Entretien de Maxime Tandonnet dans le Figaro :
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A la lecture de votre livre, on a le sentiment que l'Etat est finalement impuissant face à ces questions [la sécurité et l'immigration]. Malgré le volontarisme de Nicolas Sarkozy et la multiplication des projets de loi, la plupart des initiatives n'aboutissent pas. Quels sont les principaux obstacles auxquels vous vous êtes heurtés ? Sont-ils de nature institutionnelle, politique ? S'agit-il tout simplement de la chape de plomb du politiquement correct ?
En effet, j'ai été impressionné par la puissance des obstacles à l'action publique, pas seulement sur la sécurité d'ailleurs. Le sentiment de l'impuissance publique pèse en permanence sur les épaules d'un acteur du pouvoir politique. Les causes en sont multiples: la situation budgétaire calamiteuse, la prolifération des jurisprudences, constitutionnelles, européennes, qui limitent énormément le champ des décisions possibles, formant un étroit carcan, le climat de conservatisme et d'inertie générale. Un exemple sur lequel je reviens longuement dans le livre. Le président demandait avec insistance la nomination de 50 inspecteurs des services fiscaux, auprès des policiers dans les quartiers touchés par le trafic de stupéfiants afin de traquer les signes extérieurs de richesse. Il lui a fallu plus d'un an pour y parvenir et cette mesure s'est avérée décisive. Pour faire bouger la réalité, il faut une extraordinaire patience et détermination.
Les juridictions ont-elle une part de responsabilité dans cette situation? Laquelle?
Il me semble que nous vivons dans des sociétés où les contre-pouvoirs, en particulier celui des grandes juridictions, les cours suprêmes, l'emportent globalement sur le pouvoir politique. Il faut bien entendu des contreparties et des contrôles face au pouvoir politique mais lorsqu'un certain point d'équilibre est franchi, on tombe dans la paralysie et tous ceux qui ont expérimenté le coeur du volcan le savent. Il y a les choix politiques qui sont censurés par le conseil constitutionnel, comme la taxe carbone en 2010. On peut s'en réjouir au cas par cas sur certains dossiers, mais sur le long terme, c'est l'autonomie et la marge d'action du pouvoir politique qui ne cesse de se restreindre. En outre joue la force de l'autocensure car le travail de préparation de la décision politique consiste à anticiper en permanence sur la réaction des juridictions. Cela pose le problème dramatique de l'avenir de la démocratie, du pouvoir réel du Parlement élu au suffrage universel qui en est le coeur.
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Maxime Tandonnet décrit ce que Mathieu Bock-Coté appelle le chartisme : à coups de chartes et de traités, on limite de plus en plus les pouvoirs du peuple souverain. Bien sûr, on argue toujours d'excellentes raisons et de bonnes intentions, mais l'essentiel demeure : ceux qui négocient et signent ces chartes n'ont absolument aucune légitimité, même si c'est légal.
En effet, il n'y a aucune justification démocratique à la limitation du pouvoir populaire avec des traités signés à l'étranger.
C'est la méthode Monnet, basée explicitement sur le mépris de classe de l'oligarchie pour les peuples.
Le renforcement des pouvoirs du conseil constitutionnel, lui aussi dépourvu de la moindre légitimité, participe du même mouvement de défiance.
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