jeudi, décembre 16, 2004

Fort de café turc

Tiraillé par des prises de postion opposées bien argumentées, dubitatif face à une question complexe, impressionné par l'enjeu, j'ai mis du temps à me décider sur la question de l'adhésion de la Turquie à l'UE.

Un point est clair pour tout le monde depuis le début : cette question déborde la simple adhésion d'un pays, elle sous-entend deux questions fondamentales.

1) Qu'est-ce que l'Union Européenne (1) ?

2) Comment voyons nous l'UE dans plusieurs décennies ?

L'Union Européenne, c'est l'adhésion à des valeurs communes : démocratie, droit des individus, laïcité, protection sociale. C'est la Turquie qui doit adhérer à l'UE, non l'UE qui doit adhérer à la Turquie.

Quand la Turquie répondra aux critères définis par ces valeurs, je ne vois aucune raison de la refuser, que m'importe que les Turcs soient musulmans si ils ont le respect de la séparation du politique et de la religion.

Poussons le raisonnement à l'extrême : si la Nouvelle-Zélande, qui est à l'autre bout de la terre veut adhérer à l'UE le peut-elle ? Oui, en en faisant la demande et en respectant les critères. D'ailleurs en tant que pays du Commonwealth, elle a déjà certains droits préférentiels.

La dynamique d'élargissement est positive. Une Union Européenne qui se replierait sur elle-même s'enfermerait dans une impasse faite de vieillissement, d'isolement, de peurs. Ca ne me convient pas.

Deux objections :
1) la différence culturelle. Elle existe, mais l'utiliser comme argument de refus et non comme un point à travailler est raciste et xénophobe, on en a l'expérience historique : dans les années 1900, les journaux expliquaient que les Italiens étaient inassimilables en France du fait de la différence culturelle.

2) le poids politique de la Turquie et l'impossibilité de créer une Europe politiquement intégrée avec la Turquie dans l'UE. L'union politique est déjà repoussée de plusieurs décennies par des pays comme le Royaume-Uni, la Pologne, les Pays-Bas et d'autres qui veulent éviter tout ce qui pourrait apparaître comme un contrepoids aux USA. La présence de la Turquie ne'y changera pas grand-chose.

L'union politique se fera non par une volonté européenne mais quand les USA le décideront, par exemple en versant dans l'isolationnisme. C'est triste à dire mais c'est ainsi.

Pour l'instant, il faut se résigner à ce que l'UE soit avant tout une vaste zone de libre-échange et la Turquie y a sa place.

(1) et non pas l'Europe. L'Europe, c'est de la géographie. L'Union Européenne, c'est de la politique.


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