Je trouve excellente cette chronique de Stéphane Denis dans Valeurs Actuelles. Elle traduit exactement mon sentiment.
L'allusion à l'invasion de la Pologne est une reprise de Woody Allen : «Quand j'écoute trop Wagner, j'ai envie d'envahir la Pologne.»
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Déjà, la nostalgie
Stéphane Denis
le jeudi, 31/05/2012
– Comment trouvez-vous le nouveau gouvernement ?
– Un peu cheap.
– Ce n’est pas une raison pour parler anglais.
– Pardonnez-moi, je ne trouve pas l’équivalent en français. Petit bras, peut-être.
– Vous voulez parler du style ? De François Hollande dans sa Citroën hybride ou de Duflot en jean ?
– Pas vraiment. Duflot a eu raison de mettre un jean, pour une fois il était propre et il lui va bien. Si ça plaît au président de se ridiculiser dans une voiture trop petite pour remonter les Champs-Élysées déserts, on aurait dit les Bidochon sur la route des vacances, c’est son affaire. Non, c’est autre chose. Un mélange d’amateurisme et d’entre-soi.
– C’est vrai, on a l’impression qu’ils n’ont jamais rien vu.
– Mais ils n’ont jamais rien vu. Ce sont des socialistes : ils vivent entre eux, avec des problèmes de socialistes, dans des réunions de socialistes, en parlant le socialiste.
– J’ai compris. Vous êtes comme les journaux qui les soutiennent, comme Laurent Joffrin qui les met en garde dans le Nouvel Observateur, vous les trouvez trop gentils.
– Mais ils ne sont pas trop gentils. Ils ne sont pas gentils du tout. Ils sont extrêmement sectaires, pour commencer. Prenez M. Musca, secrétaire général de l’Élysée du président Sarkozy. Il aurait dû être nommé à la direction de la Caisse des dépôts et consignations. Pour un secrétaire général battu, il y avait là quelque chose de naturel, qui tient à parts égales du dépôt et de la consignation : M. Musca était confié à l’État qu’il avait servi en attendant que la chance lui sourie à nouveau. Le président Sarkozy n’a pas voulu le faire avant le résultat de l’élection, alors qu’il le pouvait, c’était l’usage. Cette délicatesse charmante vient de recevoir sa récompense : le président Hollande va en nommer un autre. Un à lui. Vous verrez que ce sera tout le temps comme cela. Entre socialistes, vous dis-je.
– Qu’est-ce que parler le socialiste ?
– Des mots comme “république” ou “responsabilité” prononcés sur un ton définitif, plus personne dès qu’il faut prendre une décision, une grande détermination sur les principes et une grande souplesse dans leur application. On baigne là-dedans depuis trois semaines.
– C’est tout ?
– Non, il y a aussi le recours universel à l’argent des autres, mais nous en avons déjà parlé.
– Pourtant, qu’il s’agisse de Bruxelles, de Chicago, de Berlin, le président Hollande se montre partout très ferme.
– Oui, il a pris 10 kilos.
– Je croyais que vous l’aimiez bien.
– Je l’aime beaucoup. Je crois simplement qu’il a une haute idée de lui-même depuis qu’il a été élu et que cela suffit à son horizon.
– Allons donc, il sait se montrer impitoyable. Tenez, il a fait signer par les ministres une charte de déontologie.
– Et dans le quart d’heure trois d’entre eux se sont fait pincer, mais c’est le problème des chartes de déontologie : la charte c’est pour le public, la déontologie, c’est pour les autres. En maintenant si jovialement Ayrault, Montebourg et Taubira en place, François Hollande a fait preuve d’un cynisme dont j’avais oublié qu’il fût capable.
– Cependant les médias saluent le retentissement mondial de son élection, les perspectives qu’il a ouvertes en Europe, l’enthousiasme du pays rassemblé.
– Vous voulez parler des médias français. Il faut les comprendre : les uns se sont retournés, les autres ont fait campagne contre le président Sarkozy ; il faut bien qu’ils trouvent aujourd’hui son successeur remarquable, que dis-je, surhumain ! Mais cela dit, je me demande…
– Oui ?
– Je ne sens pas beaucoup de conviction dans ces articles. On dirait que leurs auteurs cherchent à se persuader. Je flaire même un léger doute.
– Allons donc ! Vous n’allez pas regretter l’ancien régime ?
– Mais si ! La fausse modestie du nouveau m’horripile, sa vertu m’exaspère et son perpétuel “Nous verrons après une vaste concertation” me donne envie d’envahir la Pologne. Quand je pense aux foucades du président Sarkozy, son style épouvantable, son entregent international… Nous ne connaissions pas notre bonheur !
Stéphane Denis
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