En juillet 1944, la situation de l'Allemagne nazie, hitlérienne, est sans ambiguïté : elle a perdu la guerre, définitivement, sans espoir d'échapper à une reddition sans conditions.
A l'est, l'opération Bagration (complètement ignorée par Hollywood) a tronçonné l'armée allemande. L'estimation de 400 000 pertes est un minimum. C'est l'une des plus éclatantes réussites de l'histoire militaire. La Wehrmacht est dominée non seulement matériellement mais intellectuellement. La doctrine soviétique est meilleure, son efficacité opérationnelle remarquable. L'offensive a été parfaitement échelonnée. Les conséquences sont cataclysmiques pour l'armée allemande.
A l'ouest, le blocage dans le bocage se poursuit, mais l'issue ne fait de doutes pour personne ayant une once de réalisme.
Sur les plans industriel et humain, les choses sont consommées : Les Alliés produisent, suivant les matériels, entre 3 et 10 fois plus que les Allemands, leurs troupes sont beaucoup plus nombreuses et, désormais, mieux formées.
Les villes du Reich subissent des bombardements incessants, nuit et jour.
En 1918, l'Allemagne avait cherché la paix pour moins que cela.
Alors, pourquoi 300 jours ont-ils été nécessaires pour transformer la défaite virtuelle en réalité ?
Les conjurés du 20 juillet 1944
Il faut commencer par dire qu'Hitler a une chance du diable.
Il échappe le 8 novembre 1939 à l'attentat qui était peut-être le mieux préparé, celui de l'ébéniste communiste Georg Elser. Parce que la météo étant mauvaise, Hitler doit écourter son discours pour prendre le train au lieu de l'avion. Il échappe à quelques minutes près à la bombe.
Hitler tue ceux qui ont essayé de le tuer, quelquefois après les avoir conservés au frais longtemps. Elser est assassiné à Dachau en avril 1945.
Quand on lit la prose des conjurés du 20 juillet 1944, on réalise qu'ils étaient des suprémacistes allemands, ils voulaient faire la politique d'Hitler, sans Hitler et sans exterminer les juifs. Compréhensible que les Alliés, contactés, ne les aient guère pris au sérieux.
Un moyen presque infaillible de tuer une personnalité, c'est l'attentat suicide. Stauffenberg serait resté avec sa bombe, Hitler serait mort. Les volontaires ne se bousculent pas. Voir la scène, prémonitoire et désopilante, de l'excellentissime Dictateur, (Charlot qui ramasse discrètement les pièces à la fin de la scène, le génie comique de Chaplin) qui ne fut pas jugé à sa juste valeur à sa sortie et qu'Hitler, grand amateur de cinéma américain, a vu (sa réaction n'a hélas pas été rapportée).
Dommage que Branca prenne au sérieux la thèse du suicide de von Kluge.
Branca fait remarquer avec malice que beaucoup de militaires allemands ont argué après la guerre de tentatives d'assassinat ratées sans aucun début de preuves, donc probablement imaginaires, et que ce phénomène étrange pourrait bien être une manière de dédouaner de leurs accointances nazies les galonnés récupérés par les Américains, guerre froide oblige.
Le bilan de l'attentat raté du 20 juillet 1944 est catastrophique :
1) il vient beaucoup trop tard. C'est l'ébéniste qui avait raison, et non les généraux prussiens.
2) politiquement, il permet d'achever la nazification de l'Etat et de l'armée. Le salut nazi remplace le salut militaire. Pour le dernier acte du drame, Hitler a un pouvoir absolu.
L'échec de Market Garden
Le maréchal Montgomery est un pompeux crétin (« Un psychopathe » dira Eisenhower en privé).
Il n'a remporté qu'une seule vraie victoire : El Alamein, contre une Afrikakorps affaiblie par les prélèvements pour le front de l'est. Il a échoué dans tout le reste (notamment en Normandie, Les Cannais s'en souviennent douloureusement).
Il ne doit sa carrière qu'à deux facteurs :
> le jugement défaillant de Churchill (c'est bien connu que Winston a plus d'énergie que de jugeote. Il recommencera avec Tito).
> une propension à se mettre en scène et à faire sa propre publicité jamais prise en défaut, qui finit par le rendre intouchable aux yeux du public.
Alors que l'opération stratégique prioritaire est la sécurisation du port Anvers, Montgomery ne trouve rien de mieux que de monter l'opération Market-Garden, mal préparée et mal exécutée, destinée à traverser le Rhin par la Hollande. Pour montrer que la Grande-Bretagne n'est pas un junior partner (bin si, elle l'est).
Le parfait catalogue des erreurs à ne pas commettre. : négligence, pire - ignorance volontaire, des renseignements, sous-estimation de l'ennemi, de la logistique, du terrain et de la météo, matériel inadapté.
Comme il est traditionnel à la guerre, la stupidité des chefs est payée du sang des hommes. Et de la famine aux Pays-Bas.
Montgomery, avec sa mauvaise foi habituelle, qualifiera ce lamentable échec de « victoire à 90 % ».
Il y a une grosse responsabilité d'Eisenhower de ne pas avoir interrompu cette opération qu'il ne sentait pas. Ménager les susceptibilités est une nécessité de la guerre en coalition, mais celle-ci a été poussée trop loin à cette occasion.
Au lieu de virer Montgomery comme il aurait dû, le gouvernement britannique a, pour sa honte éternelle, accusé le général polonais (donc sans grande puissance derrière lui) qui avait vu clair.
La Finlande
La gestion parfaite de la guerre par la Finlande mérite qu'on y réfléchisse.
Elle a su défendre sa souveraineté contre l'URSS et contre l'Allemagne, tour à tour alliée aux uns et aux autres, sans se mettre à dos ni les uns ni les autres. C'est un véritable exploit d'intelligence, essentiellement dû au maréchal Mannerheim.
Il y a eu un jeu de bascule très habile entre les dirigeants finlandais, les pro-Russes et les pro-Allemands se mettant plus ou moins en avant suivant les circonstances.
Explosion nucléaire allemande en 1945 ?
Eric Branca accorde foi aux rumeurs disant que les Allemands auraient réussi une explosion atomique en 1945. Heureusement, il reste flou sur la nature de cette explosion, ce qui le sauve de la faute inexcusable. Mais je ne suis pas sûr que cette ambiguïté soit volontaire.
Il y a deux sortes d’explosions nucléaires :
> La vraie explosion nucléaire par une bombe à fission (ou à fusion). Elle nécessite une quantité de matière fissile (U235 ou Pu239) et une grosse organisation industrielle.
> La fausse explosion nucléaire, qui est une bombe chimique traditionnelle qui disperse des matières radioactives, la bombe radiologique, la « bombe sale ». Ou une bombe sous-critique.
Il est impossible que l’Allemagne ait pu procéder en 1945 à une vraie explosion nucléaire, pour deux raisons :
> il est bien documenté que les savants allemands étaient dans une impasse théorique, n’ayant pas compris l’importance de la distinction neutrons rapides/neutrons lents. Il se trouve que beaucoup des meilleurs savants atomistes allemands étaient juifs et en train de travailler à Los Alamos.
> l’Allemagne n’avaient pas les capacités industrielles de produire une bombe à fission, mais alors pas du tout. L’URSS, qui n’avait aucun problème de conception puisque 100 % issue de l’espionnage, et qui était désormais en paix, a mis 4 ans à faire la bombe A. Si l'Allemagne avait abandonné le développement des V2, du char Tigre et des Me 262, peut-être aurait-elle eu ces moyens industriels, mais ce ne fut pas le cas.

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