mercredi, septembre 02, 2009

Fateful choices (Ian Kershaw)

Ian Kershaw expose dix décisions des années 1940-1941 qui ont largement façonné le monde dans le quel nous vivons.

1) Mai 1940. La décision de la Grande-Bretagne de continuer la guerre.

Dans la droite ligne de Five days in London.

Hitler a failli gagner définitivement la guerre à l'ouest la dernière semaine de mai 1940. Rappelons qu'il était loin d'être un imbécile (1).

Churchill a admirablement manoeuvré pour empêcher qu'une paix séparée soit négociée à ce moment là.

L'argument churchillien tenait en ceci : si des négociations étaient engagées, elles finiraient par arriver aux oreilles du public et démobiliseraient les Anglais.

La situation était tellement dramatique que le peuple anglais serait impossible à remobiliser, si les négociations tournaient mal, après ce "lâche soulagement" de l'ouverture de négociations. Hitler serait donc dans une insupportable positon de force.

Engager les négociations revenait à descendre une "pente glissante" (l'expression est de Churchill) mortelle.

C'est exactement ce qui s'est passé pour la France en juin. Comme quoi Churchill avait oublié d'être con.

On remarquera qu'Hitler a perdu par là où il avait péché : si Churchill l'a emporté au sein du cabinet britannique, c'est qu'il avait le soutien de Neville Chamberlain qui, ayant été beaucoup trompé par Herr Hitler, n'était plus disposé à lui faire confiance.

2) Juillet-aout 1940 : la décision d'Hitler d'attaquer l'URSS.

En réalité, c'était à peine une décision dans la mesure où aucune alternative n'a été sérieusement étudiée.

Le plan de la Kriegsmarine d'une guerre atlantique et méditerranéenne destinée à mettre d'abord la Grande-Bretagne à genoux a été négligé. Quand on sait que la bataille de l'Atlantique a été le constant souci de Churchill pendant 1941-42, on peut se demander si l'Allemagne n' pas raté une occasion.

3) Aout-septembre 1940 : le Japon s'allie avec l'Allemagne


Bien entendu, cette décision était le prélude d'une guerre avec les Etats-Unis. Tout le monde le savait.

Rarement la psychologie et la culture ont autant pesé. Car, dès les années 30, la voie du développement japonais d'après-guerre, fantastique expansion économique sous protectorat américain, était ouverte, mais les esprits n'étaient pas prêts.

Ils ne voyaient que les moyens de force, pas les moyens subtils.

4) Automne 1940 : l'Italie décide d'attaquer la France puis la Grèce

L'attaque contre la France a mis fin à une non-belligérance dont l'Italie, en jouant habilement, aurait pu tirer un grand parti.

Peut-être la décision la plus désastreuse des dix qui nous occupent : la campagne italienne en Grèce a été humiliante, les Italiens se sont révélés fidèles à leur caricature, bordéliques, vains et lâches.

La conséquence la plus lourde de cette initiative funeste a été que la Grande-Bretagne a réussi à ne pas être repoussée au-delà de Suez. Les moyens consacrés a un objectif sans importance stratégique, la Grèce, ont manqué pour l'atteinte d'un objectif majeur, l'isolement de la Grande-Bretagne. On peut difficilement imaginer décision plus idiote, et elle fut ressentie comme telle, notamment par un Hitler entré en fureur (désolé pour le calembour).

Ces décisions très malvenues sont la conséquence de la structure du pouvoir fasciste : pour le meilleur et pour le pire, un seul homme décide, sans freins ni contrôles.

5) Eté-automne 1940 : les Etats-Unis aident la Grande-Bretagne sans s'engager

Nombreux ont été ceux qui ont reproché sa frilosité et son indécision à Roosevelt.

Mais il était en phase avec le peuple américain. Pour le coup, l'Amérique était plus fidèle à son tempérament isolationniste qu'à sa vocation morale démocratique.

Probablement, avec le recul, peut-on dire que Roosevelt a pris la décision la plus sage : brusquer l'entrée en guerre américaine n'aurait pas changé grand'chose en Europe et une guerre avec un peuple divisé n'est pas une bonne chose.

6) Automne 1940 hiver 1941 : Staline décide de ne prendre aucune mesure préventive contre une invasion, de manière à ne pas provoquer les Allemands

Une telle décision, désastreuse à une échelle inconnue dans l'histoire humaine (elle a provoqué des millions de morts russes), étonne de la part de l'archi-paranoïaque Staline.

En fait, Staline s'est lui-même enfermé dans cette folie : en décapitant l'Armée Rouge (plus des trois quarts des officiers généraux exécutés) en 1937-39, il l'a réduite à un état d'impuissance comme aucune guerre n'aurait pu le faire. Avec un dictateur pareil, la Russie n'avait pas besoin d'ennemis.

Staline a donc été cohérent : l'Armée Rouge étant incapable de repousser une invasion, il a fait ce qu'il pouvait pour la retarder : faire sentir aux Allemands qu'il n'était pas belliqueux.

Que l'Armée Rouge ait pu se refaire en deux ans malgré le climat de terreur rouge (assoupli très momentanément sous le poids des nécessités) témoigne du patriotisme des Russes.

Staline ni personne de son entourage n'a jamais eu le moindre compte à rendre de cette épouvantable déroute. Le rapport Kroutchev dénonçant le stalinisme a évité les mises en cause trop violentes du système.

Comme d'habitude, les communistes français, béats d'admiration devant un tel satrape, ont montré leur grande intelligence.

7) Automne 1941 : Roosevelt s'engage plus profondément sans toutefois déclarer la guerre.


C'est la continuité de l'habileté de Roosevelt.

8) Automne 1941 : les Japonais décident d'attaquer les USA

Voilà une mauvaise décision qui a influencé l'ensemble de la guerre. Si les Japonais avaient choisi d'attaquer l'URSS en soutien de l'Allemagne, il est douteux que l'Armée Rouge eusse pu combattre sur deux fronts.

Les gains étaient moins immédiats pour le Japon mais c'était probablement la meilleure décision à long terme.

Cependant, les Japonais étaient orientés depuis des années vers les conquêtes d'Asie du sud, donc vers la confrontation avec l'Amérique. Comme souvent, il s'est avéré impossible de changer la course établie, malgré ses défauts.

Il n'a pas manqué de voix contrariantes. Mais briser un consensus en cours pour en construire un nouveau est la plupart du temps hors de portée d'une grosse organisation, et pas seulement du gouvernement japonais (2).

9) Automne 1941 : Hitler décide qu'il faudra bien finir par déclarer la guerre aux Etats-Unis

La décision de se mettre à dos le colosse américain paraît téméraire. Mais, en réalité, un état de guerre non déclarée, notamment dans l'Atlantique, existait déjà. Hitler n'a fait que préempter la déclaration, soulageant au passage Rossevelt de cette décision.

10) Printemps 1941 : la solution finale de la question juive

On ne peut pas considérer qu'il y a eu une décision en la matière. Mais, plus subtilement, des encouragements, des feux verts, des indications. C'est bien dans la manière, fort adroite, de Hitler de mener son monde là où il veut.

Ce comportement répondait à des nécessités : l'absence de décision nette, datée, brouillait les responsabilités et empêchait les oppositions éventuelles de se cristalliser. De plus, le génocide juif est une des clés qui expliquent que les Allemands soient restés jusqu'au bout fidèles à Hitler (longtemps, les Alliés ont entretenu l'espoir d'un coup d'Etat qui n'est jamais venu). La culpabilisation est plus efficace quand elle n'est pas trop explicite, quand on se sent coupable mais qu'on ne peut mettre des mots précis dessus.

Pour Kershaw, des dix décisions examinées, c'est la plus inéluctable, celle pour laquelle on ne peut imaginer de voie alternative. Une fois Hitler au pouvoir, on ne voit pas comment l'extermination des juifs aurait pu ne pas avoir lieu.

Conclusion


Ce livre est passionnant, même pour ceux qui ne s'intéressent pas à cette période.

On voit que la politique consiste souvent non pas à choisir entre deux voies égales, mais à choisir entre continuer dans le sens de la pente antérieure et changer de voie.

Les décisions sont toujours à l'articulation du collectif et de l'individuel. Le collectif entraîne dans une direction, mais la décision est toujours le fait d'individus. La décision parmi les dix qui découle le moins de ce qui l'a précédée, pour laquelle les options étaient les plus ouvertes, est la décision britannique de continuer la guerre. A bien des égards, elle a été prise contre ce qui l'a précédée. Encore une fois, une analyse met en lumière la personnalité exceptionnelle de Churchill.

La supériorité des démocraties s'y manifeste : les oppositions étant explicites et légitimes, les choix sont faits par confrontation d'options avec évaluation, quelquefois erronée, des avantages et des inconvénients. La prise de décision est rationnelle.

Inversement, par rapport aux authentiques démocraties, les dictatures (auxquelles nous ressemblons de plus en plus) souffrent d'une absence de débat : les opinions minoritaires n'étant pas exprimées, la décision prise n'est la meilleure que par chance, aucun processus n'assure que toutes les options ont été explorées.

C'est d'ailleurs un point qui me soucie fort dans nos démocraties consensuelles contemporaines : les oppositions (voir les sujets qui occupent ce blog) sont de plus en plus souvent dénigrées, déligitimées et sommées de se taire, ce qui entraîne le risque assez terrifiant de décisions irrationnelles. C'est encore un des multiples traits par lesquels nos démocraties imitent le fascisme.

Nous sommes dans une ère de plus en plus post-démocratique : on garde les apparences de la démocratie, essentiellement les campagnes électorales et les élections, mais le consensus est privilégié au point qu'on n'a plus le choix qu'entre bonnet blanc et blanc bonnet.

Les lois qui rétablissent le délit d'opinion, qu'on les baptise «mémorielles» ou «anti-phobie», m'ont toujours considérablement inquiété dans leur principe même. La lecture d'un tel livre, où l'on voit l'importance d'examiner toutes les options, surtout iconoclastes, pour arriver à la bonne décision ne peut que me renforcer dans mon aversion.

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(1) : je me suis récemment pris la tête sur le site de Causeur avec des connards (c'est mal de s'énerver contre les abrutis qui vous font la leçon en en sachant dix fois moins que vous, mais je ne peux pas m'en empêcher) qui me soutenaient qu'Hitler était un fou chanceux et que la question de son intelligence était secondaire. Evidemment, encore une discussion qui obéit à la loi fatale des forums : moins on en sait et plus on est con, plus on ouvre grand sa gueule.

Si on prend Hitler pour un imbécile, on se condamne à ne rien comprendre au nazisme (il n'est d'ailleurs pas étonnant que les défenseurs de l'imbécilité d'Hitler soient nos "anti-fascistes" : ils ne comprennent absolument rien au fascisme, qu'ils utilisent comme un épouvantail commode contre leurs adversaires).

(2) par exemple, il y a en France un consensus assez partagé chez les experts, y compris de gauche, sur les ravages de l'assistanat et l'hypertrophie de l'Etat. Mais ce consensus ne trouve absolument aucune traduction politique, y compris à droite, et cest l'ancien consensus étatiste gaspilleur et maternant qui perdure.

9 commentaires:

  1. dictature, démocratie
    collectif, individuel
    Pour moi il y a un mystère allemand.
    Ils sont trop. Trop tous dans le même sens.
    Récemment trop pacifistes, ou trop verts. Comme un vol d'étourneaux.
    Ils ont dominé le XXème siécle et son orientation. Un rôle majeur pour la guerre de 14, la sponsorisation de Lénine, la deuxième manche.
    Je ne connais pas de pays où l'aristocratie, qui a les loisirs d'avoir une opinion, de penser, ait autant suivi un voyou comme un seul homme quelles qu'en ait été les raisons.
    Les aristocrates n'ont réagi très tardivement que devant le début du Götterdämmerung.
    Tant que ça marchait ...
    Ailleurs, dans d'autres pays et d'autres temps, ils se sont divisés, quelles qu'en aient été les raisons, à l'intérieur même des familles.
    Peut être leur drame c'est de n'avoir pu être colonisés par les Français qui leur auraient apporté désordre et diversité sous couleur de cartésianisme ...

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  2. En tout cas, on remarquera qu'aucun des dix choix n'engage la France. Ca fait mal à notre orgueil national, mais en même temps, ça nous remet à notre place.

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  3. A propos des Allemands il y a en effet un mystère mon explication est qu'ils ont été trop sensible à leur propre propagande au 19eme siècle. Ils se seraient donc tirer une balle dans le pied en glorifiant tout ce qui était germanique pour consolider l’unité allemande récente. Et comme d’habitude ce sont les parents qui mangent le raisin vert et les enfants qui ont en les dents agacées. Je crains pour le présent la propagande nationaliste chinoise qui pourrait avoir un effet tout aussi délétère.
    Dans les point d’histoire évoqué, l’attaque de l’URSS par le Japon n’est pas très réaliste, c’est oublié deux points les deux pays ce sont affrontés en Mandchourie en 1936 (mauvais souvenir pour le Japon) et les meilleurs unités de l’armé rouge étaient en Sibèrie. Pour faire court cela aurait été un vrai désastre pour le Japon de plus ils n’auraient rien gagné en matière de ressources primaires qui étaient le but premier de la guerre pour la zone de coprospérité.

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  4. Les Japonais ont raisonné comme vous, on voit où ça les a menés.

    Il est illusoire de refaire l'histoire mais c'est un exercice amusant.

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  5. j'ai commis il y a un an une critique du premier chapitre de Kershaw, précisément sur la fable d'une décision "démocratique" de continuer le combat en 1940 : http://www.39-45.org/histomag/mag-octobre2008.pdf

    je serais intéressé par le titre du débat sur "Causeur".

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  6. La spécificité des régimes autoritaires, censée leur donner l'avantage sur les démocraties moribondes, se retourne contre eux. En URSS par exemple, jusqu'à l'opération Barberousse, Staline - et on ne simplifie guère en évoquant Staline et non pas "les dirigeants" ou "le gouvernement" - ne voulait pas croire à une agression allemande, convaincu qu'il était que la menace venait des "capitalistes", c'est-à-dire essentiellement des Français et des Britanniques. Les sociétés atomisées sont une aubaine pour les services de renseignement et de contre-espionnage, mais une malédiction quand le NKVD lui-même se contente de dire au "vojd" ce qu'il veut entendre. Les sociétés démocratiques, à l'inverse, sont peut-être plus rebelles à l'esprit du renseignement, de par leur attachement aux libertés individuelles, mais les informations récoltées sont intelligemment exploitées.

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  7. J'avais déjà lu ce très intéressant papier (pas le livre mais ça ne saurait tarder) lorsque vous l'avez publié courant l'été. Effectivement, l'auteur y souligne avec raison les points capitaux de la période 1940-1941 et il n'est pas surprenant que notre pays en soit totalement absent.

    Je suis persuadé, aidé en cela par de nombreuses lectures, que la déculottée subit en mai-juin 40 marque non-seulement la plus grosse défaite, politique et militaire, de notre histoire mais reste aussi le signe incontestable de la faillite, en dépit de l'action courageuse du général de Gaulle, intellectuelle, morale et politique de la France. La faute essentielle en revient, déjà, à la classe politique, plus soucieuse de prébendes que d'engagement. 70 ans plus tard, nous n'en sommes toujours pas sortis et on peut même affirmer qu'actuellement, cette façon de faire de la politique a réussi, après l'intermède 1958-1981, à reconquérir toute sa capacité de nuisance.

    Il faut cependant noter, qu'à la différence de l'Angleterre qui avait peu souffert sur son territoire du premier conflit mondial, la France est un des pays qui a supporté l'essentiel de ces terribles combats avec ce que ça suppose de destructions et de misères. Il ne faut donc pas s'étonner de voir l'opinion publique de l'époque plutôt pacifiste que belliciste. Il n'empêche que les vingt ans qui séparent les deux conflits ont suffit pour laisser les politiques dilapider les petits gains obtenus après la "victoire" de 1918. Ajouter à cela un haut-commandement d'une rare incompétence (connaissez-vous le fumeux plan de l'armée de l'air visant à bombarder les raffineries de Bakou avec des avions qui n'existaient que sur le papier en s'appuyant sur une précision de bombardement obtenue 60 ans plus tard avec le GPS et le guidage Laser?). Les 100 000 morts de la campagne de France témoignent, si besoin en était, de l'âpreté des combats et du courage malheureux des combattants (preuve que tout n'est pas noir en cette douloureuse période). Il reste néanmoins quelques grosses zones d'ombres comme l'importance des sabotages communistes dans les industries de l'armement ou dans les unités combattantes même, comme le dit ce témoin, à l'époque incorporé dans le régiment de chars d'un certain Charles de Gaulle (En France, « c’était la guéguerre, la guerre en fantaisie ! », juge Léopold Baccini, toujours alerte à 89 ans... C’est en Sarre voisine que la France est d’abord entrée sur le territoire allemand, le 9 septembre 1939. Mais l’offensive est de courte durée et sans violence. « Je n’y étais pas. Mon régiment devait partir pour la Norvège, mais sur 15 chars, 13 étaient en panne, sabotés par les communistes qui ne voulaient pas que l’on s’attaque à la Russie… Alors on n’est pas partis ! On n’était pas préparés ! », se souvient-il moqueur. "http://www.la-croix.com/article/index.jsp?docId=2392053&rubId=1094").

    En 1945, le Général a du, contraint et forcé, conclure une sorte de modus-vivendi avec le PC à la Libération, afin d'éviter à la France de devenir la démocratie populaire la plus à l'ouest du continent européen. A ce sujet, je crains fort que l'éducation nationale ait été alors un des objets du marché avec les quelques nationalisations que nous connaissons. Du coup, un voile des plus pudique a été jeté sur les agissements de la CGT et du PC et, à ma connaissance, aucune étude sérieuse n'existe encore sur ce thème.

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  8. Je ne connais pas le sujet des sabotages communistes.


    Je me souviens juste que JL Crémieux-Brilhac dans Les Français de l'an dit qu'ils ont peu compté par rapport à l'incompétence.

    Vu l'omerta, ou la grande pudeur, qui prévaut en France dès qu'il s'agit d'évoquer les crimes communistes, je ne doute pas qu'ils soient plus importants que ce qu'on nous dit.

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  9. Ce n'est pas de l'histoire, mais de la mythologie. Kershaw croit à la liberté humaine (et donc à la capacité du chef d'Etat à prendre des décisions en toutes circonstances). Il faudrait être plus nuancé pour être plus scientifique. J'en parle ici : http://poesis.blog.lemonde.fr/2009/09/07/une-anecdote-sur-martin-luther/

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