mardi, août 07, 2018

Trump et le chaos

Au-delà de toutes les décisions de Trump qu'on peut discuter, il a un avantage suprême à mes yeux : il fout le bordel.

En effet, c'est dans le chaos que peuvent s'infiltrer de vrais changements. Dans un système figé et verrouillé, rien ne peut vraiment changer.

Aldo Schiavone examine, dans L'histoire brisée, non pas les causes de la décadence de Rome, mais les causes de son non-développement technique, économique et scientifique. Après cet examen, il fait remarquer que, dans le chaos de la guerre civile, d'autres voies d'organisation sociale, politique et économique ont été esquissées mais César puis Auguste ont figé les choses et ces pistes nouvelles ont été abandonnées, condamnant à terme Rome à la stagnation puis à la décadence.

Plus près de nous, le chaos de notre révolution, quels que que soient les immenses reproches qu'on puisse lui faire, a libéré des énergies et des talents, qui seraient restés inemployés si les choses avient continué leur train-train.

Encore plus près, s'il n'y avait pas eu le bordel de la guerre d'Algérie, la IVème république aurait poursuivi son bonhomme de chemin, De Gaulle ne serait pas revenu au pouvoir et les réformes dont nous bénéficions toujours n'auraient pas eu lieu.

Or, je suis insatisfait de la marche du monde actuelle, donc je souhaite un foutoir qui permette d'introduire de vrais changements et Trump est l'agent de ce foutoir. C'est pourquoi, d'ailleurs, ceux qui profitent du monde actuel, ou croient en profiter, ont pour lui une haine viscérale, ils sentent bien qu'il est l'agent du changement radical, qu'ils les remet en cause radicalement, qu'il peut vraiment changer leurs vies et leurs positions sociales (et les nôtres aussi).

C'est en vertu de cet argument qu'il était préférable de voter Le Pen en 2017 plutôt que Macron : au bout du bout, peu importent les qualités et la pertinence de Marine Le Pen, on était aussi sûr que son élection aurait apporté du changement qu'on était certain que celle de Macron serait la prolongation de la politique suivie depuis trente ans (seuls les imbéciles ont pu croire que Macron était un changement politique, il est juste une accélération, une caricature, de ce qui nous tue depuis longtemps).

Bien sûr, le changement peut être bon ou mauvais. Mais, quand on est en déclin, le risque n'est pas grand : accélérer le déclin ? Et alors ? C'est l'argument de Julien Gracq dans Le rivage des Syrtes et de Churchill en 1940 : mieux vaut mourir dans une explosion en se battant que d'une maladie de langueur, au moins l'honneur est sauf. Et quand on se bat, on court aussi la  chance de vivre.

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