Comme promis, je complète mon premier billet sur Catholix reloaded.
Des exégètes allemands du XIXème siècle, partant du principe que les miracles sont impossibles, ont prétendu que les Evangiles étaient tardifs.
En effet, si les Evangiles sont élaborés précocement, il reste beaucoup de témoins vivants pouvant les contredire et, donc, s'ils ont persisté, c'est que beaucoup leur ont accordé une certaine crédibilité. Il est plus difficile de prétendre que ce sont des fariboles ou des mythes.
Il faut d'abord séparer le contenu de la mise par écrit, de même qu'Homère fut mis par écrit tardivement, ce qui n'empêche pas un contenu précoce.
Parmi tous les arguments en faveur de la précocité des Evangiles, il y en a un que je trouve élégant.
C'est l'étude statistique des noms. Il y a environ 80 personnes citées dans les Evangiles : la répartition des noms correspond à celle qu'on connaît sur les tombes du 1er siècle en Palestine.
Quelques objections :
♘ : 80 personnes, est-ce suffisant ? C'est tout de même pas mal.
♘ : est-ce falsifiable ? Très difficilement. Essayez d'écrire un roman historique avec quatre-vingts personnages se passant au siècle précédent avec une bonne répartition des prénoms. Et bien sûr, sans les moyens modernes genre état civil.
♘ : est-ce un hasard du au fait qu'en un siècle les prénoms ont peu évolué ? Non. Le premier siècle est un siècle de bouleversements sociologiques et politiques. Les prénoms ont évolué.
Le même argument peut être utilisé pour la toponymie.
Plus globalement, les Evangiles contiennent très peu d'erreurs factuelles sur ce qu'il est possible de recouper avec des sources non-chrétiennes. Par exemple, on a longtemps douté de la présence en Palestine de la femme de Pilate, évoquée par Saint Matthieu, du fait d'une loi romaine interdisant aux fonctionnaires d'emmener leurs épouses outremer. Il se trouve qu'on a découvert que l'application de cette loi a été relaxée sous Tibère. Encore une objection qui tombe.
Concernant l'aspect factuel des Evangiles, il faut aussi comprendre que nous avons fait d'énormes progrès aux XIXème et XXème siècles dans la connaissance archéologique et philologique.
Enfin, il y a la question du style.
Julien Gracq, qui était athée mais grand styliste, a poussé une gueulante contre un auteur prétendant l'inexistence de Jésus. Il y a un style Jésus original révélant l'existence d'une personnalité originale. Ce n'est pas le lot des prophètes du commun de verser dans le calembour du genre « Tu es Pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise » (n'oubliez pas Chesterton : le secret de Jésus, c'est sa joie. Je pense même qu'il a hésité à écrire «son humour») .
De même, les Evangiles n'ont pas du tout le style mythique. Les évangélistes insistent lourdement qu'ils témoignent de choses vues.
Les épîtres de Saint Paul, qui font l'unanimité comme étant les écrits néo-testamentaires les plus anciens (vers l'an 50), font clairement référence à une doctrine déjà constituée.
Bref, l'hypothèse la plus simple, la moins tarabiscotée, donc la plus vraisemblable (vive le rasoir d'Ockham) est que les Evangiles sont des témoignages à chaud mis par écrit deux ou trois décennies plus tard.
samedi, décembre 19, 2015
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