Ce livre est désespérant et, tout à fait logiquement, Bloom est mort désespéré, en 1992.
Toute l'idée est dans le titre (meilleur à mon sens en français que le titre original, The closing of the American mind) et dans le sous-titre.
Eric Zemmour en avait fait la recension (une de ses meilleures) : « Ce professeur de Chicago qui avait tout compris ».
Je ne suis pas professeur, je ne fréquente que quelques jeunes diplômés, mais ce que je vois et que j'entends ne m'incite guère à la sérénité.
Je peux répéter Woody Allen : les jeunes me font peur, je ne les sens pas capables de prendre en charge le monde.
Ils ont perdu le bon sens traditionnel, celui qui consistait à répéter les comportements et les idées issus des générations précédentes et ils ont perdu l'intelligence du monde qu'aurait pu leur donner une solide culture générale. Ils sont dans un entre-deux où ils n'ont ni bon sens ni culture. Des singes savants : ils savent répéter des choses apprises et c'est tout.
Ils sont arrivés à l'idéal socialiste d'éducation : assez instruits pour être de gentils rouages de la machine économique, pas assez pour être des hommes libres. Capables de révolte sporadique, mais pas de révolution. Ils prennent pour leur pensée propre ce qui n'est qu'un conformisme sans faille. Et, depuis peu, s'ajoute l'abrutissement des écrans. C'est terrifiant.
Bien sûr, les meilleurs sentent le manque et essaient de compenser par eux-mêmes, mais rien ne remplace une éducation maîtrisée et méthodique de 0 à 23 ans (pour fixer une limite arbitraire).
Bloom accuse le relativisme et Nietzsche (j'ajoute, la déchristianisation, ça va ensemble).
A partir du moment où on ne croit plus qu'il y a la Vérité, qu'il nous appartient de chercher tous ensemble, mais des vérités qui se valent toutes, il n'y a plus d'arguments, puisqu'il n'y a plus d'étalon universel pour juger de leur validité. Il n'y a donc plus de raison de se parler et même de penser. Il suffit juste d'être le plus fort pour imposer sa vérité.
On pourrait craindre l'avénement d'un monde à la Huxley. Une caste supérieure régnant sur un monde d'abrutis, par le sexe, par les écrans, par les drogues. Même pas, car on constate que les gens d'en-haut sont eux aussi touchés par les destructions qu'ils ont opérées en bas.
« Le rationalisme occidental a abouti à un rejet de la raison. Le relativisme parvient à détruire les prétentions universelles de l'Occident […]. Privé de ce besoin de vérité, l'Occident s'effondrera. »
Une lueur d'espoir ? Une élite, au vrai sens du terme, sent tout ce qui l'avilit dans le monde actuel. Mais elle est si peu nombreuse ... Et entre sentir et faire ...
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