mardi, mars 10, 2009

Folie injectrice (29) : too big to exist ?

Comme le signale Guy Sorman, Paul Volcker a encore dit des choses qui méritent considération.

Certaines banques, assurances et entreprises sont, parait-il, «too big to fail». Volcker inverse le raisonnement en disant que certaines sont tellement gigantesques qu'elles sont ingérables, «too big to exist».

Voilà une manière de penser qui n'a visiblement pas traversé l'Atlantique, puisque le groupuscule d'activistes étatistes de l'Elysée entreprend de faire une «big bank» saine (?) en mariant deux banques malades.

7 commentaires:

  1. Bonjour,
    "Too big to exist" revient quasiment à dire que "small is beautiful", n'est-ce pas ?

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  2. Il y a le postulat d'Yvon Gattaz : la taille idéale d'une société ou d'une entité est 500 personnes, compromis entre deux exigences contradictoires. D'une part, il faut du monde pour avoir des compétences diversifiées ; d'autre part, la perte d'information évolue au carré de l'effectif.

    C'est bien sûr empirique.

    Mais ça correspond pas mal à mon expérience. On voit bien que des sociétés comme EADS sont sous-optimales en matière de management parce que bien trop grosses (Desproges a une image qui dit tout : le diplodocus était tellement gros qu'il ne s'entendait même pas péter. EADS ou Citigroup pourraient avoir le diplodocus comme animal fétiche).

    Ce qui justifie la taille d'EADS est le duopole dans l'aviation civile avec Boeing : ça n'est pas trop bien géré (euphémisme), mais comme on n'a qu'un unique concurrent, ça va bien, les clients sont prisonniers (les bonnes années, le marché est 55/45, les mauvaises 45/55).

    Un des moyens d'obtenir de la réactivité d'une grosse boite, c'est le court-circuit. Si les hiérachies intermédiaires savent que le PDG n'hésite pas à aller se renseigner auprès de l'ouvrier ou de l'ingénieur de base, elles sont incitées à ne pas trop filtrer les mauvaises nouvelles. C'est un simple problème d'asservissement : avec une boucle de retour, ça marche toujours mieux qu'en boucle ouverte.

    Paraît-il que Marcel Dassault se baladait entre les planches à dessin du BE et distribuait des Pascal (billets de 500 Fr, je dis ça pour les jeunes) quand quelque chose lui plaisait. Ca lui permettait également de recueillir de dessinateurs de base avis, commentaires et confidences sans filtre.

    Mais comme ce n'est pas ce genre de choses très basiques et très humaines qu'on apprend à l'ENA, nos mammouths sont gérés comme des administrations.

    Il ne viendrait pas à l'idée de nos PDGs «modernes» de se promener de temps en temps, seuls dans les couloirs, sans leur cour, tôt le matin ou tard le soir, quand un peu d'intimité est possible, pour interroger au hasard quelques grouillots de base, histoire d'apprendre ce qu'on ne lui dit pas.

    Ils peuvent estimer que leur cour est suffisamment nombreuse pour qu'il y ait toujours un courtisan qui ait intérêt à dire la vérité (sur les autres, évidemment) et que, par recoupement, ils comprennent. Cepandant, c'est très difficle de retrouver l'information pertinente dans un message brouillé. De plus, il y a des vérités que, quelles que soient les luttes internes, personne a la cour n'a intérêt à dévoiler, comme la le fait que la cour dans son ensemble est inefficace et trop nombreuse.

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  3. "Too big to exist"... Elle est pas mal celle là.
    C'est en substance ce que propose pour l'UBS le chef de l'UDC Suisse : découper la banque en plus petits établissements pour éviter que sa chute n'entraine trop de choses.

    Cependant, là encore, sans doute faut-il éviter de généraliser.
    Le problème pour les banques est qu'une chute génère trop d'externalités négatives sur l'ensemble de l'économie - pertes de capital, pertes de prêts, dépots, etc. -. En ce sens, dans le cadre d'une puissance publique prêteur en dernier ressort, il vaut mieux qu'elles soient de taille raisonnable comparativement à l'état.

    Toutefois, je constate qu'aucun politicien dans le monde n'a suivi la proposition de certains économistes autrichiens : transformer les prêts des banques en capital, quitte à laminer les actionnaires en place.

    Pour ce qui est de la perte d'information, je souscris assez à la démarche empirique d'Yvon Gataz.
    Dans le cadre de notre réoganisation ministérielle, nous avons gagné un échelon hierarchique supplémentaire - non, ce n'est pas une blague -, mais certainement pas en réactivité.

    Au passage, pour suivre la remarque que vous faîtes sur Marcel Dassault, il faut aussi que le patron comprenne clairement ce qu'il se passe dans son entreprise.
    Quelqu'un comme M. Dassault en savait suffisamment en technique et C° pour juger. Je doute qu'un patron parachuté qui n'a jamais connu l'atelier en sache quelque chose.

    Anecdote pour anecdote, je me souviens de l'émotion suscitée en Suisse durant l'été 1994 lorsque le ministre en charge de l'emploi visita différentes ANPE locales, discutant avec les chômeurs, les gens des guichets etc. Il indiqua aux journalistes que c'était sans doute pour lui la meilleure façon de comprendre ce qui se passait vraiment dans ses services...
    Imaginer un seul instant Sarkozy dans un véhicule de la BAC à l'époque...

    cordialement

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  4. «C'est en substance ce que propose pour l'UBS le chef de l'UDC Suisse : découper la banque en plus petits établissements pour éviter que sa chute n'entraine trop de choses.»

    Les Suisses sont probablement les occidentaux qui traversent le mieux cette crise et, comme par hasard, du fait de leurs institutions et de leurs traditions, ils sont parmi les plus libéraux.

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  5. Les entreprises qui deviennent énormes deviennent comme les Etats : des bureaucraties, et leurs dirigeants, des nomemklaturistes pour reprendre le terme de P. Salin. Ne remarque-ton pas que ces dirigeants sont les premiers à demander les aides de l'Etat dès que leur situation va mal ? Ca me rappelle furieusement les syndicats de la fonction publique.

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  6. "Il ne viendrait pas à l'idée de nos PDGs «modernes» de se promener de temps en temps, seuls dans les couloirs." (Franck)

    Je ne sais pas si cela se fait réellement, mais c'est un poncif des théories contemporaines du management, qui ne manquent pas, comme vous le savez.

    Cela porte même un nom: "Management by walking around".

    Je suppose que les sales capitalisses américains le font davantage que les hauts fonctionnaires français bombardés PDG.

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