C'est la continuation de la «nouvelle histoire» de la seconde guerre mondiale qui se met en place depuis vingt ans.
Quelles sont les thèses de cette «nouvelle histoire» ?
> Adolf Hitler avait annoncé son programme dans Mein Kampf.
> Il s'est montré dans l'application de ce programme d'une habileté sans scrupules proche du génie. La thèse aujourd'hui populaire du fou dangereux qui a eu de la chance prouve le succès de ses manipulations : comment peut-on penser sérieusement, soixante-dix ans après, que la prise de pouvoir nazie, le redressement de l'Allemagne et l'écrasement sans précédent de la France ne furent qu'une question de chance ?
> le résultat des manœuvres hitlériennes fut que, en juin 1940, tous les dirigeants français (sauf un obscur sous-ministre général de brigade à titre temporaire) étaient persuadés que la bataille de France concluait (si ce n'est pour toujours, au moins pour très longtemps) la seconde guerre mondiale, que, suivant le mot de l'un des plus détestables d'entre eux, l'Angleterre allait avoir le cou tordu comme un poulet et que l'habileté et le patriotisme résidaient dans un accommodement avec Hitler (1).
En Grande-Bretagne, une large fraction de la classe dirigeante était persuadée qu'un arrangement raisonnable avec Hitler était la seule voie sage (2). Hitler comptait sur cette paix séparée.
> l'obstacle vers un triomphe hitlérien s'est appelé Winston Churchill, arrivé au pouvoir in extremis le 10 mai 1940. L'idée de fond de Churchill était qu'Hitler n'était pas un dictateur comme les autres, qu'il n'y avait pas d'accommodements raisonnables possibles avec lui et que, si on se laissait aller à discuter avec lui en position de faiblesse, il en tirerait tous les avantages jusqu'à la mise en esclavage. La seule politique possible face à Hitler était la guerre à outrance, sans merci, sans pitié.
Churchill, en circonvenant les partisans d'un arrangement, a réussi à empêcher une victoire d'Hitler à l'été 1940.
Une fois qu'on a bien compris tout cela, l'histoire du drame de Mers El Kebir devient limpide, si ce n'est dans ses détails, du moins dans ses enjeux.
Churchill a absolument besoin de prouver par des actes ce qu'il dit dans ses discours, à savoir que la Grande-Bretagne est prête à tout, vraiment à tout, plutôt que de se rendre. Et quelle meilleure preuve de résolution extrême que de tirer sur ses alliés de la veille, avec qui il existait d'authentiques liens d'amitié ?
Churchill avait besoin d'un geste spectaculaire et frappant. C'est tombé sur les malheureux marins de Mers El Kebir.
Dans cette optique, les discutailleries d'après coup pour savoir si la flotte française d'Oran était une vraie menace pour la Royal Navy apparaissent pour ce qu'elles sont, secondaires.
On s'aperçoit aussi que les tentatives de mettre le drame d'Oran sur la compte de la panique ou de l'alcool sont dérisoires.
Visiblement, en 2010, ça n'est toujours pas compris par beaucoup. Comme n'est toujours pas compris le soutien de De Gaulle à Churchill.
Heureusement, pour la suite de l'histoire, trois des destinataires du geste churchillien l'ont parfaitement compris : Adolf Hitler, Franklin Roosevelt et Staline.
En effet, Hitler a compris que son espoir d'une paix séparée avec la Grande-Bretagne s'éloignait momentanément et qu'il lui faudrait d'abord vaincre l'URSS pour saper le moral des Anglais. Roosevelt et Staline ont compris que la guerre continuait et en ont tiré certaines conséquences.
Il n'y a que les pétainistes, déclarés ou non, qui n'ont toujours rien compris.
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(1) : c'est ce que soutient encore Eric Zemmour dans Mélancolie française. Comme quoi la réussite de la propagande hitlérienne est durable.
(2) : des historiens soutiennent que Churchill, par son obxtination, a ruiné la grande-Bretagne et qu'une paix avec Hitler en 1940, le laissant aux prises avec l'URSS, aurait été bien plus intelligente.
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"accomodement raisonnable"... mais où ai-je donc déjà entendu cette expression ???
RépondreSupprimerbon, blague à part...
Churchill nous montre l'exemple à suivre : on ne s'assoit pas à la même table qu'une bande de voyous de grand chemin, a fortiori pour négocier un armistice. On les combat, on les détruit. Il faut un courage et une détermination énormes pour garder la tête froide quand le monde part en vrille. Churchill et De Gaulle ont d'autant plus de mérite qu'ils ont osé braver la pensée unique de leur temps et avoir raison contre tout le monde. Les invertébrés qui prétendent nous gouverner aujourd'hui ne valent pas un mégot de Churchill, même pas un pet !