mardi, septembre 30, 2008

Les Américains m'épateront toujours

Ainsi, le fameux plan Paulson à 700 mds $, qui devait prouver (au nom d'un raisonnement d'ailleurs erroné) que le libéralisme n'est qu'une escroquerie, a été rejeté.

Je ne doute pas qu'un plan où les banques payent un peu plus finira par passer.

Mais on mesure à cette actualité l'abime qu'il y a entre la France et les USA : en France, il ne viendrait à l'idée d'aucun parlementaire d'empêcher l'interventionnisme étatique sous prétexte qu'il se fait aux frais du contribuable.

Faubourg 36

Il y avait longtemps que nous n'étions allés voir un film récent. Nous avons choisi celui-ci parce que c'était le seul qui s'ajustait à nos horaires. Nous avions une certaine méfiance : Jugnot est quelquefois un peu lourd et j'avais trouvé Les choristes insipide.

Nous avons donc eu une bonne surprise avec cette vie d'un music-hall en faillite pendant le front populaire.

Bien sûr, nous n'échappons pas à la caricature politique la plus simplette : le communiste forcément sympa et le fasciste obligatoirement un immonde salaud (1). Le gentil est «solidaire» et le méchant individualiste.

Mais tout cela passe très bien. L'actrice principale, Nora Arnezeder, rachète toutes les petites fautes.

Je ne m'engage pas beaucoup en écrivant qu'on n'a pas fini d'en entendre parler. De plus, elle est très bien servie par des chansons originales, enlevées et émouvantes.

Les auteurs ont visiblement été très bien inspirés par l'époque. Il n'y a pas de gros clins d'yeux cinématographiques snobs style «On est entre nous, cinéphiles», mais on détecte tout de même la trace du goût inoubliable des films des années 30.

Bref, une recommandation. Evidemment pour tout public.

(1) : si tous les fascistes avaient été d'immondes salauds, ce mouvement politique n'aurait pas eu le succès qu'il a eu et si tous les communistes avaient été sympas, les goulags auraient été revendus au Club Med.

vendredi, septembre 26, 2008

Le grand orgasme des anti-libéraux

Fidèles lecteurs de ce blog, vous savez que la crise financière actuelle doit autant, sinon plus, à de mauvaises lois et à une régulation inadaptée qu'à la cupidité privée. Vous redoutez les velléités de réglementation (1) et les possibles interventions étatiques (2).

Vous vous dites que, de toute façon, là où il y a prospérité durable, il y a capitalisme. Tant pis, il faut serrer les dents pendant les crises.

Mais vous êtes des gens raisonnables et intelligents, espèce rare.

Cependant, il en est d'autres individus qui, suivant l'expression populaire, ne se sentent plus pisser. Ce sont les anti-libéraux. Cette crise est leur grand orgasme.

Pour eux, la crise actuelle est enfin, après tant d'attente, la preuve tangible, comme d'ailleurs toutes les crises précédentes, qu'il y a quelque chose de fondamentalement pourri au royaume du capitalisme et que celui-ci va s'écrouler sous le poids de ses vices.

Et vas-y que je pérore sur le «retour de l'Etat», la «fin du capitalisme financier», la «réhabilitation de l'impôt et de l'interventionnisme» et autres fadaises.

Et moi, dans mon coin, je rigole.

Car dans un an, deux ans au plus tard, l'économie américaine sera repartie sur les chapeaux de roue, et nous, nous nous trainerons toujours notre croissance anémique, plombés que nous sommes par l'énormité des dépenses publiques (chez nous, l'Etat ne peut pas être de retour, puisqu'il n'est jamais parti).

Mais ne croyez pas que les anti-libéraux prendront cela pour un désaveu : ils auront promptement tourné la page, traversé pudiquement le fleuve de l'oubli, et nous assommerons toujours autant de leurs tirades anti-libérales, nous promettant comme toujours, la fin de l'économie d'abondance et l'écroulement du capitalisme.

Mais moi, je n'aurai pas oublié, et internet aussi a de la mémoire.

Alors, je ressortirai les articles de tel ou tel grand penseur anti-libéral nous prédisant l'apocalypse. Et je n'ai pas fini de rire.

Je rigole, je vous dis.

(1) : Erik Hurst on the risks of re-regulation

(2) : «Les Etats ont un singulier talent pour transformer une crise, naturelle, en récession aggravée.» Edward C. Prescott (rappelons qu'il y a désormais une quasi-unanimité, je n'ose écrire un consensus, chez les économistes pour attribuer l'aggravation et la prolongation de la crise de 1929 à des interventions étatiques intempestives).

jeudi, septembre 25, 2008

Trois énigmes

Nota : ces énigmes sont posées pour vous faire réfléchir, n'allez pas commencer à me dire «Et comment on se retrouve dans une situation pareille ?»

1) Vous êtes enfermé dans une pièce nue (pas d'objets, pas d'outils). Au sol, une bouteille de bière pleine, ouverte, posée au centre d'un tapis. Comment vous faites pour enlever le tapis de dessous la bouteille sans la renverser et sans la toucher ?

2) Vous posez une feuille de journal ordinaire, genre Le Monde ou Le Figaro, par terre. Vous devez y tenir debout en équilibre avec un ami mais sans toucher celui-ci. Comment vous y prenez vous ?

3) Vous lâchez une allumette d'1.24 m de haut. Comment faire pour qu'elle tombe sur la tranche ?

Le développement durable et le grand hamster d'Alsace

J'espère qu'au milieu de toute l'hystérie irrationnelle qui fait le quotidien des medias et donc notre quotidien, au moins partiellement, ce texte vous fera rire (j'ai retiré les pages mathématiques) :

Développement durable et grand hamster d'Alsace


Au fait, je me suis souvent torturé le cervelet pour essayer de trouver une explication au retour de l'irrationnel, du religieux, de la superstition et de la crédulité, qui envahissent la sphère publique au point de rendre tout discours froidement rationnel inaudible (cf la querelle des OGMs).

J'en suis arrivé à une réponse simple : penser et, à plus forte raison, penser rationnellement, scientifiquement, fatigue.

Tant que la pensée sur tout et n'importe quoi était réservée à quelques éminences, ça allait.

Maintenant que chacun se mêle d'avoir un avis, évidemment la majorité se retrouve sur le seul mode de pensée qui convienne à tout le monde, celui qui fatigue le moins : la croyance.

mercredi, septembre 24, 2008

Et si Paulson avait tort ?


David Reilly
THE WALL STREET JOURNAL

Que se passerait-il si le secrétaire d'Etat au Trésor, Henry Paulson, avait tort sur les prix de l'immobilier, et si le marché avait raison ?

Dans un tel scénario, son plan de renflouement de 700 milliards de dollars pourrait s'avérer inefficace et conduire à de lourdes charges pour les contribuables.

Henry Paulson a affirmé mardi devant la commission bancaire du Sénat que son plan "s'attaquerait de façon fondamentale et complète" aux racines de la crise qui ronge les marchés financiers.

Mais cela suppose que les marchés chutent, ou sont gelés, uniquement parce que le pessimisme excessif des investisseurs rend impossible la vente par les banques de leurs actifs - pour retrouver des marges de manoeuvre sur leur bilan - autrement qu'à prix cassés.

En suivant ce raisonnement, les volumes de ventes de logements pâtissent de la difficulté des acheteurs à obtenir des prêts immobiliers des banques, ce qui entraîne les prix à la baisse. Briser ce cerce vicieux conduirait alors à une stabilisation des prix, voire à une hausse.

Les investisseurs de leur côté voient une cause plus intraitable aux maux actuels. Selon eux, l'immobilier est en difficulté car les prix des maisons ont été surévalués et la hausse alimentée par des niveaux d'emprunt insoutenables.

Pour corriger cette aberration, les prix doivent chuter à des niveaux plus conformes à la réalité, ou bien le gouvernement devra augmenter son plan de sauvetage.

Pour l'instant, les marchés ont remporté une manche. Henry Paulson espère que les 700 milliards de dollars injectés changeront les données du problème. Mais même si cela arrive, il n'est pas certain que les prix de l'immobilier repartent à la hausse. Ils pourraient très bien stagner pendant des années.

Ce serait certes mieux qu'une chute supplémentaire. Mais cela pourrait conduire les contribuables à endosser des pertes supplémentaires, alors que certaines banques n'ont pas encore accepté le fait que les prix ne devraient pas rebondir de sitôt.

Les banques et le gouvernement essayent peut être en fait tout simplement de lutter contre le point d'équilibre du marché immobilier. Ce combat est souvent perdu d'avance.

David Reilly, The Wall Street Journal

mardi, septembre 23, 2008

Une critique libérale du plan Paulson

J'avais trouvé un article similaire en Anglais que j'avais (généreusement) commencé à vous traduire. Mais puisque l'institut Hayek se dévoue ...

Une critique libérale du plan Paulson

Afghanistan, la fin de l'unité nationale

Je ne parlerai pas d'esprit munichois, le terme a été tellement galvaudé. Pourtant, l'attitude des socialistes français me met très mal à l'aise.

En Afghanistan (ailleurs dans le monde aussi), il y a des hommes qui nous considèrent comme leurs ennemis, que nous soyions chez eux ou non, et qui sont même prêts à mourir pour nous tuer.

De fait, ils sont en guerre contre nous. Nous pouvons choisir de ne pas nous défendre, ça ne les empêchera pas de nous attaquer.

Il se trouvent que ces hommes, qui, pour la plupart ne sont pas Afghans, trouvent refuge en Afghanistan, en Iran, au Pakistan, au Yemen, peut-être dans une moindre mesure en Syrie et en Arabie Saoudite.

Nous avons choisi en 2001 d'attaquer leur sanctuaire principal, qui était l'Afghanistan, (et, sans le dire, de laisser les Américains tenter de controler le Pakistan).

Tout cela, nos socialistes semblent l'avoir oublié, obnubilés qu'ils sont par le désir de contredire Nicolas Sarkozy. Puéril ? Mesquin ? Idiot ? Criminel ? Lâche ? Probablement un peu de tout cela.

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Afghanistan : le PS peu résistant face aux djihadistes

Yan Rioufol 22 septembre

Le parti socialiste a prévenu: il ne validera pas, ce lundi après-midi, la stratégie de Nicolas Sarkozy en Afghanistan, à l'issue des débats parlementaires. Hier, Arnaud Montebourg laissait présager un vote négatif. Ce matin, Bruno Le Roux suggérait une abstention. Pour autant, le PS ne devrait pas plaider pour un retrait immédiat des troupes françaises. Bref, un grand flou enveloppe les positions de la gauche, prioritairement soucieuse de coller à une opinion majoritairement hostile à un engagement militaire de la France. Or, ce peu de goût du PS pour une résistance face au djihadisme international laisse voir une démobilisation et un manque de solidarité avec les démocraties, qui risque d'être perçue comme une première victoire pour les talibans.

"La guerre contre le terrorisme ne peut être gagnée", répètent les socialistes qui oublient que Barack Obama, leur modèle, appelle à le "combattre" et à "éradiquer les terroristes qui mettent en péril notre sécurité en Afghanistan". Il est évident que la guerre n'est pas une fin en soi et qu'une telle option doit aussi développer des soutiens aux populations et engager des reconstructions. C'est cette stratégie qui est en train de porter ses fruits en Irak, où 79 milliards de dollars vont être consacrés à la reconstruction en 2009, grâce aux hausses du pétrole. Hier, un appel aux investisseurs a même été lancé pour construire, à Bagdad, le premier complexe touristique de luxe avec golf, spas et hôtel six étoiles. George W. Bush peut réussir son pari d'un Irak démocratique [Etant favorable initialement à l'intervention américaine en Irak, j'ai eu ensuite beaucoup de doutes, maintenat, j'en viens à croire que j'avais peut-être raison].

Ce que je dis là est inaudible, je le sais. D'autant que la situation irakienne est encore fragile. Il n'empêche : c'est bien la poursuite de la guerre engagée par Bush contre les "islamo-fascistes", après le 11 septembre 2001, qui est de plus en plus comprise comme une évidence par les dirigeants européens. Aussi, quand le PS refuse de voir la France devenir le "supplétif des Américains" et cautionner encore davantage l'Otan, le parti persiste à juger ce conflit à travers un anti-atlantisme qui n'a plus de sens, à l'heure où l'Occident est appelé à faire front commun pour défendre ses valeurs. Cette guerre passe actuellement par l'Afghanistan. Le monde libre, auquel aspirent nombre de musulmans, ne peut se permettre de la perdre.



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Afghanistan, la fin de l'unité

L'éditorial du Figaro, Paul-Henri du Limbert, 23 septembre.

«Dans les circonstances présentes, nous devons veiller plus que jamais à maintenir notre unité nationale autour des valeurs du pacte républicain. Ce sont précisément ces valeurs que le terrorisme veut nier.» C'était le 3 octobre 2001 à l'Assemblée nationale, et l'orateur s'appelait Lionel Jospin, alors premier ministre de Jacques Chirac. Sept semaines plus tard, les premières troupes françaises étaient envoyées en Afghanistan. Sept ans plus tard, c'en est donc terminé de l'«unité nationale».

Pour justifier leur non à la prolongation du mandat des forces françaises en Afghanistan, les socialistes ont usé d'arguments qui n'ont rien d'anodin et que chacun a bien en tête, à gauche comme à droite. Les risques d'engrenage ? Les risques d'enlisement ? Bien entendu qu'ils existent. Comme ils existaient lorsque François Mitterrand, jugeant que la France ne pouvait pas «être le faux frère de l'Occident», avait décidé que le pays serait de la première guerre du Golfe et que ses soldats agiraient sous commandement américain. Personne à gauche - à part le fracassant Jean-Pierre Chevènement - n'avait alors parlé de «dérive atlantiste». L'«insulte», si c'en est une, est aujourd'hui lancée à la tête de Nicolas Sarkozy.

Mais peut-on parler de «dérive atlantiste» lorsque des soldats de trente-neuf pays, dont vingt-cinq de l'Union européenne, sont engagés sur le théâtre afghan ? Au nom de quelle logique condamnable faudrait-il, comme l'a souligné François Fillon, «laisser à nos partenaires le soin de combattre pour nous» ? Parmi ces pays, beaucoup ont un avis très négatif sur les deux mandats de George Bush, mais ça ne les empêche pas de participer à l'«effort de guerre» contre le terrorisme international. Surtout, ils ont entendu John McCain et Barack Obama annoncer qu'en cas de victoire en novembre prochain la politique américaine en Afghanistan serait maintenue, voire amplifiée. Eux savent que le problème, ce n'est pas George Bush, mais bien les talibans.

Les socialistes répondent à tous ces arguments en expliquant qu'ils ne demandent pas un retrait immédiat des troupes françaises, mais un calendrier sur la durée de leur mission. Certes, mais, dans une guerre, doit-on annoncer à l'ennemi à quel moment on cessera de le combattre ?

Dans cette affaire, qui est une affaire grave puisqu'il s'agit de la guerre, les socialistes agissent avec un brin de légèreté. Lucides, quelques-uns parmi eux ont tenté de mettre en garde contre une position qui «ferait la part belle» aux talibans. Ils n'ont malheureusement pas été entendus par leurs camarades qui, comme souvent depuis mai 2007, ont trouvé dans ce débat une nouvelle mauvaise raison de cibler Nicolas Sarkozy. Oubliant au passage les appels à l'«unité nationale» lancés par Lionel Jospin il y a sept ans dans ce même Hémicycle. La situation en Afghanistan a changé depuis ? Peut-être, mais, malheureusement, la guerre contre le terrorisme n'est pas encore finie.

lundi, septembre 22, 2008

C'est clair, l'Etat français est au service de la Nation

«Christian Poncelet, président du Sénat, laisse la place. Son successeur sera désigné dans les prochains jours. Pour services rendus au Sénat davantage qu’à la patrie, Christian Poncelet va aménager dans un appartement de 200 m2 que la deuxième chambre a acheté tout exprès pour lui dans le 6° arrondissement de Paris. Selon les informations disponibles, l’ancien président du Sénat pourra occuper cet appartement « à vie », expression dont on aurait pu penser qu’elle n’avait pas cours dans la République française.»

JM Aphatie

dimanche, septembre 21, 2008

Une réponse à Pedro à propos du pétrole

A propos du livre The bottomless well, Pedro pose la question suivante :

«Comment explique-t-il que les réserves de pétrole sont encore très abondantes ?»

Peut-être n'ai je pas été très clair dans mon compte-rendu.

La thèse principale des auteurs, thèse qu'ils défendent très efficacement, est que plus on extrait d'énergie de notre environnement, plus on est capable d'en extraire.

S'agissant du cas particulier du pétrole, ils décomposent la chose comme suit :

> nous ne manquerons pas de pétrole, même si il est un peu plus cher, à l'horizon de deux ou trois décennies. Même les plus pessimistes en conviennent.

> Pendant ce temps, le nucléaire et le charbon prendront progressivement le relais. Personne ne prédit une pénurie de charbon ou d'uranium.

> il est simple (sauf sur le plan financier : ça coûte très cher en investissement) de transformer du charbon en pétrole (procédé Fischer-Tropsch) :

«Au début de 1944, le Reich produisait quelque 124 000 barils/jour de combustibles à partir de charbon, ce qui représentait plus de 90% de ses besoins en essence d'aviation et plus de 50% du besoin total du pays en combustibles . Cette production provenait de 18 usines de liquéfaction directe mais aussi de 9 petites usines FT, qui produisaient quelque 14 000 barils/jour. [...] Cependant après structuration du marché pétrolier, et la forte baisse des prix, les États-Unis ont abandonné les recherches et le procédé Fischer-Tropsch est tombé en désuétude. Au cours des années 1950, il a cependant retrouvé de l'intérêt en Afrique du Sud : ce pays, disposant d'abondantes ressources de charbon, a construit des mines hautement mécanisées (Sasol) qui approvisionnent des unités CTL, [...] En 2006, ces unités couvrent environ un tiers des besoins sud-africains, et la société Sasol est devenue l'un des spécialistes mondiaux en la matière. [...] Depuis 2006, un B52 de l'US Air Force réalise des essais avec du carburant Fischer-Tropsch, en mélange à 50% ou pur. Pour l'instant, c'est un succès qui va permettre à l'armée américaine de retrouver une indépendance stratégique pour son carburant militaire. [...] Le rendement énergétique global de cette technologie demeure également un point faible.»

Donc, tant que nous ne manquerons pas de charbon, nous ne manquerons pas de pétrole. Et ensuite ? Hé bien, la question n'a pas de sens. Si ce procédé nous permet d'être approvisionnés en énergie avec les connaissances actuelles pour deux siècles, que demander de plus ? Il est totalement insensé d'essayer de se projeter deux siècles en avance sur les questions techniques. Qu'aurait pu concevoir un homme de 1808 de nos besoins ?

Une remarque importante : les auteurs ne font appel pour leur raisonnement qu'à des réserves et à des procédés connus, ils ne font pas de plans sur la comète. Donc toute innovation technologique, par essence imprévisible donc pas prise en compte dans leurs prévisions, ne peut que renforcer ce raisonnement.

Une remarque annexe : les réchauffistes seront sans doute épouvantés de constater qu'on n'est pas près d'arrêter de bruler des hydrocarbures. Tant pis pour eux.

Il faut bien comprendre que ce qui agitent les foules géopolitiques, ce n'est pas le pétrole en général, dont nous ne manquons pas ni ne risquons de manquer dans un avenir proche (même sans charbon ni procédé FT, d'ailleurs).

Ce qui tracasse nos décideurs, c'est le pétrole bon marché, celui qui coûte moins de 20 $/baril à extraire. Mais ce n'est pas un problème économique, c'est un problème politique.

En effet, aux cours actuels, le coût d'extraction représente 20 % du prix du pétrole brut, qui lui même ne représente qu'une fraction du prix des produits raffinés. Un doublement du coût d'extraction, doublement qui permet de faire bien des choses et d'exploiter des gisements laissés en friches, représenterait donc une augmentation de 20 % du prix du pétrole brut, et moins encore pour les produits raffinés.

Le récent yoyo des cours du pétrole prouve largement qu'une telle évolution n'aurait qu'un impact limité sur l'économie.

En revanche, l'impact politique serait considérable :

> la géopolitique en serait changée. Le Canada se placerait au premier rang des producteurs au détriment de pays plus chauds, dans tous les sens du terme. Certains soupçonnent même, sans preuves mais non sans raisons, le gouvernement américain de ne pas s'être battu pour empêcher la récente hausse du pétrole, justement pour favoriser ce «rebelotage» de la donne géostratégique. Sans l'argent du pétrole, comment l'Arabie saoudite et l'Iran financeraient-ils les terroristes ?

> la politique intérieure également. Les études d'opinion montrent que les citoyens, qui font le plein de leur voiture très régulièrement, sont hypersensibles au prix des carburants.

Politiques intérieure et étrangère sont souvent en contradiction. Mais on peut voir assez clairement un politique américaine se dessiner : assurer l'approvisionnement du pétrole bon marché à court terme, mais se positionner de manière à ce que le pétrole cher favorise les USA (ce n'est nullement un hasard si l'endroit du monde où se concentrent le plus de recherches pour un monde avec pétrole cher s'appelle la Californie).

Un point de vue libéral sur les interventions du gouvernement américain

Going for broke

Bad debt

samedi, septembre 20, 2008

La guerre d'Algérie a-t-elle été perdue ?

Ces dernières semaines, j'ai lu dans des blogs et dans des journaux qu'il faudrait s'inspirer en Afghanistan des méthodes de la guerre d'Algérie.


Le raisonnement se présente ainsi : certes, la guerre d'Algérie a été politiquement perdue, mais l'ALN a été étouffée, c'est donc une victoire militaire, dont il ne faut pas oublier les leçons.

Ce raisonnement me parait très douteux.

La stratégie ne vit pas pour soi, mais pour permettre la victoire politique. Une défaite politique est donc, obligatoirement, une défaite militaire.

Soit que la stratégie militaire ait été insuffisante, soit que la victoire n'était tout simplement pas possible dans les conditions qui prévalaient, auquel cas c'est une erreur militaire majeure de s'engager dans une guerre qu'on ne peut pas gagner (Sun Tsu doit s'en retourner dans sa tombe).

Je transpose à l'Afghanistan de la manière suivante :

il y a peut-être quelques tactiques inspirées de la guerre d'Algérie qui seraient efficaces en Afghanistan, mais comme la tactique est liée à la stratégie et que la stratégie algérienne a échoué, il va falloir y réfléchir à deux fois.

Le premier impératif me semble donc être de définir des buts de guerre tels que la victoire soit possible (1).

Le seul but de guerre qui me parait accessible, c'est d'empêcher des terroristes de se réinstaller confortablement en Afghanistan.

Tout le reste, amener la paix et la démocratie et patati et patata, je n'y crois pas. Je ne crois pas non plus à la théorie des complotistes sur ce fameux oéloduc qui serait la seule et unique véritable raison de l'intervention occidentale en Afghanistan. Pour une raison simple : le pétrole n'est pas une denrée rare (2) !

(1) : on peut raisonner à l'inverse : définir les buts de guerre d'abord puis se donner les moyens de la victoire. Mais, en Afghanistan, où l'on sent bien que les moyens seront de toute façon limités, mieux vaut commencer par définir des buts de guerre limités en fonction des moyens.

(2) : je sais ce que cette affirmation a d'iconoclaste, pourtant, c'est la pure vérité : les sources de pétrole sont abondantes et diversifiées. Je sais aussi que le pétrole occupe une position fantasmatique dans l'imaginaire politique qui fait que les décisions le concernant sont souvent éloignées de la rationalité.

jeudi, septembre 18, 2008

Question d'histoire : que sont devenus les politiciens de 1940 ?

Quelqu'un saurait-il où je pourrais trouver des infos sur la carrière postérieure des ministres et députés de 1940 ?

Combien ont été résistants ? Pétainistes ? Ont disparu de la circulation après 1945 ? Ont continué dans la politique ?

J'ai des exemples : Blum qui s'est relancé mais a été arrêté par Guy Mollet, Paul Reynaud, qui est revenu comme si de rien n'était mais sans retrouver son importance d'antan ...

J'aimerais bien une étude, quelques statistiques ...

Sans commentaire : JM Aphatie, la dette et la Poste

«Jean-Paul Bailly [président de la Poste, partisan d'une privatisation partielle]assure qu’il a besoin de trois milliards d’euros pour maintenir La Poste à flot, et la muscler face à la situation de concurrence. Dans un premier mouvement, on pourrait lui conseiller de s’adresser à son actionnaire, la puissance publique, et à lui demander à elle les 3 milliards d’euros. Inutile de changer le statut juridique et de commencer à diluer le capital public s’il s’agit seulement d’un besoin financier, très certainement légitime.

J’écris cela mais nous savons tous que c’est idiot puisque l’Etat français, un grand pays la France, n’a plus de sou, ses caisses sont vides, sa dette est colossale, les intérêts qu’il acquitte pour la financer faramineux. La dette, l’endettement, personne n’en parle et tout le monde s’en fout. Mais nous voyons dans ce dossier de La Poste une conséquence directe et concrète de ce boulet qui nous fera trébucher si nous n’y prenons garde.

Voilà une entreprise publique, rendant à l’évidence un service au public, incapable de trouver son financement auprès d’une puissance publique qui dépense chaque année plus de mille milliards d’euros. Cette affaire dit bien la sclérose qui s’installe et l’asphyxie qui menace. L’ouverture du capital de La Poste devient indispensable parce que l’Etat devient incapable.

Vous, je ne sais pas, mais moi ce type de constat m’insupporte. Et notre passivité collective face à cette situation aussi.

C’est dans ce contexte que se pose la question du référendum à propos de l’ouverture du capital. La Poste représente une réalité inscrite aussi bien dans le quotidien de chaque français que dans l’imaginaire collectif d’une Nation si longtemps fière de ses services publics. L’entreprise aujourd’hui publique appartient au patrimoine de la France. L’opération d’ouverture du capital est assez justement présentée comme une nécessité technique. Elle se trouve être aussi un acte symbolique qui peut justifier la réunion du corps électoral pour en trancher l’issue.

A force de différer les débats et de camoufler la réalité de la situation financière de l’Etat sous des discours volontaristes mensongers, les responsables politiques pourraient bien se trouver devant cette difficulté que peu de monde comprenne et partage les enjeux réels qui existent autour de La Poste pour cette seule raison que jamais personne, parmi les autorités de la République, ne les a vraiment expliqués.

En un mot comme en cent, nous paierons cher, un jour, le prix de notre médiocrité.»

Extrait du billet quotidien du blog de JM Aphatie le 19 septembre 2008

Lehman, le climat et le consensus

Lehman and consensus

Quand la France prend exemple sur le Danemark et la Hollande ...

Sans offense pour nos amis danois ou bataves, la France tend à devenir, sur la scène internationale, un acteur du même niveau que le Danemark ou la Hollande.

En tout cas, c'est très clairement l'avenir que nos dirigeants préparent à notre beau pays.

Defence Analysis est une lettre mensuelle britannique spécialisée dans les questions de défense qu'il m'arrive de parcourir de temps en temps et que je trouve généralement très pertinente.

Son étude de la réforme actuelle des armées françaises se conclut par cette phrase radicale : «Paris is actually abandoning the capability to pursue serious war fighting». Autrement dit, en langue de Molière : «Paris est réellement en train d'abandonner toute capacité à mener une vraie guerre».

C'est clair, c'est net, c'est ce que je redoute depuis un certain temps. Et c'est totalement irresponsable. Cette démission est l'aboutissement de la politique de défense menée depuis vingt ans.

Sans la menace de la force armée, la diplomatie n'est qu'aboiement de roquet.

Finis la place dans le monde, l'indépendance et la sécurité, vive le protectorat américain. Bien sûr, on ne nous le dit pas si franchement, il y a des pudeurs et des susceptibilités à ménager, mais c'est bien de cela qu'il s'agit.

Le Danemark et la Hollande, vous dis-je.

Travailler plus pour payer plus d'impôts

J'emprunte cet excellent titre, bien sûr détournement humoristique du sarkozien «travailler plus pour gagner plus», à Nicolas Baverez.

Il résume assez bien ma pensée sur le gouvernement actuel.

Ronald Reagan, grand pédagogue, avait deux ou trois slogans qu'on peut utiliser pour analyser la politique française :

1) Le socialisme, c'est : si ça bouge, taxe ; si ça bouge encore, réglemente ; si ça ne bouge plus, subventionne.

2) L'Etat n'est pas la solution, c'est le problème.

3) La phrase la plus terrifiante dela langue [française] est : «Je viens de la part de l'administration pour vous aider».

Il est clair qu'à l'aune de la première phrase, toute la classe politique française, à de rarissimes exceptions, est socialiste. Chaque politicien français se sent le devoir de se mêler de la vie de la société, d'orienter, de contraindre, de taxer, d'aider, mais surtout pas de laisser vivre.

Il n'y en a aucun qui envisage que le devoir d'un politicien puisse être de s'abstenir, de ne pas toucher, de faire confiance.

Et l'instrument favori de ces madame-sans-gêne est la fiscalité (toujous haussière bien entendu, puisque les baisses ne sont que temporaires tandis que les hausses sont permanentes).

La deuxième phrase, reformulée à la française, permet d'exprimer toutes les nuances de notre spectre politique avec sept lettres et deux parenthèses. Je m'explique :

La droite pense : «L'Etat est la solution de presque tous vos problèmes.»

La gauche pense : «L'Etat est la solution de (presque) tous vos problèmes.»

L'extrême-gauche, plus brutale, pense : «L'Etat est la solution de tous vos problèmes.»

Bien entendu, il n'en est pas un pour envisager les choses à la manière reaganienne.

Enfin, la troisième phrase décrit le piège dans lequel les étatistes nous ont enfermé. L'assistanat étouffe l'économie par l'intermédiaire des impots, provoque des drames, qui nécessitent encore plus d'assistanat, qui étouffe l'économie par l'intermédiaire des impots, qui provoque des drames, et ainsi de suite.

Il est extrêmement difficile de rompre avec l'assistanat, puisqu'on a dégradé la morale et les personnes au point que certains pensent désormais être indépendants quand ils ne dépendent plus que des subventions étatiques.

Le RSA, qui se révélera un RMI bis, les bénéficiaires n'étant pas plus actifs que les RMIstes ne sont insérés, n'est qu'une étape de cette logique folle.

Pour conclure, je suis fermement convaincu que, dans les arides comptes d'une nation, carrefour de tant de relations, on lit sa vie et que, dans les comptes de la France, on lit le je-m'en-foutisme, l'imprévoyance, l'insouciance, la servilité,le mépris, l'égoïsme, l'irresponsabilité, l'incompétence, la corruption des mœurs politiques.

La fameuse rupture tant promise devrait se lire dans les comptes publics, on ne l'y voit pas. C'est donc qu'elle n'existe pas. Tout le reste est pirouettes de saltimbanques pour épater les badauds.

mercredi, septembre 17, 2008

La crise financière actuelle (telle que je l'ai comprise)

Certains me demandent des explications sur la crise financière actuelle. Je ne suis pas sûr que d'avoir tout compris, mais je vais essayer d'expliquer ce que j'ai compris.

Des banques, essentiellement américaines mais également européennes, suisses et allemandes notamment, ont prêté à des gens ou à des organismes qui s'avèrent aujourd'hui incapables de rembourser, ou ont acheté des créances douteuses, ce qui revient au même.

C'est la menace qui pèse sur les banques depuis la nuit des temps (enfin, depuis que les banques existent en tout cas). Normalement, les banques trop aventureuses font faillite, ça fait la joie de leurs concurrents, le malheur de leurs clients et on passe à autre chose.

A quoi tient la crise actuelle ? Essentiellement à trois phénomènes, dont on remarquera que les deux premiers sont d'origine étatique ou para-étatique (1) :

> une époque de taux de crédits bas qui n'a pas peu contribué à gonfler la bulle immobilière

> les fameuses subprimes. Une loi américaine oblige les banques à faire des prêts immobiliers hypothécaires aux particuliers à qui le bon sens et la prudence bancaires déconseillent de prêter de l'argent, d'où l'expression «subprime», c'est-à-dire en-dessous de l'acheteur solvable dit «prime». On comprend bien l'intérêt démagogique d'une telle loi.

Comme les banquiers ne sont pas des philanthropes, il leur faut trois incitations pour vendre ces emprunts que l'instinct de survie devrait leur faire fuir : l'hypothèque, un taux d'intérêt plus élevé que le prime et la garantie des réassureurs para-publics Freddie Mac et Fanny Mae (organismes au statut batard : privés à garantie publique).

Quand tout va bien (c'est-à-dire quand le prix de l'immobilier monte) , tout va bien, les banquiers s'en mettent plein les poches. Mais quand tout va mal (quand le prix de l'immobilier descend), ça va très mal : les emprunteurs sont étranglés, les hypothèques ne suffisent plus à couvrir les créances et les réassureurs se trouvent surchargés de créances douteuses (c'est pourquoi l'Etat américain est venu au secours de Freddy et de Fanny : sans cette garantie, le marché immobilier s'écroulait).

Résumons où nous en sommes : taux d'intérêt bas + cupidité privée + loi démagogique + garantie publique = bulle spéculative gigantesque.

> c'est là qu'intervient le seul phénomène véritablement privé de toute cette affaire : les CDO (Collateralised Debt Obligations). Ces instruments financiers complexes ont permis de refiler un peu de créances subprime à tout le monde. Avantage théorique : on partage les profits et les risques. Inconvénient : c'est tellement compliqué qu'on ne sait plus qui à quoi, donc qui est exposé à quel risque. Bref, tout le monde est suspect d'avoir la chtouille.

Or, les banques et les assureurs passent leurs journées à se prêter de l'argent. Mais si vous souçonnez vos copains d'avoir la chtouille, c'est-à-dire de ne plus être solvables, vous arrêtez de leur prêter votre précieux argent. Et le système financier mondial, qui a besoin de cette circulation d'argent, est paralysé.

Les plus fragiles font face à une crise de liquidités : ils ne trouvent plus les prêts d'argent à court terme qui leur permettent d'attendre les rentrées à long terme.

Vous voyez aisément le cercle vicieux : les plus fragiles tombent, leurs créanciers souffrent de défauts de paiement, la défiance augmente, le prix des actifs baisse, l'activité ralentit, un nouveau cercle de plus fragiles tombe et ainsi de suite.

C'est pourquoi les banques centrales ont prêté à court terme de manière à maintenir cette circulation d'argent.

La crise s'arrêtera quand suffisamment de créances douteuses auront été annulées et que suffisamment de canards boiteux auront calanchés.

Bien entendu, cette crise n'est pas la fin du capitalisme, ni même du capitalisme financier, comme le proclament les imbéciles. Les entreprises sont globalement saines et point trop endettées, elles peuvent donc passer une période de ralentissement sans trop de casse.

Bien sûr, il y a toujours possiblité du cercle vicieux activité ralentie-faillites-chomage-activité ralentie, mais, pour l'instant, les autorités américaines ont remarquablement réagi à cette crise dont elles portent une grosse part de la responsabilté.

L'Europe et l'Asie sont inexistantes.

A la fin, les «strong hands» auront pris le contrôle des «weak hands»

(1) : désolé, ça met à mal la thèse à la mode comme quoi la crise actuelle serait due seulement aux folies du capitalisme dérégulé.

En lisant Commentaire : sur l'enseignement des sciences économiques au lycée

L'arrivée de Commentaire dans la boite aux lettres est toujours une joie.

Pour vous encourager à le lire voici un extrait :

Sur l'enseignement des sciences économiques au lycée


C'est accablant : programmes mal conçus, manuels approximatifs et entachés d'idéologie (1).

(1) : bien entendu, vous devinez de quelle idéologie il s'agit, pas de l'ultralibéralisme forcené. Meuh, non, l'Education nazionale n'est pas aux mains des gauchistes ;-)

mardi, septembre 16, 2008

Les pirates étatiques sont-ils plus dangereux que Barbe-Noire ? Pour Google, la réponse est positive

Can you make an algorithm walk the plank ?

De la primauté des films en noir et blanc

Cet article fait l'apologie des films en noir et blanc :

In living Black and White

J'entends des jeunes (et des moins jeunes) refuser de voir des films en N&B ou des films en VO sous-titrés, sans même évoquer les films muets. J'en suis à chaque fois chagriné pour eux, ils ne savent pas ce qu'ils ratent.

C'est là une faute de goût et ils aggravent en général leur cas (comme souvent les ignares) en arguant que c'est juste une question d'opinion, qu'il ne saurait y avoir de normes en la matière et patatati et patata, et ils concluent en général par un définitif «les films (en N&B) (sous-titrés) (muets) -rayez la mention inutile- , c'est prise de tête !», ce qui revient à dire «Je suis un abruti et j'en suis fier».

Heureusement, si certains sont intrinsèquement abrutis et irrécupérables, d'autres souffrent juste de ne pas avoir été initiés.

Attardons nous sur les films en N&B, puisque c'est le sujet de l'article que je vous mets en lien.

Le cinéma, comme la littérature, ce n'est pas la réalité. C'est une interprétation de la réalité, un jeu sur la réalité. Alors, qualifier les films de plus ou moins réalistes est une absurdité en soi.

Prenons l'exemple frappant des films de guerre.

Depuis Soldat Ryan de Spielberg, la mode est à «l'hyper réalisme», c'est à dire que l'on doit voir à l'écran des tonnes d'hémoglobine et des agonisants qui appellent leur mère. Mais la réalité de la guerre, c'est aussi que pour un soldat au front, il y en avait dix dans les bureaux. «L'hyper réalisme» commande donc de filmer pendant 90 % du temps des mecs qui s'emmerdent dans la paperasse.

Vous voyez bien que «l'hyper réalisme» est lui-même une interprétation, un choix artistique (avec plus ou moins de talent), et pas des meilleurs. «L'hyper réalisme» tente de compenser par le choc et le spectaculaire l'absence d'inspiration. Disons le tout net : Soldat Ryan est un navet (1).

Un des films de guerre les plus poignants est Un temps pour aimer, un temps pour mourir où la présence de la mort et du sang est limitée au strict minimum.

On peut continuer : Un homme de fer est autrement meilleur que Memphis Belle, Tant qu'il y aura des hommes que Pearl Harbor, etc ...

Une fois que l'on a bien compris que la course au réalisme cinématographique est vaine, la question couleur / NB se résout naturellement en une autre question : quels effets permet ou empêche la couleur / le N&B ?

Et là, il est clair que le N&B reprend l'avantage dans un large spectre de films. Imagine-t-on les films noirs (justement) en couleur ?

Essayez, ne serait-ce qu'un instant, de vous faire une idée de Casablanca en couleur !

Il se trouve que le N&B met en valeur les «gueules» et les décors spectaculaires ou, au contraire, très intimes, très restreints. Le N&B trie, épure les images et, par ce biais, les situations.

Il y a d'excellents films en couleur (j'adore Out of Africa, je suis un grand romantique). pourtant, si je fais un classement des dix films que je préfère, les films en noir et blanc dominent d'une courte tête.

Pour ce qui est des ignares que j'évoquais au début de l'article, ils ont certes une part de responsabilité (2), mais, à leur décharge, ils ne sont pas aidés par notre environnement, éducatif, artistique et social, qui privilégie le grossier et le barbare.

Mais il suffit de projeter quelques bons vieux films pour remettre dans le bon sens les idées de 90 % de la population.

(1) : ce que n'est pas la série télévisée Band of brothers qui a suivi. Plus encore que Soldat Ryan, Band of brothers a fait le choix de l'hyper réalisme. Mais ce choix a été poussé jusqu'au bout et a pris une valeur artistique : les situations et les personnages ont retrouvé en partie l'épaisseur et la complexité du réel.

(2) : personne n'est complètement victime de la société, tout le monde peut s'informer, se renseigner, faire preuve de curiosité.

Pour mes amis réchauffistes ou réchauffo-sceptiques

Comme indiqué précédemment, je pense pour l'instant avoir fait le tour de la question, mais il arrive que je tombe de temps en temps sur un article qui fournit une excellente synthèse comme celui-ci :

Réflexions d'un modélisateur


Suite aux récents débats de ce blog, vous trouverez la réponse à la question : que serait une preuve correcte, scientifiquement acceptable, d'un réchauffement climatique du au CO2 émis par l'homme ?

A ma connaissance, une telle preuve n'existe pas encore. Et comme les connaissances acquises récemment tendent à minorer le rôle du CO2 humain, il est possible qu'elle n'existe jamais pour la simple raison que le CO2 n'est peut-être pas la cause du réchauffement (d'ailleurs lui-même hypothétique).

lundi, septembre 15, 2008

De la vie des blogs en général, et de celui en particulier

Les blogs naissent, vivent et meurent.

La naissance se fait généralement dans l'enthousiasme.

L'enfance, la période de croissance, est la plus enrichissante : les commentateurs du blog se sélectionnent eux-mêmes, suivant qu'ils accrochent ou non.

Une certaine connivence se crée avec l'hôte qui en profite pour affiner sa réflexion.

Arrive une période de maturité, où l'hôte maitrise ses sujets, ses commentateurs savent en gros à quoi s'attendre et peuvent travailler les détails, aller chercher les erreurs dans les coins.

Vient ensuite le vieillissement : l'hôte radote, a du mal à innover, les commentateurs fidèles sont un peu moins fidèles.

Comme la nature a horreur du vide, les commentaires commencent à être monopolisés par des polémiques qui ne volent pas bien haut, provoqués par ceux que, à défaut d'un mot plus grossier, j'appellerai les importuns,qui souvent ne se donnent même pas la peine de comprendre la démarche de l'auteur.

Le boulot des importuns est très simple : zéro réflexion, il suffit de coller des slogans et de tout critiquer, si possible en tutoyant et avec un maximum d'impolitesse.

Cette facilité donne un grand avantage aux importuns : ne se fatiguant pas et ne doutant pas, ils tiennent plus longtemps. De plus, ils ont l'avantage du nombre (Une fois passeés les enthousiasmes humanistes de l'adolescence, il faut bien se résigner : nous sommes cernés par les cons).

On tient là me semble-t-il une règle intangible des blogs : un blog finit toujours par être envahi par les cons.

Murit alors chez l'hôte du blog la tentation de la censure suivant la ligne plus ou moins avouée «C'est mon blog, pas un forum pour permettre aux cons de exprimer leur connerie.» C'est ainsi que JD Merchet a carrément fermé son espace de commentaires, que JM Aphatie modère assez violemment et ainsi des autres.

A partir de là, deux routes s'ouvrent :

> la mort du blog. L'hôte, peiné, fatigué, par la bêtise humaine, se retire et passe à autre chose.

> la survie. L'hôte, ayant ajusté son niveau de censure, continue, tout de même désabusé. Les cons aussi finissent par se lasser.

vendredi, septembre 12, 2008

Mac Cain prend l'avantage ?

Comme vous le savez, je pronostique une courte victoire de John Mc Cain.

Voici le point de vue d'Ivan Rioufol :

Bloc-notes: pourquoi John McCain peut gagner

La France anti-Bush, ce bel effet de la pensée unique, plébiscite Barack Obama. Pourtant, cette semaine, John McCain devance le sémillant patricien dans les sondages. La désignation d’une mère de cinq enfants, Sarah Palin, 44 ans, comme colistière du vieux guerrier couturé a donné un coup de jeune à la révolution conservatrice entamée il y a près de trente ans avec Ronald Reagan. À ceux qui prophétisent l’épuisement de ce cycle, son apparent renouveau apporte un premier démenti.

Cependant, la combativité de Palin ne suffit pas à expliquer la progression de McCain. Sa propre vision du monde trouve aussi une adhésion populaire. " Levez-vous pour défendre notre pays de ses ennemis (…) Battez-vous à mes côtés ! ", a-t-il lancé à St Paul (Minnesota). S’il n’a pas prononcé son nom, il a remercié le "président de nous avoir dirigés au cours des jours sombres qui ont suivi la pire attaque de notre histoire sur le sol américain". C’est ce rappel d’un monde dangereux, décrit par George W. Bush après le 11 septembre 2001, qui pourrait amener un autre républicain à la Maison-Blanche, malgré la prétendue déroute des néoconservateurs. Et c’est cette même réalité conflictuelle qui, de la Russie revancharde aux djihadistes rêvant d’humilier l’Occident, commence à s’imposer à une Europe qui croyait que son pacifisme ne lui vaudrait jamais d’ennemis. Le souffle de la guerre réveille les consciences.

L’instabilité planétaire donne plus de crédibilité à McCain qu’à Obama, malgré le virage à droite du démocrate devenu défenseur de la peine de mort pour les violeurs d’enfants ou du port d’armes. Sa couleur de peau, son histoire, son brio ne suffisent plus à masquer l’imprécision de ses idées et le flou de son autoportrait en "citoyen du monde". Est-ce cet homme qui aime rappeler ses origines multiples, au point de parler de " sa foi musulmane" dans un récent lapsus, qu’attendent les Américains ? Peut-être vient-il trop tôt, s’il doit venir.

L’engouement pour Obama, partagé par 80 % des Français, témoigne d’un idéal pour un monde métissé, solidaire, pacifié. François Bayrou voit d’ailleurs un créneau dans cet "humanisme" de livre d’images. Cependant, la remontée de McCain, épaulé par une plébéienne qui se compare à "un pitbull avec du rouge à lèvres" témoigne également du désir de protection des peuples. L’utopie incarnée par l’élitiste démocrate pourrait ne pas suffire à le faire élire, le 4 novembre.


Où sont les guerriers ?

Forcément, la droite française n’a d’yeux que pour la star de la gauche américaine. Or elle devrait regarder les raisons du décollage de McCain. "Obama, c’est mon copain", déclare Nicolas Sarkozy. "Je me sens plus proche des valeurs qu’(il) incarne", ajoute Laurent Wauquiez, secrétaire d’État, qui a participé à la convention du Parti démocrate. Il n’est venu à l’idée d’aucun UMP, sauf erreur, de se rendre à la convention républicaine. Pourtant la révolution conservatrice se laisse voir aussi dans une France soucieuse de ses racines et de ses valeurs. La déroute du PS n’est pas étrangère à ce phénomène qui lui échappe. La réprobation qui a accueilli la publication, par Paris Match, des photos de talibans exhibant les dépouilles de nos soldats tués, ou les indignations que suscitent les empiétements de l’islam sur la laïcité, peuvent être vues comme des résistances au relativisme d’hier.

Pareillement, le pacifisme mou de la France antiguerre et antibu­shiste découvre les dangers que fait courir sa propre faiblesse, face aux unilatérales démonstrations de force d’ex-kagébistes russes et d’islamistes de la Reconquista. Derrière le monde irénique vanté par les faux gentils, toujours prêts aux accommodements, apparaissent les brutalités de ceux qui n’ont jamais compris que le rapport de forces. L’Europe bonne fille, qui réduit benoîtement ses budgets militaires, saura-t-elle résister longtemps aux provocations d’une Russie surarmée, qui a exclu mercredi l’envoi d’observateurs dans les républiques séparatistes de Géorgie, contredisant ainsi Nicolas Sarkozy ? La guerre soude l’Union européenne. Mais où sont les guerriers?


Benoît XVI à Paris

Le retour du religieux n’est pas le moindre des phénomènes qui accompagne cette révolution culturelle. La visite qu’entame aujourd’hui Benoît XVI, à Paris puis à Lourdes, rappelle que la France laïque, en quête d’identité, n’a pas renoncé à ses racines chrétiennes. La renaissance du Collège des Bernardins, où le Pape adressera son premier message cet après-midi, est symbolique d’une Église ayant décidé de se ressaisir en renouant avec son passé intellectuel. Construit à Paris au XIIIe siècle, cet édifice cistercien fut dès l’origine le lieu de réflexion et de recherche qu’il est à nouveau aujourd’hui, après avoir été détourné de sa vocation depuis la Révolution. Une résurrection, en somme.


Les complotistes du 11 Septembre

Sept ans après le 11 Septembre, les théories du complot "américano-sioniste" ne cessent de s’auto-alimenter par la rumeur et la propagande. Cette fois, c’est le comique Jean-Marie Bigard qui a soutenu qu’un missile américain avait détruit le Pentagone, et non un avion détourné. Mardi, il a "demandé pardon à tout le monde" pour cette sottise. Mais pour les révisionnistes, il est devenu victime du politiquement correct.

«On dépossède les jeunes soldats tombés du sens de leur mort»

Je ressentais très mal la visite en Afghanistan des familles des soldats tués dans l'embuscade. Cet interview sur le blog de JD Merchet met des mots sur mon malaise.

Les morts au combat appartiennent à la Nation. En re-privatisant cette mort par cette visite, on nie, on efface, le caractère public, plus grand qu'eux-mêmes, de leur sacrifice, bref, on lui ôte son sens.

Nous vivons vraiment dans une société qui marche sur la tête.

Un entretien avec la sociologue Danièle Hervieu-Léger, à propos de la visite des familles de soldtats en Afghanistan

Dix-sept membres des familles de soldats français tués en Afghanisan, lors de l’embuscade du 18 août ou lors d’opérations précédentes, sont aujourd'hui à Kaboul, accompagnées par le ministre de la Défense Hervé Morin. Ce déplacement, très critiqué dans le milieu militaire, suscite de nombreuses interrogations. Danièle Hervieu-Léger, présidente de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS), sociologue des religions, a été membre de la commission sur le Livre blanc de la Défense. Elle nous livre son analyse .

Comment réagissez-vous à ce déplacement très inhabituel ?

On peut comprendre le désir des familles de se faire une idée plus concrète de ce qui a pu se passer là-bas, de l’environnement dans lequel vivaient leurs enfants, des circonstances de leur mort. L'Etat, en organisant ce déplacement, soutient la demande légitime des parents de pouvoir inscrire cette mort dans la biographie de leurs enfants et de leurs familles, et donc de lui donner son sens privé. Mais la République entérine, dans le même mouvement, la privatisation de la mort de ses soldats au combat. La question est donc de savoir quelle place occupe cette privatisation dans le processus beaucoup plus large, qui touche notre société, d’effacement du sens de la mort au combat.

Notre pays ne sait donc plus comment parler des soldats qui meurent à la guerre?

Ce qui se passe autour de cet évènement dramatique, c’est bien une logique de privatisation. Pour une part, le traitement médiatique de l'évènement a contribué a une transformation de ces morts au combat en un fait divers dramatique. Un fait divers, c’est un fait privé rendu public par sa communication médiatique. Lorsque Paris Match a publié un dossier sur les soldats tombés dans l’embuscade [Une semaine avant le reportage avec les talibans, ndlr.] j'ai été frappée par le fait que la manière dont le sujet était traité n’aurait pas substantiellement différente si ces dix jeunes gens avaient perdu la vie dans un accident de leur autocar ! La spécificité de la mort au combat disparaissait complètement derrière une logique de fait divers (ce qui ne signifie absolument pas la minorisation du caractère tragique de l'évènement, mais situe celui-ci sur un autre plan). Mais ne tapons pas sur les médias : ils ne sont que la caisse d’amplification d'un phénomène plus profond.

Comment expliquer cette privatisation de la mort des soldats ?

Une mort au combat n’est pas une mort ordinaire, fût-elle dramatique. Elle ne peut se comprendre - elle ne prend son sens que si elle est inscrite dans un grand récit. Dans l'Antiquité, les morts au combat étaient des Héros, qui sortaient de l'humanité commune. En France, la mort au combat s'est longtemps inscrite dans le grand récit national dont Valmy est l'emblème: celui des citoyens qui donnent leur vie pour la nation. On peut avoir des sentiments très divers à l'égard de ce récit, mais le fait est qu'il a fonctionné durablement. Or on observe aujourd'hui, et particulièrement s'agissant de ces opérations militaires lointaines, une impuissance produire ce sens collectif . Quel récit collectif sommes nous capable de mettre en avant qui puisse donner un sens au sacrifice de ces jeunes ? Et l'absence d'un tel récit, qui va au-delà du sens subjectif que chacun d'eux pouvait donner à l'éventualité de mourir au combat et que chacun assumait en s'engageant dans l'armée, on dépossède les jeunes soldats tombés du sens de leur mort.

Le chef de l’Etat a pourtant invoqué la lutte contre le terrorisme ?

Oui, mais la référence à l'ennemi qu'on combat ne suffit pas. Il faut savoir quelles fins positives on poursuit en combattant. Dès lors qu'on s'engage dans la guerre, il faut un horizon utopique pour donner sens à la perte de la vie de ces jeunes gens de vingt ans. On tient bien un discours sur la liberté, mais il est tellement abstrait et tellement démenti par la réalité du monde et en particulier par l'enlisement d'autres guerres menées soit-disant au nom de la liberté qu’il ne parvient pas à prendre corps dans la conscience collective.

Dans les travaux du Livre blanc sur la défense, la question de la «résilience» a été beaucoup discutée. A cet égard, quel regard portez -vous sur l’attitude des autorités françaises dans la gestion des morts en Afghanistan ?

La résilience, c’est la capacité - individuelle ou collective - de résister et de rebondir dans une situation dramatique. Elle n’est pas, comme le disent certains, une culture de la peur, bien au contraire. Cette résilience est, là encore, directement indexée sur la capacité à produire un récit qui donne un sens à l'évènement. Elle implique la mobilisation de toutes sortes de ressources, mais elle a également partie liée avec le symbolique. Une question qui se pose est celle des gestes qui permettent de produire ce sens partagé de l'évènement, qui permette d'assumer ensemble la mort des soldats ? On touche là à la question du rituel. Le rituel permet de produire du sens collectif, parce que en inscrivant les individus (ici, les jeunes soldats et chaque citoyen ) dans une lignée commune, qui est bien plus que le simple agrégat des individus qui se rassemble pour le célébrer, et qui incorpore les vivants et les morts, il permet une affirmation de la continuité de notre destin commun. La République, qui repose sur l'idée d'un consentement renouvelé en permanence de l'adhésion de chaque individu à la communauté nationale, peine toujours à mettre en place des rites qui lui soient propres. Et elle a une pente spontanée à réendosser les rituels religieux (c'est à dire catholiques romains) qui sont à sa disposition culturelle. On l'a vu très clairement dans la cérémonie aux Invalides. Cette vacuité de la ritualité publique ouvre logiquement la voie à une compensation compassionnelle, qui est une logique de l’émotion et de l’individu. Celle-ci a sa place et elle est attendue dans notre société d'individus, mais elle ne suffit pas à produire du sens partagé, donc du lien social.

Suis-je de mauvaise foi à propos du réchauffisme ?

Certains m'accusent de mauvaise foi car ils confondent des affirmations politiques ou commerciales avec des preuves scientifiques.

S'agissant de la politique du réchauffisme, j'ai maintes fois affirmé mon opinion : l'homme s'est toujours adapté au climat, il n'y a pas de raison que ça change. Mieux vaut guérir que prévenir : c'est moins couteux et plus sûr.

Quant à la science, il est très clair qu'elle n'est pas mûre sur le sujet. Il n'y a de faits solidement établis ni sur les mesures (1), ni sur les mécanismes (2), ni sur les prédictions (3), ni sur les conséquences (4).

De plus, la science, sur un sujet si complexe, ce n'est pas un feuilleton télé où l'on voit le détective s'exclamer «Bon sang, mais c'est bien sûr !».

L'apparition d'un Einstein du climat est toujours possible. Cependant, il est plus probable que la science climatique continuera à progresser à vitesse d'escargot.

Il n'y a donc pas le feu au lac.

(1) : certains pensent que le réchauffement récemment mesuré est du à la disparition de nombreuses stations meteo en zones rurales (on sait que les zones urbaines sont plus chaudes), notamment ex-URSS. Les mêmes divergences se retrouvent dans les histoires de fonte des glaces.

(2) : l'influence du soleil donne lieu à des batailles de chiffoniers. Quant à l'influence des nuages, pour une fois qu'il y a accord, c'est pour dire qu'on est dans le brouillard et qu'il faut y travailler.

(3) : au sein de la communauté réchauffiste, les prédictions varient du simple au quadruple, sans compter ceux qui n'adhèrent pas au réchauffisme et qui redoutent un refroidissement.

(4) : là, c'est la purée de pois totale. Il faut être armé d'un culot absolument monstrueux pour affirmer que nous sommes capables de dresser un tableau des conséquences d'un éventuel réchauffement climatique. Bien sûr, nous connaissons les effets sur la nature à l'échelle géologique de par les variations passées, mais, justement, nous ne sommes pas à l'échelle géologique. De plus, la capacité d'adaptation des hommes est complètement négligée (comme dans toutes les thèses malthusiennes).

Résilience de l'économie américaine (par Guy Sorman)

Depuis la débâcle du crédit hypothécaire aux Etats-Unis, on guette la récession américaine : mais la récession n’arrive pas, la croissance semble même redémarrer. Ce n’est pas en Amérique que l’économie a calé, mais en Europe. Par-delà la conjoncture toujours changeante, c’est le trend qui importe. Comment comprendre ce dynamisme américain et cette stagnation européenne ? Il faut pour cela remonter loin dans l’histoire. En 1820 s’est produit un événement considérable, passé inaperçu à l’époque : cette année-là, le revenu moyen par habitant des Américains a dépassé le revenu moyen des Européens. Ce retard, depuis lors, n’a jamais été rattrapé. Les raisons profondes en sont enracinées dans nos deux civilisations, absolument distinctes de part et d’autre de l’Atlantique.

Aux Etats-Unis, société démocratique et égalitaire, les producteurs ont d’emblée cherché à satisfaire les goûts homogènes du peuple : la standardisation et la mécanisation ont été les réponses économiques à cette exigence politique. Une passion démocratique qui se perpétue aujourd’hui par les « chaînes ». Elle perdure aussi dans la « nouvelle économie » : sur Google, les sites sont classés non par des experts mais en fonction de leur fréquentation. La « sagesse des foules » l’emporte sur les choix des experts. Car l’Europe, à l’inverse, fut et elle reste le continent des élites, des aristocrates et des experts. Naguère dans l’Europe aristocratique, l’excellence au service des élites guidait les entrepreneurs : l’objet était parfait et pas standardisé. Cette Europe est restée le continent de l’excellence et du luxe, et de la conservation plus que de l’innovation.

Spontanément, l’Européen préfère le passé ; l’Américain penche vers l’innovation, le risque, l’inconnu. Ce qui est nouveau est aux Etats-Unis toujours accueilli avec enthousiasme et avec méfiance en Europe. Dans le jargon économique contemporain, ce goût de l’innovation s’appelle le principe de la création destructrice. Aux Etats-Unis, la rage de l’innovation ne cesse de remplacer du vieux par du neuf : l’économie croît ainsi par bonds et souvent de bulle spéculative en bulle spéculative.

Au début du XXe siècle, les Etats-Unis comptaient trois mille constructeurs automobiles : il en reste deux. En 2000, Silicon Valley comptait 5 000 entreprises de logiciels internet ; 80% ont disparu. Ce que l’on appelle la crise des subprimes suit exactement la même logique. Des milliers de banques ont innové – les dérivés, les subprimes – des centaines vont disparaître. Mais, après l’éclatement de ces bulles, un plus grand nombre d’Américains roulent en voiture, plus ont accès à internet et il est certain qu’un plus grand nombre resteront propriétaires malgré la crise des subprimes.

Le bilan de la destruction créatrice s’avère donc positif : c’est bien la prise de risque, la passion de l’innovation et le marché de masse qui tirent l’économie américaine. Il y faut aussi beaucoup de Dollars, mais il n’en manque jamais : crise de subprimes ou baisse du Dollar, les capitaux affluent toujours aux Etats-Unis. Faute d’alternative ? Pour alimenter ce Léviathan économique, les Etats-Unis offrent toujours la sécurité juridique et les perspectives d’enrichissement que l’on ne trouve pas ailleurs. Il faut aussi de l’intelligence car l’innovation aux Etats-Unis naît du concubinage, inconnu ou suspect en Europe, entre les universités et l’industrie : un couple où chacun trouve ses comptes. L’Etat américain n’est pas absent pour autant, pas comme moteur de la croissance mais comme assureur du dernier recours ou infirmier social.

Cette épopée économique américaine est culturellement si distincte de l’Europe qu’elle ne peut pas être considérée comme un modèle exportable : on ne voit donc pas qui menacerait le leadership américain, ni l’Europe, ni les Chinois, ni Obama. À l’exception de la crise de 1930 qui avait conduit Franklin Roosevelt à socialiser l’économie et à prolonger la crise, aucune élection ne change radicalement le modèle américain. Nul ne conteste ni le capitalisme ni la Banque Fédérale qui veille à la stabilité des prix. Il est significatif qu’il n’y ait pas aux Etats-Unis, de ministre de l’Economie mais seulement un secrétaire d’Etat au Trésor. Mais il reste possible d’esquiver le débat : Nicolas Sarkozy a demandé à deux économistes prix Nobel, Amyarta Sen (Anglo-Indien) et Joseph Stiglitz (un Américain altermondialiste) de concevoir un index du bien-être qui serait distinct de l’index économique classique, la PIB. Cette tentative a eu de nombreux précédents, en particulier à l’ONU où l’on n’aime pas trop le capitalisme américain : hélas ! il est toujours apparu que le dynamisme économique rendait le peuple plus heureux que la stagnation. La croissance ne résout pas tous les problèmes mais la stagnation n’en résout aucun.

jeudi, septembre 11, 2008

Réchauffisme, principe de précaution et fraises au vinaigre

Le réchauffisme est un des sujets qui attirent le plus de commentaires sur ce blog.

En déça de tous les arguments rationnels qui passent à droite et à gauche, je me sens étranger au réchauffisme. Ce n'est qu'un sentiment mais il compte aussi.

Toute cette hystérie me fait doucement rigoler. Peut-être à cause d'un certain fatalisme et, malgré tout mon orgueil, d'une certaine humilité.

Les hommes sont de passage sur cette terre, et bien petits, bien impuissants. Alors, quand on vient me raconter qu'ils sont capables de modifier le climat et qu'ils ont une responsabilité globale vis-à-vis de la terre, comme si il s'agissait d'un enfant, ça ne provoque chez moi qu'une moue dubitative.

J'ai envie de répondre quelque chose comme «Certes, certes, sauvons la planète, mais ne serait-il pas plus urgent de sauver les enfants qui meurent du paludisme, de la faim, de la guerre ? On ne peut pas tout faire, et sauver la planète ne vient pas au premier rang de mes priorités.»

De même, le principe de précaution se heurte à mon fatalisme : l'homme est mortel, et croire qu'il pourrait vivre et, qui plus est, innover et améliorer sa vie, sans prendre de risques me semble une attitude puéril, celle d'un enfant qui n'est pas encore sorti de son fantasme de toute-puissance, qui croit encore qu'il peut concilier les contraires, avoir le beurre, l'argent du beurre et le sourire de la crémière (et retourner au chaud dans le ventre de maman, là où il n'y a ni risques ni décisions à prendre).

Finalement, je comprends que l'âge du libéralisme fut les dix-huitième et dix-neuvième siècles : les hommes étaient sortis de leur résignation millénaire, mais ils n'étaient pas encore assez abrutis pour se croire immortels, bref ils étaient parés pour se comporter en hommes libres et responsables.

Et les fraises au vinaigre ? Cette recette de fraises, qui consiste à les servir avec un caramel de vinaigre balsamique, existe depuis la Renaissance, certains disent même depuis l'Antiquité.

mercredi, septembre 10, 2008

Qui a tué George Mandel ? (F. Delpla)

J'aime bien les thèses de François Delpla. C'est donc avec plaisir que j'ai lu son dernier livre en date.

Mais le sujet est si circonscrit, si précis, que cela crée à mon sens deux inconvénients :

> l'auteur est obligé de faire beaucoup de conjectures et d'hypothèses pour boucher les trous de la documentation. Bien souvent, il interprète des traces. Il en tire des idées certes intéressantes, mais on sent que le sujet n'est pas totalement mûr, qu'il faudra que d'autres historiens y travaillent pour apporter un autre angle.

> les lecteurs moyens, dont je suis, qui s'intéressent à la question sans être spécialistes, risquent de se perdre dans les détails

voici comment je vous suggère d'aborder les choses : lisez d'abord un des livres de François Delpla sur Hitler afin de comprendre sa vision du personnage.

La thèse de François Delpla était qu'Adolf Hitler est maléfique, mais également intelligent et redoutablement manoeuvrier et que, jusqu'en mai 1940 et sa collision avec Churchill, il a surclassé ses adversaires et les a amenés là où il voulait qu'ils soient.

Une fois que vous aurez bien compris les méthodes de manipulation hitleriennes, il vous sera plus aisé de lire le présent ouvrage.

Eventuel réchauffement climatique : enfin un début de compréhension de l'effet de serre

Effet de serre saturé

Pour ceux que la science intéresse (j'entends par cette expression exclure tous ceux qui n'y cherchent qu'une justification de leurs fantasmes), je vous ai mis en lien un article qui éclaire certains mécanismes de base de l'effet de serre (1).

L'effet de serre échappe pour le moment à la compréhension sur bien des aspects fondamentaux (ceux qui nous racontent comme Al Gore que «the science is settled» sont tout simplement des escrocs et des menteurs).

Cet article apporte une petite pierre (notamment dans le jardin des réchauffistes).

Je ne suis pas étonné que le rôle du CO2 soit minimisé : j'ai toujours été mal à l'aise pour réconcilier, d'un coté, le fait que tous, mêmes les réchauffistes les plus ardents, s'accordaient à considérer le CO2 comme un gaz à effet de serre (2) mineur par rapport à l'eau, et, de l'autre coté, la thèse comme quoi les variations de CO2 auraient un impact majeur sur le climat.

J'ai bien lu des tentatives de réconciliation, mais soit elles m'ont semblé fumeuses, soit je ne les ai pas comprises (3).

Je suis très perplexe sur notre capacité à isoler l'influence humaine sur le climat et le sujet ne présente à mes yeux que peu d'intérêt pratique, puisque l'homme s'adapte spontanément au climat.

Par contre, je suis très content de constater que, malgré les pollutions médiatiques, politiques et conformistes, il reste des scientifiques qui travaillent en toute honnêteté et non pour dire ce qui plait pour recevoir des subventions.

(1) : cette expression me gêne beaucoup car dans la plupart des cas où elle est employée, elle est impropre.

(2) : quelle que soit la définition qu'on donne de l'effet de serre

(3) : bien sûr, dans les explications que je n'ai pas comprises (si je comprenais tout, je serais climatologue !), il se peut qu'il y ait la bonne.

mardi, septembre 09, 2008

Ca se passe de commentaires

La charge de la dette devrait dépasser les prévisions

PARIS (Reuters) - La charge de la dette de l'Etat français dépassera cette année de trois à quatre milliards d'euros le montant prévu en loi de finances initiale, déclare le rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale, Gilles Carrez, dans un entretien publié dans l'édition de mercredi des Echos.

La commission des Finances de l'Assemblée estime ainsi que le coût de la dette atteindra 44,6 milliards d'euros contre 41,1 milliards prévus dans le budget 2008, en raison notamment de la hausse de l'inflation [explication technique : habituellement, l'inflation soulage la dette. Malheureusement, des technocrates très intelligents, sans ça ils ne seraient pas technocrates, ont cru d'émettre de la dette indexée sur l'inflation en faisant l'hypothèse que la période de stabilité des prix serait éternelle (toujours cette mentalité «après moi, le déluge»)].

"C'est du jamais vu !", déclare le député UMP. "Pour donner une idée, cela équivaut à plus du double du coût du Revenu de solidarité active" (RSA), ajoute-t-il.

L'intégration dans le calcul du "bouclier fiscal" de la taxe sur les revenus du capital qui doit financer le RSA représente un coût d'environ 40 millions d'euros, estime-t-il par ailleurs.

A quelques jours de la présentation du projet de budget pour 2009, fin septembre, Gilles Carrez demande au gouvernement de "protéger" les recettes de l'Etat et exclut la création d'un prêt écologique à taux zéro au coût non maîtrisé.

La guerre aérienne comme si vous y étiez (enfin ... Presque)

Subprime : marché accusé, État coupable

Vincent Bénard, président de l'Institut Hayek de Bruxelles, auteur de «Le Logement, crise publique, remèdes privés» (Romillat), revient sur la crise du subprime et se fait l'avocat de l'économie libre alors que Freddie Mac et Fannie Mae, deux organismes de refinancement du crédit hypothécaire, sont mis sous tutelle gouvernementale aux États-Unis.


La cause est entendue pour nombre d'observateurs : la crise financière des subprime est la conséquence de la folie des marchés et montre les limites d'une finance ultralibérale. Et de réclamer d'urgence plus de régulation publique des institutions financières.

Le libéralisme a une fois de plus bon dos, car il n'existe pas de marché plus perverti par les interventions de l'État fédéral que celui du crédit hypothécaire aux États-Unis.

Les deux institutions joliment surnommées Fannie Mae (FNMA) et Freddie Mac (FHLMC) portent une lourde responsabilité dans les dérives financières du système bancaire américain. La première d'entre elles fut tout d'abord une agence gouvernementale, créée en 1938 par l'Administration Roosevelt, pour émettre des obligations à bas taux du fait de leur garantie fédérale, lesquelles alimentaient de liquidités un marché de prêts immobiliers à taux réduits accessibles aux familles les moins aisées.

En 1968, l'Administration Johnson, s'avisant que les engagements de Fannie Mae garantis par l'État prenaient de l'ampleur et obéraient la capacité d'emprunt d'un Trésor empêtré dans le financement de la guerre du Vietnam, organisa sa privatisation, puis le gouvernement Nixon créa en 1970 Freddie Mac, afin d'organiser un semblant de concurrence sur ce marché du refinancement du crédit hypothécaire.

Cette histoire a donné à Fannie Mae et Freddie Mac un statut hybride de Governement Sponsored Enterprise (GSE), privées, mais légalement tenues de s'occuper exclusivement de refinancement de prêts immobiliers sous contrôle de l'État fédéral, en contrepartie d'avantages fiscaux. Pis même, bien qu'étant officiellement privés, les deux établissements ont toujours été considérés, du fait de leur tutelle publique et de leur rôle social, comme bénéficiant d'une garantie implicite du Trésor américain !

Bénéfices privatisés, pertes collectivisées : Un tel cocktail risquait de pousser les dirigeants des GSE à prendre des risques excessifs, si la tutelle de l'État se montrait défaillante. C'est exactement ce qui allait se passer dans les années 1990. Voilà qui rappelle un célèbre scandale bancaire hexagonal…

La tutelle de ces deux entreprises fut transférée au Département américain du logement (HUD) en 1992, car celui-ci voulait agir sur les prêts financés par les GSE pour satisfaire un objectif majeur de tout politicien qui se respecte outre-Atlantique : l'augmentation du taux de propriétaires de logement parmi les populations à faible revenu, et notamment les minorités.

Aussi le HUD a-t-il obligé Fannie Mae et Freddie Mac à augmenter tant le volume que la proportion de crédits subprime (jusqu'à 56 %, en 2004) refinancés. Pire, un des patrons du HUD, craignant que l'affichage des risques pris par les deux GSE pour se conformer à ces règles conduise les marchés à leur retirer leur confiance, résolut le problème en les exemptant en toute légalité de dévoiler trop en détail leurs expositions.

Aussi Fannie Mae et Freddie Mac ont refinancé, à l'aide de produits obligataires de plus en plus complexes, plus de 5 000 milliards de dollars de crédits, soit 40 % des prêts immobiliers américains, dont plus de la moitié de crédits subprime, alors qu'elles ne disposaient pas de fonds propres permettant de s'engager sur de tels montants. Résultat, les banques émettrices de ces crédits ont pu ne pas se montrer trop regardantes sur les prêts qu'elles consentaient, puisqu'il y avait deux refinanceurs à la bourse grande ouverte derrière. La banque Countrywide, dont la politique de prêts aux familles modestes est aujourd'hui vilipendée, était encore il y a trois ans encensée par les dirigeants de Fannie Mae, pour son audace en matière d'octroi de crédits subprime.

Mais le retournement de conjoncture économique a multiplié les défaillances d'emprunteurs, les deux GSE sont donc menacées de ne plus pouvoir servir les intérêts de leurs obligations, ce qui, par contagion, pourrait affecter tous les investisseurs institutionnels. Du coup, l'État organise dans l'urgence leur sauvetage, lequel devrait coûter plusieurs centaines de milliards de dollars aux contribuables.

Une seconde intervention publique a amplifié les excès bancaires dans l'octroi de crédits à des familles insolvables. Dans les années 1990, des études révélèrent que les refus de prêts aux membres des communautés noires et hispaniques étaient un peu plus nombreux que vis-à-vis des Blancs ou des Asiatiques, quand bien même ces refus ne concernaient qu'une demande de prêt sur quatre. Certains lobbies y virent non le reflet logique de la moindre richesse de ces communautés, mais la preuve d'un prétendu racisme du monde financier.

Une loi antidiscriminatoire de 1977, le Community Reinvestment Act (CRA), fut donc renforcée en 1995 pour rendre plus ardu le refus de crédit aux minorités par les banques, sous peine de sanctions renforcées. Celles-ci durent donc abandonner partiellement le rôle prudentiel qu'elles jouent habituellement lorsqu'elles refusent un prêt à une personne objectivement peu solvable. Pas si grave : Fannie Mae et Freddie Mac étaient là pour refinancer ces prêts délicats !

Aujourd'hui, nombre d'experts estiment que sans le CRA, sans les GSE, l'accès à la propriété des minorités se serait tout de même développé, moins rapidement mais plus sainement. En voulant accélérer artificiellement ce que l'économie libre accomplissait à son rythme, c'est l'État, tantôt régulateur, tantôt législateur, qui a poussé à l'irresponsabilité les acteurs de la chaîne du crédit, provoqué une crise financière grave, et acculé à la faillite nombre de familles qu'il prétendait aider.

Le principe de précaution en action : certes il est obscurantiste, mais quelle bonne pub !

Le principe de précaution revient à dire «face à l'inconnu, laissons gouverner notre peur la plus intense».

Aujourd'hui, sans rien savoir de solide (1), certains ont peur du réchauffement climatique. Il faudrait donc, au nom du trop fameux principe de précaution, tenter (bon courage !) de lutter contre le réchauffement climatique.

Si demain, la peur change et qu'on redoute, toujours sans rien savoir de solide (1), un refroidissement, il faudra, au nom du principe de précaution, lutter avec tout autant d'entrain contre le refroidissement ?

Absurde, n'est-ce pas ? Cela s'appelle le principe de précaution, qu'on aurait pu appeler «le pouvoir aux peureux les plus hystériques».

Bon certes, il est idiot, mais comme on n'a jamais manqué d'idiots et de démagogues pour les courtiser, il a foule de supporters.

Par contre, quelle merveille médiatique ! Lisez l'article ci-dessous : deux physiciens parfaitement inconnus ont réussi à avoir leurs noms dans tous les journaux grâce au principe de précaution. Elle est pas belle, la vie ?

(1) : par définition, le principe de précaution s'applique quand on ne sait rien de solide, c'est d'ailleurs ce qui le rend stupide. Et quand on sait, nul besoin de principe nouveau : le principe de responsabilité se trouvait déjà dans le droit romain il y a deux mille ans.

Le LHC ne menace pas la Terre

Deux physiciens ont demandé la fermeture immédiate du site, par mesure de précaution.

Faut-il avoir peur du LHC ? Faut-il craindre qu'un minuscule trou noir n'engloutisse la Terre en une fraction de seconde lorsque l'imposant accélérateur souterrain édifié à la frontière franco-suisse tournera à plein régime ?

La question a été posée il y a quelques mois par Walter Wagner et Luis Sancho, un Américain et un Espagnol qui ont demandé devant un tribunal de Hawaï la fermeture immédiate du LHC, en invoquant le principe de précaution.

Les trous noirs sont des objets cosmiques particulièrement voraces, dont l'existence a été prédite par le célèbre physicien britannique Stephen Hawking, et qui ont la redoutable particularité de dévorer, sans espoir de retour, tout ce qui passe dans leur très puissant champ gravitationnel. En théorie, la question posée par Wagner et Sancho est légitime vu les niveaux d'énergie exceptionnels qui vont être obtenus dans l'anneau souterrain de 27 kilomètres de circonférence. Mais en pratique sa probabilité d'occurrence est tout de même très proche de zéro.

Pour rassurer les lecteurs que cela inquiète, il faut savoir que, depuis quatre milliards d'an­nées, la Terre est quotidiennement bombardée par des particules cosmiques infiniment plus énergétiques que celles qui vont être produites au Cern. Sans qu'aucun trou noir ne l'ait jamais engloutie…

lundi, septembre 08, 2008

Not a good day to die (Sean Naylor)

Suite à l'embuscade en Afghanistan, j'ai lu ce livre qui trainait dans ma bibliothèque.

Il raconte le demi-échec de l'opération Anaconda en 2002, attaque de la vallée afghane de Shahikot, à la limite du Pakistan.

Al Qaida avait trouvé refuge dans ce coin, dont peut-être quelques leaders.

Les circonstances :

> guerre en Afghanistan supposée finissante, tous les hauts esprits déjà tournés vers l'Irak.

L'organisation :

> merdique au possible.

La guerre étant supposée sur le point se terminer, chaque unité a voulu participer a ce qui semblait le dernier combat. Cela a donné un enchevêtrement de corps et de responsabilités absolument néfaste.

Tout au long de la bataille, seule la Task Force Dagger, composée de forces spéciales, installée depuis quelques temps dans la région a eu une vision claire de la situation et a pris de bonnes initiatives. Malheureusement, elle n'a pas été écoutée autant qu'on aurait du. Comme quoi l'implantation locale n'est pas vaine.

Le plan :

> les effectifs qaidistes étaient estimés à 200, mêlés à des milliers de villageois. Le plan était donc d'encercler la vallée en laissant un échappatoire de manière à trier les talibans des civils à la sortie de la vallée.

La réalité :

> les planificateurs de ces unités disparates ont été si étonnés d'arriver à travailler ensemble qu'ils en ont oublié les fondamentaux, notamment les renseignements. Les rapports de la CIA, indiquant que les talibans étaient nombreux et dans les hauteurs, étaient contradictoires avec l'hypothèse de base. Ils ont été négligés.

> Quand les troupes d'assaut (environ 400 hommes) ont débarqué de leurs hélicos dans les villages de la vallée, il n'y avait plus un civil. Par contre, des centaines de talibans perchés sur les hauteurs, comme prévu par la CIA, ont canardé au mortier, au RPG, à la mitrailleuse et et même au canon.

Les Américains ont passé la journée le nez dans la boue à ne pas pouvoir bouger le petit doigt.

C'est miracle qu'il n'y ait eu que peu de victimes. Ils ont été sauvés par le manque d'habilité au tir des talibans et par les hélicoptères Apaches (car, tant quà planifier comme des cochons, les Américains ont négligé l'artillerie (1) et le CAS, à tel point que, exceptionnellement, les djihadistes avaient la supériorité matérielle).

Comme quoi un peu d'intelligence fait beaucoup à la guerre : la TF Dagger des commandos Delta avec une dizaine d'hommes infiltrés sur trois points culminants a dirigé les feux et a fait plus que les centaines de fantassins bloqués au fond de la vallée.

Le résultat de cette efficacité est que le commandant de la TF Dagger a été mis de coté sous prétexte d'unité de commandement, il n'a plus été informé des intentions des autres unités alors que, grâce à ces observateurs, c'était lui qui avait la meilleure image de la situation. C'est un comportement bureaucratique classique : le petit malin qui se distingue est poussé sur la touche par la coalition des médiocres. Malheureusement, à la guerre, c'est mortel.

Une décision si peu judicieuse ne pouvait que finir en drame : un Chinook a atterri directement sur une position djihadiste (pour éviter aux SEALs d'avoir à marcher (2) ), ce que Dagger avait formellement déconseillé. Et le Chinook s'est fait hacher. Les gens de Dagger, qui ont tout vu, n'avaient pas été mis au courant des nouvelles fréquences satellite, pour qu'ils cessent de se mêler des affaires des autres. Ils n'ont donc pas pu arrêter le drame qui a fait qu'un deuxième Chinook s'est fait plomber en essayant de secourir le premier, alors que les hommes de Dagger, voyant distinctement les talibans, savaient qu'une grosse connerie se déroulait sous leurs yeux.

Au cours des jours qui ont suivi, les Américains ont réussi à reprendre le dessus, grâce à leur matériel et à leur formation, mais la victoire était moralement talibane.

Autant cette bataille est à la gloire des troufions et des sous-off américains, qui se sont montrés exemplaires, autant le commandement américain a donné à cette occasion une impression d'amateurisme et de laissez-aller. C'est bien connu : le sang des bidasses paye l'incompétence des généraux (3).

La leçon tactique ? Etonamment, elle ressemble beaucoup à celle de la récente embuscade contre les Français : des principes fondamentaux ont été ignorés et ce sont quasiment les mêmes.

Connais ton ennemi

La sueur épargne le sang

Qui tient les hauts tient les bas.

Pas un pas sans appui

Sur le plan stratégique, on peut tirer deux leçons en apparence contradictoires :

> les Américains sont militairement invincibles : voilà une bataille mal organisée, mal planifiée et mal dirigée où les Américains essuient finalement peu de pertes (8 morts) et chassent l'ennemi en lui infligeant des pertes substantielles (une centaine de morts ?).

> les djihadistes sont moralement invincibles : la disportion des forces est si grande, que le simple fait d'infliger des pertes à leurs adversaires suffit à leur donner une victoire morale.

(1) : c'était la première bataille de l'armée américaine sans artillerie depuis la Nouvelle-Guinée en 1944.

(2) : à quelques exceptions près, les SEALs sont loin de s'être couverts de gloire dans cette opération. Que faisaient des commandos de marine à mille kilomètres de la mer ? Débarquer sur un point haut pour ne pas avoir à marcher, alors que de nombreux indices permettaient de supposer que l'ennemi était déjà sur place, est d'une légéreté confondante. Il semble que l'officier qui a pris cette décision ait été mis au placard.

(3) : les généraux impliqués ont tous disparu de la circulation dans les mois qui ont suivi, sauf un, Moseley, qui est maintenant chef d'EM de l'USAF. Faire des conneries n'empêche pas visiblement pas les belles carrières quand on est un habile manoeuvrier des couloirs du Pentagone.

dimanche, septembre 07, 2008

Deux avis cinglants sur le RSA

Un sur le système même :

Fabra et le RSA


Un sur le financement :

Marseille et le RSA

Sarkozy nous avait promis la rupture, nous avons une parfaite continuité avec les trente dernières années de mal gouvernance.

C'est marrant cet acharnement des politiciens français à persévérer dans des politiques qui ne peuvent que mener à la banqueroute de l'Etat et à la ruine du pays.

En attendant, comme dit Charles Gave, la veille de son effondrement, l'URSS fonctionnait encore comme en 1917.

samedi, septembre 06, 2008

70 000 hommes

70 000 hommes, c'est l'effectif que l'armée russe a déployé dans la guerre en Georgie.

Pour vous donner un ordre de grandeur, c'est la moitié de l'effectif total de l'armée de terre française et trois fois l'effectif projetable.

On notera également que les Russes ont agi avec une vitesse et une capacité d'initiative qu'on ne leur soupçonnait pas (et une brutalité qu'on leur connaissait bien).

Je me demande si, forcée par des circonstances faciles à imaginer, la France serait capable de mener une opération similaire (de moindre importance, proportionnée à la taille du pays). La réponse est, hélas, négative.

Ca chauffe ...

Les progrès de la climatologie étant très lents, je ne vous parlerai plus de climat qu'à l'équinoxe d'automne et à celle de printemps, sauf découverte fracassante (peu probable) ou article comique (plus probable) dans les journaux.

vendredi, septembre 05, 2008

Patriotisme, courage et intelligence

Je suis peiné et très inquiet de voir à quel point a disparu de la scène publique, et même privée, la notion de patriotisme (1), c'est-à-dire le sentiment de ne pas s'être fait que par soi-même, d'hériter d'une culture, d'une histoire, d'ancêtres, d'appartenir à ce pays et pas à un autre.

Certains, à courte vue, s'en féliciteront, confondant les meurtriers excès du nationalisme avec le patriotisme.

Or, le patriotisme s'oppose au tribalisme. Entre patriotisme et tribalisme, mon choix est fait.

Le patriotisme manque, mais aussi le courage et l'intelligence. JD Merchet a bien raison de le rappeler : la guerre tue des hommes jeunes. Si on ne veut pas que de jeunes Français meurent à la guerre, on ne fait pas la guerre.

Si on fait la guerre, on supporte, on endure, on encaisse. On ne se comporte pas comme des mauviettes pleurnichardes.

Vraiment, se faire tuer dix hommes est pénible. Mais la pusillanimité, la pleutrerie, la veulerie de nos dirigeants, de nos medias et, peut-être, de notre peuple sont affligeantes.

Signe qui ne trompe pas : personne n'a encore parlé de vengeance, pourtant réaction naturelle d'un peuple sûr de lui et de son droit en ses circonstances.

Nous sommes tombés bien bas.

(1) : certes, si les notions ont un sexe, celle-ci est masculine, ce qui n'est pas très bien vu de nos jours, dans notre monde maternaliste jusqu'à l'absurde.


Cette exhibition est-elle indispensable à la vérité ?
Le point de vue de Max Gallo
05/09/2008 | Mise à jour : 12:40 | Commentaires 12
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Crédits photo : Le Figaro Magazine
L'académicien s'insurge contre la publication d'un reportage (dans l'hebdomadaire Paris Match) donnant la parole aux talibans et les montrant en train d'exhiber du matériel pris aux soldats français tués en Afghanistan.

Nous savons maintenant que les Talibans peuvent gagner la guerre d'Afghanistan. Non pas parce qu'ils ont tué dix de nos soldats, ou qu'ils remporteront une victoire décisive sur le terrain. Mais parce que leurs succès militaires seront relayés par un triomphe médiatique. La preuve vient de nous en être fournie. Paris-Match titre son reportage exceptionnel sur le commando taliban : «La parade des talibans avec leurs trophées français». En effet les «ennemis» «paradent» avec casque, gilet pare-balles, armes françaises. «Tant que vous resterez chez nous, dit leur chef, nous vous tueront tous». Il ajoute «Ces hommes sont morts à cause de Bush et de votre Président».

Les photos légitiment, authentifient ce discours classique de propagande.

Or les guerres contemporaines ne se gagnent pas sans basculement de l'opinion. Et celle-ci est mise en condition par cette «parade» offerte à l'ennemi. Mais au-delà de cette victoire médiatique flagrante - par capitulation - la publication de ce reportage pose bien des questions.

La liberté de la presse dans le cadre des lois doit être totale. Certes. Mais cela renvoie à la sensibilité, aux valeurs, à la responsabilité de chacun. A une évaluation de ce qu'apporte le choix de la publication et de ce qu'il saccage.

Après avoir vu ces photos, lu cette interview du chef taliban, la connaissance de la vérité a-t-elle progressé ? Point essentiel. Car nos soldats morts exigent la vérité. Rien ne doit être laissé dans l'ombre, ni les buts de guerre, ni les carences et les erreurs éventuelles. Et il faudra sur la guerre, un débat parlementaire et un vote.

Mais est-il indispensable à la vérité qu'on arrache le linceul de nos soldats morts ?

Or les photos de vêtements, d'une montre permettent à ceux qui sont dans la folle souffrance du deuil de tout imaginer et d'abord le pire.

Il ne s'agit pas ici de liberté de la presse mais de morale et de respect. Il y a plus encore. Connaître l'ennemi, comprendre ses mobiles, le combattre en le respectant ce sont les règles qu'applique une armée républicaine, enracinée dans les droits de l'homme. Mais l'ennemi est un ennemi. On ne lui sert pas la soupe qu'il désire. Et est-ce trop demander qu'on respecte les fils de la nation morts en exécutant les missions qu'elle a donné. Autrefois quand la nation était en guerre, on disait en pensant aux soldats en danger, aux soldats morts : «Ce sont les nôtres». Les nôtres ? Ce mot s'est-il perdu ?


Et le point de vue de JD Merchet :

Mon opinion: les autorités françaises affaiblissent la résilience face aux talibans

Dans l'affaire de l'embuscade, les talibans sont en train de gagner la bataille de la communication et, par leur attitude, les autorités françaises les y aident. C'est désolant.

1) Paris Match publie des photos d'insurgés afghans exhibant les armes et les équipements qu'ils ont dérobés aux soldats français tombés sous leurs coups. Ils posent en vainqueurs. Aussitôt les responsables politiques, ministre de la Défense en tête, se précipitent sur les micros pour dire tout le mal qu'ils pensent de l'intiative de Paris-Match ! Ces photos touchent une corde sensible, soit, mais faut-il pour autant s'abstenir de réflechir ? De Daniel Cohn-Bendit à Philippe de Villiers en passant par Max Gallo, le concert est unanime. Plutôt que de taire sa douleur, chacun l'exprime à haute voix, donnant par là un formidable écho à l'opération médiatique des talibans. Tous se laissent gouverner par l'émotion.

2) L'exemple vient d'en haut. A peine la nouvelle de l'embuscade était-elle connue, le 19 aout, que l'Elysée se réservait la communication sur le sujet pour annoncer aussitôt une visite de Nicolas Sarkozy à Kaboul. « Relevez la tête » dit-il alors aux soldats, comme si ceux-ci l'avaient baissée. On passera sur la désinvolture de quelques attitudes et petites phrases... Il y eut ensuite la grande cérémonie aux Invalides, où le ban et l'arrière-ban de la République étaient convoqués. On y vit les familles éplorées et le président en majesté. Avec la mort de ses soldats, la France vivait un drame national. Là encore, l'émotion gouvernait. Et il y a désormais cette idée saugrenue d'emmener les familles des soldats tombés en visite quasi-officielle en Afghanistan, la semaine prochaine. Du jamais vu qui fait tousser la plupart des militaires.

3) Ces attitudes politico-médiatiques ne renforcent pas la résilience du pays, c'est-à-dire sa capacité à encaisser les coups que nos ennemis disent vouloir nous porter. Nos soldats sont engagés dans des opérations de guerre par les autorités françaises. De grâce que l'on ne s'étonne pas que des soldats meurent à la guerre et que ces soldats sont jeunes, qu'ils ont des familles et des copains. La guerre n'a jamais été autre chose. Si on décide de la faire, il faut s'y préparer moralement. Ce n'est jamais une belle chose.

4) Depuis le début, les autorités politiques et militaires peinent à convaincre sur le déroulement exact de l'embuscade. Aujourd'hui encore, le Parisien publie le témoignage de la mère d'un soldat qui met en doute la version officielle. Idem pour les soldats blessés qui s'expriment dans Le Monde. Ce que refuse de dire le ministère de la Défense et l'Etat-major des armées porte sur les circonstances exactes de la mort des soldats. Du coup, toutes les hypothèses fleurissent: éxécution de prisonniers, sévices sur les corps, retards des renforts qui ont conduit à la mort de soldats blessés non secourus, etc. Les autorités, qui ne sont pas claires sur ce sujet, se justifient par le respect dû aux familles des morts. Cet argument est très contestable : les soldats tombés sont les soldats de la France et c'est pour cela qu'ils sont morts. Ils ne sont pas, dans ce cas précis, les enfants de leur famille, mais ceux du pays. Si des soldats français ont été exécutés par les talibans, si leur corps a été maltraité, la France a le droit de le savoir. L'opinion, c'est-à-dire le peuple français, est bien plus capable d'encaisser cette nouvelle que ne le sont la plupart des responsables que l'on a entendu depuis le début de cette triste affaire.


Et celui de l'ADEFDROMIL :

HALTE AU MANAGEMENT COMPASSIONNEL DE L’ARMEE FRANCAISE

Article publié le 28 août 2008 à 12:09

Après avoir traité d’amateurs les paras et les militaires de l’armée française -c’était le 30 juin-il a fallu treize jours au chef des armées pour faire acte de contrition par un message du 13 juillet dans lequel il leur exprimait « toute son estime et son amitié ». Le lendemain après un défilé impeccable devant de nombreux chefs d’état et de gouvernement, il déclarait être « fier d’eux ».

Il est vrai qu’il fallait calmer les rancœurs des troupes vilipendées et auxquelles on impose un plan de restructuration drastique, dont les effets réels ne vont se faire sentir que dans les mois à venir.

Il faut croire que le « château » alerté par les notes des états-majors, de la direction de la protection et de la sécurité de la défense et surtout par celles des services de police craint toujours un beau clash qui rendrait publique la haute estime dans laquelle beaucoup de militaires en activité et en retraite le tienne désormais.

A cet égard, personne ne contredira que l’expérience militaire de Nicolas Sarkozy, ex gondolier de couloir de l’état-major de l’armée de l’air à BALARD en 1979, ne l’a pas vraiment préparé à tenir la fonction de chef suprême des armées. Son style de commandement alterne donc entre le coup de gueule du sous-lieutenant et la compassion paternaliste d’un maréchal de France.

L’épisode afghan est tombé à pic pour lui permettre de tenter de se rabibocher avec son armée sur ce mode compassionnel qu’il maîtrise si bien. Politiquement, il est toujours bon de faire pleurer Margot et en l’occurrence les familles de ceux qui sont morts au combat.

Depuis la terrible embuscade d’Uzbin, le président ne quitte plus ses paras. Car, derrière son rôle de chef des armées meurtries par la perte douloureuse de dix jeunes hommes, il y a surtout le malentendu profond, pour ne pas dire le malaise qui s’est établi entre lui et ses troupes et qu’il s’efforce de dissiper à chaque occasion.

Certains ont critiqué, non sans raisons, la précipitation avec laquelle il s’est rendu à Kaboul au risque d’envoyer un très mauvais message aux talibans. Si les chefs d’état ou de gouvernement des pays de la coalition qui endurent le plus de pertes - Etats-Unis, Royaume Uni, Canada- se rendaient à Kaboul aussi promptement que Nicolas Sarkozy, ce serait un ballet perpétuel chez Amid Karzaï. Toutefois, on peut comprendre que le président ait voulu rendre l’hommage de la nation aux soldats morts pour la France. Ils le méritent.

Il a ensuite logiquement présidé la très belle cérémonie des Invalides où il a remis la croix de chevalier de la Légion d’honneur à ceux qui sont tombés. Depuis l’automne 2007, il semble bien que des consignes aient été données à la Grande Chancellerie de la Légion d’Honneur pour que, désormais, les non-officiers soient traités sur un plan d’égalité avec les officiers face à la mort en service ou au combat. Le « château » n’a fait ainsi que suivre les revendications de l’ADEFDROMIL, comme le laisse entendre un courrier d’un officier de l’état-major particulier adressé à notre association le 25 septembre 2007.

Enfin, il s’est rendu le 26 août à Castres pour en remettre une couche. Certes, le chef des armées est chez lui dans n’importe quelle caserne de France. Mais là encore tant de compassion voire de complaisance laisse à penser qu’on craint en haut lieu des réactions individuelles ou collectives et que les circonstances de l’embuscade n’ont pas toutes été livrées au public. D’ailleurs, les blessés ont reçu des consignes de discrétion à l’égard des médias.

A cet égard, il faut féliciter le courage de Jean Dominique MERCHET, journaliste accrédité à LIBERATION qui a rapporté l’information sur son blog Secret Défense.

Le doute est désormais légitime : y a-t-il eu des prisonniers et si oui dans quelles circonstances ont-ils été assassinés ? C’est une question de transparence expressément promise par le chef des armées aux familles et que l’ADEFDROMIL n’a pas manqué de poser dans son communiqué au moment où tout le monde, médias compris, gobait le beau scénario présenté par le ministre dans sa conférence de presse.

Dans le même temps, on a appris que les familles pourraient se rendre à KABOUL voire sur les lieux de l’embuscade fatale. On croit rêver ! Verra t-on un jour les avocats et les huissiers déboulés sur le champ de bataille pour tenter de déterminer si les bonnes décisions ont été prises et s’il n’y a pas une faute de « l’administration » susceptible d’entraîner sa responsabilité dans le décès de ses agents ? Même les Américains n’en sont pas encore là.

Il est vrai que pour le ministre de la défense, chef du ministère et d’écurie, il n’y pas de guerre en Afghanistan ! Tout au plus des opérations de maintien de l’ordre comme en Algérie ? De la négation de l’évidence de la guerre à l’omission de certaines circonstances de l’embuscade, il n’y a qu’un pas, qui ne serait qu’un faux pas supplémentaire pour Hervé MORIN.

On va donc emmener des civils sur un théâtre d’opérations. Quel sera leur statut juridique : touristes invités par le ministère de la défense, collaborateurs du service public, etc ? Seront-ils couverts par l’Etat en cas de blessures ou de décès ? Leur conseillera t-on de souscrire une bonne assurance décès avant de partir ? Bref, tout cela n’est pas sérieux et procède d’un management compassionnel qui décrédibilise notre armée et la France et envoie un très mauvais message aussi bien à nos adversaires qu’à nos alliés. Que les familles puissent se rendre en Afghanistan avec l’aide de l’Etat, une fois la paix civile revenue, nous semble légitime. En revanche, les autoriser à s’y rendre dans les circonstances actuelles relève de la mascarade.

Par chance pour le gouvernement et le chef des armées, il n’y a pas parmi les victimes de l’embuscade d’Uzbin de militaires pacsés depuis moins de trois ans. En effet, à ce jour, leurs ayants-droits n’auraient pu bénéficier des allocations prévues par le fonds de prévoyance militaire.

La requête de l’ADEFDROMIL pour faire annuler cette disposition aberrante et illégale, mais approuvée naïvement par le CSFM (conseil supérieur de la fonction militaire) va être examinée à l’audience du Conseil d’Etat le 3 septembre prochain. Espérons que les sages du Palais Royal auront suivi l’actualité et rejetteront les arguments entêtés du ministre que nous ne manquerons pas de publier le moment venu… pour en rire ou en pleurer.

Jacques BESSY, Vice Président de l’ADEFDROMIL