Dans le sillage de Never let me go, je continue à me poser les questions qui me turlupinent depuis un certain temps.
J'ai commencé par mettre en cause la médecine par ses effets démographiques et politiques.
Avant l'arrivée des colons blancs, l'Afrique était en équilibre démographique. Comme disait un vieux colon dans Les racines du ciel : «On y baisait comme des lapins et on y mourait comme des mouches.» Aujourd'hui, on y baise toujours comme des lapins, mais on a cessé d'y mourir comme des mouches.
Or, les effets de cette explosion démographique sont dévastateurs : dissolution des liens traditionnels, tensions interethniques, inflation, pénuries, famines, ... Les révoltes arabes, dont je suis loin d'être enthousiaste (j'espère un happy end, mais je n'en suis pas persuadé), ne sont qu'un signe parmi d'autres.
A l'autre bout de la vie, chez nous, l'inflation continue de la tranche d'âge entre 70 ans et 120 ans est à mes yeux un grand malheur collectif (même si il réserve des bonheurs individuels). En effet, nos sociétés y perdent le goût de l'aventure, le souci de l'avenir, l'attirance pour la découverte.
Nous vivons dans des sociétés vieilles qui saccagent les qualités humaines à force de rabougrissement, de frilosité et de nombrilisme.
Les Romains, qui vivaient deux fois moins longtemps que nous, faisaient des lois pour l'éternité. Nous faisons des lois de circonstance, pour l'événement de la semaine dernière et qui ne dureront pas cinq ans.
Ceci, pour la collectivité, mais pour les individus ?
Nous mourrons tous un jour, mais la médecine moderne, en masquant cette inéluctabilité de la mort sous la froideur technicienne, nous empêche d'apprivoiser notre propre mort. Nous sommes loin du Que philosopher, c'est apprendre à mourir, de Montaigne.
Et la peur panique de la mort débouche sur l'instrumentalisation de l'homme : bébé-éprouvette, bébé-médicament, cellules-souches, embryons-médicaments, trafic d'organes, etc.
Les nazis utilisaient l'humain comme matière (on connaît les abats-jour en peau de juifs). Nous n'en sommes pas là mais nous suivons une pente inquiétante.
Le tableau philosophique de la médecine contemporaine n'est pas rose. Mais je ne sais pas comment y parer.
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