vendredi, novembre 16, 2012

Un Hollande à retardement


Je suis assez content que Stéphane Denis soit d'accord avec moi :

Un vrai travail de socialiste, ce rapport Jospin ! Il aboutira, par l’interdiction du cumul des mandats, à peupler l’Assemblée d’encore plus de fonctionnaires tandis que, grâce à la proportionnelle, des copains du pouvoir pourront avoir un job sans être élus.
– Oui, l’ancien premier secrétaire a vraiment mérité du parti. En le choisissant pour réfléchir à la moralisation de la vie publique, Hollande savait ce qu’il faisait.
– Tout était dans “moralisation”.
– Ça s’accordait si bien avec Jospin ! Il passe pour vertueux.
– Et donc ses propositions devaient l’être…
– Jusqu’à la petite vengeance qui consiste à empêcher les anciens présidents de siéger au Conseil constitutionnel.
– Alors qu’ils sont les seuls à avoir une vraie expérience des institutions. Notez qu’on continuera à nommer des amateurs qu’il faut caser ou recaser, voire des crétins complets, comme… Vous voyez qui je veux dire.
– Je vois, je vois. C’est curieux, cette haine de son prédécesseur. On dirait que le souvenir de Sarkozy empêche Hollande de dormir.
– C’est vrai qu’il a l’air anxieux. Ce doit être le tournant.
– Quel tournant ?
– Eh bien celui qui lui a permis de changer de politique après avoir laissé croire à tout le monde qu’il ne le ferait pas.
– Vous voulez parler du rapport Gallois et de l’opération de communication absolument machiavélique qui a pris les médias de court ?
– On en parle beaucoup.
– Je n’y crois pas. Tout ça est dicté par les circonstances. Que François Hollande fasse la politique de Sarkozy en moins bien et sans le dire, c’était prévu. Qu’il ait manipulé le rapport Gallois, c’est évident. Qu’il s’en sorte par des mesures bancales et incomplètes, inévitable. Mais les impôts continueront de croître, l’État de penser que c’est à lui de créer des emplois, les finances d’inventer des banques d’investissement et de nouveaux règlements.
– Donc, il n’a pas eu le choix ?
– Disons qu’il a du mal à choisir. En fait, son fonctionnement est de ne pas choisir. Le dernier truc est d’espérer une reprise de la croissance en Europe dans deux ans. La vieille logique selon laquelle ce qui se passe aux États-Unis arrive chez nous un peu plus tard. Alors, il croise les doigts et nous fait le coup du type qui sait où il va. D’ici là, il compose.
– Pourquoi deux ans ?
– Parce qu’il y aura des élections, et que le plus important pour lui, c’est le Parti socialiste. – Et s’il a raison ?
– S’il a raison, tant mieux. Mais la France n’en devra pas moins emprunter 200 milliards l’an prochain : 140 pour l’État lui-même, 60 pour le parapublic. C’est beaucoup. Le plus gros besoin de la zone euro.
– Vous songez aux marchés ?
– Si les marchés ne voient pas d’évolution en France, ils le diront.
– Quelle différence avec Nicolas Sarkozy ?
– Aucune. Il a doublé la dette. Le problème est que ni lui ni son successeur n’ont pensé que ce système est condamné. La France a une culture de l’endettement qui remonte aux années 1930, après le rétablissement des comptes par Poincaré et la rechute qui a suivi avec Blum, puis la IVe République. Ce n’est ni de droite ni de gauche. C’est politique. C’est pour cela que je dis que Hollande fait comme Sarkozy.
– Vous attendiez autre chose de la gauche ?
– La gauche l’a prouvé, elle sait s’adapter. Et même au-delà. Ce qui reste de socialiste à Hollande, à son gouvernement et ses députés, en dehors de leur sectarisme, c’est qu’ils sont viscéralement socialistes : ils ne voient pas plus loin que le bout des impôts.
– Vous semblez le regretter.
– Oui, parce que les réformes passeraient mieux que si la droite était au pouvoir. C’est ce que nos voisins allemands ne cessent de nous répéter : Hollande a une occasion unique de faire avancer les choses.
– Et vous croyez qu’il le fera ?
– Non. Elles le feront pour lui. C’est quelqu’un qui courra toujours après l’événement, et qui finira par tomber, par une sorte de hasard heureux, dans les bons choix qu’il ne se sera pas résolu à faire.
– Vous êtes donc optimiste ?
– À retardement. C’est la version la plus sûre du pessimisme

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