Voici un éditorial du Figaro. Je devrais me réjouir, puisque je pense que toutes ces fadaises autour du débat Bayrou-Royal font les affaires du candidat qui aura mon vote.
Mais je trouve cela tellement lamentable que je n'ai pas le coeur à m'en féliciter.
Désormais que l'élection est gagnée pour Sarkozy (1), je souhaite que Bayrou appelle à voter Royal. Cela permettrait l'émergence de cette gauche moderne qui manque tant à la France.
Je note chez les partisans de Royal que je connais (pardon pour eux) un grand vide intellectuel sur le monde comme il va. "La Chine ? L'Inde ? Le terrorisme ? La démographie ? Sans opinion, mais Ségolène est une femme, votez pour elle, ça nous changera et Sarko est un fâcho." C'est rigolo mais pas très sérieux.
Il est temps de remettre le PS dans le sens de la marche et qu'il profite de l'occasion pour recommencer à penser.
(1) : la raison conjoncturelle en est que SR n'a pas su installer une dynamique de second tour lui permettant, en se mettant "au-dessus des partis", de ne pas perdre à gauche ce qu'elle gagne au centre. La raison fondamentale en est ce que je répète depuis des mois : SR est la candidate du PS car le PS a refusé de choisir entre les archéo et les modernes (ou les moins-archéo). Ce qui fait qu'elle est au second tour est cela même qui la condamne à le perdre.
Bien sûr, tant que les bulletins ne sont pas dans les urnes, Sarkozy peut encore perdre, mais plus le temps passe, moins c'est probable.
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Le centre fou
L'éditorial d'Alexis Brézet.
Publié le 28 avril 2007
Actualisé le 28 avril 2007 : 22h37
Il était entré dans la campagne revêtu de probité candide et de lin blanc. Il allait « changer le système », « réconcilier les deux France », en finir avec cette « guerre civile froide » qui, selon lui, empêche le pays d'avancer. Et voici qu'aujourd'hui le desperado du Béarn canarde à tout-va. Voici qu'avec une brutalité confondante il lance contre Nicolas Sarkozy une pluie d'invectives puisées dans les eaux saumâtres du cynisme politicien. Comment l'apôtre du « et droite et gauche » s'est-il mué en huit jours, au mépris des convictions d'une bonne moitié de ses électeurs, en imprécateur du « ni Sarko ni Sarko » ? François Bayrou n'aurait-il rompu avec la longue tradition du centre mou que pour imaginer le centre fou ?
Donc, Nicolas Sarkozy est un apprenti dictateur. Le fils caché de Poutine et de Berlusconi. Encore un effort : Ceausescu et Pinochet ne sont pas loin ! Universelle aragne engraissée par le grand capital, le candidat UMP a tissé sa toile sur tous les médias. La presse régionale est aux ordres. Canal +, à la botte. TF1, Europe 1 et Le Figaro, cela va de soi. Contre le général de Gaulle, l'auteur du Coup d'État permanent n'en avait pas tant fait.
Question : comment expliquer que les principaux lieutenants de Bayrou - Maurice Leroy, son porte-parole ; Pierre Albertini, maire de Rouen et coauteur de son projet ; Charles de Courson, inspirateur de son programme économique, et dix autres encore - appellent tous à voter Sarkozy ? N'ont-ils pas d'yeux pour voir la terrible vérité ? Sont-ils cyniques à ce point que, pour un siège de député, ils seraient prêts à laisser la France s'enfoncer dans la nuit des libertés et le brouillard de la morale publique ? Vraiment, l'UDF ne mérite pas François Bayrou.
Trêve de plaisanterie. Si le prophète de l'extrême centre semble avoir un peu de mal à se faire à l'idée qu'il n'est pas au second tour, il est loin, très loin, d'être insensé. Son calcul, qui s'alimente à son obsession de revanche, est d'une biblique simplicité : persuadé que Ségolène Royal ne peut en aucun cas être élue, il préempte, pour la suite, tout l'espace de l'opposition. Et la dame, qui ne voit rien, offre son cou à ce baiser qui tue.
L'ennui avec ces fines stratégies est que l'on sait où elles commencent, pas où elles finissent. Avant de trahir Giscard en 1981, Jacques Chirac était persuadé d'emporter la mise aux législatives qui suivraient la présidentielle. Résultat : quatorze années de Mitterrand. Est-ce vraiment cela que veut François Bayrou ?
Nous n'en sommes pas là. La manoeuvre de diabolisation tentée par les socialistes contre Nicolas Sarkozy s'est brisée sur le premier tour du scrutin : difficile de peindre en croquemitaine un candidat qui rassemble onze millions et demi de voix ! La vendetta du centriste ne réussira probablement pas davantage : on imagine mal ses électeurs « antisystème » se laisser prendre à cette caricature de combinaison partisane, le tendre ménage Bayrou-Royal. Il n'empêche : le risque existe, que François Bayrou prend sciemment pour ménager son intérêt politique. Quoi qu'il advienne, il portera une lourde responsabilité devant le pays.
samedi, avril 28, 2007
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Excellent edito.
RépondreSupprimerLe centre est effectivement devenu dangereux.
Je ne donnerais jamais ma voix a cet homme.
et s'il était sincère ?
RépondreSupprimers'il croyait assez à ce qu'il dit sur Sarkozy pour supposer infiniment plus compromettante pour son avenir l'élection de Sarko (qui achèverait le meurtre de l'UDF insuffisamment réussi par Chirac et Juppé) que celle de Ségo (dont l'échec d'ici 2012 serait, par lui, estimé plus "jouable") ?
Je suis frappé de voir que les commentateurs pro-Sarkozy n'osent même pas l'hypothèse que la victoire de Ségo en 2007 est davantage dans l'intérêt (au sens personnel, étroit et élyséen) de Bayrou que celle de Sarko.
Auraient-ils peur de vendre la mèche ?
Vous avez peut-être raison, je n'en sais fichtre rien.
RépondreSupprimerJ'ai plutôt tendance à penser que le vote Bayrou est circonstanciel et que, quel que soit le vainqueur des élections, il fondra comme neige au soleil pour les législatives.
En tous les cas, je vous accorde que Bayrou fait tout ce qu'il peut pour faire gagner SR, en deçà de l'appel au vote Royal pur et simple.
j'accorde à Sarkozy une qualité : il ne sous-estime pas ses adversaires et ne vend pas la peau de l'ours.
RépondreSupprimerDonc quand aujourd'hui il se dit sûr de vaincre ce n'est qu'une posture : il doute mais juge qu'électoralement ce serait très mauvais de le montrer.
A rapprocher de la campagne du premier tour quand il a dit à la Réunion : "cette élection, je commence à la sentir"; il commençait, en fait, à sentir dans le lointain le galop de Bayrou -dont les 18% sont une claque historique pour celui qui avait barboté l'UMP à Chirac et Juppé en se faisant fort d'en faire le grand parti tory français rendant superflue toute autre formation de droite.
Dans le même ordre d'idées, voyez ces politologues qui depuis 48 h environ relativisent le score de Bayrou en disant "pour qui il se prend celui-là, il y a des centristes qui ont fait plus ou autant, Barre en 88, Balladur en 95... j'ai même entendu qu'il pouvait se rhabiller devant Poher, qui avait fait quatre points de plus, en 69 !! (rappel : 69 c'est l'étiage des voix PS à 5% et le zénith présidentiel du PCF ! et le reste, c'est avant l'OPA de 2002 du RPR sur l'UDF pour créer l'UMP).
Ce qui apparaît c'est que les électeurs de droite démocrates, modernes, lucides et intelligents, voire libéraux, (si si, je pense que ça existe !) s'alarment de ce monstre, avatar dégénéré du gaullisme, qu'est l'Etat UDR->RPR->UMP et pensent que l'égolâtre Sarko va nous verrouiller le truc pour une vingtaine d'années supplémentaires.
Et je vous accorde enfin que c'est de bonne guerre, d'archangiser la pauvre victime et de jouer la montre en serrant les fesses et en priant très fort le dieu de toutes les réactions pour que l'inéluctable érosion lui laisse une voix d'avance le 6 mai.
Vous voulez le fond de ma pensée ? Même vous, le libéral grand teint, vous risqueriez si vous aviez quelques jours de plus de prendre conscience du risque, que dis-je, de la certitude d'un grand bond en avant de l'étatisme en cas de victoire de Sarko et d'en faire votre critère principal. Même et surtout s'il gagnait avec une seule voix d'avance. Il n'en tirerait aucune leçon de modestie, comme Giscard en 74, ni comme Chirac en 2002 de sa victoire trop ample pour être sienne, il dirait j'ai gagné point, comme il l'a fait frauduleusement, toute la semaine, aux dépens de Bayrou : derrière le bon score du citoyen Nicolas, cachez cette cata de l'UMP que je ne saurais voir, et circulez sinon craignez mon radar omniscient !