Ayant très vite enchaîné depuis quelques temps des lectures concernant le "pédagogisme globaliste", j'ai éprouvé le besoin de revenir au port, à savoir Les Essais. Confronté à tant de déchet intellectuel -comment baptiser autrement les calembredaines du genre "L'apprenant doit bâtir lui-même ses savoirs" ?- , j'ai eu recours à ma méthode de réconfort habituel, à savoir me plonger dans les Essais :
Je dirois volontiers, que comme les plantes s'estouffent de trop d'humeur, et les lampes de trop d'huile, aussi faict l'action de l'esprit par trop d'estude et de matiere : lequel occupé et embarassé d'une grande diversité de choses, perde le moyen de se demesler. Et que cette charge le tienne courbe et croupy [thèse fondamentale du "pédagogisme"]. Mais il en va autrement, car nostre ame s'eslargit d'autant plus qu'elle se remplit [Base de l'école "archaïque"]. Et aux exemples des vieux temps, il se voit tout au rebours, des suffisans hommes aux maniemens des choses publiques, des grands capitaines, et grands conseillers aux affaires d'estat, avoir esté ensemble tressçavans.
Montaigne vivait en un temps où l'on gavait les élèves comme les canards et s'est élevé contre (On ne cesse de criailler à nos oreilles, comme qui verseroit dans un antonnoir ; et nostre charge ce n'est que redire ce qu'on nous a dit) : il pourrait facilement servir d'argument aux pédagogistes. On pourrait trouver dans De l'institution des enfants une justification aux sorties scolaires à répétition et aux questionnaires préalables à une leçon.
Et pourtant non, les Essais ne justifie pas le "pédagogisme" car Montaigne parle d'un précepteur qui n'aurait qu'une poignée d'élèves, voire un seul. On comprend alors qu'il ait du temps à perdre en "activités d'éveil". Mais, sur deux points essentiels, Montaigne s'oppose radicalement aux "pédagogistes" :
> l'instruction n'est pas toujours un plaisir en soi, et, même, la peine a des vertus pédagogiques.
> l'autorité du maître, à qui le sadisme est cependant interdit, est absolue.
Il le faut rompre à la peine, et aspreté des exercices, pour le dresser à la peine [...] l'authorité du gouverneur, qui doit estre souveraine sur luy, s'interrompt et s'empesche par la presence des parents.
vendredi, décembre 23, 2005
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