoeur de la différence culturelle. Cette combinaison est particulièrement dangereuse dans le cas de l'Islam parce que le mélange du sentiment d'infériorité d'un côté et de supériorité de l'autre est très explosif, comme l'histoire l'a prouvé. Les habitants d'Amérique Latine l'ont ressenti envers les Etats-Unis, les Russes envers l'Europe, les Chinois et les Japonais envers les Européens et les Américains, entre autres nombreux exemples.
Est-ce inéluctable?
La poursuite de ce déclin ou l'émergence d'une catastrophe n'est pas inévitable, cependant, bien qu'inverser la tendance demandera de vifs efforts. Malheureusement, les présages ne sont pas bons, non seulement parce que les systèmes de sécurité sociale érigés dans la plupart des pays d'Europe ont consacré l'immobilisme politique, mais aussi parce que l'entité supra-nationale européenne se construit contre la volonté des peuples d'Europe (pour autant qu'ils soient consultés.)
L'Union Européenne a différents objectifs, aucun n'étant en rapport avec les véritables défis qui attendent le continent. Elle fait oublier aux Allemands qu'ils sont allemands, leur donnant une identité de substitution plus plaisante à leur goût; elle permet aux Français d'ignorer qu'ils sont maintenant une nation moyenne, noyée dans la masse, les flattant avec l'illusion de puissance et de prestige; elle instaure une sorte de placard doré géant pour des politiciens qui n'ont plus la volonté ou les idées pour combattre dans l'arène électorale, leur permettant de s'accrocher au pouvoir et d'user de leur influence bien après qu'ils ont été rejetés par les urnes; et enfin, elle s'impose comme une forteresse potentielle contre les vents de la concurrence qui soufflent du monde entier, et qui sont désormais très dérangeants aux yeux de ceux qui désirent la sécurité par-dessus tout.
Les pensées apocalyptiques sont curieusement attirantes. Parler d'un destin funeste est un peu trop fort à mes yeux; je pense qu'il serait plus approprié de dire que l'Europe s'endort dans un déclin toujours plus prononcé.
Mais nous devrions aussi humblement nous rappeler qu'en fin de compte, le futur reste imprévisible.
Theodore Dalrymple est le nom de plume d'Anthony Daniels, psychiatre et écrivain réputé, auteur de dizaines de livres sur des sujets aussi divers que la culture, la médecine ou l'éducation. Cet article est une traduction mise en forme, que j'espère fidèle, à l'original.
Les colonies ont-elles été une bonne affaire pour la France ?
Vous trouverez un débat sur cette question :
Débat :Les colonies ont-elles été une bonne affaire pour la France ?
La réponse succinte :
> les colonies ont été une bonne affaire pour certains coloniaux et une mauvaise pour la France
> la France a de plus pris la mauvaise habitude d'exporter sur des marchés captifs (voir notre déficit du commerce extérieur)
Les économistes libéraux étaient farouchement contre (hé oui !), au nom, en plus de leur morale libérale (1) (hé oui : le libéralisme est un humanisme) de l'argument cynique que les riches commercent avec les riches et que nous n'avions pas à faire de dépenses incongrues par aventurisme.
C'est essentiellement la gauche, dans le but d'apporter notre civilisation, qui a poussé à la roue (Victor Hugo a dit quelque chose comme "Dieu donne l'Afrique à la France, prenez la.")
Bien tentendu, aujourd'hui que la gauche est le Bien et la libéralisme le Mal, on a un peu oublié. Comme c'est commode !
(1) : Tocqueville s'est tout de même fourvoyé à soutenir la colonisation de l'Algérie par nationalisme : il pensait enrayer ainsi le déclin de la France (déjà)
Débat :Les colonies ont-elles été une bonne affaire pour la France ?
La réponse succinte :
> les colonies ont été une bonne affaire pour certains coloniaux et une mauvaise pour la France
> la France a de plus pris la mauvaise habitude d'exporter sur des marchés captifs (voir notre déficit du commerce extérieur)
Les économistes libéraux étaient farouchement contre (hé oui !), au nom, en plus de leur morale libérale (1) (hé oui : le libéralisme est un humanisme) de l'argument cynique que les riches commercent avec les riches et que nous n'avions pas à faire de dépenses incongrues par aventurisme.
C'est essentiellement la gauche, dans le but d'apporter notre civilisation, qui a poussé à la roue (Victor Hugo a dit quelque chose comme "Dieu donne l'Afrique à la France, prenez la.")
Bien tentendu, aujourd'hui que la gauche est le Bien et la libéralisme le Mal, on a un peu oublié. Comme c'est commode !
(1) : Tocqueville s'est tout de même fourvoyé à soutenir la colonisation de l'Algérie par nationalisme : il pensait enrayer ainsi le déclin de la France (déjà)
Pourquoi il faut tout faire pour que l'Iran n'ait pas la bombinette
Il ne saurait être question d' "apaisement" dans les histoires d'escalade nucléaire. Pourquoi ?
Parce que l'expérience prouve et le bon sens dit, suivant le proverbe chinois, "Qu'un trajet de mille li commence par le premier pas."
Si nous avons bien tiré une leçon de la guerre froide, c'est celle-ci : chaque source de tension dans les relations de nations à bombinettes peut entraîner l'escalade fatale, juste pour un coup de malchance.
Les protagonistes de la crise de Cuba et le monde par la même occasion ont eu le cul bordé de nouilles (comme on dit vulgairement). Conclusion de Kennedy lui-même : "Est ce qu'on aura autant de chance la prochaine fois ? Il ne faut pas qu'il y ait de prochaine fois."
Pourtant, il y en a eu au moins une : au plus fort de la tension USA-URSS, le 26 septembre 1983, un satellite soviétique lance une fausse alerte. L'URSS a eu un quart d'heure pour vérifier et décider : guerre nucléaire ou pas guerre nucléaire ? Là, à un cheveu près, plus de problème de réchauffement climatique !
Le Moyen-Orient est une zone où les tensions sont très fortes, donc les occasions d'escalade seraient très nombreuses et où, en plus, les systèmes de renseignements, de communications et de commandement ne sont pas les plus perfectionnés du monde.
C'est une loi élémentaire de la statistique : plus les occasions d'escalade sont nombreuses, plus il y a de risques que l'escalade se produise.
Je suis très pessimiste sur le sujet : l'Iran avec la bombinette, c'est une guerre nucléaire (contre Israel) au Moyen-Orient dans les vingt ans.
Et les options diplomatiques pour empêcher cela se réduisent à grande vitesse.
Parce que l'expérience prouve et le bon sens dit, suivant le proverbe chinois, "Qu'un trajet de mille li commence par le premier pas."
Si nous avons bien tiré une leçon de la guerre froide, c'est celle-ci : chaque source de tension dans les relations de nations à bombinettes peut entraîner l'escalade fatale, juste pour un coup de malchance.
Les protagonistes de la crise de Cuba et le monde par la même occasion ont eu le cul bordé de nouilles (comme on dit vulgairement). Conclusion de Kennedy lui-même : "Est ce qu'on aura autant de chance la prochaine fois ? Il ne faut pas qu'il y ait de prochaine fois."
Pourtant, il y en a eu au moins une : au plus fort de la tension USA-URSS, le 26 septembre 1983, un satellite soviétique lance une fausse alerte. L'URSS a eu un quart d'heure pour vérifier et décider : guerre nucléaire ou pas guerre nucléaire ? Là, à un cheveu près, plus de problème de réchauffement climatique !
Le Moyen-Orient est une zone où les tensions sont très fortes, donc les occasions d'escalade seraient très nombreuses et où, en plus, les systèmes de renseignements, de communications et de commandement ne sont pas les plus perfectionnés du monde.
C'est une loi élémentaire de la statistique : plus les occasions d'escalade sont nombreuses, plus il y a de risques que l'escalade se produise.
Je suis très pessimiste sur le sujet : l'Iran avec la bombinette, c'est une guerre nucléaire (contre Israel) au Moyen-Orient dans les vingt ans.
Et les options diplomatiques pour empêcher cela se réduisent à grande vitesse.
Qu'est-ce qu'on se marre en avion ...
JAKARTA, 12 fév 2006 (AFP) -
Un avion de ligne indonésien avec 145 passagers à bord a volé plusieurs heures samedi avec tous ses systèmes de navigation et de communication en panne, avant de se poser en catastrophe sur une courte piste d'une île reculée de l'archipel, a rapporté dimanche la presse à Jakarta.
La panne sur le Boeing 737-300 à destination de Makassar de la compagnie Adam Air est intervenue vingt minutes après le décollage de l'aéroport de Jakarta, réalisé à 06H20 locales (23H20 GMT), a indiqué le quotidien Kompass.
Tout à coup l'appareil s'est retrouvé privé de son système de repérage dans le ciel, ne pouvant non plus être radioguidé.
Durant environ quatre heures le pilote a donc volé sans savoir où il allait et sans pouvoir communiquer.
Il a finalement réussi à poser son avion à 10H45 sur l'île de Sumba, au sud-est de Bali, où il avait repéré une piste. Il a probablement choisi cette île au trafic aérien très rare afin de minimiser les risques d'une collision avec un autre avion.
La piste de l'île de Sumba fait 1.800 mètres de long, alors qu'un Boeing 737-300 requiert une piste de 2.200 mètres de long.
Les passagers, dont aucun n'a été blessé, ont cru vivre un cauchemar éveillés, même si le commandant de bord et les sept personnels de cabine ne les ont pas informés de la situation [c'est pas bien : pas d'infos = fantasmes = vulnérabilité à la panique].
Ils se sont inquiétés notamment de voir l'avion changer sans cesse d'altitude, alors que le pilote tentait de se localiser à vue.
"Comment aurions-nous pu ne pas être inquiets après plusieurs heures à tourner sans annonce des hôtesses ou du pilote sur ce qui se passait", a relaté Made Aming, un des voyageurs.
"Nous avons été chanceux que les freins fonctionnaient bien car quand nous sommes sortis (de l'avion) nous avons réalisé que l'aéroport était petit et pas adapté aux grands avions comme le nôtre", a-t-il ajouté.
Une enquête a été ouverte et le gouvernement exigera un rapport à la fois d'Adam Air et de Boeing, selon un responsable du secteur des transports cité par Kompass. Adam air n'était pas joignable dimanche pour un éventuel commentaire.
[A propos du titre de la dépêche, il ne faut pas exagérer : si la situation était bien telle que décrite, le seul risque était une crise de panique ou de découragement de l'équipage. Comme dit un proverbe, il y a trois choses qu'un pilote n'a jamais en excès : du carburant dans les réservoirs, de l'air sous l'avion et du soleil au-dessus de l'horizon. La même panne de nuit aurait probablement été beaucoup plus difficile à gérer mais, là encore la qualité de l'équipage aurait fait la différence.
Des interrogations : si la panne est survenue 20 minutes après le décollage, pourquoi ne pas avoir fait demi-tour ? La peur de se faire descendre par une défense aérienne nerveuse ? (avion de ligne sans communications vers une grande ville = interception ; encore un cas en Europe la semaine dernière -pilotes négligents avec la radio, voire abrutis). De plus, aller se poser à 500 km sur une piste trop courte et pas/peu secourue me laisse dubitatif (et 4h pour faire 500 km ???!!!)
J'aurais plutôt fait des 360 jusqu'à être intercepté (en supposant que l'Indonésie ait un dispositif d'interception, ce que j'ignore) : ça aurait permis d'alerter les autorités, les secours et de soulager l'équipage de la décision.
Une panne simultanée des communications et de la navigation me paraît étrange.
Je rappelle pour les inquiets de l'avion que tant que l'équipage se bat et prend des décisions judicieuses, rien n'est jamais perdu. Quelques exemples :
> que j'ai déjà raconté : cas d'école : explosion d'un réacteur sur un MD je ne sais plus combien, commandes de lacet et de profondeur sectionnées, l'équipage (commandant Haynes, orthographe incertaine) s'en sort en jouant sur les deux réacteurs restants. Plusieurs facteurs favorables : équipage exceptionnel y compris les hotesses, un instructeur par hasard à bord qui soulage la charge de travail, un contrôleur très expérimenté.
> Un Airbus de DHL atteint au décollage en Irak par un missile. Malgré les deux tiers d'une aile endommagés et un réacteur en feu, l'équipage réussit un circuit court et pose l'avion.
> Un Boeing à court de carburant (erreur dans les pleins) se pose sur un circuit automobile désaffecté, qui ne figurait bien entendu sur aucune carte aérienne, mais dans le souvenir du pilote.]
Un avion de ligne indonésien avec 145 passagers à bord a volé plusieurs heures samedi avec tous ses systèmes de navigation et de communication en panne, avant de se poser en catastrophe sur une courte piste d'une île reculée de l'archipel, a rapporté dimanche la presse à Jakarta.
La panne sur le Boeing 737-300 à destination de Makassar de la compagnie Adam Air est intervenue vingt minutes après le décollage de l'aéroport de Jakarta, réalisé à 06H20 locales (23H20 GMT), a indiqué le quotidien Kompass.
Tout à coup l'appareil s'est retrouvé privé de son système de repérage dans le ciel, ne pouvant non plus être radioguidé.
Durant environ quatre heures le pilote a donc volé sans savoir où il allait et sans pouvoir communiquer.
Il a finalement réussi à poser son avion à 10H45 sur l'île de Sumba, au sud-est de Bali, où il avait repéré une piste. Il a probablement choisi cette île au trafic aérien très rare afin de minimiser les risques d'une collision avec un autre avion.
La piste de l'île de Sumba fait 1.800 mètres de long, alors qu'un Boeing 737-300 requiert une piste de 2.200 mètres de long.
Les passagers, dont aucun n'a été blessé, ont cru vivre un cauchemar éveillés, même si le commandant de bord et les sept personnels de cabine ne les ont pas informés de la situation [c'est pas bien : pas d'infos = fantasmes = vulnérabilité à la panique].
Ils se sont inquiétés notamment de voir l'avion changer sans cesse d'altitude, alors que le pilote tentait de se localiser à vue.
"Comment aurions-nous pu ne pas être inquiets après plusieurs heures à tourner sans annonce des hôtesses ou du pilote sur ce qui se passait", a relaté Made Aming, un des voyageurs.
"Nous avons été chanceux que les freins fonctionnaient bien car quand nous sommes sortis (de l'avion) nous avons réalisé que l'aéroport était petit et pas adapté aux grands avions comme le nôtre", a-t-il ajouté.
Une enquête a été ouverte et le gouvernement exigera un rapport à la fois d'Adam Air et de Boeing, selon un responsable du secteur des transports cité par Kompass. Adam air n'était pas joignable dimanche pour un éventuel commentaire.
[A propos du titre de la dépêche, il ne faut pas exagérer : si la situation était bien telle que décrite, le seul risque était une crise de panique ou de découragement de l'équipage. Comme dit un proverbe, il y a trois choses qu'un pilote n'a jamais en excès : du carburant dans les réservoirs, de l'air sous l'avion et du soleil au-dessus de l'horizon. La même panne de nuit aurait probablement été beaucoup plus difficile à gérer mais, là encore la qualité de l'équipage aurait fait la différence.
Des interrogations : si la panne est survenue 20 minutes après le décollage, pourquoi ne pas avoir fait demi-tour ? La peur de se faire descendre par une défense aérienne nerveuse ? (avion de ligne sans communications vers une grande ville = interception ; encore un cas en Europe la semaine dernière -pilotes négligents avec la radio, voire abrutis). De plus, aller se poser à 500 km sur une piste trop courte et pas/peu secourue me laisse dubitatif (et 4h pour faire 500 km ???!!!)
J'aurais plutôt fait des 360 jusqu'à être intercepté (en supposant que l'Indonésie ait un dispositif d'interception, ce que j'ignore) : ça aurait permis d'alerter les autorités, les secours et de soulager l'équipage de la décision.
Une panne simultanée des communications et de la navigation me paraît étrange.
Je rappelle pour les inquiets de l'avion que tant que l'équipage se bat et prend des décisions judicieuses, rien n'est jamais perdu. Quelques exemples :
> que j'ai déjà raconté : cas d'école : explosion d'un réacteur sur un MD je ne sais plus combien, commandes de lacet et de profondeur sectionnées, l'équipage (commandant Haynes, orthographe incertaine) s'en sort en jouant sur les deux réacteurs restants. Plusieurs facteurs favorables : équipage exceptionnel y compris les hotesses, un instructeur par hasard à bord qui soulage la charge de travail, un contrôleur très expérimenté.
> Un Airbus de DHL atteint au décollage en Irak par un missile. Malgré les deux tiers d'une aile endommagés et un réacteur en feu, l'équipage réussit un circuit court et pose l'avion.
> Un Boeing à court de carburant (erreur dans les pleins) se pose sur un circuit automobile désaffecté, qui ne figurait bien entendu sur aucune carte aérienne, mais dans le souvenir du pilote.]
Un témoignage à l'appui de l'hypothèse de Boizard ?
Voir mon hypothèse dans la critique de l'Idéologie (je la dis mienne par dérision).
Pascal Salin dans Le libéralisme (1) va plus loin que moi :
Il écrit que les libéraux français Bastiat et Say n'ont pas été lus parce que la limpidité de leur style a fait croire aux simplismes de leurs idées.
Donc, non seulement, il serait plus facile d'adhérer à des idées simplistes exprimées avec complexité qu'à des idées complexes exprimées avec simplicité, mais le seul fait d'écrire clairement pour tous desservirait l'auteur de traités économiques.
Ca ne serait pas pour m'étonner : le pédantisme et le goût des choses réservées sont de puissants moteurs chez certains intellectuels, à croire même que le savoir n'a pas pour fonction première l'apaisement de la soif de connaissances mais la distinction du vulgaire.
Que ce soit pour l'approuver ou pour le réfuter, je vous conseille de lire Bastiat : c'est un plaisir de lecteur gourmet, comme la cuisine japonaise, qui sous une apparente simplicité cache un grand raffinement.
Bastiat est surtout connu pour sa supplique des marchands de chandelles demandant à l'Etat de les protéger de la concurrence déloyale du soleil, mais ses écrits recèlent mille pépites.
(1) excellent livre que devraient lire nos anti-libéraux (et mêmes quelques soi-disants libéraux), au moins ils sauraient de quoi ils parlent, car rien n'est plus fatigant que tous ces zozos qui accusent le libéralisme de travers qui n'ont rien à y voir (quand j'entends dire que notre gouvernement fait une politique libérale, je suis au bord de la crise d'apoplexie). Il faudra que je vous en fasse la critique.
Pascal Salin dans Le libéralisme (1) va plus loin que moi :
Il écrit que les libéraux français Bastiat et Say n'ont pas été lus parce que la limpidité de leur style a fait croire aux simplismes de leurs idées.
Donc, non seulement, il serait plus facile d'adhérer à des idées simplistes exprimées avec complexité qu'à des idées complexes exprimées avec simplicité, mais le seul fait d'écrire clairement pour tous desservirait l'auteur de traités économiques.
Ca ne serait pas pour m'étonner : le pédantisme et le goût des choses réservées sont de puissants moteurs chez certains intellectuels, à croire même que le savoir n'a pas pour fonction première l'apaisement de la soif de connaissances mais la distinction du vulgaire.
Que ce soit pour l'approuver ou pour le réfuter, je vous conseille de lire Bastiat : c'est un plaisir de lecteur gourmet, comme la cuisine japonaise, qui sous une apparente simplicité cache un grand raffinement.
Bastiat est surtout connu pour sa supplique des marchands de chandelles demandant à l'Etat de les protéger de la concurrence déloyale du soleil, mais ses écrits recèlent mille pépites.
(1) excellent livre que devraient lire nos anti-libéraux (et mêmes quelques soi-disants libéraux), au moins ils sauraient de quoi ils parlent, car rien n'est plus fatigant que tous ces zozos qui accusent le libéralisme de travers qui n'ont rien à y voir (quand j'entends dire que notre gouvernement fait une politique libérale, je suis au bord de la crise d'apoplexie). Il faudra que je vous en fasse la critique.
mardi, février 14, 2006
Y en a qui s'amusent comme ils peuvent
Deux inconscients sont allés arborant des drapeaux danois à la manif des islamites. Leur récit :
La BAF crash la manif des Islamistes contre les caricatures
Evidemment, les islamistes, qui ont le respect à sens unique, voulaient leur faire un sort.
Mais, est-ce bien intelligent, tout cela ?
La BAF crash la manif des Islamistes contre les caricatures
Evidemment, les islamistes, qui ont le respect à sens unique, voulaient leur faire un sort.
Mais, est-ce bien intelligent, tout cela ?
Ni soumission, ni manichéïsme : un texte revigorant
La lâcheté chiraquo-bien pensante commençait à me peser.
Des écrivains face à la caricature
LE MONDE 13.02.06 14h49 • Mis à jour le 13.02.06 14h53
A l'époque des Versets sataniques, lorsque la fatwa fut lancée sur la tête d'un écrivain reconnu, il se trouvait ici ou là, sur les ondes, dans les dîners en ville, entre les lignes des éditoriaux, des esprits fins qui discutaient de savoir si c'était un bon livre. D'autres, plus carrés, parlaient déjà de provocation. Et dans provocation, il faut toujours savoir entendre "inutile".
Aujourd'hui, on nous demande de considérer que les caricatures d'un prophète parues dans un journal danois voilà cinq mois ne seraient peut-être pas de bonnes caricatures. On a envie de dire qu'on s'en fiche un peu, et des caricatures, et de savoir si elles étaient bonnes ou non. On nous dit que c'est attiser la haine. Et, là encore, on aimerait répondre que la haine n'est pas dans nos moeurs ni dans nos coeurs. Et en quoi serions-nous responsables d'attiser la haine d'autrui, la haine étant par essence une braise qui s'alimente toute seule ?
Nos aînés auront sans doute l'impression d'un déjà-vu, déjà-entendu. Il semble bien qu'à l'époque de Munich, pour les esprits fins d'alors, il ne fallait surtout pas humilier le peuple allemand, ne pas blesser sa fierté de grande nation défaite depuis 1918, etc. C'était une drôle de façon de montrer à nos frères allemands la délicate attention qu'on leur portait que de les laisser entre les mains d'un pouvoir qui allait les opprimer, les jeter dans des guerres sans fin, les réduire à des actes immondes, et, faisant d'eux des monstres puis des victimes, les diaboliser, les couper en deux, littéralement, puisque le Diable est Celui qui divise.
On nous demande de porter un jugement esthétique, moral et sentimental, là où il n'est question que de principes fondamentaux pour nos démocraties : le droit des femmes et des hommes à vivre libres n'est certainement pas le credo des religions, et il ne le sera jamais.
Il ne s'agit pas seulement d'être libre de se tromper. La vérité, c'est que nous sommes libres de blasphémer. Il y a quelque chose d'assez déconcertant, en France, en 2006, dans le fait de devoir rappeler qu'on a droit au blasphème. Que bouffer du curé fut longtemps un sport national, comme vendre L'Huma avec Pif Gadget le dimanche dans les cités. Que bien sûr les croyants, retour de messe, s'en offusquaient. Ce qui ne les empêchait pas de s'encanailler avec l'intégrale de Brassens dans leurs salons.
"Les as-tu vues ?" est désormais la phrase à prononcer entre gens bien. Comme naguère "L'as-tu lu ?" à propos du livre de Rushdie.
Mais peu importe qu'on les ait vues ou pas. Rien ne justifie les réactions outrancières auxquelles se livrent pêle-mêle des croyants sincèrement blessés, des politiciens trop contents de l'aubaine et de nouveaux prophètes menaçants qui nous promettent la guerre. Quand le président du MRAP décide de porter plainte contre des journaux coupables de complicité avec les blasphémateurs, sous prétexte qu'il s'agit là de "racisme antimusulman", nous nous interrogeons : de quelle race s'agit-il ? L'islam serait-il génétiquement transmissible ? Qu'en pensent les centaines de milliers d'hommes et de femmes issus de l'immigration qui se voient ainsi, encore une fois, identifiés à une religion que bien souvent ils ne pratiquent pas ?
Nous ne sommes pas trop stupides : d'une part, des dessins passés totalement inaperçus voilà presque six mois ; d'autre part, le parti ultrareligieux qui gagne les élections en Palestine et l'Iran qui menace (la provocation iranienne, comment la juger ? utile ? inutile ?)...
Nous sommes des écrivains. Nos horizons sont divers, ainsi que nos origines géographiques, nos appartenances sociales, nos héritages religieux, nos destinées singulières, nos convictions intimes, et — pardon — nos préférences sexuelles.
Difficile de ne pas voir que, dans la guerre que se livrent désormais les fanatiques chrétiens américains et les fanatiques musulmans des Proche et Moyen-Orient, [je ne suis pas d'accord avec cette mise en équivalence bassement anti-américaine, mais je vous laisse juges] c'est sur les pays laïques et modérés que retombent fatalement colère et frustrations.
Bientôt, c'est notre liberté de publier qui, au Danemark comme en France, nous sera déniée au nom du respect de tel ou tel dieu. Laissons faire et on incendiera les bibliothèques qui abritent Voltaire, Sade, Ovide, Omar Khayyam, Proust et tous les autres. Et il est bien certain que pour le grand autodafé, seront réunis et danseront les papes, les grands rabbins et les grands muftis.
----------------------
Salim Bachi, Jean-Yves Cendrey, Didier Daeninckx, Paula Jacques, Pierre Jourde, Jean-Marie Laclavetine, Gilles Leroy, Marie NDiaye, Daniel Pennac, Patrick Raynal, Boualem Sansal sont écrivains.
Des écrivains face à la caricature
LE MONDE 13.02.06 14h49 • Mis à jour le 13.02.06 14h53
A l'époque des Versets sataniques, lorsque la fatwa fut lancée sur la tête d'un écrivain reconnu, il se trouvait ici ou là, sur les ondes, dans les dîners en ville, entre les lignes des éditoriaux, des esprits fins qui discutaient de savoir si c'était un bon livre. D'autres, plus carrés, parlaient déjà de provocation. Et dans provocation, il faut toujours savoir entendre "inutile".
Aujourd'hui, on nous demande de considérer que les caricatures d'un prophète parues dans un journal danois voilà cinq mois ne seraient peut-être pas de bonnes caricatures. On a envie de dire qu'on s'en fiche un peu, et des caricatures, et de savoir si elles étaient bonnes ou non. On nous dit que c'est attiser la haine. Et, là encore, on aimerait répondre que la haine n'est pas dans nos moeurs ni dans nos coeurs. Et en quoi serions-nous responsables d'attiser la haine d'autrui, la haine étant par essence une braise qui s'alimente toute seule ?
Nos aînés auront sans doute l'impression d'un déjà-vu, déjà-entendu. Il semble bien qu'à l'époque de Munich, pour les esprits fins d'alors, il ne fallait surtout pas humilier le peuple allemand, ne pas blesser sa fierté de grande nation défaite depuis 1918, etc. C'était une drôle de façon de montrer à nos frères allemands la délicate attention qu'on leur portait que de les laisser entre les mains d'un pouvoir qui allait les opprimer, les jeter dans des guerres sans fin, les réduire à des actes immondes, et, faisant d'eux des monstres puis des victimes, les diaboliser, les couper en deux, littéralement, puisque le Diable est Celui qui divise.
On nous demande de porter un jugement esthétique, moral et sentimental, là où il n'est question que de principes fondamentaux pour nos démocraties : le droit des femmes et des hommes à vivre libres n'est certainement pas le credo des religions, et il ne le sera jamais.
Il ne s'agit pas seulement d'être libre de se tromper. La vérité, c'est que nous sommes libres de blasphémer. Il y a quelque chose d'assez déconcertant, en France, en 2006, dans le fait de devoir rappeler qu'on a droit au blasphème. Que bouffer du curé fut longtemps un sport national, comme vendre L'Huma avec Pif Gadget le dimanche dans les cités. Que bien sûr les croyants, retour de messe, s'en offusquaient. Ce qui ne les empêchait pas de s'encanailler avec l'intégrale de Brassens dans leurs salons.
"Les as-tu vues ?" est désormais la phrase à prononcer entre gens bien. Comme naguère "L'as-tu lu ?" à propos du livre de Rushdie.
Mais peu importe qu'on les ait vues ou pas. Rien ne justifie les réactions outrancières auxquelles se livrent pêle-mêle des croyants sincèrement blessés, des politiciens trop contents de l'aubaine et de nouveaux prophètes menaçants qui nous promettent la guerre. Quand le président du MRAP décide de porter plainte contre des journaux coupables de complicité avec les blasphémateurs, sous prétexte qu'il s'agit là de "racisme antimusulman", nous nous interrogeons : de quelle race s'agit-il ? L'islam serait-il génétiquement transmissible ? Qu'en pensent les centaines de milliers d'hommes et de femmes issus de l'immigration qui se voient ainsi, encore une fois, identifiés à une religion que bien souvent ils ne pratiquent pas ?
Nous ne sommes pas trop stupides : d'une part, des dessins passés totalement inaperçus voilà presque six mois ; d'autre part, le parti ultrareligieux qui gagne les élections en Palestine et l'Iran qui menace (la provocation iranienne, comment la juger ? utile ? inutile ?)...
Nous sommes des écrivains. Nos horizons sont divers, ainsi que nos origines géographiques, nos appartenances sociales, nos héritages religieux, nos destinées singulières, nos convictions intimes, et — pardon — nos préférences sexuelles.
Difficile de ne pas voir que, dans la guerre que se livrent désormais les fanatiques chrétiens américains et les fanatiques musulmans des Proche et Moyen-Orient, [je ne suis pas d'accord avec cette mise en équivalence bassement anti-américaine, mais je vous laisse juges] c'est sur les pays laïques et modérés que retombent fatalement colère et frustrations.
Bientôt, c'est notre liberté de publier qui, au Danemark comme en France, nous sera déniée au nom du respect de tel ou tel dieu. Laissons faire et on incendiera les bibliothèques qui abritent Voltaire, Sade, Ovide, Omar Khayyam, Proust et tous les autres. Et il est bien certain que pour le grand autodafé, seront réunis et danseront les papes, les grands rabbins et les grands muftis.
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Salim Bachi, Jean-Yves Cendrey, Didier Daeninckx, Paula Jacques, Pierre Jourde, Jean-Marie Laclavetine, Gilles Leroy, Marie NDiaye, Daniel Pennac, Patrick Raynal, Boualem Sansal sont écrivains.
Astre mort
Le mot est facile, mais j'aime : en politique comme ailleurs, je me méfie des sans-humour, des trop-intègres, des trop-droits, des donneurs de leçons ; le Jospin, il m'horripile. Comme disait Clémenceau : " La politique, c'est comme l'andouillette, il faut que ça sente la merde, mais pas trop."
L'étoile Jospin, par Eric Fottorino
LE MONDE 13.02.06 14h51 • Mis à jour le 13.02.06 14h51
Au soir de sa défaite en 2002, Lionel Jospin avait dit renoncer à la politique. Candidat déçu et décevant, il retournait au silence. On avait compris, dans ses propos ultérieurs, qu'il en voulait aux Français de ne l'avoir pas élu. On s'était habitué à son retrait. Comme il en est des étoiles, on l'appréciait désormais pour son éloignement. Craignant son éclipse par l'astre Royal, il resurgit. Mais sans préjuger de l'avenir, d'où vient cette sensation que, même détendu, même souriant, Lionel Jospin paraît briller d'une lumière morte ?
L'étoile Jospin, par Eric Fottorino
LE MONDE 13.02.06 14h51 • Mis à jour le 13.02.06 14h51
Au soir de sa défaite en 2002, Lionel Jospin avait dit renoncer à la politique. Candidat déçu et décevant, il retournait au silence. On avait compris, dans ses propos ultérieurs, qu'il en voulait aux Français de ne l'avoir pas élu. On s'était habitué à son retrait. Comme il en est des étoiles, on l'appréciait désormais pour son éloignement. Craignant son éclipse par l'astre Royal, il resurgit. Mais sans préjuger de l'avenir, d'où vient cette sensation que, même détendu, même souriant, Lionel Jospin paraît briller d'une lumière morte ?
A propos de l'ISF ...
Ces propos très clairs ne convaincront pas les ayatollahs de l'ISF.
J'ajoute pourtant que la valeur des résidences principales ayant fortement augmenté, l'ISF touche de plus en plus de population dont le patrimoine n'est ni mobile ni liquide ; c'est-à-dire des gens qui ne peuvent pas échapper à cet impot et que celui-ci appauvrit.
F.
Effet richesse ou effet pauvreté
Selon les théories généralement admises, la hausse des actions, l'augmentation du prix de l'immobilier, entraînent chez les possédants une euphorie qui les pousse à dépenser davantage, ce qui augmente la consommation et stimule l'économie : c'est « l'effet richesse ». Cette constatation est exacte dans la plupart des économies développées ; elle ne l'est plus en France.
La valorisation des patrimoines entraîne un « effet pauvreté » et cela du fait de l'ISF. Pour la plupart des possédants (soumis par définition à l'ISF), le budget est constitué par des recettes fixes pour l'essentiel (salaires, retraites, loyers, etc.), dont le montant a comme contrepartie des dépenses de consommation ou d'investissement, d'une part, et les impôts dus, d'autre part. Si la valeur des actions ou de l'immobilier augmente une année de 10 % par exemple, l'ISF, compte tenu de ses taux progressifs, augmentera sensiblement de 15 %.
Face à des recettes quasi fixes, cette hausse de l'ISF entraînera arithmétiquement une diminution des dépenses de consommation ou d'investissement, d'où un effet déflationniste sur l'économie financière, c'est-à-dire un « effet pauvreté ». Si, pour maintenir le niveau antérieur de ses dépenses, l'assujetti à l'ISF vend des actions (ou autres) pour se procurer les liquidités nécessaires, la plus-value dégagée engendrera un impôt supplémentaire au taux de 27 %, soit un appauvrissement effectif.
En France, du fait de l'ISF, « l'effet richesse » constaté dans la plupart des pays développés se
traduit par un « effet pauvreté », dont les conséquences sont déflationnistes pour l'économie.
JACQUES CORNELIS 75116 PARIS
J'ajoute pourtant que la valeur des résidences principales ayant fortement augmenté, l'ISF touche de plus en plus de population dont le patrimoine n'est ni mobile ni liquide ; c'est-à-dire des gens qui ne peuvent pas échapper à cet impot et que celui-ci appauvrit.
F.
Effet richesse ou effet pauvreté
Selon les théories généralement admises, la hausse des actions, l'augmentation du prix de l'immobilier, entraînent chez les possédants une euphorie qui les pousse à dépenser davantage, ce qui augmente la consommation et stimule l'économie : c'est « l'effet richesse ». Cette constatation est exacte dans la plupart des économies développées ; elle ne l'est plus en France.
La valorisation des patrimoines entraîne un « effet pauvreté » et cela du fait de l'ISF. Pour la plupart des possédants (soumis par définition à l'ISF), le budget est constitué par des recettes fixes pour l'essentiel (salaires, retraites, loyers, etc.), dont le montant a comme contrepartie des dépenses de consommation ou d'investissement, d'une part, et les impôts dus, d'autre part. Si la valeur des actions ou de l'immobilier augmente une année de 10 % par exemple, l'ISF, compte tenu de ses taux progressifs, augmentera sensiblement de 15 %.
Face à des recettes quasi fixes, cette hausse de l'ISF entraînera arithmétiquement une diminution des dépenses de consommation ou d'investissement, d'où un effet déflationniste sur l'économie financière, c'est-à-dire un « effet pauvreté ». Si, pour maintenir le niveau antérieur de ses dépenses, l'assujetti à l'ISF vend des actions (ou autres) pour se procurer les liquidités nécessaires, la plus-value dégagée engendrera un impôt supplémentaire au taux de 27 %, soit un appauvrissement effectif.
En France, du fait de l'ISF, « l'effet richesse » constaté dans la plupart des pays développés se
traduit par un « effet pauvreté », dont les conséquences sont déflationnistes pour l'économie.
JACQUES CORNELIS 75116 PARIS
Des idées TOTALement aberrantes
Le président d'UFC-Que choisir écrit un article (Des surprofits TOTALement iniques) pour dire qu'il faut sur surtaxer les profits de Total.
Il a certes le droit de surfer sur une vague de démagogie, mais je me permets quelques réflexions :
> Les profits de Total sont des profits, pas des surprofits, je ne vois pas pourquoi, au nom de quel principe, les surtaxer.
> Personne n'oblige les gens à acheter leur essence chez Total.
> L'essentiel du prix de l'essence est constitué par des taxes.
> on ne peut pas à la fois se plaindre de la consommation d'énergies fossiles et regretter leur prix élevé.
Il est vrai que j'ai entendu ce matin que les Français seraient majoritairement contre la conccurrence (Hé oui, la France est bien le pays du corporatisme et des privilèges soutirés à la puissance publique). Je ne suis pas sûr qu'ils ne sont pas aussi contre les profits (au moins ceux des autres) et contre les actionnaires (sauf moi, car je suis un petit et que je mets de coté pour mes enfants).
Il a certes le droit de surfer sur une vague de démagogie, mais je me permets quelques réflexions :
> Les profits de Total sont des profits, pas des surprofits, je ne vois pas pourquoi, au nom de quel principe, les surtaxer.
> Personne n'oblige les gens à acheter leur essence chez Total.
> L'essentiel du prix de l'essence est constitué par des taxes.
> on ne peut pas à la fois se plaindre de la consommation d'énergies fossiles et regretter leur prix élevé.
Il est vrai que j'ai entendu ce matin que les Français seraient majoritairement contre la conccurrence (Hé oui, la France est bien le pays du corporatisme et des privilèges soutirés à la puissance publique). Je ne suis pas sûr qu'ils ne sont pas aussi contre les profits (au moins ceux des autres) et contre les actionnaires (sauf moi, car je suis un petit et que je mets de coté pour mes enfants).
Régession barbare
Je reproduis cet article car je suis moi aussi frappé et inquiet dans la violence des rapports humains en France : ça crie, ça gueule, ça revendique, ça tape, pour un rien.
Il y a quelques temps, à un kiosque à crêpes (celui du coin de la rue Montmartre, près du Max Linder), une espèce de gorille accompagnée de sa femelle s'est soudain excitée en poussant son cri "J'vais t'niquer ! J'vais niquer ta mère !" et en tambourinant la vitrine.
D'après ce que nous avons pu reconstituer une fois le King-Kong miniature éloigné et calmé par sa dame, le primate a considéré que la distribution de tickets pour la queue (comme à la Sécu) était entachée d'erreur et qu'une cliente lui était injustement passée de devant. Il a manifesté son courroux et le crêpier a eu le malheur de répondre que ce n'était pas bien grave.
Je ne sais pas si son orgueil viril a été atteint par le fait de se faire doubler, quelle horreur, par une femme. En tout cas, il s'est mis, on se demande bien pourquoi, à hurler au racisme, puis s'est énervé de plus en plus fort, tout seul, sous l'oeil vaguement inquiet des spectateurs médusés.
Je crois que le silence gêné (il passait vraiment pour un abruti) l'a encore plus excité. Encore un qui prend la rue pour un ring de boxe.
Régression barbare
L'éditorial d'Yves Thréard
[14 février 2006]
Le premier rapport de l'Observatoire national de la délinquance (OND) confirme une hausse inquiétante des violences contre les personnes. Comme une illustration de ce climat d'agressivité, les menaces qu'un rappeur vient de proférer contre le ministre de l'Intérieur méritent d'être relevées. «Tu vas te faire buter», lance, entre autres «amabilités», le présumé chanteur. Rarement un homme politique a ainsi été pris à partie.
L'affaire dénote une inquiétante dégradation des rapports humains dans notre société. Si l'on n'y prend garde, le respect et le dialogue, valeurs fondatrices d'une nation civilisée, seront bientôt piétinés par la vulgarité et l'intolérance. La démocratie ne se reconnaît pas dans l'insulte et le coup de poing.
Selon les statistiques de l'OND publiées hier, les violences physiques dites «non crapuleuses» ont augmenté de près de 10% l'année dernière. L'agresseur attaque pour un oui ou pour un non : un regard de travers, une tête qui ne lui revient pas, un besoin de défoulement...
L'acte est le plus souvent gratuit, sans mobile apparent, pas même celui du vol. Chaque jour de 2005, quelque cinq cents personnes ont été victimes en France de cette régression barbare. Et encore, toutes ne portent pas plainte, par crainte de représailles.
Plusieurs faits divers récents devraient nous faire réfléchir sur l'évolution de notre société. Celui de cet homme battu à mort à Epinay-sur-Seine en quelques secondes, sous les yeux de son épouse et de sa fille. Celui de cette enseignante d'Etampes, plusieurs fois poignardée en plein cours par l'un de ses élèves. Celui enfin de ces passagers du train Nice-Lyon, attaqués par une horde de voyous, après une nuit d'ivresse et de désoeuvrement. A chaque fois, des crimes ou délits commis pour rien, ou presque.
A défaut de trouver une explication dans notre culture de l'«excuse sociologique», cette sauvagerie serait-elle la manifestation d'une tare moderne à mettre sur le compte d'un dérèglement mental collectif ? Quelque chose comme un syndrome Orange mécanique ?
L'Observatoire national de la délinquance note qu'elle a toujours existé dans les relations intrafamiliales, mais que, sur ce terrain, des tabous ont sauté : les victimes parlent plus volontiers. Autre constat, les biens étant mieux protégés, on s'en prend davantage aux personnes. Pour le reste, la violence serait devenue, selon une expression bien anodine de l'OND, un nouveau «mode de régulation sociale».
Si tel est le cas, la banaliser est un péril dont il convient vite de se protéger. Sans précautions sémantiques. C'est affaire de courage et de volonté. De la part des parents, des enseignants. Et, bien sûr, des responsables politiques. C'est pour avoir trop longtemps négligé les victimes qu'ils ont presque fini par passer, malgré eux, pour les premiers responsables de la montée de la délinquance en France.
Il y a quelques temps, à un kiosque à crêpes (celui du coin de la rue Montmartre, près du Max Linder), une espèce de gorille accompagnée de sa femelle s'est soudain excitée en poussant son cri "J'vais t'niquer ! J'vais niquer ta mère !" et en tambourinant la vitrine.
D'après ce que nous avons pu reconstituer une fois le King-Kong miniature éloigné et calmé par sa dame, le primate a considéré que la distribution de tickets pour la queue (comme à la Sécu) était entachée d'erreur et qu'une cliente lui était injustement passée de devant. Il a manifesté son courroux et le crêpier a eu le malheur de répondre que ce n'était pas bien grave.
Je ne sais pas si son orgueil viril a été atteint par le fait de se faire doubler, quelle horreur, par une femme. En tout cas, il s'est mis, on se demande bien pourquoi, à hurler au racisme, puis s'est énervé de plus en plus fort, tout seul, sous l'oeil vaguement inquiet des spectateurs médusés.
Je crois que le silence gêné (il passait vraiment pour un abruti) l'a encore plus excité. Encore un qui prend la rue pour un ring de boxe.
Régression barbare
L'éditorial d'Yves Thréard
[14 février 2006]
Le premier rapport de l'Observatoire national de la délinquance (OND) confirme une hausse inquiétante des violences contre les personnes. Comme une illustration de ce climat d'agressivité, les menaces qu'un rappeur vient de proférer contre le ministre de l'Intérieur méritent d'être relevées. «Tu vas te faire buter», lance, entre autres «amabilités», le présumé chanteur. Rarement un homme politique a ainsi été pris à partie.
L'affaire dénote une inquiétante dégradation des rapports humains dans notre société. Si l'on n'y prend garde, le respect et le dialogue, valeurs fondatrices d'une nation civilisée, seront bientôt piétinés par la vulgarité et l'intolérance. La démocratie ne se reconnaît pas dans l'insulte et le coup de poing.
Selon les statistiques de l'OND publiées hier, les violences physiques dites «non crapuleuses» ont augmenté de près de 10% l'année dernière. L'agresseur attaque pour un oui ou pour un non : un regard de travers, une tête qui ne lui revient pas, un besoin de défoulement...
L'acte est le plus souvent gratuit, sans mobile apparent, pas même celui du vol. Chaque jour de 2005, quelque cinq cents personnes ont été victimes en France de cette régression barbare. Et encore, toutes ne portent pas plainte, par crainte de représailles.
Plusieurs faits divers récents devraient nous faire réfléchir sur l'évolution de notre société. Celui de cet homme battu à mort à Epinay-sur-Seine en quelques secondes, sous les yeux de son épouse et de sa fille. Celui de cette enseignante d'Etampes, plusieurs fois poignardée en plein cours par l'un de ses élèves. Celui enfin de ces passagers du train Nice-Lyon, attaqués par une horde de voyous, après une nuit d'ivresse et de désoeuvrement. A chaque fois, des crimes ou délits commis pour rien, ou presque.
A défaut de trouver une explication dans notre culture de l'«excuse sociologique», cette sauvagerie serait-elle la manifestation d'une tare moderne à mettre sur le compte d'un dérèglement mental collectif ? Quelque chose comme un syndrome Orange mécanique ?
L'Observatoire national de la délinquance note qu'elle a toujours existé dans les relations intrafamiliales, mais que, sur ce terrain, des tabous ont sauté : les victimes parlent plus volontiers. Autre constat, les biens étant mieux protégés, on s'en prend davantage aux personnes. Pour le reste, la violence serait devenue, selon une expression bien anodine de l'OND, un nouveau «mode de régulation sociale».
Si tel est le cas, la banaliser est un péril dont il convient vite de se protéger. Sans précautions sémantiques. C'est affaire de courage et de volonté. De la part des parents, des enseignants. Et, bien sûr, des responsables politiques. C'est pour avoir trop longtemps négligé les victimes qu'ils ont presque fini par passer, malgré eux, pour les premiers responsables de la montée de la délinquance en France.
dimanche, février 12, 2006
7 remarques sur la synthèse du congrès du PS
Sur les 57 pages de la synthèse finale du congrès du Mans, le chapitre consacré aux retraites se résume à ce paragraphe :
« Le Plan Fillon a aggravé les injustices sociales sans rien régler du financement des retraites. […] Garantir à chacun une retraite fondée sur un taux de remplacement qui doit être d’autant plus élevé que le revenu d’activité est modeste. Nous retirerons purement et simplement la loi Fillon sur les retraites et ouvrirons une négociation globale dès 2007, avec l’ensemble des partenaires sociaux, pour notamment tenir davantage compte dans le calcul des durées de cotisations, de la pénibilité, des personnes qui ont commencé à travailler jeunes et des situations familiales, notamment pour les femmes. De nouvelles ressources seront mobilisées à travers notamment une contribution de solidarité sur l’ensemble des revenus. »
En si peu de lignes, il est sans doute impossible de tout dire, mais des questions majeures restent ouvertes. Voici les nôtres :
> Un constat catégorique
« Le plan Fillon sur les retraites a aggravé les injustices sociales sans rien régler du financement des retraites.»
Côté financement, l’iFRAP est moins sévère, estimant que la réforme Fillon a résolu environ le tiers du problème. Plus positif aussi côté réduction des inégalités entre travailleurs du secteur privé et fonctionnaires. Le passage des fonctionnaires à 40 années de cotisation réduira, une fois appliquée en 2012, l’écart d’environ un tiers. La prise en compte de la moyenne des 6 derniers (donc meilleurs) mois au lieu des 25 meilleures années comme base de calcul de la retraite
demeure un avantage majeur pour les fonctionnaires.
Par contre, si ce sont les salariés des entreprises publiques comme EDF, GDF, RATP, SNCF… qui sont visés par le PS, l’iFRAP partage son constat. Les avoir laissés en dehors de toute réforme a bien aggravé les injustices sociales entre ces catégories privilégiées et le reste de la population, secteur privé et fonctionnaires.
Question 1 : Le PS a-t-il l’intention d’aligner ces régimes très spéciaux de retraite sur ceux du secteur privé ?
> Un objectif ambigu
« Garantir à chacun une retraite fondée sur un taux de remplacement qui doit être d’autant plus élevé que le revenu d’activité est modeste. »
C’est déjà la règle appliquée dans le secteur privé. Comme le montre le rapport du Conseil d’Orientation des Retraites (COR) par exemple, le taux de remplacement y est actuellement plus faible pour les hauts revenus que pour les bas revenus.
Par contre, dans tout le secteur public, la retraite représentant 75% du revenu des 6 derniers mois, le taux de remplacement est le même pour tout le monde.
Question 2 : le PS veut-il aligner le mode de calcul des retraites du secteur public sur celui du secteur privé ?
> Une décision radicale
« Nous retirerons purement et simplement la loi Fillon sur les retraites. »
Question 3 : le PS a–t-il toujours l’intention de retirer aussi la réforme Balladur qui ne pénalisait que le secteur privé ?
> Une méthode usée
« Nous ouvrirons une négociation globale dès 2007, avec l’ensemble des partenaires sociaux. »
Question 4 : après 20 ans de consultation et de réflexion, les rapports Rocard, Teulade, Charpin et COR, et la parution d’au moins 10 livres sur ce sujet, quelles sont les propositions du PS ?
Question 5 : au moment où l’Angleterre, l’Allemagne, le Danemark, l’Espagne envisagent de reculer l’âge de la retraite 67 ou 68 ans, quelle est la position du ? Toujours 60 ans ?
> De l’argent
« De nouvelles ressources seront mobilisées à travers notamment une contribution de solidarité sur l’ensemble des revenus. »
Question 6 : quel est l’ordre de grandeur cette augmentation de la CSG ?
Question 7 : A quel autre impôt le PS pense-t-il derrière le « notamment » ?
Les retraites constituent un problème dont toutes les données sont connues et quasiment mathématiques : les personnes existantes vont vieillir, les enfants qui vont payer leurs retraites sont nés, les Chinois et l’OMC n’y sont pour rien. C’est un sujet grave où on attend des propositions précises et crédibles, pas des incantations. Des réponses à nos 7 questions permettraient déjà de bien éclaircir les propositions du Parti Socialiste…
Philippe François
Société Civile n°54
janvier 2006
« Le Plan Fillon a aggravé les injustices sociales sans rien régler du financement des retraites. […] Garantir à chacun une retraite fondée sur un taux de remplacement qui doit être d’autant plus élevé que le revenu d’activité est modeste. Nous retirerons purement et simplement la loi Fillon sur les retraites et ouvrirons une négociation globale dès 2007, avec l’ensemble des partenaires sociaux, pour notamment tenir davantage compte dans le calcul des durées de cotisations, de la pénibilité, des personnes qui ont commencé à travailler jeunes et des situations familiales, notamment pour les femmes. De nouvelles ressources seront mobilisées à travers notamment une contribution de solidarité sur l’ensemble des revenus. »
En si peu de lignes, il est sans doute impossible de tout dire, mais des questions majeures restent ouvertes. Voici les nôtres :
> Un constat catégorique
« Le plan Fillon sur les retraites a aggravé les injustices sociales sans rien régler du financement des retraites.»
Côté financement, l’iFRAP est moins sévère, estimant que la réforme Fillon a résolu environ le tiers du problème. Plus positif aussi côté réduction des inégalités entre travailleurs du secteur privé et fonctionnaires. Le passage des fonctionnaires à 40 années de cotisation réduira, une fois appliquée en 2012, l’écart d’environ un tiers. La prise en compte de la moyenne des 6 derniers (donc meilleurs) mois au lieu des 25 meilleures années comme base de calcul de la retraite
demeure un avantage majeur pour les fonctionnaires.
Par contre, si ce sont les salariés des entreprises publiques comme EDF, GDF, RATP, SNCF… qui sont visés par le PS, l’iFRAP partage son constat. Les avoir laissés en dehors de toute réforme a bien aggravé les injustices sociales entre ces catégories privilégiées et le reste de la population, secteur privé et fonctionnaires.
Question 1 : Le PS a-t-il l’intention d’aligner ces régimes très spéciaux de retraite sur ceux du secteur privé ?
> Un objectif ambigu
« Garantir à chacun une retraite fondée sur un taux de remplacement qui doit être d’autant plus élevé que le revenu d’activité est modeste. »
C’est déjà la règle appliquée dans le secteur privé. Comme le montre le rapport du Conseil d’Orientation des Retraites (COR) par exemple, le taux de remplacement y est actuellement plus faible pour les hauts revenus que pour les bas revenus.
Par contre, dans tout le secteur public, la retraite représentant 75% du revenu des 6 derniers mois, le taux de remplacement est le même pour tout le monde.
Question 2 : le PS veut-il aligner le mode de calcul des retraites du secteur public sur celui du secteur privé ?
> Une décision radicale
« Nous retirerons purement et simplement la loi Fillon sur les retraites. »
Question 3 : le PS a–t-il toujours l’intention de retirer aussi la réforme Balladur qui ne pénalisait que le secteur privé ?
> Une méthode usée
« Nous ouvrirons une négociation globale dès 2007, avec l’ensemble des partenaires sociaux. »
Question 4 : après 20 ans de consultation et de réflexion, les rapports Rocard, Teulade, Charpin et COR, et la parution d’au moins 10 livres sur ce sujet, quelles sont les propositions du PS ?
Question 5 : au moment où l’Angleterre, l’Allemagne, le Danemark, l’Espagne envisagent de reculer l’âge de la retraite 67 ou 68 ans, quelle est la position du ? Toujours 60 ans ?
> De l’argent
« De nouvelles ressources seront mobilisées à travers notamment une contribution de solidarité sur l’ensemble des revenus. »
Question 6 : quel est l’ordre de grandeur cette augmentation de la CSG ?
Question 7 : A quel autre impôt le PS pense-t-il derrière le « notamment » ?
Les retraites constituent un problème dont toutes les données sont connues et quasiment mathématiques : les personnes existantes vont vieillir, les enfants qui vont payer leurs retraites sont nés, les Chinois et l’OMC n’y sont pour rien. C’est un sujet grave où on attend des propositions précises et crédibles, pas des incantations. Des réponses à nos 7 questions permettraient déjà de bien éclaircir les propositions du Parti Socialiste…
Philippe François
Société Civile n°54
janvier 2006