lundi, février 11, 2019

L'appel du 18 juin 1940 (F. Delpla)

Il s'agit d'une relecture de circonstance car elle est adaptée aux événements actuels, mais je m'aperçois que je n'en avais pas fait la recension au premier passage.

Delpla démontre que, contrairement à la légende gaulliste d'une totale indépendance de l'appel, De Gaulle a du négocier pied à pied avec un cabinet anglais peuplé de beaucoup d'appeasers « raisonnables » (ce n'est pas pour rien qu'un livre de GM Benhamou sur les premiers Résistants s'intitule C'était un temps déraisonnable) et dans lequel Churchill, pas vraiment en position de force, ne pouvait le soutenir à fond.

D'où le fait que le fameux message a été lancé le 18, et non le 17 après celui de Pétain comme il eut été logique, et contient cet appel étrange (qui m'a toujours intrigué jusqu'à cette lecture de Delpla) aux « officiers et soldats, ingénieurs et ouvriers de l'armement » plutôt qu'à l'ensemble du peuple français.

Au fond, c'est la même histoire qu'avant guerre. Les partis politiques ont joué la légalité « pour mettre les nazis dans leur tort » plutôt que la légitimité et se sont fait baiser en beauté. Les appeasers jouaient le calcul, le compromis, la politique classique, et étaient sur le point de se faire baiser en beauté eux aussi.

Churchill et, dans une moindre mesure, De Gaulle ont mis fin à cette pente infernale en posant le « non » d'abord et en faisant la politique adaptée ensuite. Churchill a dit  à Pétain : « Vous croyez avoir à faire à Bismarck, vous avez à faire à Gengis Khan ».

Ce qui nous ramène à notre temps.

Un ami (dont je tais évidemment le nom) me dit souvent que les Gilets jaunes doivent sortir de la légalité et se montrer violents car l'usage qui est fait de légalité contre eux est illégitime (le gouvernement répond à une contestation politique par des coups de LDB dans la gueule, il n'y a pas plus illégitime que cela dans un pays qui se veut démocratique). Cette position ne peut être que renforcée par le sadisme et la méchanceté du parti de l'ordre et de la légalité (1). Elle n'est pas belle à voir et à entendre, la bourgeoisie, en ce moment.

J'ai une position plus nuancée, ou plus timorée, comme on voudra, mais la dérive tyrannique du gouvernement, qui considère à l'évidence que tous les coups sont permis, surtout les plus bas, m'incite à durcir ma position.

Dans la querelle entre légitimité et légalité, la position haute (celle qu'il faut toujours choisir, d'après De Gaulle, parce que c'est la moins encombrée), c'est la défense de la légitimité.

Quand tout va bien, la légitimité et la légalité sont à peu près unies. Quand tout va mal, comme aujourd'hui, elles divorcent. Et ça permet de distinguer ceux qui ont du coeur de ceux qui ont des intérêts.

Pour paraphraser Churchill, on peut dire de Macron « Vous croyez avoir à faire à Félix Gaillard, vous avez à faire à Adolphe Thiers ».

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(1) : j'ai tout de même entendu des choses à faire saigner les oreilles : « Tant pis s'il y a des morts », « Les éborgnés l'ont bien cherché », « De toute façon, ce sont des abrutis ». Je me demande si les gens qui disent tout cela ont bien conscience de se condamner eux-mêmes, de se montrer sous un jour rien moins que reluisant, puisque c'est leur devoir de « supérieurs » de porter aide et assistance aux « inférieurs » et que, bien loin de remplir ce devoir envers eux, ils demandent qu'on leur tape dessus.

Sans compter les videos peu flatteuses pour la police qui circulent, où insultes et violences gratuites tiennent une large place.


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