Tous ces livres méritent l'effort de les lire. Même ceux qui sont réputés difficiles, surtout ceux-là, car ce sont ceux qui dépaysent le plus. Bon voici une liste à peu près chronologique :
L'odyssée (Homère)
Ce chant a ému "des générations d'hommes, nombreuses comme les feuilles."
L'enquête (Hérodote) ; La guerre du Péloponnèse (Thucydide)
Ces deux-là sont toujours associés et opposés. L'un le conteur, l'autre le rigoureux. Les Grecs contre les Perses, Les Athéniens contre les Spartiates.
Nota : les bouquins de la Pléiade sont très solides : les oeuvres complètes Hérodote et Thucydide ont un peu moisies après avoir voisiné pendant six mois avec une bouteille d'eau fuyante dans un coffre de Clio mais elles sont encore lisibles.
La guerre des Gaules (JC)
Livre à la gloire de Jules César écrit par César, Jules.
Perceval le gallois (Chrétien de Troyes)
Un roman médiéval, tout en symboles
La divine comédie (Dante)
Dante, guidé par Virgile, descend aux Enfers chercher Beatrice. A-t-on fait mieux depuis ?
Oeuvres complètes de Villon
Maitre François nous initie à la grande truanderie. "Frères humains, qui après nous vivez, n'ayez contre nous le coeur endurci ...."
Oeuvres de Rabelais
Un autre maitre François. Le rire et la liberté.
Les Essais (Montaigne)
Celui-là a bien choisi la phrase gravée sur une des poutres de sa librairie :"Je suis un homme, et rien de ce qui humain ne m'est étranger." Une fête de l'intelligence. Pour ceux qui ne voudraient vraiment pas s'y mettre, je signale Montaigne à cheval, de Jean Lacouture, qui est un substitut, mais c'est à Montaigne ce que le mousseux est au champagne.
Nathalie Sarraute, la romancière, ne quittait jamais son exemplaire des Essais, paraît-il, et, dans les moments de déprime, l'ouvrait à une page au hasard, suivant la tradition russe avec la Bible, en invoquant "Montaigne, aide moi !" Parmi les amis de Montaigne, on compte La Bruyère, Voltaire, Stendhal, Jean Prévost, Saint-Exupéry. Je ne peux croire que cette affinité à travers les siècles avec des auteurs que, par ailleurs, j'apprécie soit un hasard sans signification.
Othello (Shakespeare)
Souvent placée en retrait des "trois grandes" (Hamlet, Mac Beth, King Lear), cette pièce présente pourtant le personnage le plus attachant, à mes yeux, de toute la littérature shakespearienne : Othello.
Sonnets (Shakespeare)
Se passe de commentaires, d'ailleurs je ne sais pas quoi dire
Phèdre (Racine)
Inceste, meurtres, jalousie, la vie, quoi ...
Le Misanthrope (Molière)
L'homme aux rubans verts aime Célimène. une comédie, presque une tragédie.
Romans et contes (Voltaire)
Mon conte préféré, c'est Zadig. Mais à chacun le sien.
Fables (La Fontaine)
Celui-là, jai hésité, mauvais souvenirs d'école. Mais en relisant en adulte, ça vaut le coup.
La chartreuse de Parme (Stendhal)
Stendhal écrivait ses romans d'une traite, sans ratures, car il travaillait d'abord sur lui-même et, quand il était prêt, ça sortait.
L'éducation sentimentale (Flaubert)
Il ne se passe rien que l'amour inassouvi entre Frédéric et madame Arnoux, et pourtant, c'est un grand roman.
La guerre et la paix (Tolstoï)
Une femme aime un homme et en épouse un troisième. J'ai tout lu en une demi-heure : il neige et ça parle de Russie (Woody Allen)
Anna Karénine (Tolstoi)
Vronski est séduisant, mais de là à abandonner mon fiston-que-j'aime ?
Histoire de la révolution française (J. Michelet)
Il est des livres qui deviennent des monuments mais n'en perdent pas leur qualité humaine pour autant. Vraiment un très grand livre. L'oeuvre d'une vie.
L'ancien régime et la révolution (Tocqueville)
Les misérables (Hugo)
Je suis une force qui va.
Nostromo (Conrad)
Le plus grand roman exotique ? En tout cas, un émerveillement
Alcools (G. Apollinaire)
La Lorelei, le Rhin, tout ça.
Ceux de 14 (M. Genevoix)
Terre des hommes (Saint-Exupéry)
Il cherche ce qu'il faut dire aux hommes et il finit par trouver
Le rivage des Syrtes (J. Gracq)
Comme Nostromo, un roman qui crée son univers
L'étrange défaite (M. Bloch)
Si vous voulez savoir ce que peut donner comme historien la maturation de plusieurs siècles de culture humaniste... Il ne se paye pas de mots : quand il écrit "Je souhaite que nous ayons encore du sang à verser", il pense d'abord au sien.
Fureur et mystère (R. Char)
Ecrit pendant la guerre, dans l'instant "Etre du bond. N'être pas du festin, son épilogue".
Le fil de l'épée et Mémoires de guerre (C. De Gaulle)
Un peu sa guerre des Gaules à lui. Comme la guerre des Gaules, c'est bien écrit, net et sans bavures... et il parle de lui.
Out of africa (Karen Blixen)
Conteuse exceptionnelle
Belle du seigneur (Cohen)
La joie, l'humour, la férocité. Alleluia pour le vieux juif.
Mémoires d'Hadrien (Yourcenar)
Fascinante, l'intimité d'un empereur
Oeuvres St John Perse
Spécial mais beau
Quelques livres qui se rattache plus ou moins à l'actualité :
No end save victory (ouvrage collectif)
Recueil d'articles sur des aspects oubliés ou inconnus de la seconde guerre mondiale. Passionante mise en perspective de l'histoire "officielle". Ca rend plus modeste lorsqu'on joue les stratèges en chambre sur la guerre d'Irak
Quelques livres d'actualités politico-économiques :
La guerre des deux France (J. Marseille) et La France qui tombe (N. Baverez) : plutôt de tendance décliniste, ils ont au moins le mérite de poser le débat
Le grand gaspillage (J. Marseille) et Etat d'urgence (ouvrage collectif) : émettent un diagnostic alarmant sur la santé, notamment financière mais pas seulement, de l'Etat français et proposent quelques pistes. Leurs évaluations recoupent approximativement celles de la cour des comptes : on pourrait, en posant les problèmes avec honnêteté et avec une vraie volonté de les résoudre, arriver, sans trop de douleurs mais avec quelques bousculades de situations figées à une réduction des dépenses, de l'ordre de 20 % avec plutôt une amélioration du service public.
Le problème est d'offre politique. Le diagnostic sur les maux de l'Etat et de la société français a été maintes fois émis par divers organismes ; mais il n'est pas ou peu partagé par les citoyens par absence de pédagogie des dirigeants et de projet construit (on restreint la politique à des slogans souvent très creux et à des querelles d'ambitions personnelles) ; d'où une inquiétude diffuse qui ne trouve aucun médiateur politique pour s'exprimer de manière positive et se transformer en action.
Les Français face à la réforme sont comme face à la roulette chez le dentiste : ils hurlent avant même qu'on les touche. Comment pourrait-il en être autrement alors qu'au lieu de leur ouvrir des perspectives, de prendre la barre, on s'évertue à leur faire peur et on donne à penser qu'on est victime d'évènements hors de contrôle ? "on", bien sûr, ce sont les politiciens.
Sur le sujet de l'action politique au sein de la société, deux livres de Nicolas Tenzer : Les valeurs des modernes et France : la réforme impossible ?
L'auteur pose à chaque fois la question : comment articuler individualisme et action collective dans le monde actuel ? Les réponses qu'il y apporte sont complexes, sa pensée ne s'est peut-être pas encore totalement cristallisée sur deux ou trois axes forts (nécessaires à l'action). En tous les cas, les propos sont fort instructifs. Pour ma part, cette question est la plus complexe que je rencontre actuellement, non seulement au niveau de la politique générale, mais à mon propre niveau : si je veux faire de la politique efficacement, comment m'y prendre ? Faire de la politique pour parler dans le vide, non merci.
Aujourd'hui, pour parodier une phrase des Anglais sur le football, la politique, c'est un jeu auquel tous les citoyens peuvent jouer et c'est un énarque qui gagne à la fin.
Enfin pour terminer sur une note optimiste :
Le modéle suédois (Magnus Falkehed) : réformer en profondeur tout en gardant un haut de niveau de prestations sociales est possible. Mais il y a du boulot ! Les Français n'étant pas plus bêtes que les Suédois, du moins je l'espère, nous devrions pouvoir y arriver aussi. Il "suffit" de s'y mettre.
samedi, décembre 11, 2004
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