mercredi, octobre 31, 2007

«On organise la spoliation des générations futures»

Bernard Spitz, auteur de livres sur l'Etat français, son fonctionnement et ses gaspillages, explique que la réforme en trompe-l'oeil des régimes spéciaux de retraite (on remplace les régimes spéciaux par de nouveaux régimes tout aussi spéciaux), ainsi que globalement, l'absence de véritables réformes, par exemple des universités, sont une manière d'organiser la spoliation des générations futures.

A mes yeux, ce diagnostic est tout à fait clair, seuls ne le voient pas ceux qui, par bêtise ou par égoïsme, ont décidé de ne pas le voir.

Ce qui me pose question est différent : l'argument de Bernard Spitz «Des systèmes sociaux qui ne sont pas en équilibre financier ne sont pas pérennes et préparent donc une spoliation des générations futures, qui paieront pour des systèmes dont elles ne pourront bénéficier» est très exactement celui qui a amené un fort consensus au Canada, en Nouvelle-Zélande et en Suède pour une réformes des systèmes sociaux, avec une dose plus ou moins forte de libéralisation.

Or, je ne vois pas pourquoi les Français seraient plus bêtes que les Canadiens, les Suédois ou les Kiwis. Je ne comprends donc pas pourquoi un argument suffisamment clair et évident pour faire consensus chez les autres n'a pas de prise chez nous.

On a avancé beaucoup de choses pour expliquer cette singularité : méconnaissance de l'économie, persistance d'un sous-marxisme, religion étatiste, lobby fonctionnaire, aboulie due à l'assistanat, égoïsme des soixante-huitards, veulerie des politiciens etc ...

Tout cela peine cependant à emporter ma conviction.

Banqueroute de l'Etat français : le choix dans la date

«La France est une URSS qui n'a ni vraiment réussi, ni vraiment échoué.»

Sauf que plus le temps passe sans véritable réforme, et par véritable réforme j'entends sans ambigüité un système de retraite par fonds de pension, un tiers de fonctionnaires en moins, un tiers d'impôts en moins et un tiers de dépenses publiques en moins, plus la réussite s'éloigne et plus l'échec se rapproche.

Nous sommes dans la situation de ce type qui se jette du 100ème étage et qui, arrivé au 50 ème, déclare que toutes ses histoires de chute libre et de dangerosité de sauter sans parachute sont grandement surévaluées. Puis, au 20ème étage il ajoute : «Vous voyez. Jusqu'ici, tout va bien. Les "chutelibristes" sont des oiseaux de mauvais augure, une autre physique est possible.»

La banqeroute (qui n'a rien d'inéluctable, je vous le rappelle) approche mais son heure est incertaine, alors examinons quelques dates :

2007 : année où le système de retraite par répartition devient insoutenable sans ajustements d'après des études de 1995.

2011 : année où l'agence de notation Standard & Poors prévoit de baisser la note de la dette de l'Etat français si rien ne change.

2012 : année où la France fait faillite d'après le livre de P. Jaffré.

2013 : année où j'ai longtemps cru, au pifomètre, que le France ferait faillite.

2017 : année où je pense désormais, toujours au pifomètre, que la France fait faillite. Ma confiance dans la capacité des technocrates à tirer toutes les ficelles pour retarder la catastrophe, sans toutefois réformer, s'est accrue. Cela veut dire que l'Etat sera toujours aussi inefficace mais rendra de moins en moins de services.

2020 : année où JP Chevallier prévoit la faillite de la France (système d'assurances sociales + Etat)

Comme vous voyez, le spectre est large, du fait des décisions pouvant être prises d'ici là, accélérant ou ralentissant la chute. L'inertie et la mansuétude de nos partenaires de la zone Euro nous protègent jusqu'à maintenant, cela peut changer.

Mais le déroulement de la banqueroute ne change pas : l'Etat français peine à trouver des créanciers, les taux d'intérêts augmentent, l'Etat est incapable de faire face, le FMI (et les pays de l'Euroland ?) intervient et exige des mesures drastiques, des émeutes commencent, à partir de là, c'est le saut dans l'inconnu.

Scénario rose, à l'anglaise, à la suédoise ou à la canadienne : le pays fouetté dans son orgueil, accomplit enfin les réformes tant retardées.

Scénario noir : le pays se cherche des boucs-émissaires, les spéculateurs, les riches, la mondialisation.Toutes les spoliations, toutes les persécutions, toutes les dérives, y compris l'autarcie et la dictature, deviennent possibles.

En faveur du scénario rose : la population vieillit et la révolution n'est pas un truc de vieux.

En faveur du scénario noir : la mentalité de défiance qui est celle des Français des années 2000. La tradition des boucs-émissaires. Le populisme, l'absence de pragmatisme et de courage des politiciens. Une forte population immigrée qui fournira des boucs-émissaires sur mesure.

Comme je l'ai dit, une fois qu'on a ruiné les institutions qui tiennent un pays en place, c'est le saut dans l'inconnu, nous l'avons vu en 1789 et en 1940. Nombreux sont ceux qui ont essayé de dominer la révolution, Mirabeau,La Fayette, Danton, Robespierre, Seyes, il a fallu attendre Bonaparte.

Même si Churchill, tout à sa francophilie, a écrit que la France avait le don de secréter un sauveur quand on la croyait perdue, ça me semble un pari très risqué à prendre. On ne trouve pas les Henri IV, les Clémenceau et les De Gaulle sous le sabot d'un cheval.

A titre individuel, la solution à ces situations tumultueuses est bien entendu l'émigration, grand classique de l'histoire de France, encore faut-il en avoir les moyens et la volonté.

Hors de l'émigration, le plus sûr est de faire profil bas et de suivre discrètement le troupeau, genre pétainiste en 40, gaulliste en 44.

Bien sûr, il s'agit là de constats qui font l'impasse sur votre caractère et sur vos convictions.

Dans ces périodes de chaos, on est d'autant plus responsable de ce que l'on fait et de ce que l'on ne fait pas.

mardi, octobre 30, 2007

Meuh non, la démagogie n'est la méthode du gouvernement Sarkosyon ...

Sans commentaire (ou presque)

A propos de commentaire, je profiterai du WE prolongé pour vous faire le mien sur le gouvernement.

samedi, octobre 27, 2007

L'économie française n'a pas de problèmes de pouvoir d'achat, contrairement à certains Français


Il y a beaucoup de confusion, et aussi de démagogie, autour de ces histoires de pouvoir d'achat.

L'économie française n' a pas de problèmes de pouvoir d'achat : la consommation se porte bien, les importations aussi !

Les mesures de relance, sempiternelles solutions miracles depuis trente ans, qui n'ont amené que des désastres, sont donc non seulement inutiles mais néfastes, puisqu'elles creusent les déficits publics pour régler un problème inexistant.

Par contre, certains Français ont un réel problème de pouvoir d'achat.

Mais on ne le résoudra pas par plus d'assistanat, car l'assistanat n'est une aide qu'en apparence. Ce qui améliore plus que tout le pouvoir d'achat, c'est la croissance, et l'assistanat tue la croissance.

Si la France avait connu la croissance américaine des dernières décennies, les Français seraient plus riches d'un tiers environ, y compris les plus pauvres ; aucune redistribution, aucune politique d'assistanat, ne peut amener une telle amélioration du niveau de vie.

On me répondra qu'il y a des pauvres aux USA. Certes, mais n'y en a-t-il pas aussi en France ?

A une nuance près : quelqu'un considéré comme pauvre aux USA a tout de même une voiture, un réfrigérateur et une télévision.

Il n'y a pas de solution miracle, pas de pays idéal. Mais, ceux qui veulent bien observer et réfléchir savent qu'on peut améliorer le bien-être des Français en les libérant du carcan administratif et étatique qui les étouffe sous prétexte de les protéger.

Car soyons clairs : les Français ne sont pas plus cons que les autres, il n'y a donc aucune raison que, libérés du poids fiscal de la mauvaise graisse étatique, ils ne fassent pas aussi bien que les Irlandais, les Suédois, les Néo-Zélandais, les Canadiens ...

Les élites de ce pays refusent le libéralisme.

Nos gouvernants acceptent de temps en temps quelques solutions d'inspiration libérale, assez inefficaces d'ailleurs, puisqu'elles sont isolées d'une réflexion globale. Mais ils refusent obstinément le cœur du libéralisme, à savoir que les mieux placés pour décider ce qui est bon pour les Français sont les Français eux-mêmes, auxquels on laisserait le maximum de liberté, les lois se contentant d'édicter des principes clairs de cohabitation.

Ce refus borné du libéralisme est à mes yeux une défaite intellectuelle du même ordre que la défaite militaire de 1940 : on a les moyens de savoir, d'anticiper, mais on ne veut pas, on met la tête dans le sable et quand la catastrophe arrivera, on se paiera le luxe de se tromper d'analyse (ça sera évidemment la faute des méchants spéculateurs et du sauvage capitalisme anglo-saxon). C'est rageant.

vendredi, octobre 26, 2007

Dans 20 ans, la fin de l'agriculture française ?


Le «Grenelle» de l'environnement, dont les proposition sont reprises par Nicolas Sarkozy, vient d'annoncer deux objectifs dont la contradiction porte en elle la fin de l'agriculture française, ni plus ni moins :

> une diminution de l'emploi des pesticides

> un moratoire sur la commercialisation des OGMs

Les paysans n'emploient pas les pesticides pour le plaisir mais parce que c'est utile. Sans les pesticides, il n'y aurait pas eu de pommes de terre en France en 2007, fini le steak-frites.

Or, les OGMs sont le meilleur moyen de diminuer l'emploi de pesticides, là est la contradiction. Si on ne commercialise pas les OGMS, on ne peut diminuer les pesticides significativement.

Et l'agriculture biologique ? C'est un marché de niche. Elle ne peut nourrir une population en quantité suffisante, à un prix raisonnable et à une qualité donnée. J'ai pris l'exemple des pommes de terre. Sans pesticides, on n'en aurait pas eu cette année, mais on peut tout aussi bien se référer à l'histoire : quand l'agriculture «biologique» arrivait à nourrir le pays, 90 % de la population était rurale (ce fantasme champêtre est celui plus ou moins avoué de nombre d'écolos (1) ).

Bien sûr, des techniques biologiques modernes permettent d'améliorer les rendements par rapport au XIXème siècle, mais, au fond, la problématique reste, car on ne peut espérer de miracles.

Il y a une issue : c'est l'importation à cette contradiction. C'est déjà le cas des OGMs. On ne peut en cultiver à des fins commerciales en France, mais on peut en importer.

Mais c'est là aussi contradictoire : on ne peut pas vérifier à l'étranger si il n'y a ni pesticides ni OGMs (2). Bref, loin des yeux, loin de la peur ; on aura juste exporté notre pollution.

Bref, on réussira à tuer notre agriculture sans améliorer significativement la qualité des produits. Bel exemple d'intelligence à la française.

Vous me direz qu'on trouvera bien un moyen terme : moins de pesticides, un peu plus d'OGMs. Certes, il n'y a pas que des imbéciles et des démagogues en France, et il y aussi quelques groupes de pression opposés aux écolos. Mais le temps perdu ne se rattrape pas et les parts de marché perdues non plus (du moins à court terme).

Et maintenant, que faudrait-il faire à mon avis ? C'est simple : lever le moratoire sur la commercialisation des OGMs. Et c'est tout, vraiment tout, pas de nouvelles taxes, pas de nouvelles lois, rien.

(1) : certains ignorent à quel point la vie du temps de l'agriculture "biologique" était plus dure, d'autres le savent mais s'en foutent. Pourtant, tout ce que ce retour à la terre, qui, elle, ne ment pas, c'est bien connu, a de relents devrait inciter à la prudence, même les plus irréfléchis.

(2) : de plus, comme les OGMs ont aussi des applications médicales, il est possible que l'industrie pharmaceutique en prenne un coup au passage.

Ecologisme : je suis cerné mais je ne me rends pas !

Depuis ce matin, je n'entends parler à la radio que du «Grenelle de l'environnement », et qu'il est urgent de taxer, et qu'il est important de règlementer, et qu'il faut obliger à ceci, inciter à cela , prendre des mesures pour ci, légiférer contre ça, etc.

Hé bien, je suis désolé : je persiste. Je n'ai aucun élément m'amenant à juger que l'écologie est un problème national prioritaire et urgent.

Il y a bien quelques problèmes locaux. Mais pas de quoi fouetter un chat au niveau national.

Il est vrai que, pendant que l'on parle de ces fadaises, on ne parle pas d'autre chose.

jeudi, octobre 25, 2007

La constitutionnalisation du principe de précaution est-elle irréversible ? J'en ai bien peur

Le fameux principe de précaution m'a toujours heurté comme réactionnaire et rétrograde. Je suis d'accord avec l'article de Claude Bébéar (lire aussi les commentaires).

Mais c'est assez difficile à expliquer : la plupart des gens confondent la nécessité de prévenir et le fait de donner valeur constitutionnelle à l'immobilisme.

On dit souvent, pour défendre ce principe : «Il ne faut pas faire n'importe quoi». Comme si avant l'instauration du principe de précaution, on pouvait faire n'importe quoi ! Bien sûr que non, toutes les lois sur la responsabilités et les dommages sont là pour empêcher de «faire n'importe quoi».

Quoiqu'en disent certains, il n'y a pas aujourd'hui de rupture qui nécessiterait l'édiction de nouveaux principes.

Ce que dit le principe de précaution, c'est qu'en cas de risques non évalués, il ne faut rien faire (car faire des études supplémentaires, c'est dans la plupart des cas simplement repousser l'action aux calendes grecques) ; mais comme ne rien faire comporte aussi des risques non évalués, c'est totalement idiot et contradictoire.

D'ailleurs, si le principe de précaution avait été appliqué au principe de précaution, il ne serait pas dans le constitution.

Alors quoi ? C'est en réalité fort simple : comme toute existence humaine induit des risques, tant dans l'action que dans l'inaction, qu'il est impossible la plupart du temps d'évaluer et donc de hiérarchiser, on est dans l'impasse si on est rationnel.

Pour sortir de l'impasse, il suffit très simplement d'être irrationnel. Les risques sont non plus hiérarchisés par l'analyse, mais par les émotions, les images chocs, le discours le plus émouvant, le groupe de pression le plus efficace.

En ce sens, le principe de précaution est une défaite de la pensée, et très lourde.

Je connais suffisamment l'histoire de l'aviation pour avoir une certitude : si le principe de précaution avait existé du temps des frères Wright et de Blériot, on en serait encore aux avions en papier.

Car les risques n'étaient pas là où on les croyait, et ils étaient aussi là où on ne les croyait pas. Et il n'y avait qu'un seul moyen de savoir, qui est toujours la devise des pilotes d'essai "Y aller voir".

Mais finalement, à l'échelle de l'humanité, ce n'est pas grave : les découvertes dont la France se privera seront faites par d'autres qui n'auront pas nos lubies. Par contre, s'agissant de la France ...

Mais, après tout, pourquoi vouloir à tout prix que ce pays ait un avenir ?

mercredi, octobre 24, 2007

Le boniment durable

Le "Grenelle" de l'environnement prend fin : encore une grand'messe étatiste (aux frais du contribuable) achevée.

Je n'attache pas une haute priorité à l'écologie : la nature, c'est bien, mais l'homme premier servi.

L'écologie est un problème de pays riches. C'est d'ailleurs ainsi que le voient les pays pauvres.

Comme nous sommes dans un pays riche, discutons-en :

> le concept de développement durable (sous-entendu contraint) ne repose pas sur grand'chose : dans une société de marché libre, le développement est spontanément durable (contrairement à ce qui s'est passé en URSS), puisque la raréfaction d'un produit entraine une hausse de son prix qui diminue son utilisation (le pétrole est un excellent exemple : si il n'est pas plus cher et très employé, c'est tout simplement qu'il est abondant).

> Quant à la pollution, soit elle dérange et un bon procès règle le problème ; soit elle ne dérange pas, et il n'y a pas de problème.

Bien sûr, mon raisonnement ne tient la route que si marchés, producteurs et consommateurs sont en constante évolution, si ils s'adaptent. Et, justement, c'est ce que montre l'expérience.

On m'accusera, je vois ça d'ici, de simplisme et d'idéalisme.

Mais il est extrêmement facile de retourner l'accusation : n'est-ce pas plutôt les malthusiens qui croient tout fixe, ressources, techniques, croissance de la population, et dont les prédictions catastrophistes se sont toujours révélées fausses, qui font preuve de simplisme et de manque de pragmatisme ?

Bref, je suis opposé à toute politique publique à caractère écologiste.

Par contre, ça ne m'empêche pas à titre individuel de préférer ne pas polluer. Mais vous comprenez bien que c'est totalement différent d'un règlement qui m'imposerait de ne pas polluer.

mardi, octobre 23, 2007

Pourquoi il ne faut pas faire de virage engagé ni monter dans un avion piloté par un casse-cou

Regardez ce petit film :



Edifiant, non ?

Hé bien, la cause de l'accident (Fairchild Air Base crash), qui a provoqué la mort de tout l'équipage, sous les yeux de la famille et des amis venus pour une fête qui devait se tenir après le vol, est un bête virage engagé à 250 ft sol par un pilote (Bud Holland) réputé casse-cou (il était
déjà passé à 30 ft sol -il ne manque pas de 0- avec un B-52).

L'intéressant dans cet accident est le coté facteurs humains : le pilote avait un long passé de hors-la-loi mais personne n'avait osé le sanctionner (l'expérience, la réputation, les relations, la grande gueule, le «Y a pas mort d'homme»). Après, tout le monde a pensé, mais un peu tard, qu'il aurait du être interdit de vol depuis longtemps.

Cela pose aussi le problème du recrutement des pilotes de combat : il faut des types qui n'ont pas froid aux yeux mais qui respectent toujours les règles, sauf quand il y a une bonne raison de les enfreindre. Un rien contradictoire, n'est-ce pas ?

Ce film plus long est un montage des séquences filmés où il a outrepassé les limites de l'avion :



Ca rappelle Docteur Folamour ?

L'enquête a fait remarquer que le pilote cow-boy garait toujours sa voiture dans la zone de stationnement interdit de la base. C'est dit, promis, craché, juré, je ne monte plus en avion avec un pilote de l'aéroclub mal garé (j'ai les noms).

Pas de rupture pour la société de défiance

Lisez ces deux articles à la suite, et vous comprendrez pourquoi le manque de vraie rupture du gouvernement Sarkozy m'inquiéte :

La société de défiance


Compromis, ce mot qui commence si mal

lundi, octobre 22, 2007

Henri, pire que Cécilia ?


Il était d'usage jusqu'à récemment de plaisanter en disant que le plus gros problème politique de Nicolas Sarkozy était Cécilia. La question semble dorénavant réglée.

Mais, en fait, le plus gros problème de Nicolas Sarkozy semble être Henri Guaino, son éminence grise.

J'ai déjà eu l'occasion de vous dire tout le mal que je pense de ce personnage.

J'ai participé à une discussion sur le blog de Guy Sorman.

De Guaino, sachez :

> qu'il est un séguiniste, c'est-à-dire un type qui croit que la France est une île. Etre patriote, ce n'est pas tenir absolument à ce que la France fasse autrement que les autres, c'est faire que la France se porte au mieux, et il est idiot de refuser des idées sous prétexte qu'elles seraient anglo-saxonnes, comme si les bonnes idées avaient une étiquette.

> que Juppé le tenait en grande méfiance. Or, si Alain Juppé n'est pas un modèle d'habileté politique, on ne peut lui retirer qu'il tient la route intellectuellement.

> qu'il a été Commissaire au Plan (je ne me suis toujours pas remis de cet article des Echos que je vous rabache où il n'avait rien trouvé de mieux que de mettre en face de la dette public l'épargne des particuliers)

> qu'il se définit comme "barresien" mais qu'il est à mon avis maurrassien.

> qu'il est à l'origine de la lecture de la lettre de Guy Moquet dans les lycées, initiative que je trouve, présentée telle qu'elle l'a été, déplacée, même si, par ailleurs, je juge puérile l'attitude certains profs contestataires ( 'faut suivre, ' y a des nuances !).

Il est l'archétype du technocrate : de vagues idées générales avec lesquelles il croit ordonner le monde, quelques compétences administratives pointues (il est économiste de formation) et aucune expérience en dehors de l'Etat et des gros machins bureaucratiques.

Au final, son lyrisme n'a d'égal que le flou de ses analyses : grande gueule, petites idées et aucune rigueur. Bon à rien mais prêt à tout. Bref, à peu près le contraire de ce que je crois nécessaire.

Installer Guaino à l'Elysée me paraît aussi sensé que de donner les clés d'une armurerie à un tueur en série.

Et il a déjà sévi : il est à l'origine avec Raymond Soubie de la concession (1) faite aux conducteurs de trains. Cette capitulation fait que la réforme des régimes spéciaux ne sera pas pour eux. L'équité, la justice, l'anticipation, qui sont les motivations de cette réforme, on s'en fout.

Le drame, c'est que, contrairement à un couple complémentaire où les qualités de l'un compensent les défauts de l'autre, Nicolas Sarkozy a exactement les mêmes défauts : sa campagne électorale a révélé un grand flou dans ses idées. Etatiste, le lundi ; Européen, le mardi ; souverainiste, le mercredi ; presque libéral le jeudi ; interventionniste, le vendredi ; et après c'est week-end, on prend des photos sur la plage avec p'tit Louis.

Un dernier mot, je pense que l'opposition, la vraie, pas celle des Besancenot et consorts qui, par leur jusqu'au boutisme, ne font que renforcer le conservatisme, l'opposition de gouvernement, a un boulevard ouvert devant elle. Mais je pense également qu'elle ne saura pas en profiter : trop bête, trop prisonnière de ses habitudes, trop repliée sur son électorat traditionnel.

Nicolas Sarkozy est bien parti pour être au pouvoir jusqu'en 2017 ; il sera peut-être le président de la banqueroute de l'Etat français et il ne me paraît pas avoir les idées justes pour faire face.

Il sera alors temps de rappeler à Henri Guaino ses discours et ses responsabilités.

(1) : primes intégrées au calcul de pension et compte épargne-temps ajouté à la retraite garantissant un départ à 50 ans.

dimanche, octobre 21, 2007

Demain, la lettre de Guy Moquet

Demain 22 octobre, les professeurs d'histoire dans les lycées, appliquant les consignes de leur ministre, devraient lire en classe la lettre d'adieu de Guy Moquet.

Cette lettre ne me semble pas le choix le plus judicieux, passons.

J'ai parcouru sur le forum du journal Le Monde les réactions consacrées à ce sujet. Si les gens qui s'y disent enseignants le sont vraiment, je suis atterré, c'est essentiellement des propos dignes d'adolescents attardés : «Je ne le ferai pas parce qu'on me le demande, je n'ai d'ordres (1) à recevoir de personne, et surtout pas d'un gouvernement "fasciste".»

Alors que le ministre offre une solution simple aux contestataires : mettre cette lettre dans son contexte, et là, ils peuvent dire tout ce qu'ils ont sur le cœur, y compris d'ailleurs des conneries.

A moins que les lycéens actuels soient dans l'incapacité de comprendre un contexte complexe, ce qui, au vu des quelques lycéens que je connais, n'est pas impossible.

J'entends souvent dire que le niveau des enseignants baisse. J'espère que le forum du Monde n'est pas représentatif car il illustre à merveille la boutade d'Einstein : «Deux choses sont infinies : l'univers et la bêtise humaine. Pour l'univers, j'ai encore un doute.»

(1) : vous savez ce que j'en pense : tout employé est susceptible de recevoir des ordres de qui le paye. Quand on est dans un système d'éducation étatique, on s'expose donc à la possibilité de recevoir des ordres du ministre de l'éducation. Ceux à qui ça ne plait pas peuvent enseigner dans le privé hors contrat.

samedi, octobre 20, 2007

La connaissance inutile : une plaie toujours suintante du débat démocratique

JF Revel expliquait que l'idéologie était le déni de la réalité, gouverné par le précepte : «Si les faits contredisent vos idées, niez, maquillez, ignorez les faits.»

Revel avait écrit à ce propos un ouvrage qui mérite encore lecture : La connaissance inutile. On sait, mais on fait comme si on ne savait pas, par idéologie.

La grande idéologie des années Revel était de prétendre que le modèle soviétique n'était pas inférieur au modèle libéral.

Aujourd'hui, on nous explique que les idéologies sont mortes.

Je suis sûr du contraire, sinon, comment pourrait-on avoir traité pendant la campagne électorale Nicolas Sarkozy de «fasciste» ?

On peut reprocher tout ce qu'on veut à Nicolas Sarkozy, le qualificatif de «fasciste» ne correspond pas à ce qu'on sait de lui.

L'actualité récente m'a fourni par deux fois l'occasion de me heurter au mur de la connaissance inutile :

> à propos du prix Nobel d'Al Gore. Voici quelqu'un que j'estime, pas méchant. Je parle de réchauffement climatique, ce en quoi j'ai tort : je sais par expérience que, dans neuf cas sur dix, je vais me heurter à un mur.

Vous connaissez mes opinions sur le sujet. Hé bien, ça n'a pas raté : ce monsieur ne voulait pas savoir, et ce qu'il savait déjà, il préférait l'ignorer. Dans ce cas là, mieux vaut couper court à la conversation : ça se terminerait en fâcherie ou en humiliation, ou les deux.

> deuxième sujet, les retraites. Pour certaines personnes, le vieillissement de la population n'existe pas, ou c'est tout comme. En tout cas, il n'a aucun rapport avec les systèmes de retraite.

J'ai trouvé une parade très amusante : vous convenez avec ces gens qu'il est effectivement scandaleux d'élever l'âge de départ à la retraite. Puis vous envisagez qu'il serait mieux que tout le monde parte à la retraite à 55 ans. Puis, au fil de la conversation, vous abaissez le seuil. Il est ainsi possible avec un peu d'entrainement de tomber d'accord que 45 ans comme âge de départ à la retraite, il faudrait sérieusement y penser.

jeudi, octobre 18, 2007

Qui finance les régimes de retraites spéciaux ?

Cet article est uniquement à l'usage des naïfs, les autres connaissent la réponse depuis longtemps.

Qui finance les régimes de retraites spéciaux ?

mardi, octobre 16, 2007

L'Etat trahit-il les bénéficiaires de régimes de retraite spéciaux ?

On entend souvent cet argument : par la réforme des retraites, l'Etat trahirait la parole donnée aux bénéficiaires de régimes de retraite spéciaux.

Hé bien, je suis entièrement d'accord avec cet argument. L'Etat trahit sa parole vis-à-vis des bénéficiaires de régimes de retraite spéciaux comme il l'a fait vis-à-vis des bénéficiaires du régime général il y a quelques années.

Mais c'est l'inconvénient du système de retraite par répartition : on ne peut pas lui faire confiance. C'est un système collectiviste, il est sous contrôle de la politique et soumis aux aleas de celle-ci.

On ne peut pas choisir et défendre un système vicieux et anti-économique et ensuite se plaindre de ses défauts.

lundi, octobre 15, 2007

Notre société de défiance

J'ai cru comprendre que se moquer des «avantages acquis» des (feignasses (1) de) conducteurs de TGV de la SNCF était faire preuve de conservatisme débridé.

Alors, pour me racheter, je cite un journal qui ne peut que me placer à la pointe du progressisme social, loin de mon inclination naturelle à cirer les pompes des 200 familles : Libé.

EADS et le modèle social français

Puisque le corporatisme, l'étatisme et la technocratie sont les legs de Vichy les plus prenants sur notre société de 2007, je ne peux m'empêcher de repenser à Jean Bichelonne et à cette blague de taupin, hélas trop juste dans son cas : «Quelle est la différence entre un train et un X ? Le train, quand il déraille, il s'arrête, lui.»


(1) : étant donné qu'ils sont très bien payés pour un boulot pas trop stressant, pour pas beaucoup d'heures hebdomadaires et pour un retraite précoce (sauf quand ils se recyclent comme cunsultants ferroviaires), le qualificatif me paraît aisé à défendre.

dimanche, octobre 14, 2007

La France de la peur et la Défense

Les témoignages de la Commission du Livre Blanc sur la Défense sont très intéressants.

L'Armée de l'Air décroche (signalé par Secret Défense) :

Le témoignage duLt-Col Foussard


Un témoignage de journalistes très décapant, je vous laisse juger :

Allémonière et Guisnel

Ca ne donne pas une idée terrible de la France et de sa politique de Défense.

vendredi, octobre 12, 2007

Les piliers du temple de la croissance molle

J'entendais ce matin une interview d'Yvon Gattaz. C'est toujours rafraichissant d'entendre cet homme qui a créé, avec son frère, alors qu'ils étaient tout jeunes, une entreprise qui est maintenant implantée dans le monde entier.

Que disait-il (avec mes commentaires en notes) ?

Les Français, aidés par leus politiciens, ont élevé à un temple de la croissance molle. Les Français disent "Croissance, croissance, croissance" en sautant comme des cabris, mais, au fond, ils n'y croient pas vraiment, qu'une croissance forte résoudra 99 % de leurs problèmes économiques et sociaux (1). Ils sont bien dans leur petit confort, et si il y a des Français qui ne sont pas si bien, pauvres, chomeurs, c'est la faute de la mondialisation, de la météo, du vilain capitalisme, mais pas d'une mauvaise politique, pas de l'absence de croissance.

Dans le temple français de la croissance molle, il y a deux cultes principaux.

Le premier est le culte de l'ourson : il est petit, doux, affectueux, on a envie de le materner. Mais, si il grandit, il devient un gros ours dégueulasse. En France, on aime et on protège les petits jusqu'à outrance : petites entreprises, petits producteurs, petits artisans, petits employés, petits commerces ... Mais si ils essaient de grossir, si ils essaient de devenir grands producteurs, industriels, grandes surfaces, gare ! Ils deviennent alors des salauds de patrons, de sales capitalistes. (2)

Or, c'est justement le "Mittelstand", les "Middle Size Companies" qui font la fortune de l'Allemagne et des USA.

En France, on a bien d'énormes entreprises, celles qui ont réussi à grossir à force d'implantations à l'étranger et de rapports incestueux avec l'Etat, mais d'ETM, ces Entreprises de Taille Moyenne de quelques centaines à quelques milliers d'employés, pas la queue d'une, en tout cas, pas prospère, rentable, en croissnce continue.

Le deuxième culte dans le temple français de la croissance molle est la vénération de l'IAA. L'IAA, c'est l'Inamovibilité des Avantages Acquis. La roue tourne, le temps passe, les conditions de vie s'améliorent, l'économie change, mais les AA restent là au milieu de la place, tels qu'en eux-mêmes l'éternité les change (3) et ils paralysent toute évolution, toute adaptation. L'exemple des 35 h est affolant : tout le monde les trouve mauvaises pour l'économie en général et pour pas mal de gens en particulier, et pourtant, on ne revient pas dessus (4).

Ces deux cultes suffisent amlement à expliquer la stagnation économique, sociale et politique (car ces trois marchent ensemble : un pays peu prospère vit mal et n'exerce guère d'influence) de notre merveilleux pays.

(1) C'est pourtant ce que montre tous les exemples étrangers, notamment un pays que j'apprécie comme j'apprécie la Guinness : l'Irlande. Mais les Français sont si supérieurement intelligents qu'il n'est pas digne d'eux de regarder, modestement, pragmatiquement, sans théorisation excessive, ce qui s'est fait ailleurs, n'est-ce pas ? Je rappelle juste que, sur 20 ans la différence entre 2 % de croissance annuelle (chiffre que la France peine à atteindre) et 3.5 % est 35 % de richesse en plus. Aucune politique de redistribution, aucune politique de "pouvoir d'achat", aucune politique de "patriotisme économique", ne peut atteindre un tel chiffre.

(2) : La France est le seul pays au monde où des lois empêchent les entreprises de grossir (la fameuse barrière des 50 employés). J'ai connu un "savant fou" qui créait une entreprise dès qu'il avait une idée intéressante et rentable, il en a eu quelques unes. Mais il s'arrêtait systématiquement d'embaucher à 49 employés. Pas optimal, non ?

(3) Exemple risible tellement il est caricatural : les conducteurs de TGV touchent une prime de charbon.

(4) Le pompon en matière d'avantage acquis est bien sûr la fonction publique. Notamment, il est quasiment considéré comme un du que les effectifs augmentent toujours.

La blague de l'année

Al Gore et le GIEC viennent d'obtenir la prix Nobel de la Paix.

Si vous n'avez pas compris pourquoi j'en ai une crise de fou rire :

Le réchauffisme sur La lime

jeudi, octobre 11, 2007

«L'esprit de Polytechnique» : l'exemple de Jean Bichelonne

Je sais qu'il est par certains cotés injuste de qualifier d'«esprit de Polytechnique» la tendance pernicieuse de technocrates forts en thème à trop vouloir contrôler et maitriser des phénomènes humains et des sociétés complexes, au mépris de l'ingéniosité et de la faculté d'adaptation des autres hommes (les inférieurs non-Polytechniciens) ; cette façon de voir et de faire conduit généralement à des catastrophes de grande ampleur.

Il y a des Polytechnicens qui n'ont pas cet «esprit de Polytechnique» et des non-Polytechniciens qui l'ont.

Pourtant, cet «esprit de Polytechnique» est trop présent dans notre histoire récente, Genevoix s'en plaignait déjà en 1914, les erreurs se payaient au prix du sang - des autres, pour qu'on puisse le négliger par souci du moral de nos X.

L'histoire de Jean Bichelonne, major de l'école à l'entrée et la sortie, est extrême, mais elle n'en est que plus emblématique.

Biographie de Jean Bichelonne

Je connaissais un directeur de «grande école» qui disait : «La proportion de cons est à peu près la même partout. Simplement, plus les cons sont diplômés, plus ils ont de pouvoir, plus ils sont dangereux.» (Il pensait à Noël Forgeard ?)

mercredi, octobre 10, 2007

BHL contre Henri Guaino


Henri Guaino est le nègre de Nicolas Sarkozy. Les fidèles lecteurs de ce blog savent tout le bien que j'en pense.

Ce monsieur et notre philosophe national, BHL, s'insultent, ça vole haut, ça remonte l'élite parisienne dans mon estime.

Cependant, je dois reconnaitre que, au-delà de la forme, je suis plutôt d'accord avec BHL.

Notamment, je trouve «d'inspiration maurrassienne» pour qualifier la politique du gouvernement actuel particulièrement judicieux.

Petit rappel de la pensée maurrassienne pour ceux qui voudraient se rafraichir la mémoire :

Le grand retour de Charles Maurras


Le siècle de M. Pétain

mardi, octobre 09, 2007

Le gouvernement est à désespérer

Le gouvernement est à désespérer, et comme l'opposition n'est pas mieux, c'est à désespérer de nos politiciens :

Le grand retour des idéologues


Henri Guaino est un homme dont je me demande si il est :

> un imbécile (peu probable, mais pas exclu)

> un salaud (plus probable)

> un technocrate aveuglé par son milieu, par ses certitudes (pas très différent d'un salaud)

En tous les cas, tout ce que j'ai lu de lui me révolte : il recourt à des idées étatistes qui ont déjà échoué en grand, ce qui est tout à fait inadmissible pour quelqu'un d'intelligent ; au point que je soupçonne la malhonnêteté de sa part : promouvoir des idées qu'il sait fausses mais populaires.

La rigueur (JM Aphatie)

En France, plus que jamais, en matière économique, on essaie toutes les politiques, sauf celles qui fonctionnent.

Pour vous remonter le moral : j'ai vu, en DVD, l'entretien de Bernard pivot avec JF Revel en 1997. Même si Revel n'a pas vraiment de successeur (son portrait de Georges Marchais dans Le voleur dans la maison vide), on se dit qu'il n'y a pas que des suiveurs de troupeaux germanopratins, des révoltés suivant le manuel, dans les intellectuels français.

Son humour féroce me manque, qui aujourd'hui oserait qualifier un congrès du PS de «bagarre d'ivrognes dans un bordel mexicain » ?

lundi, octobre 08, 2007

EADS : suite du feuilleton

Louis Gallois, dans une lettre au personnel, renouvelle sa confiance aux dirigeants du groupe.

Pas besoin de vous faire un dessin : quand on éprouve le besoin de renouveler publiquement sa confiance à quelqu'un, c'est qu'il y a toutes les raisons qu'il faille se défier de cette personne mais qu'on ne sait pas comment s'en débarrasser.

La Saint-Barthélémy des technocrates que j'appelle de mes voeux n'est donc pas pour tout de suite.

Autre chose : cette affaire est l'occasion d'en découvrir de drôles sur le fonctionnement des instances dirigeantes de notre beau pays.

C'est toujours le même douloureux problème de gouvernance, suivant un mot à la mode, et qu'il serait plus exact d'appeller un problème d'équilibre des pouvoirs. En France, il y a l'exécutif et rien en face ; d'où les caprices de ministraillons, les faits du prince, les financements occultes, le népotisme, le clientélisme, voire les associations véreuses.

La Caisse des Dépots et Consignations (CDC) est en théorie sous le contrôle du Parlement mais reçoit en réalité ses ordres, sans traces écrites, du gouvernement.

Elle peut donc, avec la plus parfaite mauvaise foi, déclarer qu'elle n'a jamais reçu d'ordre de quiconque sur le dossier EADS : tout le monde sait parfaitement que c'est un mensonge qui ferait honte à Pinocchio lui-même mais personne ne peut le prouver. Il ne reste plus qu'à espérer que les acteurs, plongés dans des stratégies individuelles genre sauve-qui-peut, se contredisent et que certains avouent. Mais, comme, pour l'instant, la meilleure stratégie individuelle (voir les problématiques de dilemme du prisonnier) est le déni, ce n'est pas gagné.

Si ces moeurs vous rappellent celles de la mafia, ce n'est pas un hasard : la démocratie, ce n'est pas seulement des élections, c'est aussi un système d'alternance au pouvoir et d'équilibre des pouvoirs. Or, ce dernier point n'existe pas en France.

Sans équilibre des pouvoirs, point de contrôle, les puissants sont amenés à se sentir tout-puissants. Les solidarités, les réseaux, les renvois d'ascenceur, les petits services, les coutumes et les usages sont alors plus importants que les textes, les lois et les réglements (c'est d'ailleurs une des raisons de notre inflation législative : ceux qui font les lois ne se sentent pas concernés par leur application).

On ne peut évidemment s'empêcher d'évoquer l'affaire Gautier-Sauvagnac, ce dirigeant patronal qui aurait distribué des millions d'euros en liquide à des syndicats : là aussi, les moeurs et les habitudes engendrent des pratiques tout à fait illégales. Absolument aucun syndicat n'échappe à ces délits, même si, suivant leurs affinités, les délits seront différents : tel syndicat tapera dans la caisse de CE d'entreprises publiques tandis que tel autre recevra des liasses de l'IUMM.

Enfin, ne soyons pas naïfs : comme dans le cas du financement occulte des partis politiques, on commence à nous monter un sketch, la bouche en coeur, style «Certes, c'est illégal, mais il n'y a a pas d'enrichissement personnel, j'agissais pour le plus grand bien du dialogue social.» Or, comme disait avec bon sens Pierre Dac «Quand il n'y plus de bornes, il n'y a plus de limites.», une fois qu'on est dans l'illégalité, l'enrichissement personnel ne peut JAMAIS être exclu.

N'oubliez pas que l'enrichissement personnel peut être en nature. Si le syndicat , grâce à ses magouilles, peut payer une voiture à ses dirigeants, c'est toujours ça économisé pour eux.

A partir de quel moment un dirigeant syndical qui sait qu'une part des revenus de son syndicat est illégale et qui profite de la voiture, du chauffeur, de la secrétaire, des bureaux, de la résidence de campagne du syndicat et que sais je encore fait-il acte de recel ? (Et qu'on ne vienne pas arguer du coeur pur des vaillants syndicalistes, l'affaire de l'ARC devrait nous avoir vaccinés contre ce genre d'argument : les hommes sont partout les mêmes, quelquefois bons, quelquefois mauvais, et personne n'est à l'abri de céder à la tentation.)

Qui passe sciemment dans l'illégalité, même pour toutes les bonnes raisons du monde (et sont-ils si bonnes, ces raisons ?) ne peut ensuite se plaindre d'être l'objet de toutes les rumeurs et d'alimenter tous les soupçons. Et cette conclusion vaut pour EADS comme pour les syndicats.

Pour l'affaire EADS, je suis assez «optimiste» : les principaux protagonistes seront embêtés par la justice, un peu tracassés, mais s'en sortiront sans une égratignure (sauf à la réputation, mais qu'importe à ces gens pas trop exigeants sur les questions d' honneur. Leur vive intelligence leur permet toujours de se justifier à leurs propres yeux, n'est-ce pas l'essentiel ?), faute de preuves, de cas bien nets.

Pour l'affaire Gautier-Savagnac, ça paraît plus mal embarqué : les grosses liasses de billets ! Quel ringardise, quel amateurisme. Aujourd'hui, on ouvre des comptes aux îles Caïman.

NB : on me dit fréquemment que je critique les technocrates, les politiciens, les entreprises publiques, l'Etat, les administrations, mais qu'il n'y a pas plus d'honnêteté privé.

C'est vrai et, pourtant, il y a une différence : les conneries de l'Etat sont faites avec l'argent du contribuable, qui est obligé de payer ses impots, tandis que les conneries du privé sont faites avec l'argent de l'actionnaire, que personne n'a contraint dans son choix d'investissement. Le corollaire est que l'actionnaire mécontent peut choisir de se retirer, le contribuable mécontent ne peut pas choisir de ne plus payer ses impôts. Différence fondamentale, vous ne trouvez pas ?

samedi, octobre 06, 2007

Ceux de 14 et l'économie de guerre de 2007

Les livres se parlent entre eux et ont d'étranges résonances : Paul Fabra écrit souvent dans Les Echos que l'économie française est une économie de guerre (sacrifice des jeunes, endettement de l'Etat).

Ne voilà-t-il pas que je lis dans Ceux de 14 Maurice Genevoix critiquant les belles idées d'Etat-Major refusant de «se soumettre aux faits».

Or, c'est exactement ainsi que F. Hayek définit «l'esprit de Polytechnique».

Quelle étrange chaîne d'analogies : notre économie ressemble à la guerre, la guerre était menée en dépit du bon sens par «l'esprit de Polytechnique», au prix du sang versé, nous souffrons encore en 2007 de cet «esprit de Polytechnique».

Aujourd'hui, nos morts sont des chomeurs de longue durée, nos défaites des déficits et nos mauvais généraux des hauts fonctionnaires.

Ces résonances sont d'autant plus étranges qu'une des erreurs conceptuelles de nos hauts fonctionnaires et politiciens est justement d'envisager l'économie comme une guerre où les uns perdraient ce que les autres gagneraient.

jeudi, octobre 04, 2007

Che guevara : icone radicale-chic


J'ai croisé une jeune fille dans la rue ayant sur son sac une photo de Che Guevara. J'ai eu un moment d'arrêt, d'hésitation.

Finalement, j'ai choisi de considérer que c'était une imbécile mal informée plutôt qu'une virago altérée de sang.

Car, enfin, il ne viendrait à l'idée de personne sensé d'arborer en connaissance de cause l'effigie d'une brute sanguinaire, d'un bourreau sadique.

J'ai failli arrêter la jeune passante pour lui expliquer qu'elle pourrait tout aussi bien se trimbaler avec la tête de Reinhard Heydrich sur son sac, mais elle n'aurait pas compris.

EADS : suite du commentaire


Je cite La Tribune de ce matin : «Depuis 2006, plusieurs hauts dirigeants ont quitté le groupe. C'est le cas notamment de Noël Forgeard, Gustav Humbert et Jean-Paul Gut. Mais il reste encore une grande partie des opérationnels. Si Louis Gallois, PDG d'EADS, qui était alors simple administrateur, et Marwan Lahoud, directeur général délégué, ne sont pas concernés par l'enquête de l'AMF, ce n'est pas le cas du nouveau tandem à la tête d'Airbus, Tom Enders et Fabrice Brégier.

Alors que la nouvelle gouvernance du groupe est à peine installée depuis la mi-juillet et semble même avoir encore quelque peine à trouver ses marques, ce nouvel épisode risque de gravement déstabiliser tout le groupe. Le nombre des personnes mises en cause semble rendre impossible toute sanction élargie, sous peine de décapiter le groupe et de perdre toute compétence. Mais la défiance, le découragement et les querelles pourraient prospérer sur le terreau d'un groupe démoralisé par cette crise qui paraît sans fin. »

C'est la beauté de la filouterie : plus nombreux sont ceux qui ont fraudé (1), plus il est difficile de prendre des sanctions.

Mais, pour ma part, j'aurais une position radicale : personne n'est indispensable, pas plus un polytechnicien qu'un autre salarié. Je n'hésiterais donc pas à «décapiter le groupe» sachant que :

> le coup de hache serait important mais pas total. De plus, les sanctions peuvent être échelonnées dans le temps, frappant d'abord au plus haut de la hiérarchie, à cause du symbole et de la responsabilité.

> qu'il y a possibilité de trouver des remplaçants en interne. Ce n'est pas le personnel de qualité qui manque à EADS. Un renouvellement des cadres peut voir en soi un effet positif.

> que l'effet de la décapitation pourrait être largement compensé par l'effet moral positif qu'on nettoie enfin les écuries d'Augias. Par le même coup, l'Etat français, tirant la leçon de ses erreurs, pourrait se retirer du capital (2) ; mais l'Etat intelligent, je n'y crois pas.

Hélas, vu les baronnies et les réseaux politiques établis, je ne pense pas que cette solution sera appliquée.

On se dirige donc vers le pire scénario pour EADS : une crise qui traîne en longueur, qui laisse le temps aux concurrents non pas de le tuer, mais de grignoter des parts de marché.

EADS ne mourra pas, il continuera juste à absorber les ressources de l'aéronautique européenne qui pourraient être mieux employées autrement (car on nous raconte toujours ce qu'Airbus rapporte en exportant, mais on oublie de nous dire ce qu'EADS coûte en aides publiques directes et indirectes.D'ailleurs, les comptes d'EADS sont plus ou moins maquillés -on est sur la frontière de la légalité.)

En attendant, l'A350 ne se vend pas et l'A380 pas beaucoup.

Aujourd'hui, et probablement pour quelques années encore, EADS est devenu le meilleur allié de l'aéronautique américaine : suffisamment fort pour empêcher l'émergence d'une tierce concurrence, suffisamment faible pour ne pas poser trop de difficultés.

Enfin, on notera qu'aux USA, pays du capitalisme "sauvage", des affaires similaires se sont terminées en prison, alors que, dans le cas d'EADS, la pire sanction qui pourrait arriver est un placard dans une administration ou un siège dans le CA d'un copain de promotion.

J'avais dit l'année dernière en une demi-plaisanterie que l'idéal, pour tout le monde, serait qu'EADS soit vendu à un fonds de LBO. Je persiste dans cette opinion, sauf que je plaisante de moins en moins.

(1) Certains se défendent en disant qu'ils ne sont pas rendus compte qu'ils fraudaient. Je suis prêt à les croire, c'est le syndrome Juppé : «Il est possible que je fraude, mais moi, grand commis de l'Etat, capitaine d'industrie que le monde entier nous envie, j'ai des tâches plus prioritaires que de me préoccuper de ce que dit exactement la loi à ce sujet.»

(2) les syndicats demandent le re-nationalisation. Je trouve cela idiot, je préférerais une complète privatisation, mais la position des syndicats est tout de même moins stupide que la situation actuelle.

Réchauffisme, OGMs : «On sait bien que ... »

Sur la radio BFM, il y a le samedi matin une heure de débat que j'écoute avec plaisir.

Samedi dernier, ils ont visiblement parlé des OGMs pour dire, d'après ce que je devine, qu'il fallait arrêter l'hystérie et les étudier, y compris par des cultures en plein champ.

Sur ce, la radio reçoit une avalanche de mails, majoritairement dans le sens que vous devinez.

Cette semaine, un commentateur fait remarquer que de nombreuses phrases de ses mails commencent par «On sait bien que ... » (les OGMs sont nocifs, tuent les abeilles, etc ...). Ce qui est tout simplement faux : rien n'a jamais été prouvé concernant la nocivité des OGMs.

Et ce commentateur de conclure : «On sait bien que dix imbéciles qui répètent la même chose ne font pas une vérité.»

Ils n'ont pas finir de recevoir des mails, à BFM !

Mais, je les rassure, ils auraient parlé de l'hypothétique réchauffement climatique, ils auraient eu tout autant de phrases commençant par «On sait bien que ...» Et encore moins fondées !

mercredi, octobre 03, 2007

Verdun, le Coq Hardi, les Eparges



Nous sommes allés un week-end à Verdun (joli petit port de pêche).

Verdun en elle-même est une petite ville bien agréable au bord de la Meuse. Nous étions logés au Coq hardi, un peu cher mais très bien.

Les sites sont très impressionnants notamment l'ossuaire, le fort de Douaumont et les Eparges. Les Eparges, un peu à l'écart, nous ont le plus marqué : nous étions quasiment seuls, en 2 h de marche nous avons fait le tour, et nous avons très bien pu imaginer ce qui s'y était passé.

Je vous conseille la lecture de Ceux de 14, de Maurice Genevoix. On n'y parle pas de la bataille de Verdun proprement dite, puisque Genevoix a été blessé en avril 1915. Mais cela se passe dans la région et c'est un des meilleurs témoignages sur cette période, il se classe très nettement au-dessus de la moyenne, par son sens de l'observation et son absence de pathos.

Le livre Les 300 jours de Verdun est également excellent.

Par contre, je vous déconseille la lecture des BDs de Tardi, tout au moins dans un but d'information. En effet, elles présentent une version de la guerre de 14 qui en dit plus long sur notre époque que sur les évènements. J'avais déjà écrit un message sur ce sujet il y a quelques mois. Ce fut un sujet de polémiques.

Pour les mêmes raisons, des films Joyeux Noël ou Un long dimanche de fiançailles peuvent être évités. Les films de Tavernier sont nettement meilleurs, Capitaine Conan et La vie et rien d'autre sont intéressants sans être complaisants.

J'avais aussi lu Paroles de Poilus, Orages d'acier, et Sous le feu, comme ouvrage annexe.

Concernant la motivation des combattants, qui pose toujours question quand on connait leurs conditions de vie, j'y vois un peu plus clair que dans le message auquel je fais référence plus haut.

La motivation varie dans l'espace et dans le temps pour l'ensemble du front mais suit aussi une courbe cyclique pour chaque individu (sauf pour les 2 % de guerriers dans l'âme qui sont toujours motivés).

Les composantes de la motivation :

> le patriotisme, qui était à un niveau beaucoup plus fort que ce qu'on peut imaginer aujourd'hui. Il y a eu après guerre des réflexions du coté des instituteurs sur le thème "N'avons nous pas préparé les agneaux pour le massacre ?"

Pour vous citer un exemple quasiment inconcevable en 2007, Genevoix raconte qu'il avait sous ses ordres un soldat français vivant en Californie qui était revenu pour s'engager. Il avait 59 ans et avait déjà fait la guerre de 1870. Aujourd'hui, à 59 ans, on est retraité ou pré-retraité et on geint.

> l'amour de sa terre, qui est lié au patriotisme, était très prenant dans une population à 80 % paysanne.

> la camaraderie. C'est sur la longue durée la motivation la plus forte : ne pas laisser tomber les copains. De plus, la guerre se prolongeant, les combattants ont été pris d'un sentiment d'étrangeté par rapport à la vie de l'arrière. Plus d'un Poilu raconte qu'il était content de rentrer de permission parce qu'il se sentait plus à sa place au régiment qu'à la maison, où la vie s'était organisée sans lui.

> l'exaltation de la guerre. Les soldats sont souvent jeunes et Genevoix ne cache pas que la guerre ne lui a pas toujours paru terrible, mais au contraire excitante.

> la contrainte et les mauvais traitements. Genevoix raconte des cas de mesquinerie des officiers, mais ce n'est pas la majorité. Plus fréquents sont les cas de négligence car les basses choses de l'intendance ennuyaient certains de ces messieurs. Genevoix raconte deux cas de panique où il a fait usage de son revolver pour contrôler sa section (sans tuer personne), mais c'était chaque fois avant le combat. Une fois le combat proche, chacun accepte son rôle.

L'intelligence de Pétain a été de comprendre que les mutineries de 17 avaient des causes non pas politiques, comme le répétaient les généraux incompétents pour se dédouaner, mais militaires. Le vétéran qui venait de passer plusieurs mois dans les tranchées comprenait parfaitement que certaines offensives étaient mal pensées et inutiles. Les soldats voulaient bien risquer leur peau mais utilement.

Enfin, un dernier point, qui n'est pas tout à fait anecdotique : il y a des cimetières militaires américains bien achalandés en Argonne et plus d'un monument, comme l'ossuaire de Douaumont, a été financé, tout ou partie, par des Américains.

Nous avons croisé quelques jeunes gens qui avaient tout l'air de militaires en vacances.

Parmi les expressions un peu grandiloquentes forgées après-guerre, «Verdun, reliquaire de la patrie» ne me semble pas inapproprié

EADS : le glissement vers l'abime continue

Voilà maintenant EADS empêtré dans une affaire de délit d'initié.

Allons du général vers le particulier :

Le délit d'initié est un délit fondamentalement étrange : il revient à reprocher à un dirigeant d'être mieux informé qu'un actionnaire ordinaire.

Ceci étant dit, les vrais capitalistes ont une solution radicale contre le délit d'initié : ne pas mélanger les genres entre salariés et actionnaires. Warren Buffet est opposé aux managers-actionnaires et aux systèmes de stock-options. Les salariés et les actionnaires ont des risques, des droits et des devoirs totalement différents, essayer de cumuler les avantages des deux situations tout en évitant les inconvénients est une perversion.

Dans le cas d'EADS, s'ajoute à cette perversion répandue une perversion particulière : du fait des liens incestueux avec l'Etat, les dirigeants d'EADS sont autant des politiciens que des industriels (et encore, je suis gentil en estimant qu'ils sont à 50 % des industriels).

Cette affaire de délit d'initié ne serait pas si grave pour l'avenir d'EADS, après tout, c'est le passé, si elle ne révélait pas l'ampleur des dysfonctionnements que peut induire une organisation floue, où les responsabilités sont mal délimitées.

Cette affaire va empoisonner la société dans les mois à venir et comme, contrairement à une vraie entreprise privée, on ne coupera pas les têtes parce que les têtes ont des appuis politiques, ça va trainer en longueur.

L'Etat peut vouloir conserver un pouvoir sur certaines industries dites stratégiques. C'est déjà en soi contestable, car c'est imaginer que les hommes de l'Etat ont une vision supérieure et une capacité de discernement extraordinaire, alors que l'expérience prouve exactement le contraire (le Concorde, le plan calcul, le TGV ont été des échecs. Seule la filière nucléaire peut être comptée comme réussite.).

Mais bon, admettons que même un énarque ou un polytechnicien puisse comprendre que l'aéronautique est une industrie stratégique, comment faire ?

Le mieux serait de s'inspirer des USA, où le système fonctionne : les entreprises privées sont privées, l'Etat n'intervient pas dans leur fonctionnement, il ne nomme pas leurs dirigeants, il ne décide pas quelle usine fermer, qui licencier, quelle usine ouvrir, qui embaucher. Par contre, l'Etat oriente, par le moyen de contrats de recherche et en fonction de ses besoins, la politique à long terme des entreprises jugées stratégiques.

De plus, tout investisseur sait qu'il y a certaines entreprises où il ne fait pas bon tenter d'investir sans l'assentiment du gouvernement. Il y a des lois de protection, mais il y a surtout le sentiment que les Américains savent se défendre et n'hésitent pas à le faire.

Bien sûr, adopter ce genre de système priverait nos technocrates et nos politiciens de leur jeu favori : le meccano industriel. Cela leur ôterait le plaisir de faire et de défaire les carrières, d'être courtisé pour leur influence, de prendre les décisions sans prendre les responsabilités, de tenir un discours du genre «Ce qui marche, c'est grâce à moi. Ce qui plante, c'est les autres.» Vous voyez le genre.

Nous ne sommes donc pas près d'arrêter les conneries. Mais comme, tout ça, c'est aux frais des contribuables, ça n'est pas grave, n'est-ce pas ?

Pourtant, le système à l'américaine a existé en France : c'est celui des relations entre Dassault et l'Etat jusque dans les années 80. Seulement voilà, on sortait de la guerre où on s'était pris une sacrée trempe, ce qui a inspiré à certains la salutaire envie de ne pas retomber dans les folies d'antan.

Maintenant que tout va bien, que la France est un pays florissant et prospère, on peut recommencer à reprendre les bonnes vieilles habitudes, étatistes, dirigistes et inefficaces.

Le sarkozysme est un chiraquisme

Je vous avais promis que j'attendrais fin septembre pour vous donner mon opinion sur le gouvernement Sarkozy. Voilà, c'est fait.

Je ne pensais pas que les choses seraient aussi nettes.

mardi, octobre 02, 2007

La vie dans l'impasse

Je vous plante le décor.

Je vis dans une impasse piétonne au fond de laquelle il y a une école primaire et une crèche. Cette impasse est interdite aux voitures par des barrières rabattables, qui constituent un accès pour les pompiers. C'est très tranquille (enfin, presque).

La rue pour accéder à cette impasse est à sens unique, n'a, en théorie, qu'une file et il y a des places de stationnement réparties sur le coté droit, dont une pour handicapés, et des entrées de parkings souterrains.

Je précise que c'est un quartier paisible, plutôt bourgeois et que, à part ceux qui ont contourné la carte scolaire, les parents d'élèves habitent à distance pédestre de l'école.

Hé bien, que croyez vous qu'il se passe aux heures de sortie et d'entrée de l'école ?

C'est une corrida de bourgeoises en 4x4 ou en monospaces garées en double file (donc bouchant la rue et empêchant les voitures stationnées correctement de partir) ou stationnées devant l'accès pompier ou devant les accès de parking ou même sur la place handicapés, et qui prennent bien leur temps pour discuter.

Certains véhicules, déplacés de quelques mètres, gêneraient moins, mais non, ils restent là où ils sont, c'est-à-dire au plus près des chers bambins.

Le meilleur est que, le jour où j'ai attendu un bon quart d'heure que madame et ses mioches veuillent bien libérer ma voiture, je me suis entendu dire que je pourrais au moins être aimable de quelqu'un qui ne s'était ni excusé ni rien ni merde.

Tout ça parce que j'ai signalé à cette dame sur ton absolument égal qu'elle avait bien de la chance que je n'ai pas mon portable sur moi, sinon elle allait chercher sa voiture à la fourrière.

Enfin, terminons sur une note positive : certaines, tout en se comportant mal, font des efforts visibles pour déranger le moins possible. Ce n'est pas la majorité.

Bien entendu, tout cela se fait en présence des enfants, objets de ce ballet automobile. Quel exemple de civisme, de respect, de politesse ! Belle éducation, ma foi.

L'incivisme, ce n'est pas que les sauvageons.

L'observation régulière de ce phénomène est absolument édifiante sur l'estime qu'on peut avoir pour certains de nos contemporains. Ah, comme un moraliste s'y exalterait.

J'avoue avoir un faible pour les hypocrites qui, après avoir bien pris leur temps, affectent soudain une attitude pressée pour ne pas trop se faire engueuler. Il y a aussi les fausses étourdies :«Ah bon ? Je vous gêne ? Quelle malheureuse surprise ! Je ne m'en étais point avisée.» ou les victimes du destin : «Triste coup du sort ! Revers de fortune insondable ! Caprice des Dieux ! Pourquoi a-t-il fallu que vous tentates de sortir du garage après que je me garas devant l'issue ?»

Avec l'habitude, la colère disparaît, le mépris reste, et une vague curiosité apparait : «Qu'est-ce qu'ils vont bien m'avoir inventé ce coup-ci ? »

Car, si l'impolitesse et l'égoïsme sont généralement bêtes, sans imagination, monotones, lassants, il arrive pourtant quelquefois qu'il y ait une touche d'originalité, comme la fois où, exploit nécessitant une précision millimétrique, une conductrice avait réussi à elle seule à bloquer quatre voitures, ou encore le jour où c'est un camion qui, au terme d'une manœuvre fort complexe, a réussi à occuper la place handicapée tout en évitant la borne censée prévenir ce genre d'occupation sauvage.

Je précise qu'il s'agit de l'école Jean Monnet, à Clamart.

Nota : je n'ai jamais vu dans cette rue une seule des nombreuses patrouilles policières qui sillonnent la ville. Probablement que nos forces de l'ordre ont mieux à faire que mettre fin à ce désordre.

Voilà, tout est dit. Pensez en ce que vous voulez.

La différence entre la France et la Grande-Bretagne

Quelquefois, on peut s'éviter un long discours pour comprendre les différences entre deux pays, un petit exemple suffit.

Les «spotters» sont des passionnés qui se rendent dans les aéroports ou aux abords de ceux-ci pour photographier les avions et noter leurs immatriculations. Juste comme ça, pour le plaisir.

Ils se déplacent généralement en groupe, munis d'un carnet de notes, de jumelles, d'appareils photos et de packs de bière.

En Grande-Bretagne, la police vient de lancer un programme de coopération avec les associations de «spotters», bien contente de profiter de ces vigiles disponibles, souvent compétents à force de trainer sur les plateformes et gratuits (1).

En France, les "spotters" sont interdits par arrêté préfectoral aux abords des aéroports internationaux.

*****************

(1) : comme on est en France, où la confiance dans l'intelligence du citoyen, même parmi les citoyens eux-mêmes, est nulle, il faut que je m'explique sur l'efficacité des bénévoles.

Si vous allez sur n'importe quelle plateforme de France où il y a des aéroclubs, il ne faudra pas plus que quelques minutes avant que vous soyez repérés. Si, au bout de quelques minutes supplémentaires, les raisons de votre présence ne sont pas devenues claires, quelqu'un vous abordera avec toutes les formes de la politesse (on ne sait jamais, l'espoir d'un nouveau cotisant au club) pour s'enquérir des motivations de votre visite.

Sur la plateforme où je sévis, il y avait des vols d'essence (l'essence d'aviation, c'est bon pour les motos), bien que la brigade de gendarmerie se trouve sur le terrain. Ce sont des membres d'un club qui, sortant d'une réunion tardive, ont avisé un véhicule suspect («Vin' diou que v'là ! J'la jamais vu ici c'cochon là !») et ont prévenu les pandores.

Des «spotters» dûment motivés dans le style «on compte sur vous les gars» ne seraient pas moins attentifs.

lundi, octobre 01, 2007

La réforme et la croissance

En France, on entend deux discours, suivant la conjoncture :

1) Il n'y a pas de croissance :

«Il ne faut pas bousculer les Français par des réformes trop brutales dont le traumatisme s'ajouterait aux difficultés de la conjoncture économique. On n'arrête pas les réformes mais on prend son temps.»

En fait de douceur et d'évitement des brutalités et de prendre son temps, on ne réforme pas du tout. C'est le discours que devrait nous servir l'équipe Sarkozy sous peu.


2) Il y a de la croissance :

«Il ne faut pas bousculer les Français par des réformes trop brutales alors que tout va bien, il ne faudrait pas saper la confiance, la fameuse confiance magique. On n'arrête pas les réformes mais on prend son temps.»

En fait de douceur et d'évitement des brutalités et de prendre son temps, on ne réforme pas du tout.

Nos politiciens sont-ils bêtes ? Ne comprennent-ils pas qu'il y a dans ces discours une erreur logique manifeste ?

Si la réforme est bonne pour la croissance, il faut la faire quelle que soit la conjoncture, et à plus forte raison si celle-ci est mauvaise.

Ou le fond des choses n'est-il pas que nos politiciens pensent que la réforme, quelle que soit la conjoncture, est mauvaise, qu'ils sont foncièrement, farouchement, conservateurs et qu'ils ne sacrifient au discours réformiste que pour mieux dissimuler leur arcboutement immobiliste ?

Je vous laisse choisir.