Il conclut ses remerciements : aux « syndicalistes étudiants minables » qui, par leurs blocages d'université, « m'ont presque tout appris du totalitarisme » (y compris la lâcheté des autorités et l'apathie de la foule). Pour vous dire combien l'homme est sympathique.
Il commence très fort : « Le nazisme est la réponse que l"histoire allemande a donné à la question que lui a posée la révolution française ».
Le centrisme extrémiste
Sa thèse, qu'il répète et affine de livre en livre, est que le nazisme est un centrisme, non par refus des extrêmes, mais par alliance des extrêmes (quiconque connaît l'histoire sait qu'il est idiot, ou malhonnête, de classer le nazisme exclusivement à l'extrême-droite).
Dans la même veine, il écrit sur l'illégitimité fondamentale de la république française et sur Napoléon en précurseur d'Hitler (Napoléon n'étant pas, de très loin, mon personnage historique préféré, ça ne me traumatise pas que Bouthillon en écrive du mal).
Pour Bouthillon, La fracture entre la gauche et la droite est irréconciliable : la création (impossible) d'un nouveau contrat social ou le retour (impossible) à l'ancien régime.
Depuis 1789, la politique oscille entre deux centrismes. Le centrisme par exclusion des extrêmes (orléanisme, IIIème république), le centrisme par conciliation des extrêmes (Napoléon, Hitler).
L' « hommage » aux AG étudiantes n'est pas gratuit, puisque Bouthillon considère que le nazisme est une AG à l'échelle d'un pays :
> constitution d'un faux corps politique par intimidation des opposants.
> fausse démocratie par le vote à main levée (là encore, intimidation des opposants).
A la suite de quoi, on obtient un faux unanimisme, puisqu'on a exclu les opposants, réconciliant les extrêmes sur le dos de boucs-émissaires communs (la gauche est au moins aussi judéophobe que la droite).
Toute ressemblance avec le covidisme n'est pas fortuite. Je vous laisse faire la transposition.
Les juifs : boucs-émissaires depuis 1789.
Les juifs ne veulent pas le voir parce qu’ils croient (à tort) que leur émancipation commence avec notre révolution mais c’est 1789 qui a ouvert la possibilité de leur génocide.
Avant, leur persécution était limitée par la présence surplombante du bouc-émissaire ultime, le juif Jésus. A telle enseigne que le roi, lieutenant de Dieu, était souvent celui qui ordonnait les persécutions mais aussi qui les arrêtait.
Après 1789, cette barrière saute. La persécution peut être absolue et industrielle.
L'Union Sacré
La rupture du contrat social scinde l'homme, qui est à la fois chair (local) et esprit (universel), entre partisans du local (la droite) et partisans de l'universel (la gauche).
La création ex nihilo d'un nouveau contrat social est impossible, comme de créer ex nihilo une nouvelle langue ou une nouvelle culture. Et la France pose ce problème à toute l'Europe.
Un nouveau contrat social n'est pas rationnel, il ne peut venir que d'une fusion et du sublime (anciennement, de Dieu). C'est ce qui se passe dans tous les pays européens en 1914, très bien rendu par l'excellente expression Union Sacrée.
Seulement voilà, la France gagne la guerre, légitimant le nouveau contrat social et le régime, pour la première fois depuis 1789. Mais l'Allemagne perd la guerre, rendant le contrat social encore plus impossible.
Bouthillon est très clair : si l'Allemagne avait gagné la guerre, c'est elle qui serait devenue une démocratie libérale et la France un régime fasciste.
Monsieur Tout Le Monde
Hitler est le type même du chef charismatique : il n'hérite pas du pouvoir comme le roi, il ne le doit pas à ses exploits comme Napoléon ou de Gaulle. Le pouvoir lui vient de nulle part, d'etre Monsieur Tout Le Monde.
Hitler est Monsieur Tout Le Monde : à la fois un homme comme les autres, pris au hasard dans la foule et un monsieur, très au-dessus des autres. Le chef charismatique a du mal à garder cet équilibre mystérieux, soit il est trop banal, trop comme tout le monde, soit il est trop détaché, trop hautain.
Pour le plus grand malheur du monde, à commencer par l'Allemagne, Hitler sut garder cet équilibre jusqu'au bout, se voyant, sans le dire explicitement aux foules, comme le fondateur d'une nouvelle religion, l'anti-Christ.
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