vendredi, janvier 13, 2006

La pensée restreinte française à fond la caisse au Moyen-Orient

Une réponse d'Eli Barnavi que beaucoup, notamment sur la rive gauche parisienne auraient intérêt à méditer :

Ambassadeur d'Israël à Paris au plus fort de la deuxième intifada, je tentais bien d'expliquer à mes interlocuteurs – et notamment aux médias – qu'il ne servait à rien de diaboliser Sharon. Le revirement assez spectaculaire, en effet, qu'on observe dans les commentaires, est plus éloquent sur le sérieux d'un certain journalisme que sur l'évolution objective de l'ancien premier ministre ! Comprenez-moi bien, il ne s'agit pas de s'interdire le jugement de valeur ; après tout, c'est aussi le devoir de la presse d'opinion. Mais il s'agit de ne pas permettre au jugement de valeur d'obscurcir la perception du réel. Comme il est difficile d'aborder la complexité de l'action et de la trajectoire d'un homme politique tel qu'Ariel Sharon, il est tentant de passer de la diabolisation aux dithyrambes.


Le conflit israélo-palestinien a beau être une tragédie où rien n'est simple, il n'a jamais cessé, en France, d'être jugé et interprété à l'aune d'un pur manichéisme. On a toujours voulu voir dans le choc des légitimités israélienne et palestinienne une lutte au corps à corps entre le Bien et le Mal. Cette grille de lecture est vraiment absurde. Reste que c'est sa force même de séduction qui explique que, sur les rives de la Seine, Ariel Sharon n'ait jamais cessé d'être perçu à travers le prisme d'une radicalité conceptuelle foncièrement erronée, ou du moins simplificatrice. On a eu longtemps la brute assoiffée de sang arabe, voici désormais le de Gaulle israélien.

Un homme est toujours le produit d'une somme d'expériences et on oublie parfois qu'il est tributaire de forces politiques, sociales et culturelles qui le dépassent. Le politicien en restera à jamais prisonnier ; l'homme d'Etat saura en faire un levier d'action.


En conséquence, notre bien-pensance pourrait aussi, à la lumière de son revirement sur Sharon, réfléchir à sa position sur Bush à l'aide du texte suivant. Mais voilà, la bien-pensance est-elle capable de tirer leçon de ses erreurs ? J'en doute. Il suffit de se rappeler la trajectoire de Sartre, faite de reniements d'un totalitarisme pour mieux tomber dans la vénération d'un autre totalitarisme.

Les anti-Bush répètent qu'une démocratie ne s'impose pas par la force (en dépit des exemples fournis, après la Deuxième Guerre mondiale, par l'Allemagne, l'Italie, l'Autriche, le Japon). Il est pourtant aisé de constater que la démocratie n'a cessé, depuis 2003, de progresser en Irak : le pays a la presse la plus libre du monde arabe ; en janvier 2005, trois consultations ont eu lieu, qui ont connu des taux de participation croissant malgré les interdictions intégristes.


Contrairement aux prédictions, la Constitution a été adoptée par référendum en novembre. Les sunnites se sont ralliés, le 15 décembre, aux élections à l'Assemblée nationale. Ni le choc des civilisations, ni le soulèvement de la rue arabe, ni le détournement du pétrole, ni la guerre civile, ni la libanisation du pays n'ont eu lieu, à ce jour. Les anti-Bush ne peuvent se raccrocher qu'à la persistance du terrorisme, mené par des islamo-fascistes et des nostalgiques de Saddam Hussein, de plus en plus coupés du peuple.

Thierry Wolton, dans son livre 4eguerre mondiale (Grasset) : «Avec les élections en Afghanistan et en Irak, avec le retrait syrien du Liban et le retrait israélien de la bande de Gaza, avec le scrutin municipal en Arabie saoudite, avec au Koweït le droit de vote accordé aux femmes, les choses ont commencé à bouger dans le monde musulman depuis que les Américains y sont intervenus.» Les augures soutiennent désormais que les processus démocratiques profiteront à l'islamisme radical. Les arabo-musulmans seraient-ils donc voués à l'obscurantisme ? Evidemment, non.


Si vous voulez vraiment savoir ce qui se passe en Irak, faites une petite recherche sur les blogs d'Irakiens.

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