mardi, janvier 12, 2016

Le 11 janvier n'est plus ce qu'il était

Le 11 janvier n'est plus ce qu'il était

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Le 10 janvier 2016, comme aux Invalides après le 13 novembre dernier, l'appareil d'État a décidé de faire la synthèse : les chœurs de la République en danger mais à la place du Chant du départ, «l'amour pour parler aux canons» et Les Prénoms de Paris pour répondre aux «kalachs». Or, la mort impose silence, gravité, dépouillement et l'on peut légitimement se sentir étranger à ce syncrétisme qui donne à tout événement le ton et les teintes d'une émission de variété.

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On a souvent évoqué, après le 11 janvier, la Fête de la Fédération qui s'était déroulée au Champ- de-Mars le 14 juillet 1790. La France, alors, montrait au son du Te Deum une unité retrouvée. Il fallait tout le cynisme de Talleyrand pour lâcher à l'abbé Louis en montant à l'autel: «Par pitié, ne me faites pas rire.» Un an plus tard, s'il y eut une deuxième Fête de la Fédération, elle ne fut qu'une date entre l'arrestation du roi à Varennes le 21 juin et la fusillade du Champ-de- Mars le 17 juillet où La Fayette, à la tête de la Garde républicaine, fit tirer sur la foule réunie par le club des Cordeliers. L'Histoire poursuivait son galop et l'émotion avait laissé place à la politique.

Il en va de même aujourd'hui. La France de Charlie a connu de nouvelles attaques. L'État islamique continue ses massacres. Nos ministres nous répètent, tous les jours, que notre pays sera encore frappé et qu'il faudra des années pour vaincre l'ennemi qui nous a déclaré la guerre. Le pays est encore sous le choc des attentats de novembre et les alertes des commissariats de Valence et de la Goutte d'Or entretiennent l'inquiétude. Il attend autre chose que l'affichage d'une compassion sans limite par des gouvernants impuissants. La déroute de l'Europe face à la crise migratoire n'est pas faite pour le rassurer. «L'esprit du 11 janvier» apparaît, dès lors, comme une illusion que les faits ont dissipée. La dernière tentative du monde d'hier qui voudrait pleurer les victimes d'une guerre longue et cruelle comme on s'afflige de la mort de Michel Delpech ou de David Bowie.
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