J'aime beaucoup Alain Besançon. Très bref communiste, repenti à la vitesse de l'éclair, catholique depuis, il analysa en son temps le communisme comme un gnose millénariste, ce qui en est sans doute l'analyse la plus pénétrante.
Ce livre est une compilation. Les deux premiers sujets m'ont particulièrement intéressé :
1) Le déclin intellectuel de l'Eglise. Elle est désormais peuplée de demi-intellectuels, qui savent manier les concepts et les mots mais ne comprennent pas les choses. Il serait vain d'y chercher un Bossuet ou un Lacordaire.
Je ne m'étends pas parce que la chose me paraît évidente.
Besançon écrit que la suite des papes de Jean XXIII à Benoit XVI est plutôt heureuse du point de vue intellectuel, que c'est assez exceptionnel dans l'histoire de l'Eglise et sous-entend assez fort qu'il ne faut pas trop espérer que cette bonne série dure éternellement. Pense-t-il au pape François ? Il ne le dit pas.
2) Le point de vue catholique officiel profondément erroné sur l'islam, ce qui n'est pas sans rapport avec le point précédent.
Pour Besançon, l'Eglise a été intellectuellement lâche sur le nazisme et (au moins en partie) sur le communisme, évitant de critiquer ces idéologies au fond, de pousser la critique dans ses derniers retranchements (il l'explique très bien : pour lui, le nazisme et le communisme sont des mensonges, pas seulement des erreurs de bonne foi. La nuance est plus qu'importante).
Or, l'Eglise est en train de recommencer le même comportement à propos de l'islam. Elle exalte jusqu'au ridicule des rapprochements artificiels et ferme les yeux sur l'opposition fondamentale.
La doctrine depuis Vatican II est celle des cercles concentriques : le catholicisme, la religion vraie, au centre, puis les autres christianismes, puis le judaïsme, puis l'islam, puis toutes les autres religions.
Besançon conteste cette place privilégiée de l'islam.
Il fait presque la même analyse de l'islam que Saint Jean Damascène, Chesterton et Belloc : une hérésie chrétienne en dehors de la chrétienté (il estime tout de même, en différenciant foi et croyance, que l'islam est un paganisme particulier, qui idolâtre l'Unique). Comme toutes les hérésies, elle se concentre sur certaines parties du dogme en oubliant toutes les autres. Pour l'islam : le dieu unique et l'église militante.
Or, ce qui fait la spécificité du judaïsme et du christianisme parmi les monothéismes (il n'existe pas que trois monothéismes dans le monde), c'est l'Alliance de Dieu avec ses fils, la relation d'amour entre Dieu et ses créatures, idée rejetée violemment par l'islam.
Il n'y a donc aucune raison de donner à l'islam une place privilégiée parmi les monothéismes.
Les points communs qu'on nous cite sont fallacieux et trompeurs (comme le communisme, l'islam est un mensonge) : «religions du Livre», «fils d'Abraham», «Jésus et Marie» et toutes ces fadaises pour mous du bulbe.
Parce que l'islam ne connaît pas l'Alliance, ce n'est pas le même livre, ce n'est pas le même Abraham, ni le même Jésus, ni la même Marie. Les prétendus rapprochements ne sont que des illusions sonores, des homonymies . Au contraire même, l'Abraham, la Marie et le Jésus des musulmans servent précisément à réfuter des points fondamentaux des doctrines juive et chrétienne : l'Alliance, l'Incarnation et la Rédemption, excusez du peu.
Les musulmans sont libres de se tromper mais que les catholiques ne se racontent pas d'histoires. L'islam a le droit d'être anti-chrétien mais il n'y a pas de raison que les chrétiens lui en soient gré.
Les musulmans sont, de ce point de vue, plus honnêtes : ils nous racontent des craques sur nos points communs, mais seuls quelques intellectuels y croient vraiment. En réalité, leur comportement montre qu'ils se savent radicalement séparés de nous, et c'est très bien ainsi, qu'ils soient honnêtes. A nous de l'être aussi et de l'assumer : un musulman en terre chrétienne a vocation à devenir chrétien ou à retourner dans son pays.
3) Un article intéressant sur la question du mariage des prêtres. J'avoue qu'il m'a presque convaincu.
Son raisonnement est de dire que le célibat des curés (on ne parle que des séculiers) était compensé par un statut social et des aises qui ont disparu. Les prêtres sont beaucoup plus isolés qu'il y a encore cinquante ans. Le mariage leur redonnerait une assise sociale et leur permettrait d'échapper au cléricalisme. Besançon note aussi que les prêtres catholiques sont mariés, ou tout comme, en Afrique (un évêque africain, c'est un prêtre qui n'a qu'une seule femme !).
En revanche, s'agissant de l'ordination des femmes, il est contre et il a bien raison.
4) Un article assez marrant sur la population (supposée) de l'enfer. Presque plein du temps des jansénistes et de la Contre-Réforme, presque vide de nos jours.
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